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INFECTIO-VIROLOGIE
19
Sommaire
• Sida
• Hépatite C
• Herpès
• Tuberculose
• Trichomonas vaginalis
• Méningites bactériennes de l’enfant
• Légionelloses
• Pneumopathies acquises sous ventilation
© Garo/Phanie
© Joubert/Phanie
mécanique
Institut Pasteur
• Paludisme
• Tétanos
• Couverture vaccinale
• Infections fongiques systémiques
Réalisé avec la participation de notre publication
La Lettre de l’Infectiologue
Infectio-virologie
Les maladies infectieuses sont toujours d’actualité et,
parmi elles, ce sont les infections virales qui ont le plus fait
parler d’elles au cours de ces vingt dernières années. Cela
a commencé avec le sida et s’est poursuivi avec l’hépatite C.
Depuis, d’autres viroses sont apparues et peuvent être
considérées comme des maladies émergentes, même si
certaines sont connues depuis longtemps. L’attention des
professionnels de la santé est particulièrement requise.
Ceux-ci peuvent en être les premières victimes comme pour
le SRAS. Ils ne doivent pas non plus baisser la garde face à
des affections plus fréquentes comme la grippe, mortelle
pour des patients déjà fragilisés.
D’
un point de vue pratique, il faut distinguer
trois sortes d’infections
virales, selon leur mode de transmission, par voie sanguine, aérienne ou
par l’intermédiaire d’un arthropode
vecteur, le plus souvent un moustique.
Les arboviroses
Les maladies virales transmises par
piqûre d’arthropode sont appelées
arboviroses. Elles sont plus ou
moins répandues dans les pays ou
ces insectes pullulent c'est-à-dire
les pays tropicaux. Mais elles peuvent être rencontrées dans les pays
tempérés, soit chez des voyageurs
de retour de zone d’endémie, soit
chez des autochtones, au cours de
l’été, sous réserve de l’implantation
des insectes vecteurs (et de leur
réservoir animal éventuel) dans le
pays en question. Elles ne peuvent
pas se transmettre de personne à
personne, en dehors de la fièvre
hémorragique de Crimée-Congo
(voir fièvres hémorragiques virales).
Cliniquement, les arboviroses sont
marquées par une incubation
courte (moins d’une dizaine de
jours), un début brutal par un syndrome pseudo-grippal suivi d’une
focalisation viscérale, l’absence de
traitement et la gravité du pronostic
(pour certaines d’entre elles). Elles
se distinguent par leur tropisme
neurologique (encéphalite japonaise, fièvre de West Nile), cutané
(dengue, fièvre de la vallée du Rift,
fièvre de West Nile), hépatique
(fièvre jaune) ou leur aptitude à
donner des formes hémorragiques
(fièvre jaune, dengue hémorragique, fièvre hémorragique de
Crimée-Congo, fièvre de la vallée
du Rift).
La dengue est la plus fréquente des
arboviroses. C’est une maladie tropicale, en expansion partout dans le
>> DOSSIER
Une attention particulière
aux maladies émergentes
>>
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
DOSSIER
>> DOSSIER
>>
Infos
...
Surveillance des
grippes aviaires
Selon le Pr Thierry
P. van den Berg
(Centre d’Étude
et de Recherches
Vétérinaires et
Agrochimiques,
CERVA, Bruxelles,
Belgique), en
Europe, 24 pays
participent
activement
au réseau de
surveillance
de la peste aviaire
(autre nom pour
décrire l'infection
par un virus
influenza pathogène
chez les oiseaux),
par le biais de l'OIE
récemment
renommé OMSA. Le
laboratoire référent
en Europe est celui
de Weybridge au
Royaume-Uni.
Congrès grippe,
Bruxelles, 2004.
monde, transmise par la piqûre d’un
moustique, appelé Aedes aegypti.
La répartition géographique classique comprend principalement
l’Asie du Sud-Est, le sous-continent
indien, les îles du Pacifique,
l’Amérique latine et les Caraïbes.
L’OMS estime que tous les ans 50
millions de personnes sont touchées par la dengue dans le Monde
et que 12 000 en décèdent
(formes hémorragiques, formes
compliquées d’un état de choc).
D’après l’Institut nationale de veille
sanitaire (INVS), dans les départements français des Amériques, des
épidémies ont été enregistrées aux
Antilles (1 297 cas notifiés en 1997
en Martinique), en Guyane (44 cas
en 2003), ainsi qu'à Saint-Martin
(188 cas en 2003). En France
métropolitaine, la dengue n’est
observée que chez le voyageur.
Un autre exemple d’arbovirose en
expansion est la maladie de West
Nile qui est réapparue en France au
cours de l’été 2003 et s’est implantée aux États-Unis d’Amérique
depuis l’été 1999. Elle est également transmise par piqûre d’un
moustique. Le réservoir animal est
constitué par des oiseaux. En
France, seuls une dizaine de cas
ont été observés au cours de l’été
2003 dans le Var. Le fait que la
canicule ait sévi cet été-là n’est
peut-être pas étranger à cette petite
épidémie. Aux États-Unis d’Amérique, des centaines de cas sont
observés chaque été et certains
patients, principalement des personnes âgées, décèdent de complications neurologiques.
Les maladies virales
transmises par voie aérienne
Les maladies virales transmises par
voie aérienne sont beaucoup plus
à craindre dans le cadre de l’exercice professionnel. Le personnel
médical et paramédical, au contact
direct des patients, doit être extrêmement vigilant car il y a un risque
élevé d’infections respiratoires et
ultérieurement de transmission aux
malades.
Le SRAS (syndrome respiratoire aigu
sévère) a eu l’immense intérêt de
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
© Phanie
20
Virus du sida (HIV) sortant d’une cellule MET (Microscope Electronique à Transmission)
sensibiliser le personnel médical et
paramédical aux précautions élémentaires à prendre contre les infections à
transmission respiratoire. Cette épidémie est née en Chine dans la région
de Canton, en automne 2002. Elle
s’est achevée pendant l’été 2003 au
Canada. Entre-temps, des centaines
de personnes ont été contaminées,
dont plus de la moitié était du personnel médical ou paramédical. Le
taux de mortalité était en moyenne
de 10 % mais la mortalité augmentait
de manière régulière avec l’âge. Cette
maladie est due à un coronavirus
rapidement identifié. L’épidémie
mondiale a été évitée grâce à la réactivité de la communauté internationale, à un échange constant d’informations scientifiques par voie
électronique et à l’efficacité des
mesures d’isolement respiratoire des
cas et de ceux qui ont été en contact
avec ces cas. Mais cette épidémie
doit nous servir de leçon, pour
apprendre à mieux nous protéger
contre des maladies autrement plus
fréquentes comme la grippe humaine, voire d’autres infections virales
respiratoires sévères à venir, grippe
aviaire “humanisée” ou récurrence du
SRAS.
La grippe humaine est certainement l’exemple le plus caricatural
de ce type d’infections et des
conséquences qu’elle entraîne
pour le personnel soignant. Mais
on peut se protéger de la grippe
humaine avec une relative efficacité par la vaccination annuelle.
Étant donné les conséquences de
la grippe en milieu hospitalier (personnel malade et arrêté, contamination de personnes fragiles par le
personnel), le vaccin antigrippal
devrait être obligatoire chez le personnel médical et paramédical. Il
est légitime de se demander pourquoi certains sont vaccinés contre
la variole, maladie aujourd’hui disparue, et pas contre la grippe,
maladie très commune.
La grippe aviaire est une crainte,
pour le moment théorique, mais la
plus grande vigilance est requise
pour l’avenir. Cette grippe est pour
le moment presque exclusivement
animale (“grippe du poulet” principalement). Elle peut être due à plusieurs types de virus influenza, et
des bouffées épidémiques sporadiques sont régulièrement observées dans les élevages intensifs de
volailles dans le monde. Des épidémies récentes ont été facilement
circonscrites aux Pays-Bas et aux
États-Unis d’Amérique. Mais en
Asie, la situation est plus inquiétante car les épidémies sont maintenant trop rapprochées et il est
probable que le virus circule de
façon endémique. Elles sont dues à
un virus influenza H5N1 qui avait
émergé à Honk Kong en 1997. Il
avait pu être contrôlé, à l’époque,
grâce à l’abattage systématique et
massif des poulets de ce territoire.
Cette épidémie peut être considérée comme une des conséquences
des élevages industriels de volailles,
anarchiques et aberrants, qui atteignent des proportions gigan-
Les fièvres hémorragiques
virales
Les fièvres hémorragiques virales
sont théoriquement à craindre en
raison du risque de contamination
par les hémorragies extériorisées.
Mais, en pratique, le risque pour le
personnel soignant est certainement très faible. D’une part, même
si les maladies virales pouvant se
compliquer d’hémorragies sont
nombreuses, celles d’entre elles
pouvant se transmettre secondairement à l’homme sont très rares et
ont une répartition géographique
très limitée. D’autre part, la “protection sanguine” est naturelle à partir
du moment où il y a hémorragies, et
il est probable que la contagiosité
soit extrêmement faible, si elle
existe, en dehors des formes
hémorragiques.
