Dans la maladie de Von Hippel-Lindau, 40 à 45% des sujets
vont développer un cancer du rein à cellules claires, lié à une
mutation germinale du gène VHL (chromosome 3p25), qui est
un gène suppresseur de tumeur. Cette tumeur survient égale-
ment chez 50 % des patients présentant une translocation
t(3;8) (p14;q24), t (3;6) ou t (2;3). Toutes ces anomalies
concernent le chromosome 3. La perte d’hétérozygotie sur le
chromosome 3p est une constante des formes sporadiques quel
que soit le stade, survenant dans 81 à 98 % des tumeurs. Les
autres événements sont plus tardifs : duplication du segment
5q22-qter, trisomie du chromosome 5q, mutation de p53, perte
d’hétérozygotie du chromosome 17q.
Le cancer papillaire familial est une maladie génétique à trans-
mission autosomique dominante de pénétrance réduite par rap-
port à la maladie de Von Hippel-Lindau. Le gène impliqué est
un proto-oncogène appelé met localisé en position 7q31.1-34.
Les formes familiales d’oncocytomes constituent une entité
très récente (27). Elles n’ont pas de mutations de VHL.
Dans les cancers des canaux de Bellini, caractérisés par leur
extrême agressivité, aucune anomalie génétique spécifique n’a
été décrite.
Les cancers chromophobes présentent en cytogénétique de
multiples délétions chromosomiques. Des monosomies 1, 2, 6,
10, 13 et 17 ont été décrites. Des mutations de p53 ont été
identifiées dans 30 % de ces tumeurs.
L’identification des gènes impliqués et l’étude de leur rôle sont
importantes car elles permettent de comprendre les voies
moléculaires de la tumorigenèse et de l’invasion tumorale
(l’inactivation de VHL, par exemple, conduit à une augmenta-
tion des taux de VEGF produit par les cellules malignes),
d’établir un diagnostic génétique et d’identifier des cibles thé-
rapeutiques.
Facteurs de risque chez les patients dialysés
Chez les patients dialysés, le risque de cancer du rein ou de la
vessie (mais aussi de la thyroïde et autres glandes endocrines)
ainsi que de cancer viro-induit (comme chez les transplantés)
est augmenté, comme l’a montré une étude internationale
(données fournies par des équipes américaines, européennes,
australiennnes et néo-zélandaises) d’une cohorte de
831 804 patients dialysés pendant la période 1980-94 (28).
Durant un suivi moyen de 2,5 ans, 25 044 cas de cancers (3 %)
ont été enregistrés au lieu des 21 185 attendus. Le risque le
plus élevé concerne les sujets âgés de moins de 35 ans (RR :
3,68). Pour les cancers du rein et de la vessie, les risques sont
multipliés respectivement par 3,60 (IC 95 % : 3,45-3,76) et 1,5
(IC 95 % : 1,42-1,57).
Néphrectomie partielle
C’est un traitement parfaitement validé pour des tumeurs
sélectionnées T1 selon la nouvelle classification TNM de
l’AJCC (American Joint Comittee of Cancer). Les lésions de
moins de 7 cm (idéalement de moins de 4 cm) avec un rein
controlatéral normal peuvent légitimement en bénéficier,
comme le prouve l’étude rétrospective de l’UCLA (University
of California-Los Angeles) sur 146 patients appariés avec un
groupe contrôle de 125 patients traités par néphrectomie (29).
Facteurs pronostiques du cancer du rein métastatique
Afin d’identifier les facteurs pronostiques et un modèle prédic-
tif de la survie des patients présentant un cancer du rein méta-
statique, Motzer et coll. ont repris 670 cas traités au MSKCC
dans 24 essais thérapeutiques entre 1975 et 1996 (30). La
médiane de survie était de 10 mois (IC 95 % : 9-11 mois).
Cinq facteurs pronostiques ont été identifiés (un statut de per-
formance faible, un taux de LDH > 1,5 la normale, un taux
d’hémoglobine bas, une calcémie > 100 mg/l et l’absence de
néphrectomie antérieure), permettant de classer les patients en
trois catégories. Les médianes de survie ont été respective-
ment, pour les 25 % de patients sans aucun facteur de risque,
de 20 mois, pour les 53 % avec 1 ou 2 facteurs, de 10 mois,
pour les autres, de 4 mois.
Métastases cérébrales
En cas de métastases cérébrales, la survie est classiquement de
4 à 6 mois. Une étude rétrospective de 68 patients traités à
l’Institut Gustave-Roussy (31) a mis en évidence en analyse
univariée 5 facteurs pronostiques péjoratifs : l’absence de
néphrectomie, la localisation temporale et gauche des lésions,
la présence de fièvre ou une perte de poids, une VS > 50 et un
intervalle entre le diagnostic du cancer primitif et les méta-
stases cérébrales < 18 mois. Les 44 patients (65 %) présentant
un ou deux de ces critères ont eu une médiane de survie de
8mois et une survie à un an de 26 %, les 24 autres une
médiane de survie de 3 mois et une survie à un an de 9 %.
Immunothérapie dans les formes métastatiques
Dans les formes métastatiques, trois messages clairs peuvent
être tirés des données de la littérature de 1999 à propos de
l’immunothérapie : la démonstration prouvée d’un gain en sur-
vie avec l’interféron α(IFN), l’absence d’intérêt des TIL asso-
ciés à l’interleukine 2 (IL2) et d’un cross-over entre deux cyto-
kines après échec d’une première ligne d’immunothérapie.
L’étude finlandaise (32) comparant une combinaison d’interfé-
ron α2a (18 000 000 UI x 3/semaine) et vinblastine (0,1
mg/kg/21 jours) à de la vinblastine seule a montré un bénéfice
significatif en termes de réponse (16,5 % versus 2,5 %,
p=0,0025) et surtout, pour la première fois, en termes de sur-
vie (67,6 semaines versus 37,8 semaines, p = 0,0049) dans le
bras avec interféron.
Figlin (33), dans un essai contrôlé multicentrique américain
ayant inclus 178 patients randomisés entre CD8 + TILs
(5 x 107à 3 x 1010 cellules i.v. J1) plus IL2 recombinante (1 à
4cycles en perfusion continue 4 jours par semaine x
4semaines) et placebo i.v. plus IL2, n’a pas retrouvé d’amélio-
ration de la réponse (9,9 % versus 11,4 %) ou de la survie à un
an (55 % versus 47 %).
En cas de progression sous une immunothérapie par IFNα2a
ou IL2, y a-t-il intérêt à faire un cross-over entre les deux cyto-
kines ? La réponse fournie par B. Escudier (34) à partir de
l’essai CRECY est formellement non. Cent treize patients dans
cette situation ont été analysés, 48 traités par IFN, 65 par IL2.
Seulement 4 réponses partielles ont été observées (1 avec
l’IFN, 3 avec l’IL2).
TUMEURS UROLOGIQUES
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La Lettre du Cancérologue - volume VIII - n° 6 - décembre 1999