Thème de recherche de l’équipe Etude de la diversité des bactéries phytopathogènes : recherche des déterminants moléculaires de la spécificité pathovar-plantes hôtes. Unité de recherche : UMR 077 PaVé (INRA, INH, Université d’Angers) Responsables du stage : Stéphane Poussier et Charles Manceau Objectif et contexte d’étude L'objectif de ce programme est d'identifier les déterminants génétiques responsables de la spécificité d'hôte au niveau pathovar/espèce végétale chez Xanthomonas axonopodis pv. phaseoli. Les Xanthomonas et les Pseudomonas sont des bactéries phytopathogènes qui causent des nécroses sur les parties aériennes de très nombreuses plantes monocotylédones et dicotylédones. Plusieurs espèces ont été définies au sein de ces genres telle que Xanthomonas axonopodis. De plus, des groupes d'individus sont définis au sein de ces espèces en fonction de leur spécificité d'hôte : les pathovars. Un pathovar regroupe les individus d'une espèce bactérienne responsable d'un type de symptômes sur une espèce ou un groupe d'espèces végétales. Cette spécificité se situe à un niveau supérieur à celui défini par l'interaction race/cultivar. Et, contrairement à ce dernier qui repose sur une interaction gène pour gène, on ne connaît pas les bases moléculaires régissant ce niveau de spécificité. La recherche, entreprise récemment de notre groupe, des déterminants génétiques impliqués dans cette spécificité d'hôte des pathovars constitue donc une approche originale puisque jusqu'à présent aucun de ces déterminants a été mis en évidence. Le modèle choisi est l'espèce bactérienne Xanthomonas axonopodis comprenant de nombreux pathovars dont le pathovar phaseoli, l'agent responsable de la graisse commune du haricot, une maladie répandue dans toutes les zones de production du haricot, quelles soient tempérées ou tropicales. L'objectif de ces travaux est donc de mieux comprendre la spécialisation des souches du pathovar phaseoli sur le haricot et par extension la spécificité d'hôte des pathovars définis chez les espèces bactériennes phytopathogènes. Le haricot est cultivé sur tous les continents à des fins de consommation locale mais aussi de production de semences destinées à être commercialisées. Le haricot constitue pour les pays en voie de développement la principale source de protéines. La graisse commune (ou brûlure bactérienne, selon les auteurs) du haricot causée par X. a. pv. phaseoli est la bactériose la plus dévastatrice sur cette plante. Les pertes économiques attribuées à cette maladie se traduisent par une diminution de la production des semences et une réduction de leur qualité. Globalement, la réduction de rendement varie entre 10 et 45 %. Cette maladie est observée dans toutes les zones de culture du haricot aussi bien tempérées ou tropicales. Elle affecte les différents cultivars de Phaseolus vulgaris et les espèces proches telles que P. acutifolius, P. lunatus et P. coccineus. X. a. pv. phaseoli étant une bactérie transmise par semence de haricot, les échanges commerciaux sur de longues distances présentent des risques sanitaires évidents, une certification sanitaire ainsi que des "zones hors graisses" de production de semences ont été mises en place ce qui a permis de limiter l'impact de cette bactériose. Néanmoins, la maladie se manifeste toujours régulièrement. Nos connaissances sur cette maladie doivent par conséquent encore s'améliorer pour pouvoir élaborer des stratégies de lutte plus efficaces et durables. Aujourd'hui, la lutte contre cette phytobactériose repose essentiellement sur des mesures prophylactiques, avec entre autres l'utilisation de semences saines, car aucune source de résistance majeure chez Phaseolus est connue à ce jour. En apportant de nouvelles connaissances sur l'interaction entre X. a. pv. phaseoli et le haricot, nos travaux devraient ainsi contribuer à l'amélioration de la lutte contre cette maladie. Le pathovar