HGE-EBM maq. 14/01/03 9:11 Page 359 Radiologie Appendicite : scanner, échographie ou ni l’un ni l’autre ? Ce qu’il faut retenir ● L’absence d’anomalie appendiculaire au scanner permet d’éliminer avec une quasi! certitude le diagnostic d’appendicite" Niveau de preuve _Ë 2 appendicite a toujours fait l’objet de controverses, mais on est désormais loin du concept de Mondor : “Dans le doute, on ne s’abstient pas.” Le dogme de l’absence de parallélisme anatomo-clinique a été enterré (conférence de l’ANDEM, 1997). L’imagerie a tenté de bouleverser ce schéma thérapeutique pour réduire le risque d’appendicectomie sur appendice sain ; cette notion d’appendicectomie négative fait toutefois l’objet de grande variation selon les auteurs, avec des valeurs oscillant entre 8 et 35 % selon les séries chez l’adulte et entre 28 et 57 % chez l’enfant. Il n’existe pas actuellement de méta-analyse reprenant l’ensemble des données de la littérature, mais de nombreuses études prospectives, chez l’enfant comme chez l’adulte, ont confronté les techniques ultrasonores et scanographiques (1) pour le diagnostic d’appendicite. Elles objectivent une plus grande sensibilité (entre 70 et 95 %) et spécificité (entre 85 et 89 %) du scanner par rapport à l’échographie, cette dernière demeurant un examen opérateur dépendant (en particulier pour la visibilité d’un appendice Une échographie normale n’élimine pas le diagnostic d’appendicite" Elle a toutefois une grande sensibilité et spécificité chez l’enfant# voisine de celle du scanner" ● sain) et dont la sensibilité varie de 34 à 70 % et la spécificité de 74 à 85 %. Une étude importante chez l’enfant (2) valide une performance identique des deux techniques en termes de sensibilité et de spécificité, oscillant entre 90 et 100 %. La plupart des études publiées démontrent un bénéfice de l’utilisation du scanner en urgence, en termes de réduction d’appendicectomie inutile, d’une diminution de prise en charge chirurgicale et d’une réduction du temps d’hospitalisation. Des études plus récentes (3) ont montré des résultats contraires, avec un possible effet délétère d’un retard diagnostic et thérapeutique induit par l’étape de l’imagerie ! Il semble que ces nombreuses variations relèvent essentiellement du fonctionnement de chaque institution, de la proximité entre les services d’urgence et le département de radiologie, et de la disponibilité du matériel d’imagerie et des opérateurs. Il existe également peu d’études multicentriques et cela constitue très certainement un biais de méthodologie. De toutes ces controverses semble toutefois émaner un véritable consensus pour admettre que : – chez l’adulte, une échographie normale n’élimine pas le diagnostic d’appendicite (valeur prédictive de 57 %). Mais dans une étude randomisée récente, l’échographie a permis de réduire le délai de prise en charge opératoire (4) ; – chez l’enfant, l’échographie est intéressante en première intention devant toute douleur abdominale pour affirmer le diagnostic La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 6 - vol. V - novembre-décembre 2002 359 HGE-EBM maq. 14/01/03 9:11 Page 360 Xä | w x Ç v x @ u t á x w Å x w | v | Ç x d’appendicite, et reconnaître une autre pathologie (adénolymphite mésentérique, kyste ou torsion d’ovaire chez l’adolescente) ; – chez l’adulte, le scanner doit préférentiellement être réservé aux tableaux clinico-biologiques douteux. La valeur prédictive négative du scanner atteint des valeurs de 90-100 %. L’échographie demeure intéressante chez la femme en période d’activité génitale pour éliminer un sepsis pelvien (à type d’abcès tubo-ovarien) ou une grossesse extra-utérine. De manière générale, l’imagerie permet d’appréhender de nombreux diagnostics différentiels comme la maladie de Crohn, une diverticulite cæcale ou sigmoïdienne, une appendicite épiploïque, un problème urologique ou un infarctus du grand épiploon. De nombreux chirurgiens proposent actuellement de réaliser un scanner d’emblée pour tout syndrome appendiculaire atypique de l’adulte comme devant une suspicion de diverticulite sigmoïdienne, sans passer par l’étape échographique en fonction des disponibilités du matériel d’imagerie pour ne pas compromettre un diagnostic précoce. Cela confirme la nécessité actuelle d’envisager la présence d’un scanner à proximité des services d’urgence, au même titre que pour le concept actuel de prise en charge des polytraumatisés. Grâce à cette approche concertée radio-clinique, la plupart des études actuelles affichent un taux d’appendicectomie négative bas, moins de 10 %. On dispose désormais d’études prospectives comme celle de Horton (5) ayant montré qu’un scanner sans injection permettait d’obtenir des résultats pertinents en termes de sensibilité (97 %) et de spécificité (100 %) dans les cas d’appendicites atypiques. Il faut néamoins rappeler que la priorité de la surveillance clinique avec un avis chirurgical a été rapportée dans de nombreuses études prospectives (6). Finalement, l’exploration de tout syndrome appendiculaire confondu aboutit à des explorations scanographiques inutiles pour plus de 20 % des patients. C’est pourquoi d’autres équipes ont montré le bénéfice d’une procédure sélective en termes de coût et de rapport coût/efficacité, même chez l’enfant. 360 R É F É R E N C E S 1. Wise WS, Labuski RM, Kasales JC et al. Comparative assessment of CT and sonography techniques for appendiceal imaging. Am J Roentgenol 2001, 176 : 933-41. 2. Lowe LH, Penney MW, Stein SM et al. Unenhanced limited CT of the abdomen in the diagnosic of appendicitis en children. Am J Roentgenol 2001 ; 176 : 31-5. 3. Lee SL, Walsh AJ, Ho HS. Computed tomography and ultrasonography do not improve and may delay the diagnosis and treatment of acute appendicitis. Arch Surg 2001 ; 136 : 556-62. 4. Douglas Charles, Macpherson Neil, Davidson P, Gani Jonathon. Randomised controlled of ultrasonography in diagnosis of acute appendicitis, incorporating the Alvarado score. Br Med J 2000, 321 : 919-22. 5. Horton MD, Counter SF, Florence MG, Hart MJ. A prospective trial of computed tomography and ultrasound for diagnosing appendicitis in the atypical patient. Am J Surg 2000 ; 179 : 379-81. 6. Wilson EB, Cole JC, Nipper ML et al. Computed tomography and ultrasonography in the diagnosis of appendicitis : when are they indicated ? Arch Surg 2001 ; 136 : 670-5. Autres ? uestions non résolues ◆ Faut-il distinguer définitivement les populations pédiatriques et adultes dans la prise en charge de l’appendicite ? ◆ Faut-il préconiser d’emblée une exploration scanographique ou une échographie première ? ◆ Faut-il systématiquement réaliser des scanners avec injection de produit de contraste iodé ? La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 6 - vol. V - novembre-décembre 2002