Lire l'article complet

publicité
Médecine
& enfance
Conduite à tenir devant une fièvre
chez l’enfant au retour de voyage
LES JEUDIS DE BICÊTRE
S. Rebaudet, L.L. Pham, P. Bourée, B. Wyplosz,
centre de vaccinations internationales,
service des maladies infectieuses et tropicales,
hôpitaux universitaires Paris-Sud, site Bicêtre,
Le Kremlin-Bicêtre
Rubrique dirigée par T.A. Tran, service de
pédiatrie générale hématologie et rhumatologie
pédiatriques, L. Chevret, service de réanimation
néonatale et pédiatrique, néonatologie, et
S. Rouget, service de médecine de l'adolescent
CHU Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre
LA FIÈVRE, UN MOTIF
DE CONSULTATION
FRÉQUENT CHEZ L’ENFANT
DE RETOUR
DES TROPIQUES
Chaque année, plus de 2 millions de personnes résidant en France voyagent à
destination de pays à risque sanitaire [1].
Selon les destinations et les types de séjour, entre 15 % et 64 % d’entre elles seraient victimes de problèmes de santé [2].
Dans une vaste étude portant sur 25000
consultations échelonnées sur dix ans
au sein de cliniques de médecine des
voyages du réseau mondial GeoSentinel, la fièvre, retrouvée dans 28 %
d’entre elles (adultes et enfants), constituait le premier motif de recours aux
soins au retour de voyage [3]. Dans 35 %
des cas, cette fièvre n’était associée à aucun signe de localisation prépondérant
(par exemple en cas de paludisme, de
dengue, de typhoïde). Mais des diarrhées ou des symptômes respiratoires
étaient notés au premier plan dans respectivement 15 % et 14 % des cas. Dans
une sous-population pédiatrique de
1 591 enfants rentrant de voyage (figure
1), 23 % avaient consulté pour une fièvre
sans point d’appel clinique, 28 % pour
une diarrhée (avec ou sans fièvre), 25 %
pour des symptômes cutanés et 10 %
pour des signes respiratoires [4].
Comme chez les adultes, le principal
motif de consultation en pédiatrie variait selon la provenance des voyageurs.
Il s’agissait majoritairement d’une fièvre
au retour d’Afrique subsaharienne ou
d’Asie du Sud-Est, de diarrhées au retour d’Afrique du Nord ou du MoyenOrient, de symptômes cutanés au retour
d’Amérique latine, de symptômes respiratoires au retour d’Europe ou d’Amérique du Nord [4]. L’acquisition d’une
fièvre était également plus fréquemment notée chez les grands enfants,
rentrant d’un séjour de plus de trente
jours, pour rendre visite à de la famille
ou à des amis [4].
septembre 2011
page 294
EPIDÉMIOLOGIE :
PALUDISME, MAIS AUSSI
DENGUE ET BIEN D’AUTRES
ENCORE…
En France, environ 5 000 cas de paludisme, principalement à Plasmodium falciparum, sont importés chaque année.
Dans près de 15 % des cas, il s’agit d’enfants âgés de moins de quinze ans, principalement issus de familles originaires
d’Afrique séjournant dans leur pays
d’origine. Avec globalement une dizaine
de décès annuels, cette parasitose reste
donc la principale et la plus grave cause
d’infection au retour d’un voyage hors
de France [2, 5].
Les arboviroses sont des infections virales transmises par des arthropodes.
Elles sont en pleine émergence dans
tous les pays tropicaux et représentent
une cause de plus en plus fréquente de
fièvre chez les voyageurs. Ainsi, dans
l’étude GeoSentinel, la dengue était responsable de 18 % des causes de fièvre,
dont 6 % chez les enfants [3, 4]. Elle était
au moins aussi fréquente que le paludisme chez les voyageurs au retour d’Asie
du Sud-Est, du sous-continent indien,
d’Amérique latine et des Caraïbes [3, 4, 6].
Les Antilles et la Guyane française sont
notamment confrontées à de fréquentes
flambées épidémiques, tout particulièrement pendant les mois d’hiver. Le chikungunya, qui a très largement affecté
l’île de la Réunion et les Comores en
2006, est une autre arbovirose émergente à rechercher chez les voyageurs en
provenance de l’océan Indien.
