COMPTE RENDU DE CONGRÈS
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La Lettre du Pneumologue - n° 2 - décembre 1998
Mille deux cents congressistes, (presque) tous dans les salles
de conférence, plus de quarante pays représentés ! Le congrès
Interasma a été un succès, dû certainement, en partie, à Marra-
kech, mais surtout à la personnalité des organisateurs et au
programme scientifique. L’asthme et l’allergie sont de grands
sujets d’actualité. Les connaissances progressent. Les médica-
ments sont plus efficaces. La prise en charge laisse, certes,
encore à désirer, mais les efforts pour remédier à cet état de
fait sont notables.
Nous rapportons ici quelques morceaux choisis d’un congrès
très dense, qui a duré trois jours.
PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ASTHME
L’asthme est un syndrome complexe. Il est illusoire de vouloir
synthétiser sa physiopathologie en quelques lignes. La présen-
tation formelle faite à Marrakech s’est focalisée sur quelques
aspects de l’obstruction bronchique. L’objectif était de mettre
en évidence les principaux sujets d’actualité.
L’obstruction bronchique
Elle est variable et réversible. Cette réversibilité est induite,
d’une part, par les bronchodilatateurs (β-adrénergiques essen-
tiellement), d’autre part, par les anti-inflammatoires (les corti-
costéroïdes principalement). Toutefois, l’asthme est aussi
caractérisé par sa chronicité, et l’on insiste actuellement, à
juste titre, sur le remodelage des voies aériennes.
La cellule musculaire lisse pourrait aujourd’hui servir de fil
conducteur à la description de la physiopathologie de l’asthme.
C’est une cellule contractile (responsable en grande partie du
bronchospasme), mais c’est également une cellule pro-inflam-
matoire. Son rôle à cet égard devra être précisé au cours des
prochaines années. La cellule musculaire lisse bronchique joue
enfin un rôle fondamental dans le remodelage bronchique
(hyperplasie et hypertrophie).
L’asthme peut être considéré comme une bronchite chronique
desquamative à éosinophiles. Cela signifie que les cellules épi-
théliales bronchiques sont impliquées. Certes, du fait de la des-
quamation, elles perdent leur effet de barrière, de protection.
Cependant, elles ont certainement un rôle actif, car elles sécrè-
tent des médiateurs pro-inflammatoires, et expriment des
molécules d’adhésion.
Les éosinophiles sont connus de longue date et demeurent au
centre de la physiopathologie. On ne pourra toutefois mieux
préciser leur place que lorsque les résultats des travaux cli-
niques sur les anti-IL5 seront connus.
La découverte des leucotriènes a valu le prix Nobel à
B. Samuelsson. Des médicaments antagonistes des récepteurs
sont désormais disponibles dans de nombreux pays. Les
preuves démontrant leur efficacité dans l’asthme sont mul-
tiples. Cependant, leur place dans la stratégie thérapeutique
reste à déterminer. De récents travaux se sont intéressés à la
5-lipoxygénase et à la FLAP (protéine qui active cette enzy-
me). Leur localisation nucléaire permet d’envisager d’autres
actions pour les leucotriènes, au niveau de la machinerie cellu-
laire elle-même (Peters-Golden M. Molecular mechanisms
of leukotriene synthesis : the changing paradigm. Clin Exp
Allergy 1998 ; 28 : 1959-65).
Le gène codant pour le récepteur ß-adrénergique a été cloné en
1987. Toutefois, on sait aujourd’hui qu’il existe un polymor-
phisme de ce gène. Certaines mutations pourraient expliquer la
tachyphylaxie observée lors de l’utilisation prolongée des ß2-
mimétiques. Ce polymorphisme pourrait être associé à cer-
Interasma à Marrakech*
8-11 octobre 1998
* Congrès annuel couplé avec le VI
e
Congrès de la Société Marocaine
d’Allergie et d’Immunologie Clinique (SMAIC).
