INTRODUCTION Par leur implication indispensable dans

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INTRODUCTION
Par leur implication indispensable dans le dialogue social et la production
de la norme conventionnelle dans le champ social, les syndicats de salariés ainsi
que les organisations représentant les entreprises et plus généralement les
employeurs de même que les indépendants participent, au même titre que les
partis politiques et les assemblées parlementaires, au bon fonctionnement de la
démocratie. Or, chacun en convient, cette dernière a nécessairement un coût.
Paradoxalement, le financement des acteurs de la vie sociale de notre pays
suscite beaucoup moins l’intérêt et l’attention que celui des participants au débat
politique. Pourtant, il revêt des enjeux tout aussi importants, dans la mesure où il
peut influer sur le comportement des organisations concernées, sur leurs prises de
position et, partant, sur l’adhésion qu’elles emportent auprès de leurs
ressortissants.
Au premier rang figure un enjeu de transparence, à l’heure où l’on veut
donner plus de rôle au dialogue social, comme en attestent la loi n° 2007-130 du
31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social, les protocoles du Sénat et de
l’Assemblée nationale relatifs à la consultation des partenaires sociaux sur les
propositions de loi, adoptés respectivement en décembre 2009 et février 2010, et
diverses propositions formulées par des think tanks de tous bords (Institut
Montaigne (1), Terra nova (2), etc.). Existe également un enjeu proprement
financier, consistant à apprécier dans quelle mesure les subventions et l’argent
public alloués aux organisations syndicales et professionnelles sont vitaux pour
leur fonctionnement, le niveau des réserves et des actifs patrimoniaux de certaines
pouvant interpeller à plus d’un titre.
Pour ces raisons, la création d’une commission d’enquête chargée de faire
la lumière sur les mécanismes de financement des organisations syndicales
d’employeurs et de salariés s’est avérée particulièrement opportune. En effet, à un
moment où les partenaires sociaux négocient sur la modernisation et le
fonctionnement du paritarisme, il est utile que le Parlement apporte sa contribution
en dressant un état des lieux sur les masses financières en cause ainsi que sur les
circuits utilisés et en formulant des propositions susceptibles de nourrir le dialogue
en cours.
(1) « Reconstruire le dialogue social », sous la présidence de M. Gérard Adam, juin 2011.
(2) Henri Rouilleault : « 2012-2017 : renforcer la négociation collective et la démocratie sociale », septembre
2011.
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La question n’est d’ailleurs pas nouvelle, puisque divers rapports officiels
se sont essayés à mieux en cerner les tenants et aboutissants au cours de la
décennie passée. On rappellera à cet égard l’étude d’administration comparée sur
le financement des syndicats menée par l’inspection générale des affaires sociales,
publiée en octobre 2004
(1), le rapport au Premier ministre de M. Raphaël
Hadas-Lebel sur la représentativité et le financement des organisations
professionnelles et syndicales, de mai 2006 (2), ou encore les rapports de diverses
inspections générales sur les moyens alloués aux organisations syndicales dans la
fonction publique, en 2009 et 2010 (3).
La commission d’enquête sur les mécanismes de financement des
organisations syndicales d’employeurs et de salariés, pour sa part, s’est employée
à mener des évaluations précises et une analyse plus complète sur le sujet.
Naturellement, ses conclusions ne peuvent prétendre à l’exhaustivité, tant le
champ des organisations syndicales et professionnelles est complexe, du fait de
leur structure fédérée et décentralisée ; elles n’en dégagent pas moins des
enseignements significatifs.
Les syndicats de salariés et les organisations professionnelles avaient eux-
mêmes intérêt à un tel travail, dans un contexte marqué par la forte résonance
médiatique d’affaires judiciaires retentissantes. S’agissant d’un sujet aussi tabou
que les ressources financières de ces structures à statut particulier, seul le cadre de
la commission d’enquête pouvait permettre aux représentants de la Nation d’aller
au bout des choses.
L’ensemble des responsables syndicaux ou d’organisations d’employeurs
dont l’audition a été sollicitée a déposé sous serment, consentant à cette occasion à
entrer dans le détail de leurs comptes, afin de permettre au Parlement d’établir une
vision consolidée des financements mobilisés. De même, des documents non
publics ont été remis au rapporteur de la commission, à sa demande, de manière à
éclaircir certains aspects.
Il ressort des investigations conduites par la commission que les
mécanismes de financement des organisations syndicales et professionnelles sont
structurellement opaques, non par souci délibéré de cacher quoi que ce soit, mais
en raison de modalités d’organisation qui leur sont propres. S’ajoute à cette
difficulté l’absence de prise en considération de certains paramètres matériels
importants, comme la mise à disposition de personnels ou de locaux. Un tel
constat est d’autant plus regrettable que les sommes en jeu sont significatives.
