?? 3 questions à… 3 questions à… Entretien avec Éric Pujade-Lauraine (hôpital Hôtel-Dieu, Paris) à propos de la parution récente de l’article sur l’étude PACA portant sur le traitement de seconde ligne des cancers de l’ovaire avancés (1) > Quels sont les principaux résultats de l’étude PACA dans le cancer de l’ovaire en rechute sensible aux sels de platine ? Éric Pujade-Lauraine Les chimiothérapies à base de sels de platine sont des standards dans le traitement de seconde ligne du cancer de l’ovaire avancé en rechute tardive, donc considéré comme sensible aux sels de platine. La doxorubicine liposomale pégylée en monothérapie a déjà démontré son intérêt majeur dans cette situation puisqu’elle est aujourd’hui le seul traitement qui permette un allongement de la survie chez des patientes en rechute sensible lorsqu’il est comparé à un traitement de référence (2, 3). Nous avons donc testé l’association PACA à base de doxorubicine liposomale pégylée et carboplatine (tableau). Cette étude de phase II a inclus 104 patientes avec un cancer de l’ovaire en récidive plus de 6 mois après un premier traitement à base de taxanes et sels de platine. Les doses de l’association utilisées étaient la doxorubicine liposomale pégylée à la dose de 30 mg/m² et le carboplatine AUC 5. Le traitement était répété toutes les 4 semaines. Les principaux résultats ont été un taux de réponse objective de 63 %, avec un taux de réponse complète élevé de 38 %. La médiane de survie sans progression a été de 9,4 mois et la médiane de survie globale de 32 mois. En termes de tolérance, la toxicité hématologique a été marquée par une neutropénie de grade 3/4 dans 51 % des cas mais s’accompagnant d’une neutropénie fébrile chez seulement 3 % des Tableau. Étude GINECO – carboplatine + doxorubicine liposomale pégylée (phase II). PACA (n = 105, récidive > 6 mois) RO (RC) SSP 9,4 m SG 32 m Anémie grade 3/4 12 % Thrombopénie grade 3/4 26 % Neutropénie grade 3/4 51 % Alopécie grade 2 12 % Neuropathie grade 2/3 7% D’après Ferrero JM et al. Annals of Oncology 2007. 188 63 % (38 %) patientes. Les autres effets indésirables ont été relativement peu nombreux et de faible intensité : grade 1 ou 2 le plus souvent, et limités à une alopécie et à une toxicité neurologique. Ces résultats suggèrent ainsi une efficacité élevée qui permet d’espérer un allongement de la survie globale au prix d’une tolérance tout à fait acceptable chez les patientes prétraitées par un premier traitement à base de taxanes et de sels de platine. > Comment situer ces résultats par rapport aux autres alternatives chez ces patientes ? E. P-L. Chez les patientes en rechute sensible, le standard de traitement consiste à reprendre la même combinaison qui a été utilisée en première intention, c’est-à-dire l’association carboplatine + paclitaxel. Ce standard a été défini par les résultats de l’étude ICON 4-OVAR2.2 (4). Cependant, la reprise de ce traitement efficace pose des problèmes de deux ordres : d’une part, l’impact sur la qualité de vie de ces patientes à qui l’on impose une nouvelle alopécie qui, si elle est acceptable en première ligne, lors d’un espoir de guérison, l’est plus difficilement lorsque l’on entre dans une phase plus chronique de la maladie ; d’autre part, la tolérance parfois médiocre de cette association en termes de neuropathie périphérique, d’autant que certaines gardent encore des séquelles neurologiques de leur première ligne. Il n’est dans ce cas pas envisageable de reprendre ce type de traitement, et la question se pose alors de proposer une chimiothérapie à base de sel de platine aussi efficace avec un profil de tolérance différent. Dans ce cadre, l’association carboplatine + gemcitabine est intéressante, car peu alopéciante et peu neurotoxique, mais d’administration délicate chez des patientes prétraitées du fait de son hématotoxicité importante. Ainsi, l’association PACA nous semble une alternative à considérer. > Quel développement envisagez-vous aujourd’hui ? E. P-L. Les résultats de cette étude de phase II chez plus de 100 patientes sont suffisamment significatifs en termes d’efficacité et de tolérance pour proposer l’association PACA en pratique quotidienne. Cependant, pour en faire un standard de traitement, il faut encore démontrer son équi-effiLa Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 5 - mai 2007 cacité par rapport au standard carboplatine + paclitaxel. Pour répondre à cette question, une étude internationale de phase III menée par le groupe GINECO et huit autres groupes coopérateurs dans le monde est actuellement en cours : cette étude CALYPSO (Caelyx® in Platinum Sensitive Ovarian cancer) représente la plus grande étude jamais réalisée chez des patientes atteintes de cancer de l’ovaire en rechute. Cette étude compare le standard carboplatine + paclitaxel toutes les 3 semaines à l’association PACA toutes les 4 semaines, avec un objectif de non-infériorité en termes de survie sans progression. Un total de plus de 800 patientes a déjà été inclus en deux ans sur les 970 patientes prévues. La période d’inclusion devrait donc se terminer à l’été 2007, avec des résultats attendus courant 2009. ■ Entretien E ntretien RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Ferrero JM, Weber B, Geay JF et al. Second-line chemotherapy with pegylated liposomal doxorubicin and carboplatin is highly effective in patients with advanced ovarian cancer in late relapse: a GINECO phase II trial. Ann Oncol 2007;18(2):263-8. 2. Gordon AN, Fleagle JT, Guthrie D et al. Recurrent epithelial ovarian carcinoma: a randomized phase III study of pegylated liposomal doxorubicin versus topotecan. J Clin Oncol 2001;19(14):3312-22. 3. Gordon AN, Tonda M, Sun S et al. Long-term survival advantage for women treated with pegylated liposomal doxorubicin compared with topotecan in a phase 3 randomized study of recurrent and refractory epithelial ovarian cancer. Gynecol Oncol 2004;95(1):1-8. 4. Parmar MK, Ledermann JA, Colombo N et al. ICON and AGO Collaborators. Paclitaxel plus platinum-based chemotherapy versus conventional platinumbased chemotherapy in women with relapsed ovarian cancer: the ICON4/AGOOVAR-2.2 trial. Lancet 2003;361(9375):2099-106. La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 5 - mai 2007 189