Les plus fréquentes des viroses à
l’origine d'une fièvre hémorragique
sont la fièvre hémorragique avec
syndrome rénal en France, et, pour
les voyageurs, la fièvre jaune, la
dengue hémorragique, la fièvre de la
vallée du Rift et la fièvre hémorragique de Crimée-Congo. Seule la
fièvre hémorragique de CriméeCongo se distingue par une transmission possible de patients à soignants,
voire de personne à personne, avec
possibilité d’épidémie (comme pour
d’autres fièvres hémorragiques
virales). Pourtant, on parle beaucoup
plus de la fièvre de Lassa et surtout
de la maladie d’Ebola. Elles sont marquées par une transmission initiale-
© Garo/Phanie
tesques dans certains pays d’Asie
du Sud-Est (en Chine, plus d’un
milliard d’habitants, on compte
environ cent poulets pour un habitant et ces élevages sont concentrés dans certaines régions). La
maladie est maintenant devenue
endémique chez les volailles en
Asie du Sud-Est, la Chine, la
Thaïlande, le Vietnam, l’Indonésie
étant touchés. Pour le moment, le
passage à l’homme s’est fait de
manière très peu efficace (ce sont
des personnes en contact direct et
proche avec des volailles malades
qui ont été atteintes) mais avec
une mortalité très élevée. Il ne
semble pas qu’il y ait eu à ce jour
une transmission interhumaine par
apparition d’un virus muté, “humanisé” car recombiné à partir de la
grippe humaine. Mais elle est possible si les deux virus venaient à se
rencontrer soit chez l’homme soit,
plus probablement, chez un animal
réservoir commun. Le porc constitue un réservoir de choix pour ce
genre de rencontre car il peut
héberger le virus de la grippe
humaine. A cet égard, la reconnaissance par les autorités chinoises,
en été 2004, de l’apparition de cas
de grippe aviaire chez le porc, dans
le pays, en 2003, est une mauvaise
nouvelle. Selon certains spécialistes, elle laisse présager le passage inéluctable à l’homme, la
seule question n’étant pas de
savoir si cela se fera, mais seulement quand !
ment inconnue puis, à partir du cas
index, de patients à soignants, voire
de personne à personne, avec une
mortalité très élevée et la possibilité
d’épidémie. Celles-ci surviennent à
intervalle régulier en Afrique centrale
mais la possibilité pour qu’un tel
patient arrive en France peut être
considérée comme extrêmement
faible.
En pratique, la survenue brutale au
retour des tropiques, après une
courte période de rémission (inconstante), d’une altération de l'état général, avec une recrudescence de la
fièvre et un syndrome hémorragique,
doit conduire à l’isolement du
malades et aux précautions d’usage.
L’expérience des médecins de terrain
en Afrique montre que dès la mise en
place de mesures d’hygiène de base,
la transmission au personnel soignant
est interrompue. Mais le pronostic
vital est engagé pour le malade. Les
hémorragies cutanées (purpura pétéchial et ecchymotique), muqueuses
(épistaxis, hématurie, gingivorragie...)
puis viscérales (digestive...) peuvent
conduire au décès dans un état de
choc. Le taux de létalité des formes
symptomatiques, peut atteindre
80 % pour certaines fièvres hémorragiques.
En conclusion, les infirmières savent
maintenant bien se protéger des
maladies transmises par voie sanguine. C’est l’héritage des grandes
infections virales, par les virus des
hépatites B et C et le VIH. Elles n’ont
rien à craindre des maladies transmises par les arthropodes, sauf à
titre individuel, si elles voyagent dans
les régions d’endémie de fièvres
hémorragiques virales. En revanche,
elles doivent maintenant être bien
informées des risques liés aux maladies transmissibles par voie
aérienne. Elles doivent être vaccinées contre la grippe chaque année.
Elles doivent maîtriser les règles
d’isolement respiratoire et suivre
avec vigilance l’évolution des épidémies de grippe et des autres viroses
respiratoires.
Pr Éric Caumes
21
>> DOSSIER
INFECTIO-VIROLOGIE
Service des Maladies Infectieuses
et Tropicales, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris.
Rédacteur en chef de La Lettre de l’Infectiologue
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
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DOSSIER
Sida
>> DOSSIER
Les inquiétudes renaissent en Europe
Infos
...
Comportements
à risque
Les trithérapies
antirétrovirales
hautement actives
(HAART) ne sont pas
totalement efficace
mais diminuent
de manière
substantielle la
charge virale (les
taux de mARN viral)
chez de nombreux
malades, si
l’observance
thérapeutique
est étroite. D'où
la diminution
des décès. Mais
les croyances sur les
vertus imaginaires
des trithérapies
dans la prévention
du SIDA s’avèrent
dangereuses en
matière de
comportement
sexuel à risque.
Le sida se propage en Europe orientale. Le nombre d'infections augmente à nouveau en
Europe occidentale. L’abandon, voire l’inexistence des programmes intégrés de prévention et de traitement en sont une cause. Les jeunes et d'autres groupes, comme les travailleurs du sexe, les homosexuels masculins et les toxicomanes par voie intraveineuse
sont particulièrement exposés.
P
lus de 1,5 million de personnes vivent avec le VIH
en Europe orientale et en
Asie centrale alors qu’elles n’étaient que 30 000 en 1995. La
majorité des nouveaux cas d’infection à VIH chez les toxicomanes par voie intraveineuse touchent des jeunes. Un grand
nombre d’entre eux ne se protègent pas non plus lors de rapports
sexuels, alors que leurs premiers
rapports sont plus précoces.
Les pays d’Europe orientale sont
désormais dans l’Union européenne et, comme l’a souligné le
Dr Peter Piot, Directeur exécutif
de l’ONUSIDA, à la Conférence
de Dublin en février de cette
année, « L’Europe et l’Asie centrale sont au cœur d’une épidémie de VIH qui progresse plus
rapidement que partout ailleurs
dans le monde ».
Si la plus grande partie de la
population de l’Europe occidentale a désormais accès à un traitement gratuit dans le cadre des
systèmes nationaux de santé,
beaucoup de gouvernements
n’ont pas mis le même accent sur
la prévention que pendant les
années 90. Les taux d’infection
recommencent à augmenter. Le
traitement, qui permet de prolonger la vie, ne doit pas être considéré comme un moyen de guérison. Les personnes vivant avec le
VIH/sida doivent donc continuer
de se protéger elles-mêmes et de
protéger leurs partenaires. En
Europe orientale et en Asie centrale, 7 000 personnes reçoivent
un traitement antirétroviral, c’està-dire 9 % seulement des personnes qui en ont besoin. Pour
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
beaucoup, le traitement est trop
coûteux ou n’est tout simplement
pas disponible. La dimension
socio-économique de l’épidémie
ressort clairement ainsi que l’aspect qui concerne la gouvernance
de ces pays. Les membres de
groupes à risque sont souvent
des exclus, des pauvres ou des
détenus et sont par là-même
exposés à un risque accru de
contamination.
Recrudescence des IST
Dans beaucoup de pays d’Europe
occidentale, on constate une augmentation des infections sexuellement transmissibles (IST) qui
illustrent une résurgence des rapports sexuels non protégés, avant
tout chez les jeunes hétérosexuels. Rien qu’en 2003, 30 à
40 000 personnes ont été infectées par le VIH et le nombre de
personnes vivant avec le VIH se
situe désormais entre 520 000 et
680 000.
Plus de 20 ans après l’émergence
du sida, les comportements
sexuels à risque sont en forte
croissance également chez les
homosexuels masculins dans les
pays développés. Cet état de fait,
indiscutablement lié à l’apparition
de traitements anti-rétroviraux très
efficaces au milieu des années 90,
explique, qu’encore aujourd’hui,
les homosexuels représentent
44 % des nouveaux cas d’infection à VIH aux États-Unis (statistiques 2002).
Pour faire reculer ces comportements dits de “relapse” des interventions psychologiques ou comportementales sont nécessaires.
Cependant, curieusement, malgré
des milliers de publications sur le
sujet, aucun essai randomisé
n’avait jusqu’ici abordé la question.
L’étude EXPLORE* conduite dans
6 villes américaines était destinée
à combler cette lacune : 4 295 homosexuels masculins séronégatifs
ont été randomisés entre un
groupe le “suivi standard” et un
groupe d’“intervention”. Les deux
groupes étaient représentatifs de
la population homosexuelle masculine américaine à risque : par
exemple, plus de 10 partenaires
au cours des 6 mois précédents
dans 42,2 % des cas, relation
anale passive non protégée avec
un partenaire séropositif ou au
statut sérologique inconnu dans
28 % des cas.
Les résultats sont très décevants
et aussi très controversés, notamment à cause de réponses plus
ou moins fiables compte tenu de
la gravité de certains comportements difficiles à avouer.
En 4 ans, 144 sujets du groupe
contrôle (8,2 %) et 115 du
groupe intervention (6,9 %) ont
eu une séroconversion. La prévention des comportements de
“relapse” chez les homosexuels
masculins reste donc toujours à
imaginer.
C’est pourquoi, des actions d’urgence de prévention s’imposent
partout pour inverser le cours de
la maladie.