Cellule épithéliale bronchique.
taines formes d’asthme plus sévères. Il n’est pas interdit
d’envisager une aide diagnostique et thérapeutique à ce niveau
dans les prochaines années.
De récents travaux ont mis en évidence une activation des cel-
lules souches hématopoïétiques au niveau de la moelle osseuse.
Ces expérimentations ont été conduites chez le chien sensibilisé
(Ascaris). Il est clair qu’aucune donnée n’est disponible chez
l’homme. Toutefois, là encore, il y a une voie de recherche
intéressante, en particulier dans le domaine thérapeutique.
Les molécules d’adhésion
(W. Canonica)
L’inflammation d’origine allergique est la conséquence de
phénomènes cellulaires et biochimiques complexes. Les cel-
lules sanguines sont recrutées dans les voies aériennes. Dans
un premier temps, les cellules “roulent” dans le flux sanguin,
puis elles adhèrent au niveau de l’endothélium vasculaire.
Les molécules d’adhésion sont exprimées au niveau des cel-
lules endothéliales, mais aussi épithéliales (des muqueuses
nasale, oculaire et bronchique).
La régulation de ces molécules d’adhésion est complexe.
W. Canonica a choisi d’insister sur les fibroblastes pulmo-
naires en tant que cellules intervenant dans cette régulation (ils
expriment en effet des récepteurs pour l’IL4 et l’IL13), car ils
jouent probablement un rôle majeur dans les phénomènes de
remodeling.
Le couple CD40-CD40L paraît important dans la régulation de
l’adhésion cellulaire. CD40 est exprimé sur de nombreuses
cellules et induit une up-regulation de VCAM-1 et ICAM-1.
CD40 pourrait avoir un effet anti-apoptotique.
ICAM-1 est une molécule d’adhésion exprimée au niveau des
cellules épithéliales de l’œil, du nez et des bronches. L’exposi-
tion naturelle à l’allergène induit une augmentation de
l’expression d’ICAM-1 sur les cellules épithéliales.
Il est en effet le récepteur du rhinovirus, ce qui entraînerait une
augmentation de la susceptibilité à ces infections virales.
W. Canonica suggère donc de traiter les malades même quand
ils sont asymptomatiques. L’effet des drogues, en particulier
les antihistaminiques, sur l’expression d’ICAM-1 a fait l’objet
de nombreux travaux. La cétirizine ne modifie pas la réponse
immune, mais diminue l’expression d’ICAM-1 au niveau des
cellules épithéliales. La désensibilisation par voie sublinguale
est efficace sur le plan clinique (W. Canonica, The Lancet,
1998) et entraîne une down-regulation d’ICAM-1.
La souris SCID : un modèle animal original et validé
(A.B. Tonnel)
A.B. Tonnel a présenté le modèle de souris SCID comme un
modèle expérimental d’asthme. Les modèles animaux d’asthme
sont critiquables d’une façon générale, mais la souris SCID est
plus intéressante car les cellules humaines peuvent être utili-
sées. Ces animaux tolèrent également les greffes de tissus
humains. Les lymphocytes humains peuvent survivre et migrer
au niveau des organes cibles.
Étude de la réponse IgE
Des cellules humaines de sujets sensibilisés aux acariens ont
été administrées par voie intrapéritonéale (i.p.) à des souris
SCID. Cela permet d’obtenir des IgE sériques spécifiques des
acariens. Une infiltration cellulaire (cellules de type Th2) a été
mise en évidence dans les voies aériennes après administration
de l’allergène par aérosol. Des éosinophiles sont également
présents. Ces souris développent une hyperréactivité à l’hista-
mine. Ce modèle animal est donc validé.
