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Des conséquences en chaîne dans l’économie internationale
Xerfi Global
Alexander Law, Directeur de Xerfi Global
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« Des conséquences
en chaîne dans
l’économie
internationale »
La crise japonaise concerne toutes les économies mondiales. Au-delà de l’impact
direct de ces événements tragiques sur la croissance de la troisième puissance
économique mondiale, leurs effets en chaîne bouleversent l’équilibre déjà instable de
la croissance internationale. L’impact le plus immédiatement visible concerne bien
entendu les grandes places financières. Il est bien trop tôt, évidemment, pour tirer ne
serait-ce qu’un bilan préliminaire de la crise, mais la nervosité s’est immédiatement
emparée de toutes les bourses mondiales. Ce genre d’événements imprévus ébranle
une confiance qui revenait à peine, alors que la croissance commençait déjà à
montrer des signes d’essoufflement. Les investisseurs redoublent de prudence
donnant lieu à une volatilité extrême, proche de celle que l’on voyait au plus fort de la
crise financière de 2008-2009. Au Japon, pour tenter de calmer les marchés, la
banque centrale s’efforce d’alimenter le système financier en liquidités, ouvrant
potentiellement la voie à la formation ultérieure de bulles avec des conséquences sur
toute la région.
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Plus globalement, c’est l’ensemble des marchés financiers qui est affecté. Sur le
marché des changes notamment, tout indique que le yen va poursuivre sa remontée
face au dollar, pénalisant au passage la compétitivité déjà écornée des exportateurs
japonais. De fait, les investisseurs locaux vont rapatrier leurs fonds situés à l’étranger
afin de financer la nécessaire reconstruction. Cela pose, en creux, le problème du
financement de la dette américaine. En effet, le Japon est le deuxième détenteur
extérieur de bons du trésor américain. Fin 2010, son poids dépassait même 20% de
la détention totale, juste derrière la Chine. Cela pourrait mettre sous pression les taux
d’intérêt américains au moment où la Fed commençait à chercher la porte de sortie à
sa politique monétaire ultra accommodante. Dans ces conditions, la che des
banques centrales mondiales de difficile devient quasiment impossible. En Europe,
les regards se tourneront inéluctablement vers la BCE.
Jean-Claude Trichet avait quasiment annoncé une hausse des taux en avril afin de
calmer des tensions inflationnistes naissantes, en particulier en Allemagne. Et la
situation ne va pas s’arranger. La décision d’Angela Merkel d’interrompre l’activité
dans les installations nucléaires âgées de plus de trente ans fait déjà flamber les prix
de l’électricité. Et pourrait donc bien alimenter un peu plus l’inflation. Mais l’impact de
la crise sur l’économie est tellement fort qu’une telle décision pourrait bien à son tour
faire rechuter l’économie européenne. Car c’est surement dans l’économie réelle que
les conséquences de ces événements seront le plus rapidement et le plus
tangiblement ressenties.
Le Japon a bâti sa stratégie économique autour de sa compétitivité extérieure et se
situe au quatrième rang des exportateurs mondiaux. Sa vraisemblable entrée en
récession va forcément affecter la croissance chinoise, au moment même elle
montrait des signes de faiblesse. Perturbée par des tensions inflationnistes de plus
en plus aigües, soucieuse d’une demande occidentale qui commence à vaciller, la
Chine pâtira de la crise japonaise qui représente un fournisseur majeur de son
industrie. Ce sont d’ailleurs les chaînes de logistique qui vont les premières souffrir
de la paralysie de l’économie nippone. Le Japon joue un rôle clé dans le secteur de
l’électronique avec des composants qui sont utilisés dans nombre de biens de
consommation courante. Le pays produit par exemple 30% des mémoires flash dans
le monde, ces petites cartes indispensables pour stocker des données dans les
tablettes, les appareils photos ou encore les smartphones.
Le blocage de l’activité de Toshiba, géant du secteur s’est déjà accompagné d’une
nette hausse des prix. On ne peut dès lors que s’interroger sur les effets d’une
rupture de la chaîne d’approvisionnement sur un Apple par exemple. La firme de
Cupertino, qui fait déjà face à des ruptures de stocks pour sa dernière tablette, gère
au plus fin l’ensemble de la chaîne de valeur de ces produits, en faisant appel à des
fournisseurs de tous horizons. L’an passé, le groupe éprouvait déjà des difficultés à
s’approvisionner en écrans LCD qu’il achète notamment auprès des Japonais Sharp
et Toshiba. Au total, sur son produit phare, l’Iphone, 34% de la valeur des matériels
utilisés est d’origine japonaise dans un processus de production où interviennent
neuf firmes situées dans six pays différents !
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Cette situation illustre aujourd’hui la complexité des chaînes de valeur à l’échelle
mondiale. A la recherche des coûts les plus bas, les entreprises ont fragmenté leur
activité entre les pays, au risque de voir tout leur équilibre bouleversé en cas de
défaillance d’un des maillons de la chaîne. C’est très clairement la situation qui se
met en place aujourd’hui. Une stratégie qui parait imparable à l’échelle
microéconomique peut subitement s’enrayer avec des conséquences en cascade sur
toute l’économie. Mais le poids du Japon ne se limite pas à l’électronique puisque le
pays représente également plus de 17% des exportations mondiales d’automobiles,
16% pour les navires, 14% pour les machines outils ou encore 13% pour les
appareils d’optique.
Même si les perturbations de la production ne devraient être que provisoires, la
remise en ordre de marche sera longue. Il faudra en effet reconstituer la chaîne de
logistique, en aidant les entreprises sous-traitantes, et rétablir les infrastructures
routières et portuaires. Au fond, la deuxième puissance technologique mondiale va
créer un blocage pour l’ensemble de la croissance internationale Surtout, elle va
constituer un motif supplémentaire pour compartimenter un peu plus l’économie
mondiale. Après la crise financière, qui s’était propagée à tous les pays du monde,
les tragiques événements au Japon rappellent une fois de plus aux entreprises et
aux Etats les risques économiques liés à la globalisation et à l’internationalisation de
la chaîne de valeur. Derrière la catastrophe se prépare, sans doute, un pas de plus
vers la déglobalisation.
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