La Lettre du Gynécologue • n° 345 - octobre 2009 | 27
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du tout en isolant et en hospitalisant des patients qui
auraient pu rester chez eux sans problèmes. Nous
avons “obéi aux ordres”…
Pourtant, très tôt, l’allègement du dispositif d’accueil
et de prise en charge de ces patients a été demandé
(par J.P. Stahl, président de la Société de pathologie
infectieuse de langue française [SPILF], dans une lettre
ouverte aux tutelles du 8 juin 2009). Nous avons mis
beaucoup de temps à être entendu. Le virus, comme le
nuage de Tchernobyl, aurait-il pu s’arrêter aux frontières
de la France ? Les politiques l’ont peut-être espéré. En
maladies infectieuses, nous sommes cependant tous
concernés, et souvent au-delà des frontières tracées par
la géographie ou l’homme. Finalement, la constatation
définitive de la pandémie et de la diffusion du virus
partout en France a eu raison de l’acharnement des
autorités à vouloir confiner la grippe dans des hôpitaux
de référence. Et c’est tant mieux.
Un milliard d’euros
pour le vaccin
Un milliard d’euros, c’est le montant de la somme
accordée par les autorités françaises aux laboratoires
pharmaceutiques pour développer un vaccin (le montant
de la somme, aux États-Unis, était de 1 milliard de dollars
à la mi-août 2009). C’est une nouvelle dont les labo-
ratoires pharmaceutiques, entreprises privées, doivent
se réjouir. Mais il est d’abord bien de noter l’investisse-
ment fait par les pouvoirs publics quand la santé de la
population est potentiellement mise en danger. C’est une
application du principe de précaution, ici comme dans
d’autres domaines. Ce n’est pas le cas de bien des pays.
Nous sommes privilégiés. Cela coûte aussi très cher. Et
ce privilège rend certains d’entre nous mal à l’aise. Pour
M. Gentilini, “c’est une mesure qui est dans la démesure”,
alors que la pandémie actuelle est qualifiée de “pandémie
de l’indécence” (Le Monde, 6 août 2009). Un seul chiffre :
cette somme représenterait 3 fois plus que l’aide de la
France aux pays en voie de développement (dans ces pays,
le nombre de décès annuels dus au paludisme est estimé
à 1 million). Effectivement, la comparaison est instructive.
D’un autre côté, la baisse de la TVA dans la restauration
a coûté au contribuable pas loin de 3 milliards d’euros,
somme considérée comme “une poignée de cacahuètes
sur fond de dèche budgétaire” (Le Canard Enchaîné, 19
août 2009). Le gouffre de la dette se creuse, mais c’est
un autre problème… En fait, comme le conclut M. Genti-
lini, “un mort ici compte beaucoup plus que des milliers
ailleurs”. Les pays du Sud n’affronteront pas cette maladie
avec les mêmes facilités que nous. C’est malheureuse-
ment vrai pour beaucoup de maladies et de nombreuses
autres choses ; et la grippe vient nous rappeler ce fossé,
pas seulement sanitaire, qui s’élargit.
Un vaccin espéré
sans effets indésirables
En matière d’efficacité vaccinale, force est d’attendre
les résultats des essais en cours, mais rappelons quand
même que l’efficacité du vaccin antigrippal habituel n’est
pas celle du vaccin contre la fièvre jaune. Le vaccin permet
de prévenir la grippe chez 70 % à 90 % des personnes
vaccinées. Il réduit jusqu’à 60 % la gravité de la maladie
chez les personnes âgées, et jusqu’à 80 % le risque de
mortalité (5). Et il faudra peut-être 2 injections plutôt
que 1. Enfin, ce vaccin sera disponible dans des temps
records, à peine 6 mois après le début de l’épidémie. Les
effets indésirables potentiels font tout de même réflé-
chir nos collègues américains (6). De fait, ils ont déjà eu,
en 1976, l’expérience d’une épidémie de virus “porcin”
A/H1N1 et, dans l’attente d’une épidémie (qui n’est jamais
venue), ils avaient vacciné des dizaines de milliers de volon-
taires avec le candidat vaccin. Un syndrome de Guillain-
Barré fut observé chez environ 500 personnes (8,8 cas pour
1 million de vaccinés contre 1 cas pour 1 million de personnes
non vaccinées) avec 25 décès. Ces résultats ont été ensuite
rediscutés, l’incidence du syndrome de Guillain-Barré a été
poussée à la hausse et celle des cas imputés à la vaccination
abaissée, si bien que le risque relatif s’en est réduit d’autant,
la différence devenant plus ou moins significative selon les
études. Quoi qu’il en soit, pendant ce temps, l’épidémie de
grippe A/H1N1, restée finalement limitée à Fort Dix, aux
États-Unis, avait touché 230 soldats et fait 1 mort. Une telle
histoire ne devrait pas se reproduire ici. Des spécialistes de
la vaccination telle Brigitte Autran ne sont pas inquiets. Pour
elle, “les adjuvants utilisés sont classiques, déjà largement
utilisés pour d’autres vaccins… Les effets secondaires sont
faibles et connus… Des centaines de milliers de personnes
ont été vaccinées avec ce type d’adjuvants, sans effets
secondaires sérieux” (Libération, 16 septembre 2009).
Néanmoins, il nous faudra être pharmacovigilant.
En pratique
Dans l’attente de la vaccination antigrippale A/ H1N1 mexi-
caine, la principale recommandation que l’on puisse faire est
de ne pas oublier de se vacciner contre la grippe saisonnière
et de recommander cette vaccination aux voyageurs, aux
enfants, aux femmes enceintes, et à toutes les personnes
à risque. Il nous faut être particulièrement attentif au
personnel soignant, car la couverture vaccinale anti-
grippale est loin d’être parfaite parmi nous (5). ■
1. Mutsch M, Tavernini M, Marx
A et al. Influenza virus infection
in travelers to tropical and
subtropical countries. Clin
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2. Thompson WW, Shay DK,
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associated with influenza and
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in the United States. JAMA
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3. Thompson WW, Shay DK,
Weintraub E et al. Influenza-
associated hospitalizations
in the United States. JAMA
2004;292:1333-40.
4. Jamieson DJ, Honein MA,
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influenza virus infection during
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2009; 374(9688):451-8.
5. Pearson ML, Bridges
CB, Harper SA;
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Practices Advisory Committee
(HICPAC); Advisory
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Practices (ACIP). Influenza
vaccination of healthcare
personnel: recommenda-
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ACIP. MMWR Recomm Rep
2006;55(RR-2):1-16.
6. Evans D, Cauchemez S,
Hayden FG. “Prepandemic”
immunization for novel
influenza viruses, “swine
flu” vaccine, Guillain-Barré
syndrome, and the detection
of rare severe adverse events.
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Références
bibliographiques