• 138 © Nathan. Histoire Terminales L/ES Le Quintrec, 2012
tie des juifs sépharades ayant été contraints au
départ.
– Enn, l’entrée en guerre de l’Empire ottoman
aux côtés de l’Allemagne, en octobre 1914, est
l’événement décisif qui bouleverse la situation
politique établie depuis des siècles au Moyen-
Orient. Comme le montre la carte de la région
en 1914, les grandes puissances européennes, la
France, la Grande-Bretagne, la Russie et l’Italie
n’ont cessé, depuis la n du XVIIIe siècle, date de
l’expédition d’Égypte, d’étendre leur inuence
au détriment de l’Empire ottoman, en accaparant
ses territoires, en contrôlant ses nances et de
larges pans de son économie, en obtenant des
privilèges d’exterritorialité pour leurs ressor-
tissants et leurs protégés. Dans ce contexte, les
dirigeants nationalistes jeunes-turcs ont choisi
de s’allier à l’Allemagne, qui n’avait pas d’am-
bitions coloniales dans la région. Ce choix s’est
avéré fatal pour l’Empire ottoman par la suite.
• Deux double pages cartes (pp. 258-261), ainsi
qu’un tableau récapitulatif des principales com-
munautés religieuses du Moyen-Orient (p. 257),
donnent un aperçu géopolitique du Moyen-
Orient actuel. Elles doivent permettre aux élèves
de se défaire de quelques idées préconçues et
d’acquérir sur la région des notions élémentaires
et générales pour la compréhension des conits.
Carrefour de civilisations, selon l’expression
consacrée, le Moyen-Orient abrite les lieux
saints des trois grandes religions monothéistes.
Mais, comme l’illustre le tableau de la page 257,
aucune de ces trois grandes religions ne forme
chacune un ensemble homogène. Les commu-
nautés ashkénazes et sépharades n’ont pas les
mêmes héritages historiques et culturels et, du
reste, l’intégration des communautés sépharades
dans le nouvel État d’Israël, longtemps dominé
par les élites politiques ashkénazes, ne s’est pas
faite sans difculté. Les juifs orthodoxes ont,
quant à eux, longtemps dénoncé le sionisme
comme une idéologie athée. Chrétiens latins
et orthodoxes se sont longtemps affrontés pour
la garde des lieux saints, conits intercommu-
nautaires qui, instrumentalisés par la France et
la Russie furent, par exemple, à l’origine de la
guerre de Crimée (1853-1855). Les musulmans
sont également très divisés : le principal clivage
est bien sûr celui qui oppose les sunnites et les
chiites, clivage qui a pris une dimension poli-
• Cinq grands repères permettent ensuite de
replacer l’histoire contemporaine du Moyen-
Orient dans la longue durée :
– La prise de Constantinople en 1453 vient rap-
peler qu’en 1914, les régions du Proche-Orient
sont placées depuis le XVe siècle sous l’autorité
des Turcs ottomans dont le souverain, le sultan,
exerce aussi la dignité religieuse de calife.
– Le débarquement de troupes françaises à
Beyrouth, en 1860, pour porter secours aux
chrétiens d’Orient, évoque le rôle de protectrice
que la France a longtemps revendiqué au Levant.
– L’inauguration du canal de Suez, en 1869 :
il a été construit par le Français Ferdinand de
Lesseps, mais d’emblée, la otte britannique,
qui domine les mers, en a été la principale bé-
néciaire. Le canal de Suez, et par conséquent
l’Égypte, jouent désormais un rôle essentiel
dans la défense de la « route des Indes ».
– La fondation de Degania, premier kibboutz en
Palestine en 1909, où est né le général Moshe
Dayan, le héros israélien de la guerre des Six-
Jours : il permet de revenir brièvement sur la
naissance du sionisme en Europe au XIXe siècle
dans les milieux juifs ashkénazes de Russie.
Bien que laïc, le sionisme réactualise l’espérance
messianique d’un retour des juifs en Terre pro-
mise. Jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre
mondiale, les immigrants juifs en Palestine sont
donc principalement des Européens, fuyant dès
la n du XIXe siècle les persécutions dont ils
sont victimes sur le vieux continent. Ces juifs
originaires d’Europe, dont certains sont des
socialistes athées, sont totalement étrangers à la
société et à la culture arabo-musulmanes qu’ils
découvrent en Palestine. Mais il est essentiel de
souligner par ailleurs qu’à cette époque, juifs
et Arabes cohabitent pacifiquement depuis des
siècles au Moyen-Orient (85 000 juifs en Irak et
en Palestine en 1917, 60 000 en Égypte, 100 000
en Turquie) et au Maghreb (où la présence juive
est attestée bien avant la conquête arabe). Au
Maroc, les juifs sont même proportionnellement
plus nombreux à parler l’arabe que les musul-
mans, où beaucoup sont berbérophones (en
1960, 88 % des juifs marocains parlaient l’arabe
contre 64 % seulement de musulmans). L’un des
aspects du drame qui s’est joué après 1948 est
justement d’avoir rompu les liens traditionnels
entre les deux communautés, une grande par-