ALP
* Dr Anastasia Roublev : The EXPLORE study
Team : “Effects of a behavioural intervention
to reduce acquisition of HIV infection among
men who have sex with men : the EXPLORE
randomised controlled study.” Lancet 2004;
364: 41-50.
INFECTIO-VIROLOGIE
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Hépatite C
Comment gérer les effets secondaires
La gestion des effets secondaires est une composante majeure de la conduite du traitement de l’hépatite C. Or on connaît la gravité potentielle de la maladie chronique qui
peut être efficacement traitée par le traitement antiviral, notamment chez les patients
infectés par un VHC de génotype 2.
Interféron pégylé et ribavirine
Le traitement actuel de l’hépatite C
chronique repose sur l’association
interféron pégylé avec ribavirine :
cette bithérapie permet l’éradication virale chez 9O % des patients
infectés par VHC de génotype 2
ou 3 et 50 % de ceux qui présentent un virus de génotype 1. Par
ailleurs, les examens virologiques
se sont considérablement simplifiés et standardisés. L’accès aux
soins et au traitement des patients
est facilité grâce à l’ouverture de la
prescription initiale aux spécialistes
libéraux en médecine de ville et à
la possibilité de renouveler la prescription par les médecins généralistes. Les indications du traitement
sont définies en fonction de l’activité de fibrose dans le foie. Il est
reconnu que la biopsie hépatique,
examen invasif et redouté par un
grand nombre de patients, constitue un écueil dans la prise en
charge de l’hépatite C. Bonne nouvelle, il existe désormais une alternative : Fibrotest-Actitest. Il s’agit
de tests fondés sur les dosages
sanguins pour évaluer l’index de
fibrose et d’activité du foie dans
son ensemble, qui sont utilisables
en pratique quotidienne et ne
nécessitent pas d’hospitalisation.
Il faut prendre en considération
que la bithérapie interféron
pégylé/ribavirine est jugée le plus
souvent difficile à supporter par la
majorité des patients, l’espoir de
guérir étant leur motivation principale pour poursuivre le traitement.
L’aggravation de la qualité de vie
liée aux effets secondaires conduit
à un arrêt du traitement dans
environ 10 % des cas et à une
diminution de la posologie de l’interféron pégylé et/ou de la ribavirine dans 1 cas sur 3. Les effets les
plus fréquents sont les céphalées,
la fatigue notable, les tremblements, la fièvre, les nausées, les
myalgies, l’insomnie et les troubles
anxieux et dépressifs. « On retrouve
plus rarement d’autres troubles
psychiatriques fluctuants et souvent imprévisibles tels que des
troubles maniaques, des troubles
délirants, des troubles de la personnalité ou des troubles cognitifs
atypiques. La prévalence des
effets secondaires psychiques
reste sous-évaluée et trop souvent
considérée comme négligeable,
alors qu’il convient de rechercher
précocement ces troubles et de
les prévenir par une prise en
charge globale au sein d’une
équipe multidisciplinaire. En ce qui
concerne l’alcoolisme chronique, il
n’est pas une contre-indication au
traitement mais il peut en diminuer l’efficacité. Les antécédents
de maladies psychiatriques ou de
toxicomanies sont des contre-indications majeures au traitement
par interféron alpha, mais cela
n’est pas acceptable actuellement », estime le Dr Jean-Philippe
Lang (Strasbourg).
Décider avec le patient
On entrevoit qu’il est indispensable d’associer le patient à la décision thérapeutique, de bien lui
expliquer les bons résultats
escomptés ainsi que les inconvénients qu’il va subir afin qu’il
puisse interpréter ses symptômes,
et de choisir un bon moment (sauf
urgence). En d’autres termes, le
patient doit être soutenu par
l’équipe médicale comme par ses
proches et aidé dans la gestion
des effets secondaires pendant les
six mois du traitement. D’ailleurs,
le médecin généraliste peut être
amené à prendre en charge également son entourage, souvent perturbé par le changement de la personnalité du patient induit par
l’interféron. Le contrôle de la
charge virale est effectué au bout
de 6 à 12 mois par PCR. Si la
charge virale est indétectable, le
patient est virologiquement guéri
6 mois après l’arrêt du traitement
et la majorité des manifestations
indésirables disparaissent entre 1 et
3 mois.
A noter que d’après des études
récentes rapportées par le
Pr. T. Poynard, il semble que la cirrhose n’est pas irréversible.
Ludmila Couturier
>> DOSSIER
C
omme le rappelle le
Pr T. Poynard (hôpital PitiéSalpêtrière), l’hépatite C
est une maladie asymptomatique
dans la majorité des cas. La découverte du VHC se fait donc le plus
souvent de façon fortuite lors d’un
dépistage systématique, soit après
l’évaluation des facteurs de risques.
Les contaminations les plus fréquentes se font chez les usagers et
ex-usagers de drogue par voie veineuse (80 % des cas). Néanmoins,
le piercing et les tatouages jouent
désormais un rôle, et par ailleurs, il
ne faut pas oublier de dépister les
patients qui ont subi une transfusion sanguine avant 1992. Il apparaît que 200 000 sujets par an sont
dépistés (alors que l’on estime
600 000 personnes porteuses du
virus de l’hépatite C en France) et
parmi celles-ci, seulement 10 000 à
15 000 sont mises sous traitement.
Medec 2004
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
24
DOSSIER
Herpès
Infos
...
Un dépistage
précoce
Un herpès peut en
cacher un autre car
20 à 30 % des
herpès génitaux ont
pour origine “un
banal bouton de
fièvre” ; 60 % des
patients ne sont pas
diagnostiqués
et risquent de
transmettre le virus
à leur entourage ;
le virus se transmet
très facilement et
n’est pas toujours
visible.
La journée Nationale
contre l’Herpès a
lieu le 6 novembre
2004.
Site Internet de l’association Herpès :
www.herpes.asso.fr
et/ou au numéro indigo
0 825 800 808
(0,15 euros TTC/min)
L’herpès est actuellement l’IST la plus répandue dans le monde. Or, on estime que 6O %
des malades ne sont pas diagnostiqués car les symptômes qu’ils présentent sont attribués à d’autres maladies. Ce qui augmente le risque de transmission. En France, plus
de 400 000 cas d’herpès génital sont diagnostiqués chaque année, soit une augmentation de 5O % en dix ans.
A
lors que le virus de type 1
(HSV 1) infecte surtout la
sphère oro-faciale, le
virus HSV 2 agit sur les organes
sexuels mais également les
fesses et les cuisses. La séro-prévalence de l’infection à HSV 2 est
actuellement de 18 % chez les
femmes et de 14 % chez les
hommes. Les femmes consultent
plus facilement un médecin,
notamment le gynécologue. En
revanche, les hommes restent
plus réticents et consultent volontiers un dermatologue. Reste que
60 % des porteurs du virus ne
seraient pas pris en charge, en raison notamment d’une mauvaise
connaissance de la maladie : la
majorité des patients la confondent avec des mycoses, d’autres
IST ou une infection urinaire.
Une information indispensable
L’information approfondie du
public comme du personnel de
santé est indispensable sur les
facteurs favorisant la diffusion de
l’infection à l’herpès, et en particulier la possibilité d’excrétion
virale asymptomatique (en dehors de récurrence clinique), ainsi
que sur les conséquences sévères que cette infection est susceptible d’entraîner. En effet, on
reconnaît le rôle favorisant de
l’herpès dans la transmission de
l’infection à VIH, par le biais des
lésions génitales
ulcéreuses
devenant une porte ouverte à
l’acquisition du VIH.
Autre risque majeur, celui de l’herpès néonatal : en cas de primoinfection, il est de 50 % et en cas
de récurrence il est de 1 %.
L’obstétricien devrait systématiquement demander à la femme
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
enceinte si elle ou son conjoint
ont déjà eu des épisodes herpétiques, tant au niveau génital
qu’oro-facial. En cas de doute, il
faut faire le prélèvement d’une
lésion suspecte avec culture virale.
Si la primo-infection est dépistée
en fin de grossesse, le recours à la
césarienne s’impose. En cas d’herpès récurrent, on pratique d’abord
un prélèvement au niveau de l’endocol avant d’envisager la césarienne en cas de positivité.
Il est important de savoir que dans
certains cas l’herpès pénètre sans
provoquer de lésions apparentes,
et donc certains sujets peuvent
avoir été contaminés il y longtemps par une personne porteuse
du virus et n’avoir jamais eu
aucune poussée apparente. Le
virus reste à vie dans l’organisme
et lors des récurrences symptomatiques (presque toujours au même
endroit) la contagiosité débute
avant l’apparition des vésicules (au
stade de picotements et de
démangeaisons) et dure de deux à
quatre jours. A l’occasion d’un épisode asymptomatique la contagiosité dure en moyenne un jour et
demi. Il est acquis que certaines
circonstances peuvent déclencher
la réactivation du virus et donc une
poussée : la fièvre, le stress, un
traumatisme local, les règles, les
relations sexuelles, l’exposition au
soleil (pour l’herpès du visage).
