L’anisakiase : nouvelle cause d’urti-
caire
L’ Anisakis est l’ascaris de poisson, ren-
contré fréquemment en Asie mais aussi
en Europe. Quand le poisson est peu
cuit, fumé ou mariné avec différentes
sauces pimentées, le parasite n’est pas
tué. Une étude espagnole (Daschner A.
et coll. Br J Dermatol 1998 ; 139 : 822-8)
a été réalisée chez 26 patients ayant
consulté au service des urgences pour
différents symptômes allergiques :
urticaire (18 cas), œdème (6 cas), éry-
thème (2 cas) et qui avaient récemment
consommé du poisson cru. Tous ces
patients ont eu un test cutané positif à
l’antigène et une élévation des IgE spé-
cifiques. Or, la moitié de ces patients
seulement avaient des troubles diges-
tifs, qui sont plus significatifs de l’ani-
sakiase. Ces manifestations allergiques
sont apparues entre 20 minutes et
23 heures après l’ingestion du poisson
cru (anchois, colin). Ces patients ont été
traités par des antihistaminiques.
Il faut donc connaître cette symptoma-
tologie, qui peut apparaître après
consommation de certaines spécialités
locales telles que sushi (Japon), anchois
au vinaigre (Espagne), hareng fumé
(Pays-Bas) ou rollmops (Allemagne).
P. Bourée, Le Kremlin-Bicêtre
Transmission de la tuberculose :
l'isolement du patient bacillifère est
nécessaire, mais - peut-être - insuf-
fisant
Avec la résurgence de la tuberculose, la
description de bacilles multirésistants
aux antibiotiques et de leur transmis-
sion nosocomiale, de nombreux travaux
ont été entrepris ces dernières années
pour identifier les facteurs prédictifs de
tuberculose bacillifère à l'admission à
l'hôpital et définir les stratégies d'isole-
ment des patients suspects.
Deux publications récentes ont abordé
sous un angle différent la question du
risque de transmission nosocomiale de
la tuberculose.
!La première étude (K.R. Venkatarama
et coll. Ann Intern Med 1999 ; 130 :
404-11) a évalué les délais entre l'ad-
mission à l'hôpital, la suspicion de
tuberculose et la mise en route du trai-
tement antituberculeux. L'enquête s'est
déroulée dans une région à faible
incidence aux États-Unis, puisque seu-
lement 203 tuberculoses ont été docu-
mentées au laboratoire de microbiolo-
gie en 9 ans (1988-96) dans un réseau
hospitalier de 3 400 lits. Le délai médian
entre l'admission et la mise en route du
traitement était de 6 jours, supérieur à
24 heures pour 75 % des patients et à
10 jours pour un tiers d'entre eux. Les
facteurs statistiquement associés à un
traitement dans les 24 premières heures
étaient la présence des symptômes les
plus évocateurs : lésion cavitaire pul-
monaire, atteinte méningée, hémopty-
sie et positivité de l’examen direct des
crachats.
Les auteurs ont ensuite examiné les
délais entre l'admission et la suspicion
de tuberculose, et entre la suspicion et
le début du traitement. Le délai médian
de suspicion était relativement court,
d’un jour. En revanche, le délai médian
de mise en route du traitement après la
suspicion était de 3 jours, et supérieur à
24 heures pour 64 % des patients. Il était
plus court lorsque l’examen direct des
crachats était positif (3 jours) que
lorsque l'examen était négatif (4 jours).
Malgré les recommandations nationales
sur la prévention de la tuberculose
nosocomiale émises au cours de
l'étude, ces délais n'ont pas été rac-
courcis au cours des dernières années.
Le caractère rétrospectif de l'enquête n'a
pas permis de relever la date de mise en
isolement des patients suspects de
tuberculose, et les auteurs postulent
qu'elle a dû être simultanée à la suspi-
cion. Ils soulignent que le retard à la
mise en route du traitement, en parti-
culier en cas d'examen direct positif,
allonge d'autant la période bacillifère et
l'exposition du personnel et des autres
patients.
!La seconde étude (M.A. Behr et coll.
Lancet 1999 ; 353 : 444-9) visait à éva-
luer les risques de transmission de la
tuberculose à partir des patients avec
examen direct des crachats négatif.
Les auteurs ont réalisé une analyse
génomique de 1 359 des 1 574 souches
de bacille de Koch (BK) isolées en 6 ans
dans le comté de San Francisco. L'ana-
lyse moléculaire a permis d'identifier
71 grappes de patients avec la même
souche, et d'y rechercher le cas index.
Dans 28 des 71 grappes (39 %), les cas
index avaient un examen direct des cra-
chats négatif, et 32 des 183 cas secon-
daires (17 %) ont été considérés comme
acquis à partir d'un patient avec examen
direct négatif. Le taux de transmission à
partir d'un patient avec examen direct
négatif était mesuré à 22 % de celui à
partir d'un patient avec examen direct
positif. La collecte de données micro-
biologiques sans enquête clinique per-
mettant de décrire les grappes de
patients est sujette à de nombreux
biais : l'analyse systématique de ces
biais ne modifiait pas les conclusions de
l'étude.
Dans leur discussion, les auteurs rap-
pellent que la transmission de la tuber-
culose à partir d'un cas index avec exa-
men direct négatif est un fait déjà bien
établi, mais qui n'avait pas été démon-
tré sur une aussi large population, avec
des méthodes d'analyse moléculaire. Ils
en tirent deux conclusions. Pour la pra-
tique hospitalière, ils recommandent la
mise en isolement des patients forte-
ment suspects de tuberculose, même si
l'examen direct des crachats est néga-
tif, jusqu'à réponse clinique, surtout si
le patient est hospitalisé dans une unité
où séjournent des patients immunodé-
primés. Cette attitude est, en partie, jus-
tifiée par les données de leur étude, où
le délai médian de mise en route du trai-
tement antituberculeux est de 12 jours
chez les patients avec examen direct
négatif (5 jours dans l'étude de Venka-
tarama et coll.). Dans les pays en voie
de développement, où la lecture des
lames de crachats peut être moins per-
formante, ils suggèrent que les patients
avec examen direct négatif contribuent
de façon plus importante qu'on ne le
pensait à la dissémination du BK.
J.C. Lucet
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La Lettre de l’Infectiologue - Tome XIV - n° 6 - juin 1999
les brèves