Bien qu’emblématiques, les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes sont plus rarement en cause (6 % des causes de fièvre
de l’enfant voyageur) [4]. En France, plus
d’une centaine de cas sont recensés
chaque année par déclaration obligatoire. Un quart d’entre eux touchent des
enfants de moins de quinze ans, et les
trois quarts sont importés [7]. Cette cause
est à rechercher par hémocultures en cas
de fièvre subaiguë, a fortiori au retour
Médecine
& enfance
Figure 1
Motifs de consultation chez 1591 enfants voyageurs (cohorte GeoSentinel [4])
signes respiratoires
10 %
parasitoses
tissulaires autres
4%
causes
9%
signes
cutanés
25 %
autres
syndromes
fébriles
25 %
syndromes
fébriles
23 %
paludisme
32 %
syndrome
viral
27 %
diarrhées
29 %
hépatite A
4%
dengue
6%
typhoïdes
et paratyphoïdes
6%
Tableau I
Ressources internet de médecine des voyages
En français
En anglais
첸 Site du Centre de vaccinations internationales de l’hôpital Bicêtre :
http://www.parasitologie.fr/site/index.htm
첸 Institut national de veille sanitaire (InVS), Bulletin épidémiologique hebdomadaire,
Recommandations sanitaires pour les voyageurs, 2011 :
http://www.invs.sante.fr/beh/2011/18_19/index.htm
첸 Société de médecine des voyages (SMV) :
http://www.medecine-voyages.fr/vaccins_pays_nc.php5
첸 Ministère français des Affaires étrangères et européennes :
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs_909/index.html
첸 Institut Pasteur : http://www.pasteur.fr/ip/easysite/pasteur/fr/sante/centre-medical/
vaccinations-internationales-medecine-des-voyages/recommandations-par-pays
첸 Organisation mondiale de la santé (OMS), Voyages internationaux et santé :
http://www.who.int/ith/fr
첸 Centers for Disease Control and Prevention (CDC) (Etats-Unis) :
http://wwwnc.cdc.gov/travel/destinations/list.htm
첸 Fit for Travel (Ecosse) : http://www.fitfortravel.scot.nhs.uk/home.aspx
첸 National Travel Health Network and Centre, NaTHNaC (Angleterre) :
http://www.nathnac.org/travel/index.htm
des pays du sous-continent indien [3, 4, 6].
Il existe plusieurs vaccins, mais ils n’assurent qu’une protection de 50 à 80 % et
ne sont indiqués que pour des séjours
prolongés ou dans des conditions sanitaires précaires.
L’hépatite A affecte encore plus de 1 000
personnes par an en France, dont environ un tiers au retour d’un séjour outremer [8]. Elle bénéficie pourtant d’un vaccin efficace et bien toléré, qui est recommandé pour tout voyage en zone
d’endémie moyenne à élevée quelle que
soit la durée du séjour [2].
Les rickettsioses sont des infections bactériennes intracellulaires transmises par
piqûre de tique, de puce ou d’acarien.
Bien que leur incidence chez l’enfant
voyageur demeure inconnue, elles sont
globalement de plus en plus fréquemment rencontrées au retour de voyage
[9]. Outre la fièvre boutonneuse méditerranéenne, il s’agit de la fièvre pourprée des montagnes Rocheuses (Amérique du Nord), de la fièvre à tique africaine (en Afrique australe), du typhus
murin ou endémique (en Asie du SudEst), du typhus des broussailles (en Asie
et en Océanie). Il n’existe pas de prévention spécifique en dehors d’une lutte
anti-vectorielle. Leur traitement repose
sur la doxycycline, justifiée dans ces infections, y compris chez l’enfant de
moins de huit ans, du fait de leur sévérité potentielle, de la grande efficacité de
cet antibiotique et de l’absence de coloration dentaire en cas d’administration
de courte durée [10].
Plus de 1,5 milliard d’ épisodes diarrhéiques affecteraient chaque année
dans le monde les enfants de moins de
cinq ans, occasionnant environ 3 millions de décès. Alors que le rotavirus est
la principale cause des épisodes sévères,
les agents responsables des diarrhées
aiguës de l’enfant demeurent les Escherichia coli, les Salmonella non typhiques, les Shigella, les Campylobacter
et Giardia, avec des prévalences variant
selon les zones géographiques et les saisons [11, 12]. Concernant l’enfant voyageur, le taux d’attaque des diarrhées aiguës fébriles ne semble pas plus important que chez les voyageurs adultes, à
l’exception des moins de deux ans [11,
13], et les pathogènes les plus fréquemseptembre 2011
page 295
ment notés dans l’étude pédiatrique de
GeoSentinel étaient les Campylobacter
et les Salmonella [4, 11, 12]. L’épidémiologie spécifique de ces infections reste
en revanche largement à décrire.