Étude de la réaction tuberculinique
Des souris SCID ont été greffées avec de la peau humaine,
puis des PBMC (cellules mononucléées du sang périphérique)
autologues ont été injectées par voie i.p. L’objectif était
d’explorer la réaction tuberculinique. Il a été mis en évidence
des T lymphocytes (CD45, CD4, CD8) et une augmentation
des marqueurs d’activation (HLA DR, CD25). Il n’y avait pas
d’éosinophiles. Par hybridation in situ, des cellules IFNγ+ et
IL2 + ont été mises en évidence, mais aucune cellule IL4+ ou
IL5+.
Ces observations sont comparables à celles faites chez
l’homme. Ce modèle animal devrait permettre l’exploration de
nouveaux mécanismes et de nouvelles drogues. Il y a cepen-
dant quelques limites à l’exploration de la réaction allergique :
la réponse éosinophilique est faible.
Cellules dendritiques
(R. Pauwells)
La physiopathologie de l’asthme peut être présentée de la
manière dynamique suivante : sensibilisation, puis inflamma-
tion, puis remodeling et (donc) HRB. Les symptômes cliniques
sont la conséquence de cet enchaînement en cascade.
D’un point de vue morphologique, les cellules dendritiques ont
de larges extensions cytoplasmiques. Elles dérivent de la moelle
osseuse et migrent vers l’organe cible. Après avoir séjourné à
ce niveau, elles migrent à nouveau, vers les ganglions lympha-
tiques régionaux. C’est là qu’elles agissent comme cellules
présentatrices de l’antigène. Chez l’animal ainsi que chez
l’homme, on trouve des cellules dendritiques dans les voies
aériennes.
Les récepteurs des cellules dendritiques sont nombreux et per-
mettent successivement l’ingestion, la digestion puis la présen-
tation de l’antigène aux lymphocytes. Les molécules B7-1 et
B7-2 permettent l’adhésion des cellules dendritiques aux lym-
phocytes et donc une augmentation de l’interaction cellulaire.
Des cellules dendritiques ont été obtenues à partir de la moelle
osseuse, puis injectées dans les voies aériennes d’animaux sen-
sibilisés à l’ovalbumine. L’administration subséquente d’oval-
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Une inflammation minimale persiste chez les patients asymp-
tomatiques. ICAM-1 pourrait expliquer ce phénomène. De ce point de vue, les cellules dendritiques jouent donc un
rôle de premier plan. Elles interviennent bien évidemment
au niveau de la sensibilisation, mais aussi à celui du main-
tien de la chronicité de l’inflammation.
bumine par aérosol a entraîné une inflammation des voies
aériennes (ce qui n’est pas observé chez des animaux traités
avec des macrophages au lieu de cellules dendritiques).
L’infiltrat inflammatoire est constitué de T lymphocytes. Il y a
également des éosinophiles. Ce phénomène est dose-dépen-
dant. L’analyse des ganglions lymphatiques péribronchiolaires
permet d’affirmer que c’est à ce niveau que se font la présenta-
tion de l’antigène et l’activation lymphocytaire.
Il est également possible que les cellules dendritiques présen-
tent l’antigène de manière continue aux cellules lymphocy-
taires, entretenant ainsi une inflammation chronique.
Pour prouver cette hypothèse, une expérimentation a été
conduite avec des souris transgéniques. Celles-ci ont été traitées
avec du ganciclovir pour détruire les cellules dendritiques. Une
disparition de l’inflammation des voies aériennes a été obser-
vée. La réponse IgE à l’ovabulmine a également été abolie.
Chez l’homme, qu’en est-il ? Le nombre de cellules dendri-
tiques est augmenté dans le nez et les bronches proximales de
l’asthmatique allergique. L’exposition aux polluants entraîne
un recrutement local des cellules dendritiques. Les corticoïdes
inhalés diminuent ce nombre.
Comment évaluer l’inflammation des voies aériennes chez
l’asthmatique ?
(M. Vignola)
Tout d’abord, est-il nécessaire de l’évaluer ? La réponse est
certainement positive, car l’asthme est une maladie inflamma-
toire et les malades sont sous-traités. Les moyens habituels de
surveillance, tel le DEP, sont en outre probablement insuffi-
sants pour un suivi optimal de certains malades (M. Vignola a
rappelé à cette occasion l’observation d’un jeune garçon décé-
dé brutalement d’un asthme suraigu, alors même que le DEP
était stable).