(1) Rapport n° 2004 160 de MM. Pierre de Saintignon, Jérôme Guedj, Hilger Osterrieder et Mme Valérie
Saintoyant, portant sur l’Allemagne, la Belgique, la Grande-Bretagne, l’Italie et la Suède.
(2) « Pour un dialogue social efficace et légitime : représentativité et financement des organisations
professionnelles et syndicales », rapport au Premier ministre, mai 2006.
(3) Rapport sur les moyens alloués aux organisations syndicales dans la fonction publique, mars 2009 (non
public), et « Le bilan des moyens alloués aux organisations syndicales dans la fonction publique : analyse
détaillée dans deux départements, le Rhône et le Loiret », juin 2010.
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Depuis l’adoption de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant
rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, la transparence
progresse. Les organisations syndicales et d’employeurs sont désormais tenues de
publier leurs comptes et les mises à disposition de salariés auprès d’elles ont été
davantage encadrées.
Sur cette base, la commission d’enquête a pu collecter des indications
chiffrées étayées et procéder à des consolidations comptables ainsi qu’à des
comparaisons éclairantes. Le fait est, néanmoins, qu’elle a constaté une extrême
complexité dans les circuits de financements légaux et conventionnels en vigueur,
celle-ci ouvrant la voie à de possibles dérives.
Cette situation a conduit à certaines incongruités, à commencer par celle
d’un évident déficit de représentativité d’organisations dont l’essentiel des
ressources est parfois déconnecté des cotisations de leurs adhérents. Plusieurs
propositions sont donc formulées afin d’y apporter des remèdes. Ce faisant, la
représentation nationale apportera sa pierre à la négociation collective en cours sur
le devenir du paritarisme et aux grands débats politiques à venir, au printemps
2012.
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I.- LA DIFFICULTÉ D’ÉTABLIR LE BUDGET GLOBAL DE L’ACTION
SYNDICALE ET PROFESSIONNELLE EN FRANCE
A. UNE OBLIGATION DE TRANSPARENCE COMPTABLE QUI EN EST À SES
DÉBUTS
L’article 10 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 a soumis les
organisations syndicales et professionnelles à une obligation d’établissement, de
certification et de publication de leurs comptes. Ce dispositif est particulièrement
novateur : en effet, la loi du 21 mars 1884 relative à la création des syndicats
professionnels – dite loi « Waldeck-Rousseau » – ne contenait que très peu de
mesures sur le financement des syndicats. L’article 6 de cette loi prévoyait
simplement que « les syndicats professionnels de patrons ou d’ouvriers (…)
[pouvaient] employer les sommes provenant des cotisations ».
Ainsi, si les associations, dont le statut est établi en application de la loi du
1er juillet 1901, ont l’obligation
(1), lorsqu’elles ont reçu annuellement des
subventions publiques dont le montant global dépasse le seuil de 153 000 euros,
d’établir et publier des comptes annuels, les organisations syndicales, régies par la
loi « Waldeck-Rousseau » n’avaient pas été, jusqu’en 2008, soumis à cette
obligation.
1. L’obligation d’établir et de certifier les comptes
L’article L. 2135-1 du code du travail, issu de la loi du 20 août 2008,
prévoit que les syndicats professionnels et leurs unions ainsi que les associations
de salariés ou d’employeurs régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat
d’association, sont tenus d’établir des comptes annuels. Cette obligation
s’applique à compter de l’exercice comptable 2009 (article 15 de la loi du 20 août
2008). Ces comptes sont arrêtés par l’organe chargé de la direction et approuvés
par l’assemblée générale des adhérents ou par un organe collégial de contrôle
désigné par les statuts (article L. 2134-4 du code du travail).
L’article 44 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et
d’amélioration de la qualité du droit a ensuite modifié l’article L. 2135-1 du code
du travail pour préciser que les syndicats établissent leurs comptes annuels non
plus dans des conditions fixées par décret, mais dans celles de l’article L. 123-12
du code de commerce qui est le « droit commun » de la tenue des comptes des
entreprises. Selon cet article L. 123-12 précité, toute personne physique ou morale
ayant la qualité de commerçant doit procéder à l’enregistrement comptable des
mouvements affectant le patrimoine de son entreprise. Ces mouvements sont
enregistrés chronologiquement. En outre, elle doit établir des comptes annuels à la
(1) Article L. 612-4 du code de commerce.
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