Enfin, sans écarter les autres causes
exotiques de fièvre (leptospirose, borrélioses récurrentes, bilharzioses aiguës
d’invasion, amibiase tissulaire…), il importe surtout de ne pas négliger les infections cosmopolites, éventuellement
acquises après le retour, qu’il s’agisse de
viroses (primo-infection à cytomégalovirus ou Epstein-Barr virus, rougeole,
grippe, viroses respiratoires saisonnières, méningites virales…) ou d’infections bactériennes communes (respiratoires, urinaires, cutanées…).
ORIENTATION
DIAGNOSTIQUE :
DÉMARRER L’ENQUÊTE
Parce que les causes de fièvre au retour
des tropiques sont nombreuses et que
des co-infections peuvent être rencontrées, l’enquête étiologique doit être rigoureuse et systématique. Quelques
questions simples permettront d’orienter les premiers examens. Dans tous les
cas, un accès de paludisme sera recherché de façon systématique.
Il faut avant tout savoir si une consultation des voyages a été réalisée avant le
départ. En s’aidant du carnet de santé, on
précisera le statut vaccinal (calendrier et
vaccinations spécifiques des voyages). Il
est important d’essayer de connaître l’observance des mesures universelles d’hygiène et celle des prophylaxies médicamenteuses (paludisme) ou autres (mesures de lutte vectorielles). On recherchera les co-morbidités et une immunodépression sous-jacente qui pourrait
rendre l’enfant plus vulnérable à une infection acquise sous les tropiques.
Une bonne connaissance des régions
traversées au cours du voyage récent est
importante pour déterminer les risques
auxquels l’enfant a pu s’exposer. Il importe ainsi de connaître les climats et
les écosystèmes rencontrés afin de cibler les recherches étiologiques. Les res-
Médecine
& enfance
Tableau II
Durées d’incubation des différentes causes de fièvre au retour des tropiques
<7j
첸 Arboviroses, fièvres hémorragiques virales
첸 Méningite à méningocoque, shigellose, peste…
첸 Fièvres cosmopolites (pneumopathie, gastroentérites…)
7-21 j 첸 Paludisme, trypanosomose africaine, trichinellose
첸 Fièvres hémorragiques virales
첸 Fièvres typhoïdes, rickettsioses, borrélioses récurrentes, leptospirose, fièvre Q
첸 Histoplasmose
sources spécialisées en médecine des
voyages et comportant des « fiches
pays » actualisées sont nombreuses sur
internet (tableau I) . Outre leur intérêt
pour le conseil avant le départ, elles
proposent souvent une liste de maladies
à prendre en compte au retour et renseignent sur les épidémies en cours.
La durée du séjour et la date de retour
sont à confronter aux durées d’incubation des différentes infections potentielles (tableau II). Ainsi, la dengue a une
incubation maximale de une semaine
tandis qu’un accès de paludisme peut
survenir des mois après le retour, même
en cas de prophylaxie bien conduite.
L’appréciation du type de séjour, ses
conditions et les différentes activités
pratiquées, permet de dresser une liste
de potentiels facteurs de risque et d’exposition, et d’orienter les recherches
étiologiques (tableau III).
Enfin, le recensement des accompagnants doit permettre de découvrir
d’éventuels cas contacts, parmi les
membres de la famille notamment. Certains peuvent avoir déjà bénéficié d’un
diagnostic établi par une autre équipe
médicale ; d’autres, non encore malades,
doivent être dépistés ou surveillés, voire
bénéficier d’un traitement préventif.
Le mode d’installation et d’évolution de
la fièvre peut dans certains cas orienter
vers certaines infections. Les fièvres
« tierce » et « quarte », bien que classiques, ne sont que rarement observées
dans la pratique courante, et les accès
palustres présentent le plus souvent une
fièvre brutale et aiguë. Une fièvre crescendo avec obtention d’un plateau au
bout de quelques jours évoque plutôt
une fièvre typhoïde.