Les recommandations internationales insistent sur la nécessité
de valider des marqueurs de l’inflammation. Un marqueur
idéal doit remplir plusieurs conditions : être spécifique de la
maladie, être augmenté en fonction de la sévérité des symp-
tômes, diminuer spontanément ou sous l’effet du traitement
lors de l’amélioration. L’endoscopie bronchique a permis de
quantifier cette inflammation et de la corréler à certains phéno-
types, en particulier la sévérité de l’asthme. Toutefois, dans
l’immense majorité des cas, cet examen n’est pas utile et reste
un outil de recherche. Un marqueur sérique, urinaire ou dans
l’air expiré (NO, CO) reste à valider.
L’ECP (protéine cationique de l’éosinophile) sérique a été
amplement étudiée et satisfait à de nombreux critères :
– elle est libérée par les cellules inflammatoires ; on la trouve
dans les biopsies bronchiques ;
– sa mesure est sensible et spécifique ;
– elle est augmentée après test de provocation allergénique et
durant la saison pollinique ;
– elle-même et les symptômes sont corrélés dans l’asthme
chronique ;
– elle est diminuée par les traitements anti-inflammatoires.
L’ECP est donc un marqueur intéressant, mais les taux sériques
sont très variables, ce qui entraîne des “overlap” importants et
rend son utilisation peu fiable en pratique clinique. En outre, il
n’y a pas de corrélation entre les taux sériques d’ECP et la
sévérité des exacerbations. Leur suivi régulier ne permet pas
non plus de prévoir la survenue d’une exacerbation
Conclusion
Nous avons besoin de marqueurs, mais aucun n’est actuelle-
ment disponible.
Question posée : peut-on se contenter des symptômes pour
affirmer que le contrôle de l’asthme est satisfaisant ?
La réponse n’a pas été positive, sans toutefois être formelle. Il
existe en effet dans la littérature une étude qui montre la per-
sistance d’une inflammation bronchique à éosinophiles malgré
le traitement par corticoïdes inhalés et un bon contrôle de
l’asthme. Une discussion s’est engagée concernant l’intérêt ou
non de la mesure de l’HRB.
RECOMMANDATIONS POUR L’ASTHME
(R. Pauwels)
L’objectif des recommandations internationales est d’assister
le médecin généraliste et les pouvoirs publics dans leur prise
de décision.
Plusieurs recommandations ont été publiées (OMS, British
Thoracic Society et États-Unis) :
– les définitions du contrôle de l’asthme sont comparables ;
– les niveaux de sévérité sont différents (4 à 5 niveaux selon
les cas) ;
– les recommandations thérapeutiques sont assez proches dans
tous les documents ;
– les antileucotriènes sont proposés dans l’asthme persistant
léger comme alternative aux traitements habituels, et non en
première intention, car les auteurs estiment que le niveau de
preuve suffisant n’est pas encore atteint ;
– les Britanniques, contrairement aux autres, recommandent de
commencer par un traitement d’attaque, puis de diminuer les
doses en fonction du niveau de contrôle obtenu.
Une étude publiée par van der Mole (American Journal Respi-
ratory Clinical Care Medicine 1998 ; 158 : 121-5) démontre
qu’il n’y a pas de différence entre ces deux attitudes. Les
malades inclus dans l’essai avaient un asthme persistant léger.
Cette observation doit cependant être relativisée et ne
“condamne” pas les traitements d’attaque.
Le prix des ß2 à longue durée d’action est élevé et peut consti-
tuer un obstacle au traitement de longue durée dans certains
pays. A. Bennis s’est donc interrogé à ce sujet, proposant
d’inclure dans les recommandations la possibilité d’utiliser de
manière régulière les ß2-mimétiques classiques. La réponse de
R. Pauwells a été négative, arguant des études déjà menées sur
ce sujet et utilisant l’argument de la compliance.
