Médecine & enfance Conduite à tenir devant une fièvre chez l’enfant au retour de voyage LES JEUDIS DE BICÊTRE S. Rebaudet, L.L. Pham, P. Bourée, B. Wyplosz, centre de vaccinations internationales, service des maladies infectieuses et tropicales, hôpitaux universitaires Paris-Sud, site Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre Rubrique dirigée par T.A. Tran, service de pédiatrie générale hématologie et rhumatologie pédiatriques, L. Chevret, service de réanimation néonatale et pédiatrique, néonatologie, et S. Rouget, service de médecine de l'adolescent CHU Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre LA FIÈVRE, UN MOTIF DE CONSULTATION FRÉQUENT CHEZ L’ENFANT DE RETOUR DES TROPIQUES Chaque année, plus de 2 millions de personnes résidant en France voyagent à destination de pays à risque sanitaire [1]. Selon les destinations et les types de séjour, entre 15 % et 64 % d’entre elles seraient victimes de problèmes de santé [2]. Dans une vaste étude portant sur 25000 consultations échelonnées sur dix ans au sein de cliniques de médecine des voyages du réseau mondial GeoSentinel, la fièvre, retrouvée dans 28 % d’entre elles (adultes et enfants), constituait le premier motif de recours aux soins au retour de voyage [3]. Dans 35 % des cas, cette fièvre n’était associée à aucun signe de localisation prépondérant (par exemple en cas de paludisme, de dengue, de typhoïde). Mais des diarrhées ou des symptômes respiratoires étaient notés au premier plan dans respectivement 15 % et 14 % des cas. Dans une sous-population pédiatrique de 1 591 enfants rentrant de voyage (figure 1), 23 % avaient consulté pour une fièvre sans point d’appel clinique, 28 % pour une diarrhée (avec ou sans fièvre), 25 % pour des symptômes cutanés et 10 % pour des signes respiratoires [4]. Comme chez les adultes, le principal motif de consultation en pédiatrie variait selon la provenance des voyageurs. Il s’agissait majoritairement d’une fièvre au retour d’Afrique subsaharienne ou d’Asie du Sud-Est, de diarrhées au retour d’Afrique du Nord ou du MoyenOrient, de symptômes cutanés au retour d’Amérique latine, de symptômes respiratoires au retour d’Europe ou d’Amérique du Nord [4]. L’acquisition d’une fièvre était également plus fréquemment notée chez les grands enfants, rentrant d’un séjour de plus de trente jours, pour rendre visite à de la famille ou à des amis [4]. septembre 2011 page 294 EPIDÉMIOLOGIE : PALUDISME, MAIS AUSSI DENGUE ET BIEN D’AUTRES ENCORE… En France, environ 5 000 cas de paludisme, principalement à Plasmodium falciparum, sont importés chaque année. Dans près de 15 % des cas, il s’agit d’enfants âgés de moins de quinze ans, principalement issus de familles originaires d’Afrique séjournant dans leur pays d’origine. Avec globalement une dizaine de décès annuels, cette parasitose reste donc la principale et la plus grave cause d’infection au retour d’un voyage hors de France [2, 5]. Les arboviroses sont des infections virales transmises par des arthropodes. Elles sont en pleine émergence dans tous les pays tropicaux et représentent une cause de plus en plus fréquente de fièvre chez les voyageurs. Ainsi, dans l’étude GeoSentinel, la dengue était responsable de 18 % des causes de fièvre, dont 6 % chez les enfants [3, 4]. Elle était au moins aussi fréquente que le paludisme chez les voyageurs au retour d’Asie du Sud-Est, du sous-continent indien, d’Amérique latine et des Caraïbes [3, 4, 6]. Les Antilles et la Guyane française sont notamment confrontées à de fréquentes flambées épidémiques, tout particulièrement pendant les mois d’hiver. Le chikungunya, qui a très largement affecté l’île de la Réunion et les Comores en 2006, est une autre arbovirose émergente à rechercher chez les voyageurs en provenance de