Prévention
En ce qui concerne les méthodes
de prévention pour limiter le
risque de transmission, on insiste
sur l’abstinence (y compris les rapports oro-génitaux) pendant les
crises, sur l’utilisation du préservatif et sur l’importance de faire tester le partenaire, le problème des
couples sérodiscordants étant particulièrement préoccupant pendant la grossesse. Ainsi, si aucune
précaution n’est prise, le partenaire non porteur du virus a 10 %
de risque d’être contaminé par le
virus herpétique. Enfin, il a été
démontré que le traitement antiviral préventif réduit de 70 à 8O %
la fréquence de crises d’herpès
génital chez les personnes qui en
ont plus de six par an. Une étude
récemment publiée indique qu’un
traitement antiviral diminue de 75
% le risque d’acquisition d’un herpès génital symptomatique et de
48 % la transmission du virus
chez les couples séro-discordants
stables.
LC
© Association Herpès
>> DOSSIER
Une infection sournoise
INFECTIO-VIROLOGIE
25
Tuberculose
La vigilance toujours de mise
Populations défavorisées
La plupart des cas sont diagnostiqués chez des migrants en provenance de pays à forte endémie
tuberculeuse comme l’Afrique
subsaharienne, les populations
précarisées, en particulier les
sans-abri (chez qui l’incidence est
20 à 30 fois supérieure à la
moyenne nationale), les personnes touchées par l’infection
VIH (la tuberculose est l’infection
opportuniste la plus fréquente) et
les personnes vivant en milieu
carcéral. À noter que la transmission du bacille de Koch en milieu
soignant reste l’objet de préoccupation quant à l’utilisation des
masques de protection et du filtrage suffisant pour assurer la
sécurité bactérienne.
Il est bon de rappeler que la plupart des personnes infectées par le
bacille de Koch ne développent
pas la maladie. Celles qui la développent peuvent le faire rapidement dans les 2 ans ou bien très
longtemps après, plusieurs dizaines d’années plus tard. On dis-
tingue l’infection tuberculeuse, c’està-dire l’infection latente asymptomatique par le Mycobacterium
tuberculosis avec l’intradermoréaction positive (IDR) de la tuberculose-maladie avec atteinte des
organes et la radiographie pulmonaire positive. C’est au stade de la
maladie que le patient bacillifère
(excréteur de bacilles) peut largement ensemencer son entourage y
compris les sujets immunocompétents. Pour les experts, l’infection
tuberculeuse devrait être traitée
chez tous les patients ayant une
infection latente récente pour lesquels le passage à une maladie
tuberculeuse est hautement probable : les personnes de l’entourage, d’un cas de tuberculose bacillaire, tout sujet immunodéprimé ou
à risque de le devenir (infection par
VIH, greffes, corticothérapie). Précisons que l’IDR est désormais utilisée pour le diagnostic grâce à une
nouvelle tuberculine à partir d’une
souche humaine de M. tuberculosis (Tubertest). Ces tests plus performants prennent toute leur
valeur dans l’enquête autour d’un
cas et chez les personnes à risque.
Par ailleurs, de nouvelles recommandations vont concerner la suppression de la revaccination en cas
d’IDR négative.
Traitement
Le traitement de la tuberculose
repose sur l’association de plusieurs
molécules (isoniazide, rifampicine,
éthambutol et pyrazinamide) en utilisant chaque fois que cela est possible des formes combinées.
La durée du traitement reste
longue, au minimum de 6 mois
(2 mois de quadrithérapie et
4 mois de bithérapie) et prolongé
dans les formes graves cavitaires.
La stérilisation est obtenue en
moyenne en 15 jours et l’isolement n’est pas nécessaire au-delà
dans la majorité des cas. Néanmoins, les personnes traitées doivent être vues au moins une fois
par mois.
Quant au traitement de l’infection
latente (chez l’adulte comme
chez l’enfant) qui demande pour
le moins une bonne observance,
le traitement par isoniazide sur
une durée de neuf mois ou l’association isoniazide-rifampicine pendant trois mois est actuellement
recommandé par les experts.
L’association rifampicine-pyrazinamide pose un problème majeur,
étant donné la survenue de cas
d’hépatites, parfois mortels.
Le contrôle de la tuberculose
dans le monde se heurte à la
résistance croissante du bacille de
Koch aux antituberculeux, principalement à l’isoniazide et à la
rifampicine, mais aussi à d’autres
antituberculeux. La tuberculose
multirésistante est actuellement
particulièrement fréquente dans
les pays de l’ex-Union soviétique.
En France, les souches de BK
multirésistants sont rares soit
0,5 % des souches isolées.
LC
>> DOSSIER
L
a tuberculose est un fléau
mondial. Un tiers de la
population mondiale est
infecté et, chaque année, 8 millions de personnes développent
la maladie et 2 millions en meurent. En France, la situation épidémiologique est marquée par une
stagnation de la maladie déclarée
à environ 11 cas pour 100 000 habitants, toutefois avec des disparités régionales considérables. Ainsi
l’Ile-de-France concentre la moitié
des cas, et à Paris le taux d’incidence a tendance à augmenter
(50/100 000).
© Garo/Phanie
Si l’incidence de la tuberculose stagne en France depuis 1997, il ne faut pas pour autant
baisser la garde. Les populations en difficulté sociale sont les plus vulnérables.
L’accent est mis sur le dépistage des cas, le traitement rapide des malades atteints
mais aussi de ceux dont l’infection tuberculeuse latente récente est repérée par la positivité des réactions tuberculiniques.
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
26
DOSSIER
Trichomonas vaginalis
Infos
...
Un protozoaire
Le trichomonas est
un protozoaire
flagellé muni de
3-5 flagelles à son
pôle antérieur et
d’une membrane
ondulante. C’est un
organisme piriforme,
très mobile,
mesurant en
moyenne 10 x 7 µm.
Il provoque chez les
femmes des vaginites
accompagnées d’un
écoulement
jaunâtre, mousseux
et malodorant et,
dans les cas graves,
des pétéchies, des
érosions cervicales
ou, parfois, des lésions
hémorragiques
ponctuées.
La maladie clinique
est plus fréquente
chez les femmes en
particulier âgées de
16-35 ans.
Le diagnostic étiologique des vulvo-vaginites, en dehors d’un contexte évocateur,
nécessite un prélèvement pour étude microbiologique. Néanmoins, ce diagnostic est
incertain lorsque les concentrations des bactéries anaérobies ou de Trichomonas vaginalis ne permettent pas de tirer des conclusions. L’éviction de ce protozoaire parasite
est d’autant plus souhaitable qu’il peut favoriser les co-infections.
L
a trichomonase urogénitale demeure sous-estimée
parce qu’elle est souvent
asymptomatique et que sa mise
en évidence n’est pas facile.
Selon l’OMS, son incidence annuelle dépasse les 180 millions
des cas, et diverses enquêtes ont
révélé que le portage du parasite
restait asymptomatique dans
25 % à 50 % des cas chez la
femme. On sait aussi que la moitié des femmes infectées développeront une trichomonase clinique dans les six mois qui
suivront. À l’échelle mondiale, près
des 20 % des femmes enceintes
sont porteuses d’une infection à
Trichomonas qui est associée à
diverses complications périnatales. Chez l’homme, le portage
de ce parasite est encore plus
asymptomatique, mais il est tout
de même mis en cause dans
11 % des urétrites non gonococciques.
Une pathogenèse complexe
Bien que le Trichomonas vaginalis
ait été découvert il y a plus d’un
siècle et demi, on commence
seulement à mieux comprendre
la pathogenèse complexe de ce
parasite et son association fréquente avec d’autres germes
(mycoplasmes, bactéries anaérobies), dont le pullulement serait
en rapport avec l’inflammation
vaginale et des micro-lésions,
consécutives à l’activité de diverses protéases parasitaires.
T. vaginalis est capable de se
déguiser pour échapper aux
défenses immunitaires (détruire
les IgA au niveau de la muqueuse
vaginale) et également d’adopter
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
la stratégie des relations symbiotiques. Le fait que la présence
d’un germe pathogène peut favoriser les co-infections n’est pas
une notion nouvelle. En revanche,
le phénomène de l’endosymbiose
est un domaine passionnant pour
les chercheurs : ils ont pu observer les mycoplasmes à l’intérieur
du cytoplasme de ce parasite, qui
pourrait jouer le rôle de leur transporteur. À la lumière de ces découvertes on comprend qu’il convient de prendre en charge
l’infection à T. vaginalis qu’elle soit
symptomatique ou non et de
rechercher également la présence
des mycoplasmes.
Comme le rappelle le Dr R. Guillot
(Grenoble) : « On ne traite par une
vulvo-vaginite à T. vaginalis d’après
les signes cliniques, car 88 % des
femmes échapperont au diagnostic et 29 % seront traitées
par excès ». La fiabilité du diagnostic bactériologique précis
repose sur la qualité du prélèvement effectué et de bonnes conditions de transport au labora-
© Burger/Phanie
>> DOSSIER
Comme un véritable cheval de Troie
toire, le parasite étant très sensible au changement de température et à la dessiccation. Or des
formes rondes sans flagelles correspondant vraisemblablement à
des formes de “souffrance” du
parasite ne sont pas recherchées
en pratique courante. On reconnaît que la sensibilité moyenne
de l’examen de laboratoire n’excède pas 60 % et celle de la mise
en culture peut atteindre 85 à
95 % avec un délai de deux à
sept jours. Des méthodes diagnostiques plus sophistiquées
devraient être disponibles dans
un avenir proche. Dans la pratique quotidienne les gynécologues sont souvent amenés à
recourir d’abord à un traitement
en aveugle des vulvo-vaginites et
demander un prélèvement en cas
d’échec ou de récidive.
