Nous faisons de vos spécialités Nous faisons de vos spécialités notre spécialité notre spécialité É ditorial Directeur de la publication : Claudie Damour-Terrasson Rédacteur en chef : B. Combe Rédacteur en chef adjoint : J. Sibilia Comité de rédaction C. Bailly - X. Chevalier - F. Duriez - B. Fautrel P. Le Goux - E. Legrand - S. Perrot - S. Poiraudeau A. Saraux - T. Thomas - O. Vittecoq - D. Wendling Conseillers scientifiques B. Mazières (Toulouse) - Ph. Orcel (Paris) Comité de lecture M. Audran (Angers) - B. Bannwarth (Bordeaux) F. Berenbaum (Paris) - P. Bourgeois (Paris) A. Cantagrel (Toulouse) I. Chary-Valckenaere (Vandœuvre-lès-Nancy) P. Chazerain (Paris) - P. Claudepierre (Créteil) B. Delcambre (Lille) - P. Delmas (Lyon) V. Devauchelle (Brest) - M. Dougados (Paris) L. Euller-Ziegler (Nice) - F. Eulry (Paris) R.M. Flipo (Lille) - B. Fournié (Toulouse) P. Goupille (Tours) - P. Guggenbuhl (Rennes) C. Job-Deslandre (Paris) - A.C. Koeger (Paris) J.L. Kuntz (Strasbourg) - P. 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Is genetic counselling useful for Paget’s disease of bone? IP L. Michou* Mots-clés : Maladie de Paget – Sequestosome 1 – Mutation – Test génétique – Conseil génétique. Keywords: Paget’s disease of bone – Sequestosome 1 – Mutation – Genetic test – Genetic counselling. L a maladie osseuse de Paget est la pathologie osseuse métabolique la plus fréquente après l’ostéoporose dans les pays industrialisés. L’existence d’une composante génétique dans cette maladie, suspectée devant une forte agrégation familiale, est connue depuis de nombreuses années. Dans les formes familiales de la maladie de Paget, le mode de transmission est autosomique dominant : le risque théorique pour un individu dont l’un des parents est atteint de maladie de Paget est donc de 50 %. Sa pénétrance est toutefois incomplète, encore qu’elle augmente avec l’âge. En 2002, le premier gène de la maladie de Paget, appelé sequostosome 1 (SQSTM1), a été identifié sur le bras long du chromosome 5 (1). À ce jour, 14 mutations de ce gène, toutes localisées dans les exons 7 et 8, ont été mises en évidence dans des populations originaires d’Europe de l’Ouest. Dans les formes familiales, la mutation P392L, la première décrite, est la plus fréquente (23,6 %) [2], sachant qu’au moins une mutation du gène SQSTM1 a été identifiée dans 36,8 % des familles étudiées. Dans les cas sporadiques, une mutation de SQSTM1 n’a été décrite que dans 8,3 % des cas. Là encore, P392L reste la mutation la plus fréquente (7,1 %). La pénétrance de la mutation P392L est incomplète et augmente avec l’âge : si elle n’est que de 17 % avant 50 ans, elle atteint 42 % à partir de 50 ans et 87 % à partir de 60 ans (2). En France, le test génétique de la maladie osseuse de Paget est disponible en pratique médicale courante depuis la fin de l’année 2002. Une analyse effectuée sur les 94 premiers patients pagétiques testés en France a permis d’identifier au moins une mutation de SQSTM1 chez 13 % d’entre eux, la mutation P392L étant de nouveau majoritaire (8,5 %) [3]. La recherche de corrélations génotype-phénotype dans cette population a permis de montrer que les patients porteurs de mutations de SQSTM1 * Fédération de rhumatologie, hôpital Lariboisière, Paris. La Lettre du Rhumatologue - n° 340 - mars 2008 18/03/08 10:25:46 Éditorial É ditorial avaient un âge de diagnostic plus précoce (53 ans en moyenne, contre 60 ans) et une atteinte osseuse plus étendue (4 atteintes osseuses en moyenne, contre 2). Une observation similaire a été faite dans la population anglaise, où les auteurs ont montré que les patients porteurs de mutations avaient un phénotype plus sévère, en particulier en cas de mutation stop (4). Il y a quelques années, la plupart des tests génétiques réalisés étaient des “tests de reproduction” ayant pour objectif de connaître le risque de survenue d’une pathologie génétique chez un enfant à venir, par exemple un test génétique pour la mucoviscidose. Mais depuis une dizaine d’années, les tests prédictifs cherchant à déterminer le risque de développer une pathologie génétique chez l’individu testé sont devenus de plus en plus fréquents. Ces tests prédictifs incluent les tests présymptomatiques et les tests de prédisposition. Les tests présymptomatiques sont utilisés lors de la recherche de mutations dans des pathologies génétiques à pénétrance complète (par exemple, la maladie de Huntington). Les tests de prédisposition visent à rechercher la mutation d’un gène qui constitue un facteur de risque pour une maladie, la présence de la mutation indique une augmentation du risque de développer la maladie mais n’en apporte pas la certitude (par exemple, les tests génétiques pour