phaseoli est scindé en deux groupes, fuscans et non-fuscans, selon l'aptitude des souches à produire ou non un pigment brun dans le milieu de culture. L'étude, réalisée par Seyed Medhi Alavi (étudiant iranien bénéficiant d’une bourse de thèse, 2004-2206, dans le cadre de la coopération bilatérale franco-iranienne), a permis de confirmer que ces deux populations définies sur un critère biologique constituent des populations génétiques distinctes. En effet, l'analyse par AFLP de la diversité génétique d'une collection mondiale de souches de X. a. pv. phaseoli et de souches appartenant à d'autres pathovars de cette espèce (pv. allii, pv. citri, pv. vesicatoria…) a révélé que les souches du pathovar phaseoli se répartissent au sein de 4 lignées génétiques. Les souches fuscans sont homogènes (une seule lignée) alors que les souches non-fuscans sont plus diverses (3 lignées). Le pathovar phaseoli présente donc une structure génétique complexe. De plus, cette analyse a montré que ces lignées se différencient autant entre elles qu'avec d'autres lignées de pathovars ayant des gammes d'hôtes très différentes telles que des Alliacées, des Citrus ou des Solanacées. Ces résultats suggèrent que le pathovar phaseoli et chacune de ses lignées génétiques possèdent des séquences nucléiques spécifiques. Avant cette analyse par AFLP, une hybridation soustractive entre la souche CFBP 4834 du pathovar phaseoli et 3 souches appartenant à d'autres pathovars de X. axonopodis, avait été effectuée pour générer un outil moléculaire de diagnostic des populations du pathovar phaseoli. Cette approche nous a permis d'isoler une séquence nucléique spécifique des souches de X. a. pv. phaseoli. Cette séquence nous a ainsi tout d'abord servi de matrice pour développer un réactif de détection moléculaire utilisé dorénavant dans les schémas de contrôle sanitaire des semences de haricot. Cette séquence permet la reconnaissance spécifique des 4 lignées génétiques du pathovar phaseoli identifiées par AFLP. La caractérisation moléculaire de cette séquence nous a permis de montrer qu'il s'agit d'une séquence d'insertion que nous avons nommé (ISXax1) (Alavi et al., soumis). Cet IS ne porte pas de gène codant une fonction qui pourrait jouer un rôle dans l'interaction avec la plante-hôte. De plus, nous avons montré qu'il existe un fort polymorphisme d'insertion de cette séquence chez les souches de X. a. pv. phaseoli. Enfin, nos résultats ont révélé qu'aucune copie de l'IS (1 à 7 copies selon les souches) est inserée dans un gène commun à toutes les souches de X. a. pv. phaseoli indiquant que cet IS n'est pas impliqué dans le déterminisme de la spécificité des souches du pathovar phaseoli vis-à-vis du haricot. Sujet de stage proposé La démarche que nous proposons maintenant pour identifier des gènes communs au pathovar phaseoli et donc des fonctions qui pourraient expliquer ce niveau de spécificité est la suivante: - Sélectionner par hybridation soustractive, les zones génomiques spécifiques de chaque lignée génétique qui constitue le pathovar phaseoli vis-à-vis des pathovars les plus proches au sein de l'espèce X. axonopodis. - Puis, extraire les zones génomiques communes à toutes les lignées du pathovar phaseoli. - Enfin, séquencer le génome commun et identifier les fonctions codées par ce génome. Nous chercherons les homologies de séquences à partir des génomes entiers déjà ou bientôt disponibles de Xanthomonas (X. a. pv. citri, X. a. pv. vesicatoria, X. campestris pv. campestris, X. c. pv.armoraciae, X. oryzae pv. oryzae, X. o. pv.oryzicola). Une mutagénèse de gènes candidats sera alors effectuée pour vérifier leur rôle dans la spécificité d'hôte. Méthodologies et techniques utilisées Microbiologie, pathologie végétale (inoculation de plantes), biologie moléculaire, PCR, Southern-blot, clonage, hybridation soustractive, analyses bioinformatiques des séquences nucléiques et protéiques.