Selon le Dr L. Dubreuil (Lille), on
constate souvent le succès thérapeutique avec le secnidazole de
la classe des nitro-imidazolés car
il présente une activité à la fois
sur le T. vaginalis et sur les bactéries anaérobies, et contrairement
à d’autres antibiotiques, les résistances acquises sont exceptionnelles. Bref, il est important de
disposer d’un médicament couvrant les germes impliqués et susceptible de guérir rapidement la
patiente mais aussi le partenaire,
qu’il ne faut pas oublier de traiter.
Une nouvelle galénique de secnidazole de la famille des nitroimidazolés sous forme de microgranules en sachets permet une
prise en charge simplifiée avec
une prise unique, donc une
observance facilitée.
LC
INFECTIO-VIROLOGIE
27
Méningites bactériennes de l’enfant
La prévention par les vaccins conjugués
Chez les enfants de moins de 2 ans, le pneumocoque est la première cause de méningite purulente. Selon les experts, la généralisation de l’utilisation du vaccin pneumococcique conjugué chez ces enfants pourrait faire reculer ces infections, à l’instar de la
réduction de l’incidence des méningites dues à l’Haemophilus influenzae de type b, qui
a été obtenue grâce au vaccin conjugué anti-haemophilus.
Vacciner tôt
C’est dire l’importance de la prévention des infections massives à
pneumocoque chez les nourrissons de moins de 2 ans. Le vaccin pneumococcique conjugué
est disponible depuis 2001 et il a
l’avantage d’être immunogène dès
l’âge de 2 mois : il couvre 85 %
des pneumocoques responsables
de méningites et 90 % des pneumocoques de sensibilité diminuée à la pénicilline. Son efficacité (supérieure à 95 %) et sa
bonne tolérance (en termes de
pharmacovigilance le recul est de
plus de 50 millions de doses) ont
été démontrées aux États-Unis lors
d’un essai portant sur 40 000 nourrissons. En France, le vaccin pneumococcique conjugué est recommandé chez les nourrissons de
moins de 2 ans qui sont à très
haut risque (drépanocytose,
asplénie fonctionnelle, déficit
immunitaire congénital ou secondaire, pathologie chronique…)
mais aussi chez ceux ayant un
risque accru d’infection invasive
du fait du mode de vie : garde en
collectivité, fratrie d’au moins
deux enfants d’âge préscolaire,
allaitement maternel de moins de
2 mois. Pour le Pr D. Daniel
(Lyon), ce vaccin doit être administré le plus tôt, dès l’âge de
2 mois pour couvrir le pic d’incidence maximale de méningites à
pneumocoque qui se situe avant
l’âge de 6 mois.
En ce qui concerne le méningocoque, c’est le sérotype B qui est
responsable de plus de la moitié
des cas mais nous ne disposons
pas de vaccin. Par contre, il existe
le vaccin conjugué contre le
méningocoque du sérogroupe C
(responsable d’un tiers des cas)
qui est inclus, au Royaume-Uni,
dans le calendrier vaccinal de
tous les sujets de 2 mois à
20 ans. À l’heure actuelle, les indications en France restent limitées
étant donné que le taux global
d’incidence (1,3/100 000) reste
bas (donc inférieur à celui des
autres pays européens), d’où l’absence de politique nationale vaccinale. Cependant, la vaccination
est recommandée au contact des
cas de méningite à méningocoque C et aux zones géographiques dans lesquelles l’incidence a dépassé la moyenne
nationale, telles le Puy-de-Dôme
et le Sud-Ouest de la France.
LC
Medec 2004
La ponction lombaire :
la clé du diagnostic
Trois couches protectrices isolent notre système nerveux :
les méninges. Les méningites
correspondent à une atteinte
inflammatoire des méninges.
Dans 80 % des cas, le responsable est un virus. Elles sont
alors bénignes et le rétablissement est le plus souvent
spontané.
D’origine bactérienne, dans
20 à 25 % des cas, ces infections sont particulièrement
graves et peuvent être fatales. Plus rarement un parasite ou un champignon peut
être une cause d’inflammation des méninges.
Grâce à une ponction lombaire, on peut procéder à une
analyse du liquide céphalorachidien (LCR) qui, en cas
d’infection, peut devenir
inflammatoire (couleur, nombre de cellules et types de
cellules trouvées), ce qui permet de déterminer l’origine
de la méningite.
>> DOSSIER
C
omme le montrent les
données de janvier 2002
à novembre 2003 de
l’Observatoire national des méningites bactériennes incluant
toutes les méningites primitives
survenant chez des sujets âgés de
0 à 18 ans, tous âges confondus,
la bactérie la plus fréquente dans
ces infections est le méningocoque (44,2 %) suivi par le pneumocoque (29,8 %). Par contre,
dans la tranche d’âge 2 mois2 ans, le pneumocoque représente 46,9 % des étiologies
contre 42,9 % pour le méningocoque, alors que chez l’enfant
de plus de 2 ans, le méningocoque prédomine nettement
(70,7 % contre 25,7 % pour le
pneumocoque). Quant aux méningites à Haemophilus, elles ont
quasi disparues (2,1 %). En outre,
les données de l’Observatoire
confirment que plus de la moitié
des souches isolées de pneumocoques ont une sensibilité diminuée ou sont résistantes aux
bêta-lactamines. La mortalité des
enfants atteints de méningite à
pneumocoque est plus élevée
(12 %) que celle de ceux atteints
de méningites à méningocoque
(6,7 %) ; de même, la morbidité
est importante avec des séquelles
neurologiques et cognitives au
long cours (30 à 50 %).
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
28
DOSSIER
Légionelloses
>> DOSSIER
L’antibiothérapie doit être activée sans retard
Infos
...
Santé publique
Le Centre national
de référence des
légionelles a pour
missions le
diagnostic des
légionelloses,
l'identification des
souches de
Legionella par
typage moléculaire,
l'aide au diagnostic
de même que la
production et la
mise à disposition
de réactifs spécifiques,
l’expertise biologique,
l’entretien d’une
collection bactérienne
et d’une sérothèque.
Il contribue,
entre autres,
à la surveillance
épidémiologique
des légionelloses,
établit les protocoles
d’études pour de
nouveaux réactifs...
Les trois épidémies de légionellose en 2003 ont propulsé cette maladie au centre des
préoccupations du corps médical et du gouvernement. D’une part, il est nécessaire de
maîtriser les risques d’exposition de la population aux principales sources de contamination. D’autre part, il faut traiter précocement afin de limiter les conséquences de la
maladie en termes de mortalité.
L
es légionelloses sont des
bacilles Gram négatif composant une famille de
43 espèces regroupées en
64 sérogroupes, Legionella pneumophila étant responsable de
90 % des légionelloses chez
l’homme. Ces bactéries prolifèrent dans l’eau douce à des températures comprises entre 25 °C
et 42 °C. Les principales sources
de contamination sont bien connues : réseaux d’eau chaude sanitaire, circuits de refroidissement
des tours aéroréfrigérantes, diverses installations aquatiques,
systèmes de traitement d’air, eau
minérale utilisée à des fins thérapeutiques. La transmission se fait
par inhalation d’aérosol d’eau
hébergeant la bactérie. Cependant, aucun cas de transmission
interhumaine n’a été décrite.
Déclaration obligatoire
La légionellose est une maladie à
déclaration obligatoire, qu’elle soit
acquise à l’hôpital ou communautaire. En 2003, le nombre des cas
déclarés était de 1 044 cas identifiés biologiquement ou qui ont
nécessité une hospitalisation. Néanmoins, l’incidence réelle est vraisemblablement plus élevée du fait
des difficultés du diagnostic et de
l’absence de recherche systématique de Légionella pneumophila
devant une pneumopathie aiguë.
Rappelons que l’infection se manifeste par deux formes : un syndrome grippal habituellement bénin (la fièvre de Pontiac) qui guérit
spontanément en 2 à 5 jours et la
pneumonie (maladie du légionnaire) qui revêt le tableau d’une
pneumopathie communautaire
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
d’allure grippale et dont les signes
(hyperthermie, toux peu productive, myalgies, céphalées) ne permettent pas de la distinguer de
l’ensemble des pneumonies ; à
noter que dans la moitié des cas
sont associés les signes évocateurs,
à savoir la confusion, des troubles
digestifs et une bradycardie.