La recherche de signes fonctionnels et
physiques associés permet également
souvent d’orienter la démarche diagnostique (tableau IV). Leur absence et leur
manque de spécificité ne doivent cependant pas égarer le clinicien. En effet, les
symptômes accompagnant la fièvre au
cours des accès palustres sont volontiers
aspécifiques (céphalées, douleurs abdominales). Des signes de gravité doivent
enfin être recherchés, dont certains, spécifiques à certaines pathologies exo-
> 21 j 첸 Paludisme, bilharziose aiguë, amibiase hépatique, filarioses, leishmaniose viscérale
첸 Tuberculose, brucellose
첸 Primo-infection VIH, hépatites virales
Tableau III
Causes de fièvre en fonction des facteurs d’exposition
Produits laitiers non pasteurisés
Brucella, Campylobacter, Salmonella, tuberculose
Fruits de mer . . . . . . . . . . . . . . . . . . Vibrio parahaemolyticus, virus entériques (Norovirus…), HAV
Viande crue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Toxoplasma, Trichinella, Campylobacter, E. coli…
Poisson cru . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Vibrio, Anisakis, Gnathostoma…
Baignade en eau douce . . . . . . . . . Schistosoma, Leptospira
Piqûre de moustique . . . . . . . . . . . Ecthyma mais le plus souvent non informatif (souvent inaperçue)
Piqûre de tique . . . . . . . . . . . . . . . . Rickettsia, Borrelia, encéphalite à tiques
Piqûre de mouche tsé-tsé . . . . . . . Trypanosomose africaine (maladie du sommeil)
Contact avec des triatomes . . . . . . Trypanosomose américaine (Chagas)
Contact avec des rongeurs . . . . . . Fièvre de Lassa, Hantavirus,
Sexe, aiguilles, sang . . . . . . . . . . . . HIV, HBV, HCV…
Tableau IV
Causes de fièvre en fonction des signes cliniques d’orientation
Syndrome hémorragique. . . . . . . . Paludisme, dengue, fièvres hémorragiques virales,
méningococcémie, leptospirose…
Diarrhée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, salmonellose, shigellose, typhoïdes, amibiase…
Signes neuropsychiques . . . . . . . . Paludisme, méningite, typhoïdes, légionellose, arboviroses,
trypanosomose africaine…
Eruption cutanée . . . . . . . . . . . . . . Arboviroses, primo-infection VIH, rickettsioses, leptospirose,
trypanosomose africaine…
Ictère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, hépatites virales, leptospirose, fièvre jaune…
Hépatomégalie . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, amibiase hépatique, hépatites virales, bilharziose
aiguë…
Splénomégalie . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, leishmaniose viscérale, typhoïdes, trypanosomose
africaine…
Adénopathies . . . . . . . . . . . . . . . . . Dengue, primo-infection VIH (jeunes adultes), trypanosomose
africaine, leishmaniose viscérale, peste bubonique…
Toux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, pneumopathie, peste pulmonaire…
tiques, doivent être connus. Il s’agit notamment des critères de gravité du paludisme, résumés dans la conférence de
consensus de 2007 [14], et, dans le cadre
d’une dengue, du purpura et des douleurs abdominales, qui suggèrent respectivement une dengue hémorragique
et un « dengue shock syndrome ».
Enfin, des examens biologiques de débrouillage doivent être réalisés sans délai (tableaux V et VI). La recherche de paludisme repose sur la réalisation d’un
frottis sanguin (obtention rapide d’un
diagnostic d’espèce et d’une parasitémie). La goutte épaisse apporte un gain
de sensibilité significatif mais requiert
un temps plus long et une expertise difficile à entretenir en dehors des laboratoires spécialisés. Il existe aussi des tests
de diagnostic rapide pour P. falciparum
septembre 2011
page 296
reposant sur la mise en évidence d’antigènes circulants. Ils permettent d’obtenir un résultat fiable en quinze minutes
avec une sensibilité proche de celle de
la goutte épaisse. Outre des éléments de
biologie standards, des hémocultures
sont indispensables, de même qu’une
coproculture et des examens parasitologiques des selles en cas de diarrhée.
Une radiographie de thorax pourra
compléter les explorations sans retarder
la prise en charge hospitalière. Le diagnostic d’une dengue repose sur la réalisation d’une antigénémie ou d’une
PCR au cours des cinq premiers jours de
fièvre, ou d’une sérologie IgM ensuite ;
celui d’une rickettsiose repose sur la sérologie ou la PCR.
