COMMENT TRAITER UNE CALCIFICATION TENDINEUSE
La Lettre du Rhumatologue - n° 316 - novembre 2005
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L’analyse combinée des deux séries révèle 85 % de patients guéris
ou très améliorés. Aucune complication précoce infectieuse ou
vasculo-nerveuse n’a été relevée. En revanche, le pourcentage de
capsulites postopératoires varie de 5 à 9 %.
Le retour à la vie normale se fait en moyenne au bout de trois mois,
mais la stabilisation réelle de l’état fonctionnel de l’épaule peut
être plus longue (six à huit mois selon les séries). Quinze pour cent
des patients gardent quelques douleurs résiduelles, causées vraisem-
blablement par une zone cicatricielle dans le tendon (tendinopathie
postcalcifiante).
La recherche de facteurs pronostiques a montré que les résultats
étaient significativement moins bons en cas de raideur préopéra-
toire ou de cervicalgies associées. En revanche, il n’y avait aucune
incidence de la durée d’évolution et du nombre d’infiltrations pré-
opératoires.
Le résultat fonctionnel est moins bon dans les calcifications de
type C et lorsqu’il existe une calcification résiduelle sur les clichés
de révision (20 %). Ces calcifications résiduelles sont observées
notamment après traitement des calcifications de type B, lorsque
l’opérateur n’a pas pris soin d’effondrer les cloisons de la calcifi-
cation. Il n’a pas été observé d’incidence de la taille initiale de la
calcification, de sa localisation, ni du type acromial dans la clas-
sification de Bigliani (4).
Les résultats à long terme ont été analysés sur une série de 112 cas
en 2003 (recul moyen de 10,7 ans) (5). Le résultat fonctionnel est
resté stable, sans récidive de calcification sur le même tendon. Deux
cas de rupture (1,8 %) ont été identifiés, sans relation significative,
car ces deux cas présentaient une rupture de coiffe contro-latérale.
Cette étude confirme que les patients opérés d’une calcification
de type A ou B n’ont aucune tendance naturelle à évoluer vers une
rupture tendineuse.
CAS PARTICULIER DES CALCIFICATIONS
DE TYPE C
Il s’agit plus de tendinopathies calcifiantes que de calcifications
tendineuses classiques. Elles représentent 15 % des cas en moyenne
dans toutes les séries.
Nous avions analysé rétrospectivement, en 1996, 33 calcifications
de type C opérées (6).
La population est un peu différente de celle des calcifications de
type A ou B. La prédominance féminine (70 %) reste classique,
mais l’âge moyen est plus élevé (49 ans). Quinze pour cent des
patients avaient fait l’objet d’au moins une trituration ou ponction-
lavage-aspiration. La calcification est souvent située sur le sous-
épineux (33 %), et l’existence de géodes du trochiter est fréquente
(42 %). Une rupture tendineuse associée, partielle ou transfixiante,
est fréquente (48 %). Cela justifie de faire systématiquement un
arthroscanner ou une IRM en présence d’une calcification de
type C.
Plusieurs patients présentaient initialement des calcifications
banales de type A ou B qui ont évolué vers un type C, sans cause
évidente. Les résultats de l’exérèse arthroscopique sont moins satis-
faisants, avec 25 % de calcifications résiduelles au dernier recul,
et 31 % de résultats fonctionnels insatisfaisants. Plusieurs séries
ont montré qu’il valait mieux y associer une acromioplastie.
INDICATIONS
Une exérèse arthroscopique de calcification de la coiffe ne doit
jamais être proposée en première intention, ni pour une calcifica-
tion asymptomatique. Elle est inutile en cas de crise hyperalgique
de résorption ou si l’aspect radiographique change.
Cinq conditions sont requises pour proposer cette intervention :
–douleur et gêne fonctionnelle invalidantes, interférant dans la vie
quotidienne ;
–pas d’amélioration durable malgré un traitement médical bien
conduit pendant une période minimale de six mois (7) ;
–épaule parfaitement souple ;
–calcification persistante et immuable sur les clichés radiogra-
phiques ;
–patient informé des suites postopératoires.
CONCLUSION
Les calcifications de la coiffe des rotateurs constituent une affec-
tion bénigne, asymptomatique une fois sur deux, évoluant dans
80 % des cas vers une résorption spontanée. L’exérèse sous arthro-
scopie est une bonne option thérapeutique en cas d’échec du traite-
ment médical. Cette intervention procure de bons résultats (85 % de
patients guéris ou très améliorés). Derrière l’apparente bénignité
du geste se cache une récupération parfois longue, dont les patients
devront être prévenus.
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Bibliographie
1. Sirveaux F, Gosselin O, Roche O et al. Suites postopératoires du traitement
endoscopique des calcifications de la coiffe des rotateurs avec ou sans exploration
associée. Rev Chir Orthop 2005;91(4):295-9.
2. Molé D, Kempf JF, Gleyze P et al. Résultats du traitement endoscopique des
tendinopathies de la coiffe des rotateurs. 2epartie : les calcifications de la coiffe
des rotateurs. Rev Chir Orthop 1993;79(7):532-41.
3. Lévigne C, Walch G. Les tendinopathies calcifiantes de la coiffe des rotateurs :
traitement chirurgical. In : Journées lyonnaises de l’épaule, 1-3 avril 1993;547:
214-27.
4. Bigliani LU, Morrison DS, April EW. The morphology of the acromion and its
relationship to rotator cuff tears. Orthop Trans 1986;10:228.
5. Gosselin O, Molé D, Sirveaux F et al. Long term results of arthroscopic treat-
ment of calcifying tendinitis with or without subacromial decompression.
Communication présentée au 17econgrès de la Société européenne de chirurgie
de l’épaule et du coude, Heidelberg 2003.
6. Levigne C. Non homogeneous calcifications of the rotator cuff. In : The cuff.
Gazielly DF, Gleyze P, Thomas T (eds). Paris : Éd. Elsevier;1997:180.
7. Noël É. Treatment of calcific tendinitis and adhesive capsulitis of the shoulder.
Rev Rhum Engl Ed 1997;11:619-28.