Observance thérapeutique
(G. Rossi)
Elle est très mauvaise chez les asthmatiques. Les raisons en
sont probablement multiples : la relation médecin-malade est
mauvaise ; bien souvent, les malades ne veulent pas suivre leur
traitement car ils n’en perçoivent pas l’efficacité ; ils pensent
que le traitement sera moins efficace plus tard, préfèrent les
médecines douces, ou ont peur des effets secondaires ; enfin,
ils peuvent avoir des problèmes financiers.
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La Lettre du Pneumologue - n° 2 - décembre 1998
Cependant, d’autres raisons peuvent expliquer la mauvaise
observance :
– la difficulté d’utiliser les aérosols doseurs ;
– la prescription quatre fois par jour : il est possible que le
nombre de prises soit important. Toutefois, les preuves sont
peu nombreuses ;
– la voie d’administration. La voie orale améliore-t-elle
l’observance ? Probablement oui.
Lecture recommandée :
Cochrane. Comment mesurer l’observance ? ERR 1998 ; 8 :
239-42.
Asthme professionnel (AP)
C’est un bon modèle pour mieux comprendre l’étiopathogénie.
Il s’agit toujours d’un asthme extrinsèque, puisque l’agent res-
ponsable est par définition dans l’environnement. Toutes les
étapes physiopathologiques peuvent être parfaitement identi-
fiées et donc analysées : allergène (ou agent déclenchant), sen-
sibilisation, inflammation, HRB et symptômes.
L’AP permet également de valider certaines procédures pour
le suivi : DEP, HRB, par exemple.
Un autre exemple de l’intérêt de l’AP en tant que modèle est
fourni par l’éviction du facteur déclenchant. Que se passe-t-il ?
Il est intéressant d’observer que l’inflammation peut persister ;
il en est de même pour le remodeling des voies aériennes, qui
peut être important. L’AP persistant ressemble à un asthme
intrinsèque.
L’atopie est un facteur de risque pour l’AP, mais un facteur
inconstant. L’HRB n’est pas un facteur de risque, mais une consé-
quence de l’AP. Ces notions de facteurs de risque sont impor-
tantes pour une éventuelle sélection médicale à l’embauche.
Épidémiologie et facteurs de risque
(D. Gautrin)
L’incidence estimée de l’AP selon différents documents éma-
nant de plusieurs pays est d’environ 15 par million d’habitants
et par an. Les résultats sont en fait très variables, car les
méthodes d’étude étaient très différentes. Quoi qu’il en soit,
l’augmentation des cas d’AP semble importante : plus 70 %
entre 1986 et 1993.
Les facteurs de risque sont assez nombreux. D. Gautrin a insisté
sur plusieurs d’entre eux :
– tout d’abord, l’exposition au risque : c’est évidemment le
plus important, même si cette affirmation ressemble à une
vérité de La Palice ;
– l’atopie est probablement un élément important, mais sa
valeur prédictive positive reste faible ;
– l’HRB n’est pas un facteur prédisposant ; cependant, cela
semble discuté ;
– le tabagisme est un facteur de risque, mais son importance
dépend du type d’AP considéré, en particulier pour les travaux
exposant aux sels de platine, TCPA, crabe (industrie alimen-
taire).
Diagnostic et méthodes utilisées en épidémiologie
– Des questionnaires ont été validés. Ils paraissent être très
sensibles, mais peu spécifiques.
– Il est important, en épidémiologie, d’effectuer des tests cuta-
nés pour évaluer l’atopie.
– Le suivi du DEP n’est pas forcément idéal pour le diagnos-
tic, car l’observance des sujets n’est pas très bonne. La mesure
de l’HRB est peut-être plus intéressante.
Prévention de l’allergie professionnelle
(L. Fabbri)
La prévention de l’exposition est la mesure la plus importante.
