Algèbres de Poisson
Kevin Quirin
Avec Pol Vanhaecke 1
Mai-Juin 2010
1. Professeur de Mathématiques à l’Université de Poitiers
Table des matières
1 Introduction 1
2 Définitions et premières propriétés 1
3 Crochets de Poisson en petite dimension 5
3.1 Casdeladimension1 .................................... 5
3.2 Casdeladimension2 .................................... 6
3.3 Casdeladimension3 .................................... 7
4 Crochets de Nambu-Poisson 10
5 Rang d’une structure de Poisson 12
5.1 Dénitions........................................... 12
5.2 Unexempledétude ..................................... 15
5.3 Propriétés........................................... 15
6 Crochets de Poisson polynomiaux 17
6.1 Lescrochetsconstants .................................... 18
6.2 Lescrochetslinéaires..................................... 18
6.3 Lescrochetsquadratiques .................................. 20
Annexes 23
A Récurrence de la proposition 4.3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
B Diagonalisation du crochet quadratique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
Références 25
1 Introduction
«Il ne semblait pas que cette importante théorie pût encore être perfectionnée,
lorsque les deux géomètres qui ont le plus contribué à la rendre complète en ont
fait de nouveau le sujet de leurs méditations. [. . .] Les recherches que je soumets
aujourd’hui à la classe, sont relatives à cette même théorie, que je reprends en entier sous
un nouveau point de vue. »
C’est suite à ces mots que Siméon Denis Poisson (1781 – 1840) introduisit en 1809 dans le Journal
de l’École Polytechnique sa célèbre parenthèse – devenue aujourd’hui crochet –, destinée à améliorer
la mécanique Lagrangienne. Cette découverte toucha des domaines aussi différents que la mécanique,
la physique quantique, la géométrie, l’algèbre, etc. Nous étudierons dans la suite les aspects plutôt
algébriques des crochets de Poisson, bien qu’ils soient des objets essentiellement géométriques.
2 Définitions et premières propriétés
On se placera toujours sur un espace vectoriel V=KnK=Rou C, et on notera F(V)soit
C(V, R), soit K[X1, . . . , Xn]( identifié aux fonctions polynomiales à nvariables sur K).
Définition 2.1 : Crochet de Poisson
On appelle crochet de Poisson sur Vtoute application ,·} :F(V)×F(V)F(V)vérifiant :
(i) ,·} est bilinéaire.
(ii) ,·} est antisymétrique, i.e. (f, g)F(V)2,{f, g}=−{g, f }.
(iii) ,·} est une bidérivation, i.e. vérifie l’identité de Leibniz en chacun de ses arguments :
(f, g, h)F(V)3,{fg, h}=f{g, h}+g{h, f}
{f, gh}={f, g}h+{f, h}g
(iv) ,·} vérifie l’identité de Jacobi :
(f, g, h)F(V)3,{f, {g, h}} +{h, {f, g}} +{g, {h, f}} = 0.
Remarque (i),(ii) et (iv) définissent un crochet de Lie sur F(V).
Exemples :
Le crochet défini par {f, g}= 0 est un crochet de Poisson.
Le crochet historique donné par Poisson était défini sur C(R2n)par
{F, G}=
n
X
i=1 F
qi
G
pi
F
pi
G
qi
(p1, . . . , pn, q1, . . . , qn)est un système de coordonnées linéaire sur R2n.
1
Définition 2.2 : Algèbre de Poisson
Soient Aun K-espace vectoriel, et ·et ,·} deux applications bilinéaires sur A×A.Aest une
algèbre de Poisson si :
(i) ·est associatif et commutatif.
(ii) ,·} est un crochet de Lie.
(iii) ·et ,·} sont liés par l’identité de Leibniz :
u, v, w A,{u·v, w}=u· {v, w}+{u, w} · v.
Remarque Soit Vun espace vectoriel. On note ·le produit usuel de deux fonctions, et ,·} un
crochet de Poisson sur V. Alors (F(V),·,,·})est une algèbre de Poisson.
Définition 2.3 : Casimir
On appellera casimir une fonction fvérifiant
gF(V),{f, g}= 0
et on notera Cas(V, ,·})l’ensemble des casimirs sur Vmuni du crochet de Poisson ,·} ( ou simple-
ment Cas(V)s’il n’y a pas d’ambiguïté ).
Remarque Cas(V, ,·})est une algèbre pour ,·} et pour ·.
Définition 2.4 : Dérivation hamiltonienne
Soit fF(V). On appellera dérivation hamiltonienne associée à fl’application
Xf:F(V)F(V)
g7−Xf[g] = {g, f}
et on notera Ham(V, ,·})l’espace vectoriel des dérivations hamiltoniennes.
Définition 2.5 : Dérivation hamiltonienne en un point
Soient fF(V)et mV. On appellera dérivation hamiltonienne associée à fen ml’application
Xm
f:F(V)K
g7−Xf[g](m) = {g, f}(m)
et on notera Hamm(V, ,·})l’espace vectoriel des dérivations hamiltoniennes en m.
Exemple Considérons une particule de masse mqui se déplace sur un axe. On repère la particule
par son abcisse q, et on note pson moment p=m˙q. Soit H(q, p)l’hamiltonien du système. Les
2
équations de la physique nous donnent
˙q=H
p
˙p=H
q
Soit (q, p)une solution du système. Soit Fune fonction dépendant de pet q, mais pas explicitement
du temps. Alors
dF
dt=F
q ˙q+F
p ˙p
=F
q
H
p F
p
H
q
={F, H}
{a, b}=a
q
b
p a
p
b
q .
Ainsi, la dérivation hamiltonienne XHest ici la dérivation par rapport au temps. On peut donc montrer
le théorème de Poisson :
Si fet gsont deux constantes du mouvement, alors {f, g}l’est aussi.
En effet
d{f, g}
dt={{f, g}, H}
={{f, H}, g} − {{g, H}f}par identité de Jacobi
= 0
Définition 2.6 : Dérivation
On appelle dérivation sur F(V)toute application linéaire α:F(V)F(V)vérifiant :
f, g F(V), α(fg) = fα(g) + gα(f).
On appelle k-dérivation toute application k-linéaire α:F(V)kF(V)qui est une dérivation en cha-
cune des coordonnées. On appellera bidérivation, tridérivation, etc. respectivement les 2-dérivations,
3-dérivations, etc. On travaillera souvent avec des k-dérivations antisymétriques, i.e.
f1, . . . , fkF(V),σSk, α(fσ(1), . . . , fσ(k)) = ε(σ)α(f1, . . . , fk).
Exemples :
La dérivée usuelle f7→ f0est une dérivation, car (f g)0=f0g+fg0.
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