DOULEUR
arrefour de la douleur est une rubrique ouverte à tous, qui vise à amé-
liorer la prise en charge de la douleur. Nous avons choisi ce mois-ci
de publier le témoignage d’une patiente. Ce témoignage exceptionnel
et fort illustre les difficultés que rencontrent encore nos patients dans la prise en
charge de leur douleur. S. Perrot
T
émoignage sur la douleur
La Lettre du Rhumatologue - n° 249 - février 1999
une “extraterrestre” ; mais c’est, à mon sens,
la seule chose dont j’ai souffert moralement.
On ne peut pas parler
d’une douleur mais des douleurs
En revanche, la douleur physique a rythmé
toute mon enfance, mon adolescence, et conti-
nue de rythmer quotidiennement ma vie
d’adulte ; là encore, je ne parlerai pas d’une
douleur, mais des douleurs : en effet, j’ai
appris, au long de toutes ces années, à diffé-
rencier les douleurs simplement articulaires de
celles liées à une poussée inflammatoire ou à
une inflammation locale, ou encore celles pro-
voquées par un excès de fatigue. Je dois dire,
avec regret, que, d’une manière générale, je
trouve que la douleur est très mal prise en
charge par les rhumatologues, non seulement
chez les adultes, mais plus encore chez les
enfants.
Ainsi, en ce qui me concerne, ce n’est qu’en 1993
que ma rhumatologue m’a prescrit pour la pre-
mière fois un antalgique contenant des opiacés
afin de calmer des douleurs liées à une poussée
inflammatoire. Pourtant ma maladie a été parti-
culièrement active et sévère pendant toute mon
enfance et mon adolescence, et je pense que de
tels antalgiques m’auraient sûrement aidée à
mieux supporter mes douleurs, en réduisant,
notamment, la fatigue qu’engendre la douleur. Il
faut savoir que la douleur est quelque chose d’ex-
trêmement fatigant à vivre, car on lutte instincti-
vement contre elle, tant sur le plan physique que
moral.
J’ai finalement appris à vivre avec
mes douleurs
Sur le plan physique, on cherche continuelle-
ment une position qui soulage ou qui soit, au
moins, la moins douloureuse possible, mais
lorsqu’on finit par en trouver une, les rhuma-
tologues la qualifient généralement du doux
nom d’attitude “vicieuse” et nous la décon-
seillent, en disant qu’elle va engendrer (ou
accentuer) des blocages et des limitations !
Quant aux traitements qui m’ont été et me sont
encore prescrits pour lutter contre la douleur, je
les trouve relativement inefficaces, notamment
La douleur a toujours fait partie
de ma vie
J’ai 30 ans, et je suis atteinte d’une forme sys-
témique d’arthrite chronique juvénile (ACJ)
qui a débuté lorsque j’avais 8 mois. Je n’ai donc
aucun souvenir de ce que ma vie était “avant”
l’apparition de cette maladie, tout comme je
n’ai aucun souvenir de ce qu’a pu être ma vie
sans douleur. La douleur a toujours fait partie
de ma vie, de la même façon que ma polyar-
thrite, et j’ai donc appris à vivre avec de la
même façon que j’ai appris à vivre avec deux
jambes ou deux bras.
En fait, ce n’est que depuis très peu de temps
que je commence à découvrir ce que peut être
la vie avec moins de douleurs. En effet, ma
maladie a été particulièrement sévère depuis
son début jusqu’à ma dernière poussée inflam-
matoire, qui date de 1993-94. Ce n’est que
depuis la fin de cette poussée, soit depuis 2-3
ans environ, que je découvre ce que peut être
une vie avec moins de douleurs. Je n’irai pas
jusqu’à dire que je ne souffre plus du tout, car
il reste toujours les douleurs articulaires,
séquelles de mes articulations détruites, mais
ces douleurs-là sont plus faciles à “gérer”, car
il me suffit de respecter certaines règles d’hy-
giène de vie pour les contrôler, plus ou moins
facilement. J’ai ainsi constaté que ces douleurs
articulaires sont extrêmement sensibles à la
fatigue, et si je ne prends pas garde à ne pas
dépasser un certain seuil de fatigue, toutes mes
articulations deviennent très douloureuses en
l’espace d’un quart d’heure-vingt minutes... au
point d’avoir parfois du mal à me déshabiller
le soir pour aller me coucher ! Et curieusement,
malgré mes années d’expérience en la matière,
la rapidité avec laquelle ces douleurs appa-
raissent continue de me surprendre. J’ai aussi
appris à différencier les douleurs, ce qui me
permet en partie de prévenir l’apparition de cer-
taines d’entre elles. Je crois en effet qu’en rhu-
matologie, on ne peut pas parler de LA dou-
leur, sauf d’une manière très générale, car il y
a plusieurs sortes de douleurs, que ce soit sur
le plan physique ou sur le plan moral.
