V I E P R O F E S S I O N N E L L E L e concept de qualité a déjà été mis en place depuis plusieurs années dans l’industrie, avec le principe des normes iso 9000 et suivantes. L’industrie automobile en a fait la démonstration : on peut maintenant dire que les grands constructeurs européens ne vendent plus de “mauvaises” voitures. La pression des consommateurs a été très forte, relayée – et ceux qui s’intéressent à l’automobile le savent – par les principales revues spécialisées, qui ont multiplié les enquêtes auprès des concessionnaires, des réparateurs automobiles, des centres de contrôle technique et surtout auprès des consommateurs eux-mêmes (en témoigne l’abondant “courrier des lecteurs” de ces revues). De la même façon, la médecine pourra difficilement échapper à l’obligation de qualité. Le mouvement est d’ailleurs déjà en marche : chez les consommateurs, l’enquête du magazine “Que Choisir ?” sur les établissements hospitaliers a suscité de vives polémiques, et du côté des institutionnels, l’ANAES* a mis en route un système d’accréditation des établissements hospitaliers. L’accréditation des cabinets libéraux devrait suivre à plus ou moins long terme, selon des modalités à définir. Environnement paramédical Bien évidemment, nombre des points vérifiés par les visiteurs de l’ANAES concerneront l’environnement paramédical : accueil au téléphone, admission, accueil de l’infirmière, installation dans la chambre, amabilité du personnel, qualité des repas, respect des horaires de brancardage, de prise de sang, des examens complémentaires, respect de la chaîne de stérilisation, explication de la facture à la sortie, etc. Certains de ces éléments trouvent déjà une équivalence au cabinet médical : l’accueil au téléphone et à l’arrivée au cabinet, la ponctualité * Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé. 32 des rendez-vous, l’affichage correct des honoraires dans la salle d’attente (qui est d’ailleurs devenu une obligation légale depuis deux ans)... Acte médical Le concept de qualité En ce qui concerne la qualité de l’acte médical à proprement parler, elle comporte plusieurs volets : – L’accueil dans le bureau de consultation, l’écoute, l’information donnée au patient sur les examens à effectuer, les diagnostics envisagés, les thérapeutiques possibles, l’accord du patient à la fois pour les examens complémentaires (ce qui n’est pas trop difficile si l’examen n’est pas agressif) et pour la thérapeutique (ce qui est parfois plus difficile, notamment en ce qui concerne les infiltrations, en raison de leur aspect douloureux et de leurs effets secondaires, largement surestimés dans “l’imaginaire populaire”). – La qualité du diagnostic et de sa conséquence thérapeutique : elle est bien évidemment plus difficile à évaluer, en particulier en rhumatologie. Dans cette spécialité, beaucoup d’affections chroniques ne posent en effet aucun problème diagnostique mais nécessitent une prise en charge double : d’abord par l’écoute, celle-ci signifiant au patient qu’il n’est pas abandonné et que toutes les thérapeutiques suffisamment validées lui seront proposées, et ensuite par un programme de soins suffisamment structuré et motivant. Cela permettra d’éviter que le patient ne s’égare vers les guérisseurs et autres charlatans, dont le nombre, malgré les progrès de la médecine (et peut-être à cause de ces progrès), ne diminue toujours pas. FMC Nous pouvons néanmoins agir sur la qualité de notre diagnostic dans les cas les plus difficiles par une mise à jour régulière de nos connaissances, et j’ose penser que les rhumatologues sont bien placés dans ce domaine, si l’on tient La Lettre du Rhumatologue - n° 253 - juin 1999 V compte de l’actuelle fréquentation des sessions de FMC, à la fois nationales et régionales. Il faut également savoir demander un avis complémentaire, par exemple en présentant le dossier à des confrères ou à des réunions d’enseignement post-universitaire, voire sur des sites Internet, comme il en existe maintenant en rhumatologie (à condition que quelqu’un de compétent soit toujours prêt à répondre...). Infiltrations - manipulations Des normes de qualité ont déjà été discutées à maintes reprises en ce qui concerne les infiltrations, et en particulier la nécessité de porter ou non des gants ; nous n’y reviendrons pas. Cela a toutefois le mérite de montrer que la recherche de la qualité est devenue une réalité dans notre exercice professionnel. Des débats importants ont également eu lieu concernant les manipulations vertébrales, et notamment le danger potentiel des manipulations cervicales. L’un des aspects de recherche de la qualité dans ce domaine a été la mise en place d’un DIU de médecine manuelle sur deux ans dans plusieurs CHU de France. Il est intéressant de noter que le débat sur le concept de qualité dans les infiltrations et les manipulations a été largement suscité par les actions en justice intentées par des patients ayant I E P R O F E S S I O N N E L L E souffert de complications suite à ces gestes thérapeutiques. Faut-il s’attendre à voir des confrères accréditeurs venir dans nos cabinets, mandatés par l’ANAES ? Cela se pratique déjà au Canada : les médecins chez qui des comportements non conformes aux bonnes pratiques ont été notés sont “inspectés”, avec vérification de dossiers de patients et obligation de retourner à l’hôpital pour enseignement complémentaire en cas d’incompétence flagrante. Définitions Pour terminer, il peut être utile de rappeler quelques définitions concernant le processus de qualité, afin que chacun se sente plus à l’aise dans ce domaine. ☛ La qualité, selon la norme iso 8402, est l’ensemble des propriétés et des caractéristiques d’une entité qui lui confèrent l’aptitude à satisfaire des besoins exprimés et implicites. ☛ Pour agir sur les causes de nonqualité, il faut : – développer la prévention, – construire un plan d’action rigoureux, – agir avec une structure participative de travail, – refuser les alibis et les opinions, – s’améliorer sans cesse. ☛ Pour une démarche qualité intégrée, une dynamique d’amélioration continue est nécessaire en : – analysant les dysfonctionnements, – fixant des objectifs motivants, – établissant un plan d’action, – mettant en œuvre les outils qualité appropriés, – analysant les résultats, – recommençant. ☛ Les bases de l’accréditation : afin d’assurer l’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins, tous les établissements de santé publics et privés doivent faire l’objet d’une procédure externe d’évaluation, dénommée accréditation. Dr D. Kieffer, Strasbourg Pour en savoir plus... ■ Mise en place d’un programme d’amélioration de la qualité dans un établissement de santé. Principes méthodologiques. ANDEM, Paris, 1996. ■ L’évaluation des pratiques professionnelles dans les établissements de santé. L’audit clinique. ANDEM, Paris, 1994. ■ Jocou P., Meyer P. La logique de la valeur. Une approche européenne du management par la qualité totale. Dunod, Paris, 1996. ■ Union régionale des médecins libéraux d’Alsace. Mise en place d’une démarche qualité et évaluation. JCP(1), mars 1999. Copyright Groupe XL 1999. LES MÉDECINS LIBÉRAUX SPÉCIALISTES S’ORGANISENT Les 5, 6 et 7 février ont eu lieu les Premières Rencontres interspécialistes d’Ile-de-France. Cette initiative originale émane du Collège des spécialistes, qui rassemble la majorité des associations de spécialistes d’Ile-de-France. Ces journées ont réuni des médecins libéraux et hospitaliers de spécialités différentes et avaient pour thème les pathologies interdisciplinaires. Au sein de ce collège, la rhumatologie tient une bonne place. Des exposés de qualité ont attiré un public dont la motivation était de s’informer et de retrouver des confrères qui partagent, en pratique libérale, les mêmes problèmes d’ordre médical ou médico-légal, d’informatisation ou de mise en place de réseaux. Ce fut ainsi l’occasion de fédérer l’ensemble des spécialistes au cours d’assises, et de positionner le Collège des spécialistes comme interlocuteur de poids auprès du Conseil régional de FMC, en prouvant que les médecins libéraux sont capables de prendre en charge leur formation. F. Duriez La Lettre du Rhumatologue - n° 253 - juin 1999 33