l’océan Indien. Bien qu’emblématiques, les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes sont plus rarement en cause (6 % des causes de fièvre de l’enfant voyageur) [4]. En France, plus d’une centaine de cas sont recensés chaque année par déclaration obligatoire. Un quart d’entre eux touchent des enfants de moins de quinze ans, et les trois quarts sont importés [7]. Cette cause est à rechercher par hémocultures en cas de fièvre subaiguë, a fortiori au retour Médecine & enfance Figure 1 Motifs de consultation chez 1591 enfants voyageurs (cohorte GeoSentinel [4]) signes respiratoires 10 % parasitoses tissulaires autres 4% causes 9% signes cutanés 25 % autres syndromes fébriles 25 % syndromes fébriles 23 % paludisme 32 % syndrome viral 27 % diarrhées 29 % hépatite A 4% dengue 6% typhoïdes et paratyphoïdes 6% Tableau I Ressources internet de médecine des voyages En français En anglais 첸 Site du Centre de vaccinations internationales de l’hôpital Bicêtre : http://www.parasitologie.fr/site/index.htm 첸 Institut national de veille sanitaire (InVS), Bulletin épidémiologique hebdomadaire, Recommandations sanitaires pour les voyageurs, 2011 : http://www.invs.sante.fr/beh/2011/18_19/index.htm 첸 Société de médecine des voyages (SMV) : http://www.medecine-voyages.fr/vaccins_pays_nc.php5 첸 Ministère français des Affaires étrangères et européennes : http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs_909/index.html 첸 Institut Pasteur : http://www.pasteur.fr/ip/easysite/pasteur/fr/sante/centre-medical/ vaccinations-internationales-medecine-des-voyages/recommandations-par-pays 첸 Organisation mondiale de la santé (OMS), Voyages internationaux et santé : http://www.who.int/ith/fr 첸 Centers for Disease Control and Prevention (CDC) (Etats-Unis) : http://wwwnc.cdc.gov/travel/destinations/list.htm 첸 Fit for Travel (Ecosse) : http://www.fitfortravel.scot.nhs.uk/home.aspx 첸 National Travel Health Network and Centre, NaTHNaC (Angleterre) : http://www.nathnac.org/travel/index.htm des pays du sous-continent indien [3, 4, 6]. Il existe plusieurs vaccins, mais ils n’assurent qu’une protection de 50 à 80 % et ne sont indiqués que pour des séjours prolongés ou dans des conditions sanitaires précaires. L’hépatite A affecte encore plus de 1 000 personnes par an en France, dont environ un tiers au retour d’un séjour outremer [8]. Elle bénéficie pourtant d’un vaccin efficace et bien toléré, qui est recommandé pour tout voyage en zone d’endémie moyenne à élevée quelle que soit la durée du séjour [2]. Les rickettsioses sont des infections bactériennes intracellulaires transmises par piqûre de tique, de puce ou d’acarien. Bien que leur incidence chez l’enfant voyageur demeure inconnue, elles sont globalement de plus en plus fréquemment rencontrées au retour de voyage [9]. Outre la fièvre boutonneuse méditerranéenne, il s’agit de la fièvre pourprée des montagnes Rocheuses (Amérique du Nord), de la fièvre à tique africaine (en Afrique australe), du typhus murin ou endémique (en Asie du SudEst), du typhus des broussailles (en Asie et en Océanie). Il n’existe pas de prévention spécifique en dehors d’une lutte anti-vectorielle. Leur traitement repose sur la doxycycline, justifiée dans ces infections, y compris chez l’enfant de moins de huit ans, du fait de leur sévérité potentielle, de la grande efficacité de cet antibiotique et de l’absence de coloration dentaire en cas d’administration de courte durée [10]. Plus de 1,5 milliard d’ épisodes diarrhéiques affecteraient chaque année dans le monde les enfants de moins de cinq ans, occasionnant environ 3 millions de décès. Alors que le rotavirus est la principale cause des épisodes sévères, les agents responsables des diarrhées aiguës de l’enfant demeurent les Escherichia coli, les