Je regrette de ne pas avoir
rencontré plus tôt des enfants
souffrant comme moi
Personnellement, je n’aborderai essentielle-
ment que l’aspect physique de la douleur, car
je ne considère pas avoir une expérience suffi-
sante de la douleur “morale” : ma maladie,
ayant débuté très tôt, m’a appris à faire les
choses différemment (par rapport aux autres),
mais j’ai appris à le faire en même temps que
j’apprenais à marcher, à parler ou à lire, et je
ne considère pas que j’en ai souffert. La seule
chose dont je pense avoir souffert, et qui m’a
vraiment manqué, c’est de ne pas avoir pu ren-
contrer d’autres personnes, d’autres enfants
notamment, atteintes de cette maladie avant les
1er États généraux de la polyarthrite, en 1991;
j’avais alors 24 ans, et le fait de découvrir que
je n’étais pas la seule à souffrir de cette mala-
die, étrange et assez inhabituelle chez les
enfants, m’a rassuré et redonné confiance ; jus-
qu’à cette époque, je me sentais un peu comme
C
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DOULEUR
lorsque ces douleurs sont d’origine inflamma-
toire. En ce qui me concerne, j’ai finalement
appris à vivre avec mes douleurs : je me suis
défini un seuil au-delà duquel la douleur
empêche toute activité, mais en dessous de ce
seuil, je fais mon possible pour continuer à vivre
aussi normalement que possible. Je me
demande si cela ne risque pas d’être dangereux,
à long terme, car j’ai tendance à repousser régu-
lièrement ce seuil, et à attendre, parfois un peu
trop, que ma douleur disparaisse. Par exemple,
en agissant ainsi, il y a deux ans environ, j’ai
attendu tout un dimanche qu’une douleur tenace
qui avait débuté le matin au réveil disparaisse...
et ce n’est qu’en fin d’après-midi que, n’y
tenant plus, j’ai demandé à ma mère de m’em-
mener aux urgences... On m’a alors appris que
c’était une crise de colique néphrétique.
Lutter contre la douleur mobilise
tout le corps et tout l’esprit
Ce que je souhaite souligner en disant cela,
c’est qu’à force de vivre avec la douleur, on
s’endurcit, on prend sur soi, on attend toujours
un peu plus que cela “passe tout seul”, mais en
même temps, on est moins efficace, car on lutte
contre la douleur, et cela mobilise parfois tout
notre corps et tout notre esprit. Je ne comprends
pas pourquoi les malades atteints de rhuma-
tismes ne sont pas plus souvent dirigés vers des
consultations de la douleur, et pourquoi la dou-
leur est si mal traitée en rhumatologie. Je sais,
pour avoir fait un séjour en chirurgie orthopé-
dique, qu’il existe des moyens de traiter et de
prévenir la douleur, sans “abrutir” pour autant
le patient. Il y a deux ans, je me suis fracturé
les deux fémurs lors d’une chute accidentelle,
et j’ai été orientée vers un service d’orthopé-
die. Dès mon arrivée, la douleur a été traitée
en priorité : on m’a mise sous morphine jus-
qu’à ce que je sois opérée, puis pendant les 24
heures qui ont suivi l’intervention. Et je dois
dire que je ne garde aucun souvenir d’une quel-
conque douleur. À tel point que je répétais à
qui voulait l’entendre, au lendemain de mon
intervention, que si je m’étais écoutée, je me
serais levée ! Or, si les chirurgiens sont
capables de prévenir et de traiter aussi bien la
douleur, je pense que les rhumatologues doi-
vent l’être aussi. Il faut peut-être simplement
qu’ils reconsidèrent ce facteur en y accordant
plus d’importance, car c’est cela qui rythme
chaque minute de la vie du patient.
Exprimer une douleur
n’est pas facile
Enfin, je souhaite dire une dernière chose : je
sais que dans l’ensemble, nous, les malades,
n’aimons pas nous étendre sur notre douleur,
et du coup, on n’en parle peut-être pas assez
au rhumatologue qui nous suit... En général,
on dit “j’ai mal”, ce qui, pour un rhumatologue,
n’est pas toujours très explicite. Parler de la
douleur n’est pas facile : il faut prendre le
temps de l’analyser, de trouver les mots
capables de la décrire, et il faut arriver à faire
comprendre au médecin ce que l’on ressent,
alors que l’on n’est pas toujours capable soi-
même de mettre des mots sur ce que l’on
éprouve. Ce n’est donc qu’en en parlant assez
longuement avec nous, les patients, lors des
consultations, que vous, rhumatologues, arri-
verez peut-être à mieux nous soulager.
La Lettre du Rhumatologue - n° 249 - février 1999
Muriel S. aidée de Claire A.
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DOULEUR ET FMC :
DEUX PRIORITÉS HISTORIQUES DES LABORATOIRES UPSA
Avec un engagement historique dans la prise en charge de la douleur et la Recherche dans le domai-
ne
de l’antalgie,les Laboratoires UPSA préfiguraient,avant l’heure,le thème de la douleur.Ce thème
est aujourd’hui retenu comme prioritaire dans le cadre de la FMC et comme campagne d’intérêt
général par les pouvoirs publics,avec la mise en place d’un plan contre la douleur sur trois ans.
Avec l’aspirine, le paracétamol et la morphine, les Laboratoires UPSA proposent une gamme
complète,avec des formes galéniques adaptées,de produits dédiés à la prise en charge de la douleur,
quels que soient son intensité et l’âge des patients qui souffrent.
À cet égard,les Laboratoires UPSA ont acquis dans ce domaine une véritable expertise,dont ils ont,
depuis toujours,voulu faire bénéficier l’ensemble des professionnels de santé.
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