STÉPHANE GSELL
MEMBRE DE L’INSTITUT
PROFESSEUR AU COLLÈGE DE FRANCE
HISTOIRE ANCIENNE
DE
L’AFRIQUE DU NORD
TOME VIII
JULES CÉSAR ET L’AFRIQUE
FIN DES ROYAUMES INDIGÈNES
PARIS
LIBRAIRIE HACHETTE
79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79
1928
Livre numérisé en mode texte par :
Alain Spenatto.
1, rue du Puy Griou. 15000 AURILLAC.
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HISTOIRE ANCIENNE
DE
L’AFRIQUE DU NORD
VIII
LIVRE PREMIER
JULES CÉSAR ET L’AFRIQUE
CHAPITRE PREMIER
L’AFRIQUE AUX POMPÉIENS
I
Au début de l’année 49(1), éclata la guerre civile entre Ju-
les César et Pompée. Dans les jours qui précédèrent l’ouver-
ture des hostilités, le Sénat eut à s’occuper de l’Afrique.
Nul n’ignorait que le roi de Numidie Juba avait de bonnes
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1. C’est-à-dire au début de l’année 705 de Rome, selon le calendrier officiel, qui
était alors en avance. J’adopte les concordances indiquées dans les tables que contient le
tome III de la Geschichte Roms de Drumann, 2e édit. par Groebe, p. 780 et suiv. D’après
ce système, le janvier 763 correspond au 14 novembre 48. Il correspond au 6 décembre
selon Le Verrier (dont les tables, insérées dans le tome Il de l’Histoire de Jutes César par
Napoléon III, ont été reproduites par Stoffel, Histoire de Jules César, Guerre civile, t. II,
p. 360 et suiv. Je crois que le système allemand se concilie mieux avec les textes relatifs
aux mesures prises par Jules César, en 46, pour remettre le calendrier en ordre (v. infra, p.
49, n. 5), et avec, d’autres données encore. Pour l’année 46, nous savons que le XVII des
calendes de juin tomba au temps de l’équinoxe (Cicéron, Ad Attic., X, 17, 3) : ce qui est
2 JULES CÉSAR ET L’AFRIQUE.
raisons pour haïr César(1). Dans la séance du 1er janvier, quel-
qu’un proposa qu’on le reconnût « allié et ami » (socius et
amicus) : c’eût été lui montrer que l’on comptait sur son aide.
Il fut aussi proposé que Faustus Cornélius Sulla, fils du dicta-
teur et gendre de Pompée, se rendit sans retard en Maurétanie:
on espérait évidemment que l’amitié qui avait uni son père au
roi Bocchus lui assurerait un accueil favorable auprès des suc-
cesseurs de ce roi, Bogud et Bocchus le Jeune. Mais le consul
C. Claudius Marcellus, quoique ennemi de César, s’opposa à
la première de ces deux motions ; le tribun L. Martius Philip-
pus, à la seconde(2) : ils ne voulaient sans cloute pas que l’on
mêlât des barbares aux affaires intérieures de la République.
La province d’Africa était alors administrée par Q. Liga-
rius, venu avec le propréteur C. Considius Longus, dont il était
le légat(3). Considius, étant retourné à Rome, peut-être vers la
fin de l’année 50(4), peut-être plus tôt(5), avait, conformément
à la loi, laissé Ligarius pour faire l’intérim(6) jusqu’à l’arrivée
de son successeur. Quand, en janvier 49, le Sénat eut dressé la
liste des anciens préteurs qui auraient à se répartir les provinces
prétoriennes par la voie du sort(7), l’Afrique échut à l’un d’eux,
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exact avec la concordance de Groebe (= 25 mars), mais ne l’est pas avec celle de Le Ver-
rier (=16 avril), Les dates que nous indiquons, sans autre explication, dans ce chapitre el,
dans les suivants sont celles du calendrier officiel.
1. Voir t. VII, p. 294-5.
2, César, Bell, civ., I, 6, 3-4. Je citerai désormais cet écrit sous la forme abrégée B.
c., sans nom d’auteur.