Salmonella non typhiques, les Shigella, les Campylobacter et Giardia, avec des prévalences variant selon les zones géographiques et les saisons [11, 12]. Concernant l’enfant voyageur, le taux d’attaque des diarrhées aiguës fébriles ne semble pas plus important que chez les voyageurs adultes, à l’exception des moins de deux ans [11, 13], et les pathogènes les plus fréquemseptembre 2011 page 295 ment notés dans l’étude pédiatrique de GeoSentinel étaient les Campylobacter et les Salmonella [4, 11, 12]. L’épidémiologie spécifique de ces infections reste en revanche largement à décrire. Enfin, sans écarter les autres causes exotiques de fièvre (leptospirose, borrélioses récurrentes, bilharzioses aiguës d’invasion, amibiase tissulaire…), il importe surtout de ne pas négliger les infections cosmopolites, éventuellement acquises après le retour, qu’il s’agisse de viroses (primo-infection à cytomégalovirus ou Epstein-Barr virus, rougeole, grippe, viroses respiratoires saisonnières, méningites virales…) ou d’infections bactériennes communes (respiratoires, urinaires, cutanées…). ORIENTATION DIAGNOSTIQUE : DÉMARRER L’ENQUÊTE Parce que les causes de fièvre au retour des tropiques sont nombreuses et que des co-infections peuvent être rencontrées, l’enquête étiologique doit être rigoureuse et systématique. Quelques questions simples permettront d’orienter les premiers examens. Dans tous les cas, un accès de paludisme sera recherché de façon systématique. Il faut avant tout savoir si une consultation des voyages a été réalisée avant le départ. En s’aidant du carnet de santé, on précisera le statut vaccinal (calendrier et vaccinations spécifiques des voyages). Il est important d’essayer de connaître l’observance des mesures universelles d’hygiène et celle des prophylaxies médicamenteuses (paludisme) ou autres (mesures de lutte vectorielles). On recherchera les co-morbidités et une immunodépression sous-jacente qui pourrait rendre l’enfant plus vulnérable à une infection acquise sous les tropiques. Une bonne connaissance des régions traversées au cours du voyage récent est importante pour déterminer les risques auxquels l’enfant a pu s’exposer. Il importe ainsi de connaître les climats et les écosystèmes rencontrés afin de cibler les recherches étiologiques. Les res- Médecine & enfance Tableau II Durées d’incubation des différentes causes de fièvre au retour des tropiques <7j 첸 Arboviroses, fièvres hémorragiques virales 첸 Méningite à méningocoque, shigellose, peste… 첸 Fièvres cosmopolites (pneumopathie, gastroentérites…) 7-21 j 첸 Paludisme, trypanosomose africaine, trichinellose 첸 Fièvres hémorragiques virales 첸 Fièvres typhoïdes, rickettsioses, borrélioses récurrentes, leptospirose, fièvre Q 첸 Histoplasmose sources spécialisées en médecine des voyages et comportant des « fiches pays » actualisées sont nombreuses sur internet (tableau I) . Outre leur intérêt pour le conseil avant le départ, elles proposent souvent une liste de maladies à prendre en compte au retour et renseignent sur les épidémies en cours. La durée du séjour et la date de retour sont à confronter aux durées d’incubation des différentes infections potentielles (tableau II). Ainsi, la dengue a une incubation maximale de une semaine tandis qu’un accès de paludisme peut survenir des mois après le retour, même en cas de prophylaxie bien conduite. L’appréciation du type de séjour, ses conditions et les différentes activités pratiquées, permet de dresser une liste de potentiels facteurs de risque et d’exposition, et d’orienter les recherches étiologiques (tableau III). Enfin, le recensement des accompagnants doit permettre de découvrir d’éventuels cas contacts, parmi les membres de la famille notamment. Certains peuvent avoir déjà bénéficié d’un diagnostic