La recherche des causes de fièvre au retour de voyage nécessite donc la réalisa-
Médecine
& enfance
Tableau V
Examens paracliniques initiaux à réaliser en urgence
첸 Hémogramme, numération plaquettaire
첸 Frottis sanguin + goutte épaisse à la recherche d’hématozoaires ± test de diagnostic rapide du
paludisme
첸 Tests diagnostiques de la dengue (selon la destination)
첸 Ionogramme sanguin, urée, créatine plasmatique, C-reactive protein, tests hépatiques
(transaminases, phosphatases alcalines, γGT, bilirubine totale et conjuguée), LDH, créatine kinase
첸 Hémocultures x3, coprocultures et parasitologie des selles, sérologies selon orientation
diagnostique
첸 Bandelette urinaire ± examen cytobactériologique des urines
첸 Radiographie de thorax, échographie abdominale
Tableau VI
Causes de fièvre en fonction des signes biologiques d’orientation
Anémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, leishmaniose viscérale, dengue…
Thrombopénie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, arboviroses, hépatites virales, rickettsioses,
leptospirose, leishmaniose viscérale…
Leuconeutropénie . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, typhoïdes, rickettsioses, arboviroses, leishmaniose
viscérale…
Hyperleucocytose . . . . . . . . . . . . . . . . Infections bactériennes cosmopolites, amibiase hépatique,
leptospirose, borréliose récurrente…
Hyperéosinophilie . . . . . . . . . . . . . . . . Bilharziose aiguë, anguillulose, trichinellose…
Syndrome mononucléosique . . . . . . . CMV, EBV, VIH, hépatites virales, arbovirose, toxoplasmose,
trypanosomose…
Cytolyse hépatique . . . . . . . . . . . . . . . Hépatites virales, arboviroses, CMV, EBV, VIH, leptospirose,
typhoïdes, borrélioses récurrentes…
Insuffisance rénale . . . . . . . . . . . . . . . . Paludisme, leptospirose, Fièvre hémorragique virale avec
syndrome rénal…
tion d’examens souvent spécialisés et
habituellement indisponibles en ville
dans le cadre de l’urgence. Ces recherches doivent être réalisées en milieu hospitalier dans un centre spécialisé en médecine pédiatrique infectieuse.
PRISE EN CHARGE
THÉRAPEUTIQUE : SAVOIR
PASSER LA MAIN
En pratique, tout enfant fébrile au retour des tropiques devra donc être rapidement orienté vers un service d’urgence, les explorations réalisables en ville
devant se limiter aux examens biologiques de routine.
Les recommandations françaises de prise en charge du paludisme de l’enfant
insistent sur la nécessité d’une hospitalisation systématique initiale d’au moins
vingt-quatre heures en milieu pédiatrique, y compris pour les formes non
compliquées [14]. Il est ensuite possible
de poursuivre la fin du traitement d’un
grand enfant à domicile. Le traitement
des accès palustres à P. falciparum de
l’enfant a bénéficié de l’arrivée récente
de deux médicaments très efficaces et
bien tolérés : l’association artémétherluméfantrine (Riamet®) per os pour les
accès non compliqués, et l’artésunate
(Malacef®) par voie intraveineuse pour
les accès graves. Un suivi clinico-biologique à J3, J7 et J28 doit enfin être systématiquement organisé, afin de ne pas
passer à côté d’un échec précoce ou tardif du traitement antipaludique.
La prise en charge d’une dengue repose
uniquement sur le traitement symptomatique : hydratation et paracétamol
pour les formes bénignes (éviter l’aspirine) ; prise en charge spécialisée en réanimation pédiatrique pour les formes
sévères (hémorragiques avec ou sans
signes de choc).
Les diarrhées fébriles de l’enfant voyageur requièrent une réhydratation orale
ou IV selon le degré de déshydratation.
En cas de diarrhée invasive avec signes
systémiques, une injection de ceftriaxone en IV sera discutée. Pour les formes
non sévères, un traitement ambulatoire
par azithromycine pendant 5 jours sera
instauré devant une coproculture positive à Shigella, Salmonella ou Campylobacter.
EN CONCLUSION
L’augmentation des voyages d’agrément
et des expatriations, en particulier dans
des pays tropicaux, expose un nombre
croissant d’enfants à des risques infectieux exotiques. Les fièvres sont un motif fréquent de consultation chez l’enfant
rentrant de voyage. Si le paludisme reste la première et la plus grave pathologie d’importation de zone endémique, il
faut savoir évoquer d’autres infections
éventuellement acquises après le retour
en métropole. Le diagnostic nécessite
une enquête souvent exhaustive, mêlant
septembre 2011
page 297
Résumé La fièvre est un motif de consultation fréquent chez l’enfant rentrant de voyage. Le paludisme à Plasmodium falciparum
en est la cause principale après un séjour en
zone tropicale, particulièrement en Afrique
subsaharienne. Il impose un diagnostic en
urgence et une prise en charge hospitalière.