Le traitement de l’AP est le même que celui de l’asthme habi-
tuel. Toutefois, plus l’intervention (éviction et corticoïdes
inhalés) est précoce, plus elle a de chances d’être pleinement
efficace.
Il est possible que, dans un avenir proche, des marqueurs géné-
tiques soient disponibles pour le diagnostic, voire le dépistage.
La présentation de l’antigène est régulée au niveau du chromo-
some 6. Un polymorphisme pourrait exister à ce niveau, et sa
mise en évidence pourrait être un élément important de la stra-
tégie de prévention. Toutefois la route est encore longue avant
d’en arriver là. L. Fabbri a en effet conduit une étude dans ce
sens pour l’AP aux isocyanates. Un locus du complexe majeur
d’histocompatibilité serait un facteur de risque, mais les odds-
ratios sont encore faibles.
L’allergie au latex chez le personnel de santé
(A. Aichane)
La prévalence est de 3 % en Finlande, de 7 % aux États-Unis,
mais elle augmente et atteint 12 % dans certaines études. L’âge
des malades est en moyenne de 30 ans. Les femmes sont plus
souvent concernées. La dermatite atopique serait un facteur de
risque, mais pas l’asthme ni la rhinite. Les infirmières du bloc
opératoire sont les plus concernées.
Le diagnostic est en général facile et fondé sur l’interrogatoire.
Les tests cutanés sont fiables. La présence d’IgE spécifique est
cependant moins sensible. Les tests de provocation peuvent
être dangereux.
Il existe une allergie croisée avec la banane, l’avocat, les
carottes, le céleri, le kiwi, le melon ; à Casablanca, 28 % des
membres du personnel de santé allergiques au latex ont une
allergie alimentaire.
Il existe une période de latence entre le début de l’exposition
au latex et le début des symptômes : 5 ans pour 75 % des
sujets. L’urticaire est la première manifestation.
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La Lettre du Pneumologue - n° 2 - décembre 1998
Les sujets à risque sont le personnel de santé, les travailleurs
de l’industrie du latex, les sujets subissant des opérations mul-
tiples, présentant une atopie ou ayant un contact fréquent avec
des gants en latex.
Des produits utiles sans latex existent (comme alternative),
mais ils sont très chers. Il est clair que les hôpitaux ne peuvent
exclure complètement le latex.
Un dosage des protéines de latex dans l’air ambiant a été réa-
lisé dans trente-deux hôpitaux différents. Une concentration
supérieure ou égale à 0,6 ng/m3était associée à une plus grande
fréquence des symptômes et à des taux d’IgE spécifiques plus
élevés. Il s’agit donc du seuil critique.
Prévention primaire :
– l’idéal est d’éviter toute exposition ;
– les atopiques devraient éviter le latex de manière absolue. Il
est cependant difficile de formuler des recommandations pour
une éventuelle sélection à l’embauche. Au minimum, ils
devraient éviter les gants en latex.
Prévention secondaire :
– pas de latex,
– pas de gants poudrés,
– faire des tests cutanés à la recherche d’une sensibilisation à
d’autres pneumallergènes,
– éviter tout air contaminé par du latex,
– recommander au malade de porter sur lui une carte d’aller-
gique, et d’avoir une trousse d’urgence.