établi par une autre équipe médicale ; d’autres, non encore malades, doivent être dépistés ou surveillés, voire bénéficier d’un traitement préventif. Le mode d’installation et d’évolution de la fièvre peut dans certains cas orienter vers certaines infections. Les fièvres « tierce » et « quarte », bien que classiques, ne sont que rarement observées dans la pratique courante, et les accès palustres présentent le plus souvent une fièvre brutale et aiguë. Une fièvre crescendo avec obtention d’un plateau au bout de quelques jours évoque plutôt une fièvre typhoïde. La recherche de signes fonctionnels et physiques associés permet également souvent d’orienter la démarche diagnostique (tableau IV). Leur absence et leur manque de spécificité ne doivent cependant pas égarer le clinicien. En effet, les symptômes accompagnant la fièvre au cours des accès palustres sont volontiers aspécifiques (céphalées, douleurs abdominales). Des signes de gravité doivent enfin être recherchés, dont certains, spécifiques à certaines pathologies exo- > 21 j 첸 Paludisme, bilharziose aiguë, amibiase hépatique, filarioses, leishmaniose viscérale 첸 Tuberculose, brucellose 첸 Primo-infection VIH, hépatites virales Tableau III Causes de fièvre en fonction des facteurs d’exposition Produits laitiers non pasteurisés Brucella, Campylobacter, Salmonella, tuberculose Fruits de mer . . . . . . . . . . . . . . . . . . Vibrio parahaemolyticus, virus entériques (Norovirus…), HAV Viande crue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Toxoplasma, Trichinella, Campylobacter, E. coli… Poisson cru . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Vibrio, Anisakis, Gnathostoma… Baignade en eau douce . . . . . . . . . Schistosoma, Leptospira Piqûre de moustique . . . . . . . . . . . Ecthyma mais le plus souvent non informatif (souvent inaperçue) Piqûre de tique . . . . . . . . . . . . . . . . Rickettsia, Borrelia, encéphalite à tiques Piqûre de mouche tsé-tsé . . . . . . . Trypanosomose africaine (maladie du sommeil) Contact avec des triatomes . . . . . . Trypanosomose américaine (Chagas) Contact avec des rongeurs . . . . . . Fièvre de Lassa, Hantavirus, Sexe, aiguilles, sang . . . . . . . . . . . . HIV, HBV, HCV… Tableau IV Causes de fièvre en fonction des signes cliniques d’orientation Syndrome hémorragique. . . . . . . . Paludisme, dengue, fièvres hémorragiques virales, méningococcémie, leptospirose… Diarrhée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, salmonellose, shigellose, typhoïdes, amibiase… Signes neuropsychiques . . . . . . . . Paludisme, méningite, typhoïdes, légionellose, arboviroses, trypanosomose africaine… Eruption cutanée . . . . . . . . . . . . . . Arboviroses, primo-infection VIH, rickettsioses, leptospirose, trypanosomose africaine… Ictère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, hépatites virales, leptospirose, fièvre jaune… Hépatomégalie . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, amibiase hépatique, hépatites virales, bilharziose aiguë… Splénomégalie . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, leishmaniose viscérale, typhoïdes, trypanosomose africaine… Adénopathies . . . . . . . . . . . . . . . . . Dengue, primo-infection VIH (jeunes adultes), trypanosomose africaine, leishmaniose viscérale, peste bubonique… Toux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, pneumopathie, peste pulmonaire… tiques, doivent être connus. Il s’agit notamment des critères de gravité du paludisme, résumés dans la conférence de consensus de 2007 [14], et, dans le cadre d’une dengue, du purpura et des douleurs abdominales, qui suggèrent respectivement une dengue hémorragique et un « dengue shock syndrome ». Enfin, des examens biologiques de débrouillage doivent être réalisés sans délai (tableaux V et VI). La recherche de paludisme repose sur la réalisation d’un frottis sanguin (obtention rapide d’un diagnostic d’espèce et d’une parasitémie). La goutte épaisse apporte un gain de sensibilité significatif mais requiert un temps plus long et une expertise difficile à entretenir en dehors des laboratoires spécialisés. Il existe aussi des tests de diagnostic rapide pour P. falciparum septembre 2011 page 296 reposant sur la mise en évidence d’antigènes circulants. Ils permettent d’obtenir un résultat fiable en quinze minutes avec une sensibilité proche de celle de la goutte épaisse. Outre des éléments de biologie standards, des hémocultures sont indispensables, de même qu’une coproculture et des examens parasitologiques des selles en cas de diarrhée. Une radiographie de thorax pourra compléter les explorations sans retarder la prise en charge hospitalière. Le diagnostic d’une dengue repose sur la réalisation d’une antigénémie ou d’une PCR au cours des cinq premiers jours de fièvre, ou d’une sérologie IgM ensuite ; celui d’une rickettsiose repose sur la sérologie ou la PCR. La recherche des causes de fièvre au retour de voyage nécessite donc la réalisa- Médecine & enfance Tableau V Examens paracliniques initiaux à réaliser en urgence 첸 Hémogramme, numération plaquettaire 첸 Frottis sanguin + goutte épaisse à la recherche d’hématozoaires ± test de diagnostic rapide du paludisme 첸 Tests diagnostiques de la dengue (selon la destination) 첸 Ionogramme sanguin, urée, créatine plasmatique, C-reactive protein, tests hépatiques (transaminases, phosphatases alcalines, γGT, bilirubine totale et conjuguée), LDH, créatine kinase 첸 Hémocultures x3, coprocultures et parasitologie des selles, sérologies selon orientation diagnostique 첸 Bandelette urinaire ± examen cytobactériologique des urines 첸 Radiographie de thorax, échographie abdominale Tableau VI Causes de fièvre en fonction des signes biologiques d’orientation Anémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, leishmaniose viscérale, dengue… Thrombopénie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, arboviroses, hépatites virales, rickettsioses, leptospirose, leishmaniose viscérale… Leuconeutropénie . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, typhoïdes, rickettsioses, arboviroses, leishmaniose viscérale… Hyperleucocytose . . . . . . . . . . . . . . . . Infections bactériennes cosmopolites, amibiase hépatique, leptospirose, borréliose récurrente… Hyperéosinophilie . . . . . . . . . . . . . . . . Bilharziose aiguë, anguillulose, trichinellose… Syndrome mononucléosique . . . . . . . CMV, EBV, VIH, hépatites virales, arbovirose, toxoplasmose, trypanosomose… Cytolyse hépatique . . . . . . . . . . . . . . . Hépatites virales, arboviroses, CMV, EBV, VIH, leptospirose, typhoïdes, borrélioses récurrentes… Insuffisance rénale . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, leptospirose, Fièvre hémorragique virale avec syndrome rénal… tion d’examens souvent spécialisés et habituellement indisponibles en ville dans le cadre de l’urgence. Ces recherches doivent être réalisées en milieu hospitalier dans un centre spécialisé en médecine pédiatrique infectieuse. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE : SAVOIR PASSER LA MAIN En pratique, tout enfant fébrile au retour des tropiques devra donc être rapidement orienté vers un service d’urgence, les explorations réalisables en ville devant se limiter aux examens biologiques de routine. Les recommandations françaises de prise en charge du paludisme de l’enfant insistent sur la nécessité d’une hospitalisation systématique initiale d’au moins vingt-quatre heures en milieu pédiatrique, y compris pour les formes non compliquées [14]. Il est ensuite possible de poursuivre