les cancers du sein et de l’ovaire). Ce type de test est très vraisemblablement appelé à devenir le principal type de test génétique proposé dans un avenir proche pour étudier les gènes de prédisposition à des maladies communes : cancers, maladie d’Alzheimer, pathologies cardio-vasculaires, diabète, etc. L’étude des facteurs influençant la décision de faire ou de ne pas faire un test génétique montre que c’est la possibilité effective de traiter ou de prévenir la pathologie en cause qui constitue la principale source de motivation. Ainsi, quand peu de propositions thérapeutiques peuvent être offertes, la plupart des patients ne souhaitent pas connaître leur statut. Par exemple, dans la maladie de Huntington, seuls 10 % des individus à risque réalisent effectivement le test présymptomatique. Au contraire, dans le cancer du sein, qui offre des possibilités de prévention et de traitement, on estime à 50 % le pourcentage de patientes à risque qui se font dépister. Enfin, dans la polypose adénomateuse familiale, pour laquelle un traitement efficace existe, environ 80 % des individus à risque se soumettent au test prédictif (5). Dans la maladie osseuse de Paget, le seul test génétique à envisager en pratique médicale courante est la recherche de mutations du gène SQSTM1, test réalisé par séquen LR-NN-340-0308.indd 4 çage des exons 7 et 8. Ce test peut être proposé dans un but diagnostique chez un patient atteint de maladie de Paget ; il peut alors être prescrit par tout médecin en respectant les sept étapes du test génétique (tableau). La découverte de la mutation dans ce cas signe le caractère héréditaire de la maladie. L’absence de mutation n’infirme pas le diagnostic, mais elle élimine le caractère héréditaire. Aucune modification des indications thérapeutiques individuelles n’est actuellement justifiée par la découverte d’une mutation. Néanmoins, les données récentes de corrélation phénotype-génotype incitent à un suivi très régulier des patients porteurs d’une mutation de SQSTM1, ces derniers ayant un phénotype volontiers plus sévère. Lorsqu’une mutation est mise en évidence chez un patient, l’intérêt principal de la recherche de mutations chez les sujets apparentés réside dans le dépistage précoce de la maladie pour pouvoir prévenir l’évolution vers des complications. Dans ce cas, il s’agit d’un test présymptomatique qui n’est envisageable que chez une personne majeure, apparentée à une personne atteinte de maladie de Paget chez qui une mutation de SQSTM1 a été identifiée. La loi prévoit alors de renforcer la qualité de l’information avant recueil du consentement éclairé en réservant la prescription du test à des équipes pluridisciplinaires rassemblant des compétences cliniques et génétiques, dotées d’un protocole type et déclarées auprès du ministère de la Santé. La présence d’un psychologue spécifiquement rattaché à cette équipe est hautement souhaitable. L’existence de la mutation chez un apparenté asymptomatique indique a priori un risque élevé de développer une maladie de Paget radiologiquement décelable. Le dépistage précoce est recommandé à partir de l’âge de 40 ans, celui-ci reposant sur une scintigraphie osseuse, à renouveler – uniquement si l’examen est négatif – tous les dix ans jusqu’à l’âge de 70 ans, associée au dosage des phosphatases alcalines totales. En cas de découverte d’une maladie de Paget cliniquement asymptomatique, les indications thérapeutiques sont à discuter en équipe dans le but de prévenir la survenue de complications, Tableau. Déroulement du test génétique. 1. Information 2. Décision en consultation individuelle 3. Recueil du consentement par écrit 4. Prescription avec attestation de recueil de consentement 5. Respect du droit de ne pas savoir 6. C ommunication du résultat par le prescripteur en consultation individuelle 7. Respect du secret médical, y compris vis-à-vis de la famille. La Lettre du Rhumatologue - n° 340 - mars 2008 18/03/08 10:25:47 éventuellement après une période de surveillance radiologique annuelle. Les atteintes du crâne, du rachis et des extrémités articulaires, qui concernent plus de la moitié des patients en fréquences cumulées, doivent faire l’objet d’une attention particulière, car elles évoluent souvent vers des complications. Actuellement, les traitements par bisphosphonates peuvent être prescrits chez les patients pagétiques asymptomatiques en cas d’atteinte sur des localisations à risque ou comportant un risque de complication. Bien qu’il existe peu de doutes sur la corrélation entre l’évolutivité et l’apparition de complications en rapport avec la déformation osseuse, et sur l’efficacité des bisphosphonates récents pour bloquer la progression des déformations, aucune