Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume V, n° 6, novembre-décembre 2001
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ment suffira à établir le diagnostic d’hypogo-
nadisme à condition d’avoir écarté les fausses
hypotestostéronémies par confrontation aux
chiffres de TeBG ou de LH. En effet, une
réduction de la concentration de TeBG a pour
conséquence une baisse de la testostérone
totale sans chute concomitante de sa fraction
libre (à peu près 2 %) considérée comme la
seule physiologiquement active. Un tableau
de ce type peut être observé chez l’obèse.
À l’inverse, une inflation du taux de TeBG
est susceptible de masquer une réduction de
la fraction libre du stéroïde, voire même
d’induire une hypertestostéronémie para-
doxale compte tenu du motif de la consul-
tation (20). Dans ces circonstances, le rap-
port testostéronémie totale-TeBG (chaque
paramètre étant exprimé en nmol/l) fourni-
ra une approximation indirecte de la frac-
tion physiologiquement active de la testosté-
rone (N > 0,6). Elle doit être, en cas de
doute, utilement remplacée par la mesure
directe de la testostérone biodisponible
(21, 22). Enfin, la détermination concomi-
tante de la concentration plasmatique de
LH (23) permettra d’apporter deux infor-
mations supplémentaires.
Son élévation au-dessus des limites nor-
males de l’homme adulte (N 10 U/ml)
confirme l’hypogonadisme, même en pré-
sence d’une testostéronémie totale normale.
Il faut néanmoins avoir présent à l’esprit,
pour l’interprétation de cette dernière
valeur, que la sécrétion gonadotrope se
modifie avec l’âge et que ce symptôme bio-
logique peut être absent après 65 ans alors
même qu’il existe un authentique hypogo-
nadisme primaire (24).
L’inflation de la concentration plasmatique
de LH traduit le déficit du rétrocontrôle
négatif exercé par les stéroïdes sexuels sur
la sécrétion gonadotrope. Ce constat
permettra de préciser le caractère primaire
de l’hypogonadisme. Si la concentration
plasmatique de LH est inférieure à
10 mU/ml, son association à une réduction
de la testostéronémie totale, qu’il faudra
interpréter avec les précautions mentionnées
précédemment, authentifie le caractère
secondaire de l’hypogonadisme à un déficit
gonadotrope. Celui-ci peut expliquer en
totalité la symptomatologie clinique et bio-
logique ou au contraire s’associer au déficit
testiculaire primaire, notamment chez
l’homme âgé de plus de 65 ans (25).
En résumé, les déterminations biologiques
les plus pertinentes pour affirmer l’existen-
ce d’un hypogonadisme chez un patient
consultant pour dysfonction érectile sont
au nombre de trois : testostérone, TeBG et
LH. Avant 50 ans, ces trois mesures, effec-
tuées chez un patient se plaignant de symp-
tômes ou présentant des signes d’hypogo-
nadisme, suffiront à établir ce diagnostic.
Après 50 ans, l’existence d’une dysfonc-
tion érectile doit suffire à faire effectuer ces
mesures éventuellement complétées par la
détermination de la testostérone biodispo-
nible compte tenu des modifications hor-
monales liées à l’âge (modifications de la
sécrétion gonadotrope, inflation du taux de
TeBG). La mise en évidence d’un hypogo-
nadisme hypogonadotrope devra conduire
à une dernière étape comportant la mesure
de la saturation à la sidérophiline, de la
prolactinémie et de la recherche d’autres
stigmates d’insuffisance antéhypophysaire
et bien entendu à une étape de visualisation
pituitaire.
Attitude pratique (figure 3)
L’hypogonadisme affirmé et la précision de
son origine établie, se pose la question de
l’attitude pratique à adopter.
1. Lorsque la dysfonction érectile est sous-
tendue par un hypogonadisme, trois situa-
tions sont schématiquement possibles :
–la cause de l’hypogonadisme est acces-
sible à un traitement spécifique. Cette thé-
rapeutique permettant de supprimer le fac-
teur causal et, consécutivement, l’hypogo-
nadisme, résoudra le problème de la dys-
fonction érectile révélatrice. L’exemple
type de cette situation est l’adénome hypo-
physaire à prolactine, étiologie rare d’hy-
pogonadisme, mais spécifiquement curable
par une approche neurochirurgicale ou par
les agonistes dopaminergiques ;
–la cause de l’hypogonadisme est identi-
fiée mais aucun traitement spécifique n’est
envisageable. Le déficit testiculaire endo-
crine primaire est l’exemple type de cette
situation. Le traitement repose alors sur la
substitution androgénique. Si l’hypogona-
disme est suffisamment profond pour
expliquer à lui seul la dysfonction érectile,
la substitution androgénique est un traite-
ment d’autant plus logique qu’il fera dispa-
raître le symptôme révélateur et permettra
de palier les inconvénients de l’hypogona-
disme (au premier rang desquels l’ostéopo-
rose). L’initiation de la thérapeutique qui
suivra des modalités adaptées à chaque cas
ne devra cependant s’envisager qu’après
avoir écarté les contre-indications poten-
tielles (notamment prostatiques après
50 ans) et s’être assuré que la dysfonction
érectile n’est pas de physiopathologie mul-
tifactorielle (vasculaire ou neurologique en
particulier). Dans cette dernière hypothèse,
ces autres facteurs étiologiques seront à
corriger conjointement ;
-– enfin, troisième cas de figure, la cause de
l’hypogonadisme est clairement identifiée
et non accessible à un traitement spécifique,
mais la mise en route d’une substitution
androgénique est impossible. Elle peut en
effet être contre-indiquée par le contexte
pathologique ou vouée à l’échec en raison
d’interférences médicamenteuses (traite-
ment non interruptible par substance à acti-
vité antiandrogénique par exemple). Il faut
dans ce cadre avoir recours aux traitements
non hormonaux de la dysfonction érectile.
En pratique, les patients atteints d’une dys-
fonction érectile et relevant d’une androgé-
nothérapie substitutive sont les suivants
(26-29) :
–la dysfonction érectile révèle un hypogo-
nadisme chez un adulte jeune ;
–il existe des symptômes cliniques et la
testostéronémie totale est inférieure à la
limite basse de la norme de l’adulte jeune
(3 ng/ml = 11 nmol/l) chez un patient de
Mise au point