Des infections émergentes, comme la
dengue ou d’autres arboviroses, et des
causes non « exotiques » de fièvre, comme
les infections digestives et respiratoires, sont
aussi particulièrement fréquentes. Certaines
infections plus rares représentent parfois un
véritable défi diagnostique et thérapeutique,
et justifient le recours à un centre spécialisé
en médecine infectieuse. Enfin, la prise en
charge d’une affection au retour de voyage
doit être l’occasion de réitérer les recommandations de prévention en prévision des
séjours ultérieurs.
Mots clés Fièvre, tropiques, voyage, pédiatrie, diagnostic.
géographie, clinique et microbiologie.
La prise en charge des infections de l’enfant au retour de voyage doit être rapidement hospitalière. Enfin, on profitera
de cet épisode pour réitérer auprès des
parents les recommandations de prévention en prévision de séjours ultérieurs hors de métropole.
첸
Références
[1] « Numéro thématique Santé des voyageurs 2007 », BEH,
2007 ; 25-26 : 217-40.
[2] « Recommandations sanitaires pour les voyageurs, 2011 »,
BEH, 2011 ; 18-19 : 205-28.
[3] WILSON M.E., WELD L.H., BOGGILD A., KEYSTONE J.S.,
KAIN K.C., VON SONNENBURG F. et al. : « Fever in returned travelers : results from the GeoSentinel Surveillance Network »,
Clin. Infect. Dis., 2007 ; 44 : 1560-8.
[4] HAGMANN S., NEUGEBAUER R., SCHWARTZ E., PERRET C.,
CASTELLI F., BARNETT E.D. et al. : « Illness in children after international travel : analysis from the GeoSentinel Surveillance
Network », Pediatrics, 2010 ; 125 : e1072-80.
[5] « CNR Paludisme. Rapport d’activités. Année 2009 »,
http://www.imea.fr/imea-fichiersjoints/cnrpalu/cnrpalu-2009.pdf.
[6] FREEDMAN D.O., WELD L.H., KOZARSKY P.E., FISK T., ROBINS R., VON SONNENBURG F. et al. : « Spectrum of disease
and relation to place of exposure among ill returned travelers »,
N. Engl. J. Med., 2006 ; 354 : 119-30.
[7] DELMAS G., VAILLANT V., JOURDAN N., LE HELLO S.,
WEILL F.X., DE VALK H. : « Les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes en France entre 2004 et 2009 », BEH, 2011 ; 2 : 9-12.
[8] InVS : « Maladies à déclaration obligatoire - Hépatite A - Données épidémiologiques », http://www.invs.sante.fr/fr/Dossiersthematiques/Maladies-infectieuses/Hepatites-virales/HepatiteA/Donnees-epidemiologiques, cité le 4 août 2011.
[9] JENSENIUS M., DAVIS X., VON SONNENBURG F.,
SCHWARTZ E., KEYSTONE J.S., LEDER K. et al. : « Multicenter
GeoSentinel analysis of rickettsial diseases in international travelers, 1996-2008 », Emerging Infect. Dis., 2009 ; 15 : 1791-8.
[10] CENTRE NATIONAL DE RÉFÉRENCE DES RICKETTSIES :
« Rickettsia conorii subspecies conorii. Traitement de la fièvre
boutonneuse méditerranéenne », http://ifr48.timone.univ-mrs.fr/
Fiches/index.html, cité le 4 août 2011.
[11] MACKELL S. : « Traveler’s diarrhea in the pediatric population : etiology and impact », Clin. Infect. Dis., 2005 ; 41 suppl. 8 :
S547-52.
[12] PARASHAR U.D., GIBSON C.J., BRESSE J.S., GLASS R.I. :
« Rotavirus and severe childhood diarrhea », Emerging Infect.
Dis., 2006 ; 12 : 304-6.
[13] NEWMAN-KLEE C., D’ACREMONT V., NEWMAN C.J., GEHRI M., GENTON B. : « Incidence and types of illness when traveling to the tropics : a prospective controlled study of children and
their parents », Am. J. Trop. Med. Hyg., 2007 ; 77 : 764-9.
[14] SPILF : « Prise en charge et prévention du paludisme d’importation à Plasmodium falciparum : recommandations pour la
pratique clinique 2007 (révision de la conférence de consensus
1999) », texte long, Méd. Mal. Infect., 2008 ; 38 : 68-117.
Téléchargement