i o t n a e r s Obbservv ation.. O Traitement d’un trouble anxieux généralisée par thérapie comportementale et cognitive chez une tabagique P. Guichenez(1), I. Clauzel(1), A.M. Clauzel(2), P. Dupont(3), G. Lagrue(3) Des liens entre les troubles anxieux, notamment phobie sociale (PS) ou trouble anxieux généralisé (TAG), et la dépendance tabagique ont été mis en évidence (6, 9). Nous rapportons un cas de trouble anxieux généralisé (TAG) pris en charge par une thérapie comportementale et cognitive (TCC) chez une patiente tabagique candidate au sevrage. À la fin de la thérapie, l’arrêt du tabagisme est obtenu sans difficulté, alors qu’antérieurement de nombreuses tentatives de sevrage s’étaient soldées par des échecs en raison de la persistance du trouble anxieux. Observation Mme B., 28 ans, professeur d’anglais consulte pour un sevrage tabagique. Elle a fait quatre tentatives d’arrêt avec des rechutes liées à un état dépressif une première fois et à la majoration de son trouble anxieux ensuite. La dépendance est forte avec un test de Fagerström à 7. Le test HAD (Hospital Anxiety Depression Scale) est à 13/3, le CO dans l’air expiré est de 35 ppm. Elle accepte finalement l’avis d’un psychiatre qui conclut à un trouble anxieux généralisé selon les critères du DSM IV (tableau). Nous décidons de prendre en charge par thérapie comportementale et cognitive (TCC) son trouble anxieux généralisé (TAG) et de revoir le problème du tabagisme ultérieurement. La patiente cesse spontanément et sans aide son tabagisme à la fin de la TCC, sans intervention tabacologique. Le CO dans l’air expiré est à 2 ppm et l’arrêt du tabac est confirmé à 6 mois. 1. Centre de tabacologie, centre hospitalier, 2, rue Haüy, 34500 Béziers. 2. Centre de tabacologie, clinique Lavalette, 34000 Montpellier. 3. Centre de tabacologie, hôpital AlbertChenevier, 94000 Créteil. Discussion Le critère 1 du DSM IV du TAG : au moins un souci durant six mois, un jour sur deux (travail, scolarité, santé…) est retenu (tableau). La prévalence du TAG est de l’ordre de 4 à 5,1 % de la population générale (5). Le TAG est plus fréquent chez les femmes (6,6 %) que chez les hommes (3,6 %). La comorbidité est fréquente avec parmi les diagnostics secondaires les plus fréquents : la phobie sociale, le trouble panique, la dysthymie et la phobie simple (5). Les résultats sur 400 fumeurs avec une dépendance physique élevée (Fagerström ≥ 6), objectivent des troubles anxieux et/ou dépressifs dans 34 % des cas. Chez ces fumeurs, la phobie sociale (PS) et l’anxiété généralisée (TAG) sont présentes environ une fois sur deux (7). Dans une enquête sur la prévalence sur un an du TAG portant sur 4 181 sujets, le risque relatif de dépendance à la nicotine a été retrouvé à 1,7 (IC 95 % : 0,8-3,7) (2). D’autres troubles anxieux sont fréquemment associés au tabagisme notamment la phobie sociale. Les liens entre PS et dépendance tabagique ont été démontrés dans une enquête portant sur 3 021 adolescents et jeunes adultes de 14 à 24 ans : à âge égal, dans le groupe phobie sociale, la dépendance tabagique est deux 75 Tableau. Trouble anxieux généralisé (TAG): DSM IV. 1. Au moins un souci durant les 6 mois, un jour sur deux (travail, scolarité, santé…). 2. Préoccupation difficile à contrôler. 3. Au moins trois symptômes sur la liste suivante : – agitation, surexcitation ; – fatigabilité ; – trouble de la concentration ; – irritabilité ; – tension musculaire ; – trouble du sommeil. 4. Souci non limité à des attaques de panique, une phobie sociale, ou des obsessions. 5. Souffrance, altération sociale ou professionnelle significative. 6. Le trouble n’est pas consécutif à un abus de substance, une affection médicale ou un trouble de l’humeur ou psychotique. fois plus fréquente que dans le groupe témoin. Avec un recul de quatre ans, l’existence initiale d’une PS multiplie par deux à trois le risque de devenir un fumeur régulier puis dépendant (9). Une étude récente a également mis en évidence les relations entre attaque de panique et tabagisme (10) : on observe une augmentation du risque d’apparition d’attaque de panique chez les fumeurs réguliers (OR : 2,9, IC 95 % : 1,08,4) et chez les fumeurs dépendants (OR : 3,6, IC 95 % : 1,2-10,5). Le TAG constitue ainsi une source de difficultés à l’arrêt du tabac et également