étude spécifique n’a démontré que cette stratégie thérapeutique permet de diminuer l’incidence des complications à long terme. À ce jour, en France, environ 220 tests génétiques ont été prescrits dans la maladie osseuse de Paget ; il s’agissait dans la plupart des cas de tests diagnostiques réalisés chez des patients atteints. Dans le cadre du conseil génétique offert au patient lors de la réalisation du test, il est systématiquement rappelé que c’est au patient lui-même d’informer ses apparentés du résultat du test génétique, notamment en cas de positivité, afin que les sujets apparentés puissent consulter en vue d’un test présymptomatique, s’ils le souhaitent. Compte tenu de la présence d’équipes pluridisciplinaires pour les tests présymptomatiques dans tous les centres hospitaliers universitaires français, on peut supposer que le faible nombre de sujets apparentés ayant fait un test présymptomatique dans la maladie de Paget est en rapport avec une volonté de ne pas connaître leur statut génétique pour cette maladie. Cela peut être dû aux incertitudes concernant l’efficacité d’un éventuel traitement préventif, ou au caractère rarement symptomatique de cette affection. Le coût actuel du test génétique est de 125 € environ. La démarche consistant à proposer un test génétique à toute personne atteinte de la maladie de Paget, puis, en cas de mutation seulement, aux sujets apparentés, test suivi d’une scintigraphie osseuse et, éventuellement, d’un traitement par bisphosphonates, n’a pas fait l’objet d’une évaluation médico-économique. Toutefois, le coût lui-même du test, qui ne sera réalisé qu’une seule fois pour un individu donné, ne paraît pas constituer un obstacle dans cette démarche, sachant que le coût annuel de la maladie de Paget par patient La Lettre du Rhumatologue - n° 340 - mars 2008 LR-NN-340-0308.indd 5 Éditorial É ditorial atteint en France est estimé à 1 269 € (6). Cependant, il n’existe à ce jour aucune démonstration formelle de l’efficacité du traitement précoce en termes de prévention des complications de la maladie. Néanmoins, la diminution du nombre de patients atteints de formes sévères de la maladie, observée depuis quelques années, semble coïncider avec l’utilisation plus répandue des bisphosphonates. Une étude visant à évaluer l’acceptabilité d’un test génétique suivi d’un traitement préventif par acide zolédronique 5 mg versus placebo chez les sujets apparentés aux patients atteints de maladie de Paget devrait débuter prochainement (7). En conclusion, malgré la faible prévalence actuelle de la maladie de Paget, la proportion de patients ayant bénéficié d’un test génétique n’est pas négligeable, ce qui traduit une bonne transmission de l’information par les rhumatologues sur le test et une acceptabilité élevée du test génétique malgré l’absence de réel bénéfice direct pour les patients. La faible proportion de tests génétiques chez les sujets apparentés peut s’expliquer par le caractère rarement symptomatique de la maladie et par les incertitudes relatives à l’effet d’un traitement préventif. Si l’étude prévue prochainement en Europe démontre l’efficacité du traitement préventif, il est probable que la proportion de tests présymptomatiques chez les sujets apparentés augmentera de façon importante. ■ Références bibliographiques 1. Laurin N, Brown JP, Morissette J, Raymond V. Recurrent mutation of the gene encoding sequestosome 1 (SQSTM1/p62) in Paget’s disease of bone. Am J Hum Genet 2002;70:1582-8. 2. Morissette J, Laurin N, Brown JP. Sequestosome 1: mutation frequencies, haplotypes, and phenotypes in familial Paget’s disease of bone. J Bone Miner Res 2006;21 (Suppl.2):P38-P44. 3. Collet C, Michou L, Audran M et al. Paget’s disease of bone in the French population: novel SQSTM1 mutations, functional analysis and genotype-phenotype correlations. J Bone Miner Res 2007;22:310-7. 4. Hocking LJ, Lucas GJA, Daroszewska A et al. Novel UBA domain mutations of SQSTM1 in Paget’s disease of bone: genotype-phenotype correlation, functional analysis, and structural consequences. J Bone Miner Res 2004;19:1122-7. 5. Marteau TM, Croyle RT. Psychological responses to genetic testing. BMJ 1998;316:693-6. 6. Saraux A, Brun-Strang C, Mimaud V et al. Epidemiology, impact, management, and cost of Paget’s disease of bone in France. J Bone Spine 2007;74:90-5. 7. Langston AL, Johnston M, Roberston C et al. Protocol for stage I of the GAP study (genetic testing acceptability for Paget’s disease of bone) – An interview study about genetic testing and preventive treatment: would relatives of people with Paget’s disease want testing and treatment if they were available? BMC Health Services Research 2006;6:71. 18/03/08 10:25:48