3. Cicéron, Pro Ligario, 1, 2 ; 7, 20.
4. Cicéron (ibid., 1, 2) dit simplement : « decedens Considius provincia ». Un
scoliaste de Cicéron (Schol. Gronov., au Pro Ligario, édit. de Cicéron d’Orelli, V, 2e
partie, p. 444) indique que Considius était retourné à Rome pour briguer le consulat. Les
élections consulaires avaient lieu en juillet. Mais Considius, désireux de préparer sa can-
didature, avait peut-être demandé au Sénat l’autorisation de quitter sa province quelques
mois avant les comices, qui devaient avoir lieu au milieu de l’année 49.
5. On pourrait supposer que Considius était parti avant le milieu de 50, son année
de gouvernement étant terminée. Une raison quelconque aurait empêché son successeur
désigné de venir le remplacer. Mais il est plus vraisemblable qu’il avait reçu l’Africa pour
la période 50-49.
6. Cicéron. l. c.
7. Conf. B. c., I, 6. 5.
L’AFRIQUE AUX POMPÉIENS. 3
L. Aelius Tubero(1). Mais celui-ci tarda à aller en prendre posses-
sion(2), probablement à cause de son mauvais état de santé(3).
Il fut devancé par Y. Attius Varus, qui avait gouverné
l’Africa peu d’années auparavant(4). Après que César eut
franchi le Rubicon, ce Varus avait été charde s’opposer à
sa marche, en occupant avec des recrues Auximum (au Sud
d’Ancône). Mais les magistrats municipaux l’invitèrent à se
retirer et une avant-garde césarienne eut raison de lui sans
aucune peine, ses troupes l’ayant abandonné(5). Cela se passa
au commencement du mois de février. Aussitôt après, Varus
se rendit en Afrique(6). Il est à croire qu’il y avait laissé de
bons souvenirs, car il fut bien accueilli, quoiqu’il n’eut aucun
titre légal à faire valoir(7). A Utique, les acclamations de la
foule lui tinrent lieu d’investiture(8). Ligarius se mit à sa dis-
position(9).
Quand Tubéron, accompagné de son fils Quintus, arriva
devant Utique(10), Ligarius, d’après les instructions de Va-
rus(11), — interdit à tous deux de débarquer et même de péné-
trer dans le port, quoique Quintus fût malade; il ne leur permit
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1. B. c., I, 30, 2 : « Africain sorte Tubero obtinere debebat. » Cicéron, Pro Ligar.,
7, 21. « Tuberonis sors coniecta est ex senatus consulto » ; 8, 23 : « …Africam, quo sena-
tus eum sorsque miserat » ; 9, 27 : « Iusto cum imperio ex senatus consulto in provinciam
suam venerat. » Ces textes prouvent que Tubéron fut envoyé en Afrique comme gouver-
neur, et non pas avec une mission spéciale, ainsi qu’un passage de Quintilien le laisserait
croire (XI, 1. 80) : « Tubero iuvenem se patri haesisse, illum a senatu missum non ad
bellum, sed frumentum coemendum ait. »
2. Cicéron. l. c., 7, 22.
3. Conf. Cicéron, l. c., 7, 21.
4. B. c., I, 31, 2. Cicéron, l. c., 1, 3.
5. B. c., I, 12-13.
6. B. c., I, 31, 2.
7. Cicéron (l. c., 1, 3) le qualifie de privatus. B. c., I, 31, 2 : « Africam sua sponte
vacuam occupaverat. »
8. Cicéron, l. c.
9. Comme le prouve la conduite de Ligarius dans l’affaire de Tubéron : v. infra.
10. Probablement vers la fin de mars ou le début d’avril, Pompée avait déjà quitté
l’Italie : ce qu’il fit le 17 mars.
11. César (B. c., I, 31, 3) attribue l’exclusion de Tubéron à Attius varus ; il ne
mentionne pas Ligarius. Voir aussi Paul Orose, Adv. pagan., VI, 15, 7.
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