En cas de suspicion de légionellose, il est donc recommandé de
demander rapidement un test urinaire (15 minutes) qui a une bonne sensibilité et une grande spécificité pour Légionella pneumophila,
l’espèce la plus fréquente. Toutefois, sa négativité n’écarte pas le
diagnostic de légionellose puisqu’il
existe 42 autres espèces. Certes la
sérologie et la culture à partir d’un
prélèvement précisent le diagnostic, mais les résultats ne sont pas
immédiats.
Pour les spécialistes, en cas de
doute, le traitement d’une pneumopathie aiguë suffisamment
grave pour nécessiter une hospitalisation devrait couvrir le risque de
légionellose. Ce qui sous-entend
de recourir à un macrolide ou à
une fluoroquinolone. Autrement
dit, si la légionellose ne représente
qu’une minorité des cas de pneumonie communautaire ou nosocomiale, et pour éviter un retard
thérapeutique, l’antibiothérapie
devrait prendre en compte cette
bactérie dans les possibles origines, surtout quand aucune autre
cause n’a été mise en évidence.
En conclusion, il s’agit d’une affection potentiellement dangereuse
(15 à 20 % de décès) en l’absence d’un diagnostic précoce et
d’une prise en charge adéquate,
notamment chez les patients ayant
un terrain à risque : insuffisance
rénale ou respiratoire, infection
VIH, cancer, immunodépression
(greffes d’organe, corticothérapie
au long cours, neutropénie). En
outre, les réseaux de surveillance
doivent renforcer des moyens mis
en œuvre pour assurer en permanence le traitement efficace des
eaux contaminées par la Legionella
pneumophila.
LC
La situation nationale
en août 2004
L’Institut de veille sanitaire a
répertorié 550 cas de légionellose en France pour l’année
2004. En 2003, 1 044 cas de
légionellose (parmi lesquels
129 personnes décédées)
avaient été recensés, dont 597
sont survenus avant la fin du
mois d’août 2003.
La légionellose affecte essentiellement les personnes
fragilisées. Elle se traduit
par une pneumopathie sévère. Le diagnostic clinique
doit dans tous les cas être
confirmé biologiquement.
Dans la majorité des cas,
avec un traitement antibiotique précoce et adapté,
l’évolution est favorable. Il
n’y a pas de transmission
interhumaine pour cette
maladie. La période d’incubation est de 2 à 10 jours.
Les cas de légionellose doivent être distingués selon
qu’il s’agit de cas groupés ou
de cas isolés (sporadiques).
Communiqué de la DGS-IVS
INFECTIO-VIROLOGIE
29
Pneumopathies acquises sous ventilation mécanique
Un phénomène d’urgence
Les pneumonies représentent la deuxième cause d’infections nosocomiales et s’accompagnent d’une mortalité de 30 à 5O %. Elles touchent autant des patients hospitalisés en médecine ou en chirurgie que les sujets ventilés admis en service de soins intensifs. Plusieurs études confirment la nécessité de traiter immédiatement.
Un traitement approprié
Néanmoins, la nécessité d’un traitement immédiat ne signifie pas
une prescription inconsidérée
d’antibiotiques, étant donné que
de nombreuses études ont
démontré par ailleurs l’existence
d’un lien direct entre la consommation d’antibiotiques dans une
structure de soins et l’émergence
de bactéries multirésistantes. Sans
oublier que le tableau d’une maladie infectieuse (fièvre, hyperleucocytose) peut s’observer dans de
nombreuses pathologies susceptibles de compliquer l’évolution
d’un malade en réanimation.
« L’enjeu auquel nous sommes
confrontés est d’être capables
d’identifier rapidement et avec
spécificité les patients ayant développé une pneumonie nosocomiale de façon à pouvoir les traiter
immédiatement et eux seuls. Les
résultats de l’examen direct d’un
prélèvement distal de bonne qualité par fibroscopie permettent
avec beaucoup de sécurité de
sélectionner le traitement initial
approprié en cas de résultats posi-
tifs. Tandis qu’en cas de résultats
négatifs, il est préférable de surseoir à toute nouvelle antibiothérapie en attendant les résultats des
cultures », estime le Dr J. Chastre
(hôpital Pitié-Salpêtrière).
Certes, le choix du traitement
empirique est difficile, étant donné
que ce type d’infection est souvent
polymicrobien et que les germes
responsables sont souvent résistants aux antibiotiques, notamment
lorsque les patients sont hospitalisés depuis longtemps.
spectre dans une unité de réanimation. De même, rien ne justifie
de poursuivre le traitement par de
la vancomycine si finalement
aucun Staphylococcus aureus
méticilline-résistant (SARM) n’est
isolé. Par ailleurs, il est apparu
qu’il est souvent nécessaire de
réajuster les doses de l’antibiotique utilisé même si le choix de
celui-ci s’avère justifié afin d’obtenir son efficacité maximum ; cela
est d’autant plus important que le
germe responsable est difficile à
traiter et que sa CMI est élevée.
L’intérêt des algorithmes
D’où l’intérêt des algorithmes thérapeutiques incorporant le contexte clinique, les traitements antibiotiques déjà reçus par le
malade, le fait qu’il soit ou non
colonisé par une bactérie multirésistante et le résultat des prélèvements microbiologiques respiratoires antérieurs.
En fait, chaque unité de réanimation doit construire son propre
algorithme thérapeutique en
fonction des spécificités qui sont
les siennes, en termes de population de malades et d’écologie
bactérienne, dans la mesure où la
proportion d’infections dues aux
bactéries résistantes peut être
variable d’un endroit à l’autre de
même que la résistance de ces
souches.
L’identification précise des germes
responsables de pneumonie par
l’examen microbiologique permet
d’effectuer une désescalade thérapeutique chaque fois que le
spectre antibactérien couvert par
l’antibiothérapie empirique peut
être rétréci, et par là, de diminuer
significativement la consommation d’antibiotiques à très large
Une durée de traitement
variable
Quant à la durée du traitement,
l’ensemble des études ayant pour
objectif d’éviter le risque d’échec
clinique mais aussi celui de favoriser l’émergence des bactéries
multirésistantes lors des traitement prolongés sont en faveur
d’une réduction de la durée du
traitement antibiotique à huit
jours dans la très grande majorité
des cas. À condition que le traitement initial ait pu être d’emblée
approprié.
Cependant, la durée de l’antibiothérapie est de l’ordre de 14 à 21
jours pour les patients ayant une
atteinte multilobaire, un abcès du
poumon ou lorsque l’infection est
due à des germes difficiles à éradiquer sous ventilation artificielle
(Pseudomonas aeruginosa ou
Acinetobacter baumannii), quand
l’évolution clinique ne permet pas
un sevrage rapide de la ventilation artificielle.
LC
>> DOSSIER
C
hez les patients en service de soins intensifs,
l’infection bactérienne
bronchopulmonaire nosocomiale
peut vite aboutir à des tableaux
cliniques graves engageant le pronostic vital. Il a été démontré de
façon indiscutable qu’il existe une
relation entre la mortalité et le
délai séparant les signes faisant
suspecter l’infection pulmonaire
de la première administration
d’antibiotique efficace sur le ou
les agents pathogènes responsables (plus ce délai augmente,
plus la mortalité croît).
XXXIIe Congrès de la Société
de réanimation de langue française
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
30
DOSSIER
Paludisme
>> DOSSIER
Un danger chez la femme enceinte
Infos
...
Une maladie
exportée
Maladie endémique
dans trois
continents,
le paludisme
est fortement
exporté au point
que plus
de 8 000 cas
ont été dénombrés
en 2001 en France
causant 20 décès,
selon l’OMS.
Plus de 90 %
des paludismes
importés
proviennent
d’Afrique touchant
1à2%
des voyageurs.
Plus rarement,
sont atteints
les voisins des
aéroports
ou les personnels
y travaillant.
On estime que vingt pour cent de la population mondiale court le risque de contracter
le paludisme. La plupart des personnes menacées vivent dans les pays les plus
pauvres de la planète. La maladie provoque plus de trois cent millions d’atteintes
sévères chaque année et est responsable d’au moins un million de décès annuels.
Q
uatre-vingt-dix pour cent
des décès surviennent
en Afrique, au sud du
Sahara, et la plupart des victimes
sont des enfants de moins de cinq
ans. En l’absence de traitement
adapté, peut survenir l’accès pernicieux entraînant une anoxie cérébrale. De même, une méningite, des
convulsions, une anémie, un syndrome hémorragique sont à craindre. La gravité des troubles est plus
importante, voire mortelle, chez le
jeune enfant, la femme enceinte et
les personnes immunodéprimées.
Les atteintes cardiaques, hépatiques,
spléniques sont surtout le fait de
réinfestations multiples chez des
patients séjournant sans protection
dans les zones endémiques.
La femme enceinte
Responsable de nombreuses
complications pour la mère et l’enfant, le paludisme doit engager
une femme enceinte à ne pas
voyager en zone d’endémie. En
cas d’obligation absolue, le personnel médical après l’avoir informée
des risques encourus, doit lui indiquer les mesures à suivre.
En France, les cas sont principalement détectés en période de
vacances entre juin et septembre.
C’est essentiellement en Afrique,
zone endémique, que la maladie
est responsable d’anémie chez la
maman dans 15 % des cas, d’insuffisance pondérale chez l’enfant
dans plus de 35 % des cas, quand
une prophylaxie non ou mal
conduite fait contracter le parasite.
