ASA 2004 ASA 2004 CHAPITRE 2 Agents de l’anesthésie générale La succinylcholine L’utilisation de la succinylcholine à l’induction reste largement répandue outre-Atlantique (États-Unis et Canada). La dose habituellement préconisée est de 1 mg/kg. Des études récentes (Naguib et al., Anesthesiology 2003;99: 1405-9) ont comparé l’efficacité de doses plus faibles (0,5 à 1 mg/kg), dont l’intérêt serait de reproduire des conditions d’intubation similaires aux doses fortes tout en réduisant la durée d’apnée. Cette réduction de durée diminuerait elle-même le risque de désaturation en cas de ventilation difficile ou impossible au masque facial. L’intérêt potentiel de la réduction de la durée d’apnée a été largement discuté dans la littérature au cours de cette dernière année : Donati estime ainsi, dans un éditorial récent (Anesthesiology 2003), que réduire la dose d’induction expose dans 5 % des cas à des conditions d’intubation insuffisantes sans réduction de la durée d’apnée. Deux études ont de fait A confirmé des conditions d’intubation orotrachéale similaires, sans réduction de la durée d’apnée. Naguib et al. (abstract A-1176), dans un travail prospectif et randomisé mené chez trois groupes de 20 patients, comparent le sérum salé et la succinylcholine aux doses de 0,56 mg/kg et de 1 mg/kg. Après une préoxygénation de 3 minutes, l’induction est réalisée par fentanyl 2 µg/kg et propofol 2 mg/kg, puis l’une des trois solutions est injectée. Le patient n’était pas ventilé jusqu’à ce que la SaO2 chute au-dessous de 90 %, puis il a été ventilé et intubé. Le critère principal était la durée d’apnée. Dans les deux groupes “succinylcholine”, les auteurs ne retrouvaient pas de différence significative concernant la durée d’apnée et la désaturation (figure). La conclusion de cet abstract renforce les craintes et les réserves émises par Donati, en montrant que la diminution de la dose de succinylcholine au cours de l’induction ne permet pas de réduire significativement la durée d’apnée. B 100 Pourcentage de patients avec SaO2 > 90 % 12 Temps (mn) 10 8 6 * 4 2 0 * p < 0,05 vs autres groupes Salé Succi. 0,56 mg/kg Succi. 1 mg/kg 90 80 70 Salé 60 50 40 30 20 10 0 Succi. 0,56 mg/kg Succi. 1 mg/kg 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 Temps (mn) Figure. Durée d’apnée (A) et évolution de la SaO2 (B) (sérum salé vs succinylcholine 0,56 et 1 mg/kg). 14 Le Courrier de l’algologie (4), no 1, janvier/février/mars 2005 L’étomidate Deux formes commerciales existent en France pour l’étomidate : une émulsion lipidique (Lipuro®) et une forme plus classique, non lipidique (propylèneglycol 35 %). Une étude pharmacocinétique et pharmacodynamique confirme que les caractéristiques de ces deux formulations sont identiques en pratique clinique, sauf au moment de l’induction, où la perte de conscience est plus rapide avec la forme lipidique. Gin et al. (abstract A-492) injectent chez 20 patients l’une ou l’autre des deux solutions en perfusion continue (2 mg/kg/h) : la perte de réponse verbale intervient en 3,6 ± 0,5 mn (Lipuro®) contre 6,4 ± 1,5 mn (propylèneglycol) (p < 0,001). À ce stade, la concentration plasmatique de l’émulsion lipidique est de 443 ± 91 ng/mL contre 523 ± 72 ng/mL (propylèneglycol) (p = 0,039). Par la suite, plus aucune différence n’est retrouvée en termes de clairance (0,02 ± 0,01 vs 0,03 ± 0,02 L/mn) ou de volume de distribution (0,44 ± 0,29 vs 0,34 ± 0,13 L/kg). Les effets sur le BIS™ sont équivalents dans les deux groupes, ainsi que le délai de réveil. Les auteurs concluent que la composition lipidique explique la vitesse d’équilibration plus rapide entre les compartiments et le moindre délai de perte de conscience pour la formulation lipidique. ■ Le Courrier de l’algologie (4), no 1, janvier/février/mars 2005 ASA 2004 ASA 2004 15