L’
objectif de la campagne
de Santé en action est
d’alerter en premier lieu
les professionnels de santé et de
les inciter à profiter de chaque
contact avec le malade pour pren-
dre en compte cette problématique
et y penser toujours devant des
symptômes inhabituels. En bref, il
s’agit de modifier les comporte-
ments, de favoriser le dialogue car il
faut que les patients osent dire tous
les médicaments qu’ils prennent, y
compris ceux de l’automédication à
leurs yeux la plus banale.
Un combat de santé publique
Les effets indésirables des médica-
ments sont beaucoup plus fré-
quents chez la personne âgée de
plus de 65 ans. Or, près des deux
tiers de ces incidents sont évitables.
Depuis la prescription jusqu’à la
prise par le patient lui-même en
passant par la dispensation et l’ad-
ministration du médicament, cha-
que phase est décisive en termes
de bon usage. Il ne faut jamais
oublier qu’un médicament n’est
pas anodin et que son efficacité
thérapeutique s’accompagne par-
fois d’effets indésirables. Ceux-ci
sont d’autant plus sévères que le
traitement est mal adapté ou mal
suivi, et d’autant plus encore chez
la personne âgée qui présente des
polypathologies.
Un patient particulier
Si la vieillesse n'est pas une mala-
die, elle est pourtant marquée par
la dégradation de certaines capaci-
tés fonctionnelles qu’elles soient
rénales, cardiaques ou hépatiques
entraînant une propension à une
sensibilité aux agressions et à un
développement des maladies.
Selon une étude du CREDES, les
patients de plus de 70 ans pren-
nent en moyenne 4 à 5 médica-
ments par jour. Aussi les ordon-
nances sont complexes et de plus il
existe plusieurs prescripteurs. Les
interactions sont nombreuses et les
risques se multiplient.
Par ailleurs, oubli ou confusion, le
traitement peut être omis ou pris
deux fois, ou encore un médica-
ment peut être pris à la place d’un
autre, etc. Il est à souligner que le
grand âge voit s’instaurer une consi-
dérable variabilité inter- et intra-indi-
viduelle de la pharmacocinétique
des médicaments (distribution dans
l’organisme, transformation, élimi-
nation). Ainsi leur activité s’en
trouve parfois majorée, prolongée
ou réduite. La prescription doit tout
naturellement prendre en compte
ces données et la surveillance cli-
nique des soignants s’impose, avec
une attention particulière sur le res-
pect strict des conditions d’emploi
des doses et des horaires de prise.
Sensibiliser la personne
Devant un symptôme nouveau le
soignant doit toujours se poser la
question : “et si c’était lié au traite-
ment ?” L’infirmière ne doit pas hési-
ter à en parler au médecin et à
engager un dialogue avec le patient.
Parfois la personne âgée n’ose pas
dire qu’elle ne comprend rien à l’or-
donnance. Il faut la rassurer en lui
disant tout simplement qu’elle n’est
pas la seule, par exemple. Certains
conseils sont à dispenser : boire suf-
fisamment, manger des fruits et des
légumes, des laitages, conserver
une activité physique, faire contrôler
la vue, l’audition, l’état dentaire, etc.
Il faut rappeler que selon l’étude
SPS 2000 de l’IRDES, le taux d’hos-
Plus d’une personne âgée sur deux ne respecte pas sa prescription.
Fragile et souvent polymédiquée, elle est plus souvent victime des effets
indésirables des médicaments d’autant plus si ces derniers sont mal uti-
lisés. Une campagne de prévention est menée par Santé en action.
Gériatrie
Éviter la iatrogénie médicamenteuse
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 59 • novembre 2004
pitalisation chez les personnes de
plus de 65 ans est deux fois plus
élevé que celui observé chez les
adultes plus jeunes (directement lié
à la polypathologie). Et selon une
autre étude récente, un peu plus de
3 % de ces hospitalisations seraient
en rapport avec une iatrogenèse
médicamenteuse. Quand on sait
que les deux tiers sont évitables, la
vigilance des soignants s’impose
plus que jamais.
ALP
Infos ...
Santé en action
Santé en action
est un mouvement
qui regroupe
les organisations
professionnelles
libérales et
industrielles
de la santé.
Avec les différents
partenaires elle
lance la première
campagne nationale
de prévention
destinée à inciter
au bon usage
du médicament chez
les personnes âgées.
Le sigle du message
est AVEC : accueil,
vigilance, écoute,
conseil.
Pratique Soins
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Étude CREDES 2000
– 67 % des personnes âgées de
65 ans et plus ont acquis au
moins un produit pharmaceutique
en un mois vs 35 % pour les moins
de 65 ans. Elle est de 65 % parmi
les
personnes âgées de 65 à 74 ans ;
de 70 % chez les 75-84 ans et de
69 % chez les 85 ans et plus.
– En moyenne la consommation
par jour s’établit à 3,6 médica-
ments pour les 65 ans et plus. Elle
passe de 3,3 médicaments diffé-
rents par jour pour les 65-74 ans, à
4,0 pour les 75-84 ans et à 4,6
pour les 85 ans et plus. Les
femmes en consomment plus que
les hommes : 3,8 vs 3,3.
En un mois, 8,6 % des per-
sonnes âgées achètent un médi-
cament sans ordonnance.
La consommation est dominée
par les médicaments à visée car-
diovasculaire. Suivent les médica-
ments de l’appareil digestif, de
l’appareil locomoteur et les psy-
chotropes.
Une personne âgée sur cinq déclare
avoir acheté au moins une boîte
d’antalgique en un mois contre 12 %
pour les moins de 65 ans.
Lenquête PAQUID rapportée en
1998 indiquait que les personnes
âgées vivant en institution
consommaient davantage de médi-
caments que celles vivant au domi-
cile : 5,2 médicaments en moyenne
chaque jour. 56 % prennent plus de
4 médicaments par jour.
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