de rechute. Il doit donc être traité par TCC, éventuellement associée à un inhibiteur de la recapture de la sérotonine (6) et à un traitement nicotinique, si la dépendance est importante. Dans notre observation, la dépendance était forte et avait été traitée initialement de façon optimale, et les difficultés du sevrage étaient liées au trouble anxieux. La TCC a été efficace sur le TAG permettant l’arrêt du tabac (4). G. Lagrue souligne les difficultés à l’arrêt du tabac chez les femmes par plusieurs facteurs : l’existence d’un trouble anxieux, notamment le TAG et/ou des états dépressifs, la prise de poids, l’aggravation prémenstruelle des troubles dépressifs (8)… Les tabacologues doivent apprendre à mieux diagnostiquer les troubles anxieux pour une meilleure prise en charge multidisciplinaire, notamment avec l’apport des TCC (4). i o t n a e r s Obbservv ation.. O Références bibliographiques 1. Bouvard M, Cottraux J. Protocoles et échelles d’évaluation en psychiatrie et en psychologie. Paris: Masson 2002:323. 2. Carter RM, Wittchen HU, Pfister H et al. One-year prevalence of subthreshold and threshold DSM-IV generalized anxiety disorder in a nationality representative sample. Depression and Anxiety 2001; 13:78-88. 3. Cottraux J. Les thérapies comportementales et cognitives. Ed Masson 2001:283. 4. Guichenez P, Clauzel I, Germaini G et al. Traitement d’une phobie sociale par thé- rapie comportementale et cognitive chez un tabagique. Press Med 2004 (sous presse). 5. Ladouceur R, Marchand A, Boisvert JM. Les troubles anxieux. Approche cognitive et comportementale. Paris: Masson 1999:213 p. 6. Lagrue G, Dupont P, Fakhfakh R. Troubles anxieux et dépressifs dans la dépendance tabagique. L’Encéphale 2002; XXVIII:343:374-7. 7. Lagrue G, Mautrait C, Béhar C et al. Phobie sociale et dépendance tabagique. Courrier de addictions 2003;3:110-11. 8. Lagrue G. Pourquoi l’arrêt du tabac est- il plus difficile chez la femme? Courrier des addictions 2004;6:51. 9. Sonntag H, Wittchen HU, Hofler M et al. Are social fears and DSM IV social anxiety disorder associated with smoking and nicotine dependance in adolescents and young adults. Eur Psy 2000;1:67-74. 10. Zvolensky MJ, Schmidt NB, McCreary BT. The impact of smoking on panic disorder: an initial investigation of a pathoplastic relationship. J Anxiety Disorder 2004;17:447-60. A bonnez-vous A bonnez-vous A bonnez-vous p. 82. e e L’entretien motivationnel : une nouvelle formation pour les médecins généralistes Brèv Brèv s è v r e B s èv es r B s Développé au début des années 1990 par William Miller et Stephen Rollnick, l’entretien motivationnel s’inscrit dans le cadre de thérapies à court terme de type cognitivo-comportementales (TCC). Approche globale de l’accompagnement au changement, à la fois technique relationnelle et philosophie du rôle du soignant, ce style psychothérapeutique s’appuie sur le modèle des 6 stades de changement par lesquels passent les patients, développé par deux autres psychologues, James Prochaska et Carlo DiClemente (indétermination, intention, préparation, action, consolidation, rechute ). Rappelons que l’entretien motivationnel a pour objectif d’impliquer les patients et de les rendre autonomes en faisant d’eux des acteurs à part entière de la mise en œuvre et du suivi de leur traitement, en les amenant à développer leurs propres raisons de changer. Les généralistes vont pouvoir bénéficier d’une formation intitulée : “L’entretien motivationnel : des mots, des motifs, une motivation”, mise sur pieds par les laboratoires Schering-Plough, en partenariat avec l’Association Confédérale pour la Formation Médicale (ACFM). Initié l’an passé par une trentaine de séminaires de formations de formateurs, le programme a démarré sur le terrain en décembre dernier. Désormais, il propose à tous les praticiens qui le désirent une journée d’initiation pratique avec des ateliers de travail en groupe restreint (une douzaine de participants), et une mise en application sous la forme de trois situations cliniques enregistrées en vidéo (consommation persistante de benzodiazépines ; demande de benzodiazépines ; demande d’arrêt prématuré de traitement de substitution). Renseignements : 01 41 06 36 38 (Schering-Plough). e Brèv s Le Courrier des addictions (7), n° 2, avril-mai-juin 2005 76 F.A.R.