Cependant, il existe une différence
entre la femme africaine et la
femme occidentale enceinte qui
ne présente pas d’immunité
acquise à l’affection et est donc
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
plus vulnérable. Exceptée la primipare africaine, elle aussi peu
immunisée et à risques de complications. Pendant la grossesse, l’accès palustre ne prend pas une
forme différente de la triade classique, à savoir : frissons, fièvre,
sueurs. Seules les complications
sont plus fréquentes et plus graves :
principalement l’anémie. Celle-ci
est à la fois responsable de mortalité maternelle, par œdème, et
d’une hypoplasie fœtale chez le
bébé. En plus de l’anémie, une
hypoglycémie est fréquemment
retrouvée avec son aggravation
observée, en cas de traitement par
la quinine, le traitement de référence. Toutes ces complications
potentielles font qu’il est indispensable d’hospitaliser une femme
enceinte chez qui on suspecte un
accès palustre. Le traitement hospitalier sera fondé sur la quinine à
doses efficaces et surveillées par la
mesure de la concentration plasmatique. La quinine est employée
à raison de 25 mg/kg/j pendant
5/7 jours, en cas d’atteinte par le
Plasmodium falciparum. Si le parasite est Plasmodium ovale ou
malariae, le traitement préférentiel
est fondé sur la chloroquine :
600 mg les deux premiers jours
puis 300 les jours suivants.
Quelle protection ?
Les mesures prophylactiques observées doivent être maximales.
Elles portent d’abord sur la prévention des piqûres de moustiques
réalisée grâce au port de vêtements couvrant le corps au maximum, notamment les bras et les
jambes, dès que le soleil se couche. Ensuite, il convient au maximum de chercher à éradiquer les
moustiques de la pièce où l’on
dort, au moins en protégeant le lit
par une moustiquaire. Autre moyen
efficace : s’enduire le corps de préparations repoussantes tout en
respectant les posologies et contreindications de chaque préparation.
Ces mesures ne sont pas toujours
suffisantes et doivent être complétées par la prophylaxie individuelle
médicamenteuse, différente selon la
personne et son lieu de destination.
Selon la personne, il faut toujours
tenir compte du passé médical, du
présent (grossesse par exemple),
des traitements en cours, de l’état
immunitaire.
Il peut être ainsi souhaitable de tester
la tolérance des médications avant le
départ pour prévenir tout incident sur
place. Habituellement, le traitement
sera commencé un peu avant le
départ, poursuivi pendant tout le
voyage et une à quatre semaines
après le retour : une, pour la malarone
seulement mais quatre pour toutes les
autres spécialités. Il existe en effet des
formes retard de déclenchement du
paludisme.
JB
Bientôt un nouveau médicament
Une nouvelle molécule inspirée d’un
composant d’une plante chinoise,
l’artémisinine (nom de code : OZ 277)
sera disponible peut-être l’an prochain. Elle serait plus puissante et
agirait plus longtemps sur l’organisme que les médicaments utilisés
actuellement. Son principal avantage est qu’elle peut être fabriquée
entièrement industriellement, ce qui
la rend beaucoup moins chère.
Argument essentiel quant on sait
que les populations les plus touchées n’ont pas accès aux médicaments à cause de leur prix.
INFECTIO-VIROLOGIE
31
Tétanos
La vaccination trop souvent négligée
A
lors que la vaccination est
efficace, le tétanos est
une affection des pays
pauvres, mais les plus riches,
pour des raisons différentes, n’en
sont pas exempts. Pour les pays
développés, dont la France, de
10 cas par million d’habitant en
1975, on est passé à 0,44 cas
dans les années 2000. Pour plus
de 87 % d’entre eux, il s’agit de
patients ayant plus de 70 ans. Les
rappels de vaccination ont été
souvent négligés depuis longtemps, parfois depuis le service
militaire. Leurs défenses immunitaires s’affaiblissant avec l’âge, les
patients encore très actifs, deviennent plus vulnérables.
L’agent contaminant pénètre par
effraction à travers la protection
représentée par la peau, sous
forme de spore. Le Clostridium
tetani est en effet présent dans la
plupart des sols, tout composé
tellurique, parasite de nombreux
animaux. En son milieu, il peut
persister plusieurs années. La
forme spore étant particulièrement bien adaptée pour résister
au froid, au chaud, mais aussi, aux
antiseptiques. Inoculées, les spores donnent naissance aux bacilles qui, secrétant une neurotoxine, provoquent le tétanos.
Diagnostic
Le signe pathognomonique du
tétanos est la difficulté à ouvrir les
mâchoires par contracture des
masséters. Une difficulté qui
existe parfois depuis quelques
jours lorsque le patient en prend
réellement conscience et qui a
tendance à s’aggraver très rapidement. Cette gêne est bientôt si
importante que toute alimentation devient quasi impossible, à
cause d’une déglutition pénible.
La contracture touche aussi d’autres muscles du visage au point
de réaliser un faciès particulier
avec des yeux bridés, un front
plissé, un regard flou, des peauciers très apparents.
Le trismus est parfois si important
que la contracture peut provoquer une véritable morsure de la
langue. Il peut être associé à une
paralysie faciale périphérique (en
cas de plaie du visage du même
côté) ou une diplégie faciale (en
cas de plaie du nez) ou une
paralysie oculaire (en cas de plaie
de l’orbite).
Le trismus, signe crucial de la
maladie, ne doit pas être
confondu car il peut également
apparaître dans un contexte
fébrile, suite à l’extraction d’une
dent de sagesse, en accompagnement d’une lésion inflammatoire temporo-maxillaire, durant la
prise de neuroleptiques.
Respectivement, il peut s’agir
d’un phlegmon de l’amygdale,
d’un accident de la dent de sagesse, d’une maladie de Horton,
d’un accident des neuroleptiques.
On peut enfin retrouver ce signe,
en cas d’hypoglycémie, en crise
résolutive post-épileptique, en cas
d’atteinte cérébrale, tumorale
comme vasculaire.
Définir l’évolutivité
Diagnostiquer le trismus c’est
reconnaître la maladie, déterminer le temps de latence entre son
apparition et celle des symptômes de dissémination : c’est en
définir l’évolutivité. Un temps
court (12/24 h) signe en effet un
tétanos rapidement évolutif et
inversement ; la moyenne étant
de 48 heures entre le début d’apparition de la gêne et l’apparition
d’une contracture du cou signe
d’extension de la maladie.
Si rien n’est fait, l’extension va
toucher l’appareil respiratoire
sous forme d’épisodes de gêne
d’abord, d’un blocage ensuite à la
moindre sollicitation, au moindre
bruit. Devant un tel tableau, une
réaction d’urgence s’impose,
comme savoir-faire hospitaliser le
malade par un service de réanimation de type SMUR ou SAMU.
Le personnel soignant aura pris
soin antérieurement de se renseigner sur les dates des dernières
vaccinations, le nombre total de
doses reçues.
À défaut de soins immédiats, le
pronostic vital du patient est en
effet en jeu.
L’atteinte est liée aux contractures
musculaires, celles-ci étant potentiellement très dangereuses lorsqu’elles touchent le larynx, causant un spasme laryngé avec
fermeture de la glotte. Lorsqu’elles
atteignent les muscles respiratoires, le risque est alors le blocage mécanique du souffle avec
pour conséquence l’arrêt respiratoire. C’est la diffusion de la neurotoxine qui est en cause.
Produite par le bacille, elle est diffusée progressivement dans l’ensemble de l’organisme par voie
nerveuse, le long des axones.
Une diffusion qui débute par les
muscles masséters jusqu’au diaphragme, atteint en dernier, en
général.
JB
>> DOSSIER
Passant de un cas par jour dans les années 1970, à 26 cas en 2001, le tétanos a été efficacement combattu par la généralisation de la vaccination. Cependant, chez les plus de
70 ans, les rappels sont trop souvent négligés et la mortalité avoisine alors 20 %. Et dans
les pays en développement, la mère n’étant pas protégée, le tétanos touche annuellement
plus d’un million d’enfants nouveau-nés.
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
32
DOSSIER
Couverture vaccinale
>> DOSSIER
Des remises en cause nécessaires
Si la couverture vaccinale pour les enfants de 2 ans est satisfaisante contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, la coqueluche, ce n’est pas le cas en ce qui concerne la
rougeole, la rubéole, les oreillons et l’hépatite. Pourtant c’est grâce à la vaccination,
entre autres, que nombre de maladies mortelles ont pratiquement été éradiquées.
À
l’âge de deux ans, 98 %
des enfants ont reçu les
trois doses vaccinales DT
Polio et 88 % trois doses et un
rappel. C’est grâce à la vaccination que la poliomyélite a quasiment disparu, des pays occidentaux en tout cas. Seuls quelques
pays émergents ont encore la
maladie de manière endémique.
L’éradication de la maladie était
l’objectif décidé par l’OMS en
1988 et fixé initialement pour
2000. La date a été repoussée en
2 005. De même, la réduction
des cas de coqueluche pour
l’Europe a dû être repoussée à
2010, année où la rougeole
devrait être éradiquée en France.