POLLUTION
La pollution est un sujet d’actualité, mais aussi l’objet de
controverses, du fait de son importante médiatisation. Il y a
probablement un défaut de compréhension car les politiques et
les journalistes n’ont pas obligatoirement les mêmes objectifs
et certainement pas le même langage. Par ailleurs, les méde-
cins, les spécialistes (pneumologues, pédiatres) et les généra-
listes, connaissent mal le problème. Une enquête réalisée par
D. Charpin le montre très bien.
Les fumées de diesel : étude expérimentale
Un modèle expérimental de provocation a été présenté par
M. Salvi (Grande-Bretagne), qui a essayé de reproduire une
exposition aux fumées de diesel :
– dans le sang périphérique, il a observé une augmentation des
neutrophiles et des plaquettes ;
– il a retrouvé, dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire,
une augmentation des neutrophiles (trois fois la normale), du
nombre des macrophages alvéolaires, des cellules de type B
lymphocytes, ainsi que de l’histamine et de la fibronectine ;
– les biopsies bronchiques ont permis de quantifier cette
inflammation : augmentation des neutrophiles (quatre à cinq
fois la normale), des lymphocytes et des mastocytes. Les molé-
cules d’adhésion (ICAM-1) au niveau vasculaire sont “up-
régulées”. Il a également observé une augmentation très signi-
ficative de l’IL8.
Il a montré, par ailleurs, que l’exposition aux fumées de diesel
favorise la synthèse locale des IgE.
L’approche épidémiologique
(E. von Mutius)
Elle donne davantage de renseignements que l’approche expé-
rimentale. Un grand nombre de sujets peuvent être étudiés.
L’enquêteur a le choix des endroits où il va effectuer son tra-
vail, de telle sorte qu’il pourra comparer des villes ou des
régions polluées à des villes non polluées. La comparaison des
deux Allemagne a été, à cet égard, très riche en enseignements.
Les taux de pollution sont en effet très différents.
Une première étude a été conduite chez des enfants. Ceux qui
vivaient dans une région très polluée avaient moins d’asthme
et de rhume des foins que ceux qui vivaient dans une ville net-
tement moins polluée. En revanche, la prévalence des signes
de bronchite chronique était inversée. L’atopie, évaluée par les
tests cutanés, était plus fréquente en Allemagne de l’Ouest.
D’autres études comparant des populations vivant à Hambourg
et Erfurt donnent des résultats qui vont dans le même sens.
Cependant, des critiques ont été émises au sujet de ces études.
En effet, la pollution n’est peut-être pas le seul facteur en cause.
Le mode de vie ou les habitudes alimentaires pourraient être
différents. Un travail réalisé en Suisse a évalué l’effet de
l’exposition prolongée à différents polluants mesurés dans
l’atmosphère. Aucun d’eux n’était un facteur de risque (odds-
ratio proche de 1) pour les symptômes de l’asthme. Toutefois,
si l’on considérait les symptômes de toux et d’autres symp-
tômes de ce type, les odds-ratios étaient supérieurs à 2. Cela
permet plutôt de conclure que les polluants agissent comme des
irritants.
Aux États-Unis, il a été montré qu’il existe une relation entre
la dose de polluants présents et les symptômes de bronchite
chronique.
Une étude a montré que l’exposition massive aux polluants issus
du trafic automobile pourrait avoir un effet. Les femmes étaient
plus sensibles, mais les variations dans les résultats étaient
importantes, ce qui limitait l’intérêt de ce travail. Une autre
étude a donc été menée à Munich, où le trafic peut être connu
parfaitement : celui-ci n’avait aucun effet sur les symptômes
d’asthme ou de rhinite pollinique. Il a cependant été observé un
effet négatif (mais modéré) sur le DEP. Dans une autre étude, le
fait de vivre près d’une autoroute qui suppportait un trafic dense
de camions entraînait une chute du VEMS de 4 % environ.
En revanche, il est bien connu que la pollution peut entraîner
des exacerbations de l’asthme. Il a été observé une augmenta-
tion de 32 % des admissions en urgence pour asthme.
Pour en savoir plus...
Rev fr Allergol Immunol Clin 1998 ; 38 (7S) : S1-S280.
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La Lettre du Pneumologue - n° 2 - décembre 1998
En conclusion, la pollution atmosphérique ne peut expli-
quer l’augmentation de prévalence des symptômes d’aller-
gie, de rhinite pollinique et d’asthme, mais elle est indiscu-
tablement responsable d’exacerbations de l’asthme. C’est à
ce titre qu’elle est un problème de santé publique.
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