la fin du traitement d’un grand enfant à domicile. Le traitement des accès palustres à P. falciparum de l’enfant a bénéficié de l’arrivée récente de deux médicaments très efficaces et bien tolérés : l’association artémétherluméfantrine (Riamet®) per os pour les accès non compliqués, et l’artésunate (Malacef®) par voie intraveineuse pour les accès graves. Un suivi clinico-biologique à J3, J7 et J28 doit enfin être systématiquement organisé, afin de ne pas passer à côté d’un échec précoce ou tardif du traitement antipaludique. La prise en charge d’une dengue repose uniquement sur le traitement symptomatique : hydratation et paracétamol pour les formes bénignes (éviter l’aspirine) ; prise en charge spécialisée en réanimation pédiatrique pour les formes sévères (hémorragiques avec ou sans signes de choc). Les diarrhées fébriles de l’enfant voyageur requièrent une réhydratation orale ou IV selon le degré de déshydratation. En cas de diarrhée invasive avec signes systémiques, une injection de ceftriaxone en IV sera discutée. Pour les formes non sévères, un traitement ambulatoire par azithromycine pendant 5 jours sera instauré devant une coproculture positive à Shigella, Salmonella ou Campylobacter. EN CONCLUSION L’augmentation des voyages d’agrément et des expatriations, en particulier dans des pays tropicaux, expose un nombre croissant d’enfants à des risques infectieux exotiques. Les fièvres sont un motif fréquent de consultation chez l’enfant rentrant de voyage. Si le paludisme reste la première et la plus grave pathologie d’importation de zone endémique, il faut savoir évoquer d’autres infections éventuellement acquises après le retour en métropole. Le diagnostic nécessite une enquête souvent exhaustive, mêlant septembre 2011 page 297 Résumé La fièvre est un motif de consultation fréquent chez l’enfant rentrant de voyage. Le paludisme à Plasmodium falciparum en est la cause principale après un séjour en zone tropicale, particulièrement en Afrique subsaharienne. Il impose un diagnostic en urgence et une prise en charge hospitalière. Des infections émergentes, comme la dengue ou d’autres arboviroses, et des causes non « exotiques » de fièvre, comme les infections digestives et respiratoires, sont aussi particulièrement fréquentes. Certaines infections plus rares représentent parfois un véritable défi diagnostique et thérapeutique, et justifient le recours à un centre spécialisé en médecine infectieuse. Enfin, la prise en charge d’une affection au retour de voyage doit être l’occasion de réitérer les recommandations de prévention en prévision des séjours ultérieurs. Mots clés Fièvre, tropiques, voyage, pédiatrie, diagnostic. géographie, clinique et microbiologie. La prise en charge des infections de l’enfant au retour de voyage doit être rapidement hospitalière. Enfin, on profitera de cet épisode pour réitérer auprès des parents les recommandations de prévention en prévision de séjours ultérieurs hors de métropole. 첸 Références [1] « Numéro thématique Santé des voyageurs 2007 », BEH, 2007 ; 25-26 : 217-40. [2] « Recommandations sanitaires pour les voyageurs, 2011 », BEH, 2011 ; 18-19 : 205-28. [3] WILSON M.E., WELD L.H., BOGGILD A., KEYSTONE J.S., KAIN K.C., VON SONNENBURG F. et al. : « Fever in returned travelers : results from the GeoSentinel Surveillance Network », Clin. Infect. Dis., 2007 ; 44 : 1560-8. [4] HAGMANN S., NEUGEBAUER R., SCHWARTZ E., PERRET C., CASTELLI F., BARNETT E.D. et al. : « Illness in children after international travel : analysis from the GeoSentinel Surveillance Network », Pediatrics, 2010 ; 125 : e1072-80. [5] « CNR Paludisme. Rapport d’activités. Année 2009 », http://www.imea.fr/imea-fichiersjoints/cnrpalu/cnrpalu-2009.pdf. 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