1 Les Atrides
La famille des Atrides, dont Oreste et Electre font partie est victime d’une malédiction divine, qui a
l’origine suivante :
Tantale, grand-père d'Atrée, roi de Lydie, ayant été invité par les dieux à un banquet, leur vole le
nectar et l'ambroisie, ces deux nourritures célestes. Plus tard, il invite lui-même les dieux et, pour
éprouver leur divinité, leur sert le corps de son fils Pélops. Les dieux s'en rendent compte aussitôt,
bien sûr, sauf Déméter, déesse de la terre cultivée, qui mange une épaule de l'enfant. Zeus fait jeter
dans un chaudron magique les membres de Pélops, qui revient alors à la vie, et on lui donne une
épaule d'ivoire pour remplacer celle que Déméter a mangée. Tantale est puni pour son arrogance :
précipité aux Enfers, il est plongé dans un lac, environné d'arbres chargés de fruits ; mais il ne peut
assouvir ni sa faim ni sa soif, car l'eau et les fruits s'éloignent de lui dès qu'il veut les atteindre.
Pélops, devenu adulte, quitte la Lydie et se rend en Élide. Là, il se joint aux prétendants à la main
d'Hippodamie, que le père de celle-ci, Œnomaos, a promis d'accorder à celui qui le vaincrait à la
course de chars. Nombreux sont les prétendants qui ont déjà succombé à la suite de tentatives
infructueuses. Pélops, pour mettre toutes les chances de son côté, corrompt Myrtile, le cocher
d'Œnomaos : Myrtile sabote une roue du char de son maître, et Pélops triomphe, puis épouse
Hippodamie ; mais il n'oublie pas que Myrtile connaît son secret, et il se débarrasse de lui en le tuant.
Le père de Myrtile, qui n'est autre qu'Hermès, dieu du commerce et des voyageurs, messagers des
autres dieux, va venger son fils en attachant une malédiction aux descendants de Pélops.
Les fils de Pelops et Hippodamie, Atrée et son frère jumeau Thyeste, poussés par leur mère,
assassinent leur demi-frère Chrysippos. Bannis par Pélops, leur père, ils trouvent refuge à Mycènes
Atrée devient roi. Puis Thyeste séduit la femme d'Atrée, et celui-ci, pour se venger, tue deux de
ses neveux et, au cours d'un banquet, les sert comme viande à leur père. Plus tard, Égisthe, troisième
fils de Thyeste, vengera ses frères en tuant Atrée.
Ménélas, fils d'Atrée, est le mari d'Hélène, dont l'enlèvement déclenche la guerre de Troie, au cours
de laquelle les Grecs sont commandés par Agamemnon, roi de Mycènes et frère aîné de Ménélas. À
la fin de la guerre, Ménélas et Hélène se réconcilient et reviennent ensemble à Troie, ils coulent
des jours heureux. Il n'en va pas de même pour Agamemnon : il vient à peine de rentrer
triomphalement à Mycènes qu'il est assassiné par sa femme Clytemnestre et l'amant de celle-ci, qui
n'est autre qu'Égisthe. Sept ans après, ses enfants, Oreste et Électre, vengent sa mort et tuent leur
mère : Oreste, jugé à Athènes, est acquitté du meurtre de sa mère, et Hermès qui met fin à la
malédiction qui pesait sur la famille des Atrides, les descendants d'Atrée.
2 Colomba
Les points communs / les différences
Orso / Oreste :
Tous deux reviennent adultes au pays natal après avoir été absents pendant plusieurs années, leur
père étant mort.
Tous deux sont absous du double crime qu’ils ont commis.
mais :
Oreste a été éloigné de Mycènes par Electre, sa sœur, qui craignait pour sa vie après l’assassinat
d’Agamemnon par Eghiste ; Orso était parti volontairement pour apprendre le métier des armes et
avait servi dans l’armée napoléonienne bien avant la mort de son père.
Oreste revient à Mycènes dans le but d’exécuter l’oracle d’Apollon : venger son père en tuant les
meurtriers identifiés de son père (sa mère Clytemnestre et son amant Eghiste) ; Orso n’est pas
convaincu de l’implication de s Bariccini dans l’assassinat de son père ; il n’a nul désir de vengeance :
il revient en Corse pour vendre ses terres et marier sa sœur. Le double meurtre dont il se rend
coupable est au hasard et ne témoigne d’aucune préméditation de la part d’Orso, qui ne fait que
réagir instinctivement à l’attaque dont il est victime : il tue pour défendre sa vie et non pour se
venger ;
Oreste est matricide ; Orso tue des membres de la famille Bariccini, ennemis traditionnels de sa
propre famille ;
A la fin, Oreste est tourmenté par les Erinyes, divinités persécutrices qui interviennent quand on tue
un membre de sa famille (avant que l’assemblée des citoyens athéniens, décide, sur les conseils
d’Athéna, de l’absoudre de ce crime) ; Orso est « récompensé » et épouse Miss Nevil.
Colomba/ Electre
Toutes deux sont les instigatrices de la vengeance qu’elles font accomplir par leur frère.
Toutes deux sont intransigeantes (par exemple, Electre ne veut pas tenir compte du fait que son
père bien-aimé est responsable de la mort de sa soeur Iphigénie ; Colomba veut que les deux frères
Bariccini soient tués, même si, en fait un seul est coupable de la mort de son père) et sont des êtres
de passion et de démesure, mues par la haine.
Toutes deux sont poussées non seulement par le désir de vengeance, mais aussi par la volonté de
faire éclater la vérité au grand jour (cf quand Colomba recherche dans les papiers de son père des
preuves accablant les Bariccini). (Electre = la brillante, la lumineuse// Lumière de la vérité)
MAIS :
Colomba ne parvient pas vraiment à convaincre son frère de se venger (même si elle parvient à lui
faire admettre la culpabilité des Bariccini) en dépit de toutes ses manœuvres (exhibition des
« reliques », pèlerinage au lieu le père a été tué, mutilation du cheval …) alors qu’Electre, dans la
tragédie antique ( Sophocle, Euripide ou Eschyle) n’a aucun mal à faire agir son frère.
Electre est la sœur aînée d’Oreste, Colomba est plus jeune que son frère Orso.
Pourquoi cette reprise ?
Attribuer à Colomba la dimension d’une Electre révèle le goût de Mérimée pour des êtres sauvages,
opposés à l’ordre bourgeois ennuyeux. En effet, Mérimée, comme son ami Stendhal, a toujours été
fasciné par les personnalités fortes, les êtres énergiques et passionnés, hors du commun, qui font
cruellement défaut à son époque. Réactualiser les figures des mythes antiques permet de concilier
modernité et tradition, tout en mettant en scène, dans Colomba , un personnage féminin au
caractère affirmé et entier. Le fait que le personnage fort est une femme est peut-être par ailleurs
révélateur de cette carence (que déplorent aussi Stendhal et Musset) de héros propres à l’époque
qui suit l’épopée napoléonienne.
De plus, la notion de destin, de fatalité correspond à cette attitude que l’on peut observer chez
Mérimée de défiance à l’égard de la tendance à tout rationnaliser, fréquente à son époque. S’il
manifeste souvent une incrédulireligieuse certaine, il lui semble, selon le mot du critique Sainte-
Beuve, que l’univers est « peuplé de forces redoutables ». Orso entraîné malgré lui à tuer les deux
Bariccini n’est-il pas l’illustration de la puissance de ces forces qui nous poussent à agir et nient la
liberté humaine ?
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