
La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire • n° 423 - mars 2009 | 21
Points forts
Les arguments étaient nombreux pour affirmer un bénéfice du contrôle glycémique sur le risque cardiovas-
»
culaire, mais des arguments directs manquaient.
Les études ACCORD surtout et VADT de façon moindre ont laissé supposer un surrisque cardiovasculaire en
»
cas de contrôle intensif.
ADVANCE ne l’a pas confirmé et UKPDS “20 ans après” affirme un bénéfice cardiovasculaire, mais seulement »
au-delà de 10 années de suivi.
Le contrôle glycémique strict ne doit être appliqué que pour des patients diabétiques dans les 15 premières »
années d’évolution et le taux glycémique cible ne doit être atteint que progressivement, sans utiliser de schéma
de traitement exposant à un haut risque hypoglycémique et chez des patients dont le risque cardiovasculaire est
modéré (HbA1c de 6,5 à 7 %) ; au-delà les objectifs sont moins stricts (entre 7 et 8 %).
Le contrôle des lipides et de la pression artérielle sont essentiels dans la prévention cardiovasculaire primaire
»
ou secondaire, quel que soit l’âge des patients.
Mots-clés
Diabète de type 2
Contrôle glycémique
Hypoglycémie
et risque
cardiovasculaire
Summary
The arguments were many to
assert a benefit of glycemic
control on cardiovascular risk;
however, directs arguments
lacked.
Studies ACCORD especially and
VADT suggested an increased
cardiovascular risk with inten-
sive glycemic control.
ADVANCE did not confirm it
and UKPDS “20 years later”
showed a cardiovascular
benefit, but only beyond
10 years of follow-up.
The strict glycemic control
must be applied only for
patients with diabetes in the
first 15 years of evolution, and
the blood sugar target should
be achieved gradually, without
using a pattern of treatment at
a high risk of hypoglycemia and
in patients whose cardiovas-
cular risk is moderate (HbA1c
from 6.5 to 7%). In other
cases, targets are less stringent
(between 7 and 8%).
The control of lipids and blood
pressure levels are essential in
preventing primary or secondary
cardiovascular risk, whatever
the age of the patients.
Keywords
Type diabetes 2
Glycemic control
Hypoglycaemia and
cardiovascular risk
Résultats des grandes études
présentées en 2008
Les études ACCORD, VADT, ADVANCE et UKPDS
“20 ans après” (9-12) avaient toutes pour objectif de
répondre à cette problématique. Ainsi, l’année 2008
a été émaillée de ces nombreux et très spectaculaires
“événements médicaux” fortement médiatisés.
De leurs premières conclusions, on a trop vite et trop
hâtivement tiré des leçons, avant que ces travaux
n’aient été communiqués, publiés et analysés serei-
nement.
Comme vous l’aurez lu dans le détail dans les
autres articles de ce dossier thématique, ces études
ont porté sur des patients, des stratégies théra-
peutiques, des objectifs et une durée de suivi tous
spécifiques.
On en retient que, dans ces conditions, le contrôle
glycémique n’a pas réduit la mortalité cardiovascu-
laire. En somme, la réponse est “négative” tant pour
ACCORD et VADT que pour ADVANCE.
Plus grave encore, chacun a depuis en tête que le
bras de contrôle glycémique intensifié dans ACCORD
a dû être interrompu, avant la date prévue pour la
fin de l’étude, du fait d’une surmortalité globale
significative.
En contrepoint des 3 autres études citées, les résul-
tats 2008 de l’UKPDS sont porteurs de messages
très positifs.
Leçon principale de l’étude
UKPDS étendue à 20 ans
Ces résultats sont essentiels, puisqu’ils démon-
trent que l’effet favorable d’un meilleur contrôle
glycémique durant les 10 premières années de
l’UKPDS (12) se maintient 10 ans plus tard (soit
20 ans après le début de l’étude).
Cet effet bénéfique se confirme sur toutes les formes
de micro-angiopathie (– 24 %) mais aussi sur tous les
critères liés au diabète, la mortalité de toutes causes,
les infarctus du myocarde (– 15 %, p = 0,014) ; cette
fois, la significativité de ces résultats ne laisse planer
aucun doute.
Qui plus est, le bras traité initialement par metfor-
mine voit ces bénéfices renforcés pour les infarctus
du myocarde (– 33 %, p = 0,005).
On a parlé de mémoire ou d’héritage de l’optimisa-
tion glycémique initiale.
Par conséquent, la leçon majeure à retenir, avant de
passer aux autres études, est que “le contrôle glycé-
mique est bénéfique sur toutes les complications du
diabète de type 2 s’il est entrepris tôt”.
Notons qu’à l’inverse le bénéfice tensionnel ne se
confirme pas en raison du non-maintien des diffé-
rences tensionnelles entre les deux groupes.
Leçon principale de ACCORD
L’étude ACCORD (10 251 patients) conclut à
“ l’absence de bénéfice d’un traitement de l’hyper-
glycémie intensif, mais tard dans l’histoire du DT2
âgé et à haut RCV”. Il existe même un risque de
surmortalité en partie seulement CV (9). Mais
l’abaissement du taux de l’HbA1c a atteint 6,7 %
en 4 mois (6,1 à 7 %) pour un taux cible de “6 %”,
cela après des années d’hyperglycémie chronique
(8,1 ± 1,1 %) en utilisant plus d’associations d’anti-
diabétiques oraux (3 au moins pour 60 %, 4 à 5 pour
10 %) ; 77 % des patients prenaient de l’insuline, en
multi-injection pour 55 % d’entre eux.
La survenue d’hypoglycémies graves a été consi-
dérablement accrue dans le bras intensif par ces
traitements très lourds (26,7 versus 8,6 %).
Cependant, le nombre d’infarctus non létaux a été
réduit dans le groupe “contrôle intensif”.
De plus, lorsque les patients du groupe “contrôle
intensif” n’avaient pas d’antécédents CV et avaient
une valeur d’HbA1c de départ à 8 % ou moins, le
nombre d’événements CV fatals ou non fatals a été
plus faible que dans le groupe dit standard.
De même, l’âge (inférieur ou supérieur à 65 ans)
joue aussi un rôle.
Cette étude ne remet donc pas en cause l’intérêt
de traiter la glycémie avec des objectifs stricts
mais pointe le relatif danger de le faire de façon
si exigeante (< 6,5 %), si vite (< 6 mois) et si