Un objectif ambitieux irréaliste ?
La couverture vaccinale des enfants de deux ans a en 10 ans fait
un bond de 32 à 80 %, chiffre de
1994 mais chiffre qui n’a guère
évolué depuis, puisque légèrement inférieur à 85 % en 2001. Il
existe de surcroît de fortes disparités géographiques : le Sud de la
France est ainsi la zone la moins
couverte. Sur les 15 États européens concernés, près de 18 000
cas de rougeole ont été déclarés
en 2001/2002. Dans 21 cas, une
complication sévère a été notée.
Un décès en a résulté. Pour obtenir une éradication de la maladie,
il faudrait atteindre une couverture vaccinale supérieure à 95 %.
Un taux qui est loin d’être atteint
aussi pour l’hépatite B : à peine
30 % des enfants de deux ans,
66 % pour la tranche des 1418 ans. La prévalence de la maladie est plus faible dans les pays
riches que les pays pauvres : ainsi,
en Europe, le pourcentage est
Infos
...
Faut-il vacciner contre la varicelle ?
La varicelle est la plus fréquente des maladies infantiles. Banale mais pas anodine. Due
au virus VzV, l’affection est courante avant 9 ans. C’est une maladie virale bénigne de l’enfant, et la protection doit se faire au niveau des complications infectieuses liées aux surinfections bactériennes. Mais depuis quelques années, on note l’apparition de plus en plus
fréquente de cas après 14 ans, voire chez l’adulte. C’est avec l’émergence de ces formes
tardives qu’apparaissent des formes plus compliquées. Les enfants doivent-ils ou non être
vaccinés contre la varicelle ? Jusqu’à présent, cette pathologie n’est pas inscrite au calendrier vaccinal, mais la donne pourrait éventuellement changer. Les défenseurs du vaccin
invoquent des cas graves et parfois mortels. Selon les chiffres Inserm du réseau Sentinelle,
la varicelle touche entre 600 000 et 700 000 personnes chaque année. Mais ce chiffre
n’est pas en augmentation. Au cours des vingt dernières années, on a enregistré 317
décès, les principales victimes étant des adultes de plus de 20 ans. Selon le laboratoire, la
tolérance au vaccin serait bonne, mais des études font craindre un développement du
zona. En effet, une vaccination des enfants, en disséminant à grande échelle dans la
population du virus de la varicelle atténué – c’est le principe même de la vaccination –,
aurait comme conséquence d’augmenter l’incidence dans la population du zona, cette
version adulte et aggravée de la varicelle. D’autre part, le vaccin n’est efficace que pendant huit ans, ce qui suppose une série de rappels, difficile à faire suivre efficacement par
la population, et qui déplacerait la maladie infantile vers l’adulte.
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
Comment mesure-t-on
la couverture vaccinale ?
En France, les outils à disposition pour évaluer la couverture
vaccinale sont surtout le carnet
de santé, le carnet de vaccination. Au-delà de 6 ans, les
mesures viennent d’enquêtes
réalisées ponctuellement pour
certaines pathologies, certaines
tranches d’âge données. Ces
données sont difficilement interprétables car difficilement extrapolables à l’ensemble de la population nationale.
Médecine et Enfance, OMS, BEH,
Comité de pilotage sur la couverture vaccinale en France,
Vaccinews.
JB
voisin de 0,5 % de personnes atteintes avec pour une sur quatre
l’existence de complications.
Rôle des soignants
Si les campagnes de vaccination
servent à sensibiliser le public,
via les médias, l’insuffisance de
progression des taux est préoccupante.
Tout le monde doit se remettre en
cause, les soignants entre autres
n’insistant pas assez dans le cadre
du conseil sur les risques des
maladies et les bénéfices à tirer
de la vaccination.
Ainsi, dans le monde 3 millions
de vies pourraient être sauvées
par la vaccination.
En 2000, 770 000 enfants sont
morts de la rougeole, 220 000 du
tétanos néonatal, 520 000 de
l’hépatite B, et plus de 1 700 000
de la tuberculose.
JB
INFECTIO-VIROLOGIE
33
Infections fongiques systémiques
Problème majeur en réanimation
Les infections fongiques systémiques dont l’incidence s’est considérablement accrue au
cours des ces dernières décennies sont grevées d’une lourde morbi-mortalité, en particulier chez les patients immunodéprimés. Les espèces autres que Candida albicans sont
venus sur le devant de la scène ainsi que la résistance croisée aux antifongiques azolés.
cellulaire. Les antifongiques de la
classe azolés, le fluconazole et l’itraconazole, présentent une plus faible
incidence d’effets secondaires et
restent souvent actifs contre C. albicans, mais ils le sont moins contre
C. glabrata et sont tout à fait inactifs contre C. krusei. À noter que
l’itraconazole est également actif
contre certaines moisissures comme Aspergillus. Comme le rapporte
le Pr O. Lortholary (Paris), on constate en clinique l’intérêt conservé
de l’utilisation de ces deux azolés
“anciens” dans le traitement des
candidoses systémiques incluant
les candidoses disséminées et profondes.
Un nouveau antifongique de la
classe azolés, le voriconazole, constitue un progrès puisqu’il garantit
une efficacité thérapeutique même
pour les isolats résistants au fluconazole et il est actif tant sur C. glabrata que sur C. krusei. Par ailleurs
il donne aussi le succès thérapeutique chez 63 % patients présentant une infection à Scedosporium
et chez 40 % patients ayant une
infection à Fusarium. Il n’existe pas
de résistance croisée entre les antifongiques azolés et d’autres
classes d’antifongiques. Mais les
antifongiques azolés peuvent avoir
des interactions médicamenteuses
en raison de leur effet inhibiteur
sur le cytochrome P450 avec les
corticoïdes, les myorelaxants, les
anticoagulants, la cyclosporine et
un grand nombre des médicaments cardiovasculaires.
LC
Antibiotiques mieux compris des Français
Environ deux tiers des Français interrogés (67 %) déclarent être mieux informés sur la résistance aux antibiotiques. C’est l’un des résultats majeurs de
l’enquête barométrique Ipsos qui a évalué l’évolution des connaissances des
Français à la suite des actions menées par l’Assurance maladie sur l’automne
– hiver 2003/2004. Les Français ont aussi mieux compris le phénomène compliqué du développement des résistances. Ainsi, 70 % des personnes interrogées, qui ont entendu parler des résistances, savent qu’elles concernent les
bactéries elles-mêmes et non la résistance de l’organisme au traitement.
La résistance aux antibiotiques provient du grand pouvoir d’adaptation des
bactéries qui ont la capacité d’acquérir de nouvelles propriétés soit par modification de leur génome soit par gain d’informations génétiques nouvelles.
Autre complication : la multirésistance se réfère à une bactérie qui est résistante à plusieurs familles d’antibiotiques en même temps. Ainsi le staphylocoque doré résiste non seulement à la méticilline mais aussi à la plupart des
antibiotiques ou familles d’antibiotiques. Résistance ou multirésistance, le
phénomène prend de l’ampleur. La création de nouveaux médicaments est à
la traîne par rapport à la progression de la résistance aux antibiotiques. Autre
motif d’inquiétude, et non des moindres : la résistance a quitté les murs complices de l’hôpital (infections nosocomiales) pour gagner aussi la pratique de
ville, devenant du coup un enjeu de santé publique.
Malgré une baisse sensible, la consommation d’antibiotiques en France reste
la plus élevée d’Europe : deux fois plus qu’en Allemagne, par exemple.
>> DOSSIER
L
a fréquence des infections
fongiques et la résistance
aux antifongiques sont en
augmentation chez les patients en
unité de soins intensifs. On connaît
les facteurs de risque de développement d’une candidose invasive,
tels les traitements de longue
durée, le cathéter intravasculaire, la
nutrition parentérale totale, l’état
immunitaire, la pancréatite aiguë.
On sait aussi qu’il y a vingt ans,
plus de 80 % des champignons
isolés étaient C. albicans. Depuis,
d’autres espèces ont gagné en fréquence, en particulier C. glabrata,
C. tropicalis et C. parapsilosis et
elles sont actuellement responsables de plus de 50 % des infections fongiques de l’immunodéprimé (le taux de mortalité
attribuable aux candidoses profondes est estimé à plus de 20 %).
Aspergillus est le second germe
responsable, par ordre de fréquence, des infections fongiques
invasives chez le sujet immunodéprimé. Les affections sous-jacentes
les plus fréquemment observées
sont les hémopathies malignes, les
allogreffes de moelle osseuse, les
transplantations d’organes, la granulomatose septique chronique,
l’infection par le VIH ; l’aspergillose
pulmonaire massive est une pneumopathie opportuniste particulièrement redoutable chez le patient
aplasique.
Dans les infections fongiques
sévères l’amphotéricine B possède
le plus large spectre, cependant la
fréquence et la sévérité de ses
effets secondaires limitent en pratique son utilisation. L’arrivée de
l’amphotéricine B liposomale (un
complexe lipidique) a permis
d’améliorer la tolérance rénale et
46e Congrès national de la SFAR
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004
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