La Lettre du Cardiologue - n° 339 - novembre 2000
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Cela pourrait être expliqué par le fait que l’effort (et non le dipy-
ridamole) provoque une augmentation paradoxale des résistances
sur les vaisseaux sténosés, comme cela a été mis en évidence lors
de coronarographies faites à l’effort. Gage et al. ont pu ainsi obser-
ver qu’un effort minime s’accompagnait d’une réduction de
calibre de 30 % des artères sténosées, alors que les artères saines
présentaient une vasodilatation de l’ordre de 20 % (Circulation
1986 ; 73 : 865-76).
3. Les informations pronostiques fournies par la scintigraphie
myocardique, réputées de premier plan, reposent sur des critères
tels que l’absence d’hypofixation ou l’étendue des hypofixations,
validés sur des populations explorées par épreuve d’effort. Ce tra-
vail montre qu’il serait probablement abusif de les extrapoler aux
scintigraphies faites après dipyridamole.
Remarques. Ce travail est particulièrement bienvenu pour rap-
peler que ces deux tests agissent par des mécanismes différents
(seul l’effort augmente les besoins en O2myocardiques) et qu’il
est donc logique qu’ils divergent quant à l’appréciation de l’éten-
due de l’ischémie. Le fait qu’une “bonne” épreuve d’effort soit
celle qui provoque une réelle accélération de la FC, incite à
conseiller (une fois de plus...) d’interrompre les bêtabloquants ou
autres traitements chrono-freinateurs, mais peut-être également
à différer l’exploration si le patient présente un syndrome de
sevrage aigu. D’un autre côté, peut-être faudra-t-il, chez un plu-
ritronculaire, privilégier le test au dipyridamole si l’on souhaite
déterminer l’étendue des territoires sous la dépendance des seules
sténoses sévères. Enfin, ce travail conduit à s’interroger sur la
signification des défects scintigraphiques observés après épreuve
mixte dipyridamole-effort.
P. Pézard, unité de cardiologie nucléaire, CHU Angers
ABSTRACTS
Dipyridamole and exercise SPET provide different estimates
of myocardial ischaemic areas : role of the severity of corona-
ry stenoses and of the increase in heart rate during exercise.
David N, Marie PY, Angioi M et al.
●
Eur J Nucl Med 2000 ;
27 : 788-99
.
Évaluation du diltiazem lors d’infarctus du myocarde thrombolysés
À la suite des résultats favorables obtenus sous diltiazem
lors d’infarctus du myocarde non Q (Diltiazem Reinfarc-
tion Study), cette étude prospective, multicentrique, randomisée
en double aveugle contre placebo, a évalué l’intérêt d’un traite-
ment par diltiazem (300 mg/jour en une prise) en présence d’in-
farctus du myocarde (IDM) indemnes d’insuffisance cardiaque
congestive et thrombolysés à la phase aiguë. Parmi les 874 patients
enrôlés, 430 ont été randomisés sous diltiazem prescrit à partir
des 36-96 heures du début de l’IDM sur une durée totale de six mois,
et 444 ont reçu un placebo. Le critère de jugement principal est
la survenue d’un des événements suivants : décès cardiaque, réci-
dive d’IDM non fatal, ischémie myocardique réfractaire. En
second lieu ont été analysées les complications cardiaques non
fatales suivantes : récidives d’IDM non fatal associées soit aux
ischémies myocardiques réfractaires, soit à tout événement isché-
mique myocardique, soit au recours à une revascularisation myo-
cardique.
Concernant le critère de jugement principal, 131 événements ont
été constatés pour le groupe placebo contre 97 pour le groupe dil-
tiazem (hazard ratio = 0,79 ; p = 0,07). Pour les complications
cardiaques non fatales, on observe un résultat favorable pour les
patients traités par diltiazem, particulièrement marqué pour le
recours à la revascularisation myocardique, réduit de 42% sous
diltiazem (hazard ratio = 0,61 ; p = 0,03).
Conclusion. L’étude INTERCEPT pose à nouveau la question
de la place des calcium-bloqueurs dans le cadre de la prévention
secondaire post-IDM, et peut être considérée à nouveau comme
négative en termes de critère de jugement principal.
Pour cette population de patients indemnes d’insuffisance car-
diaque congestive et fibrinolysés à la phase aiguë, le diltiazem
prescrit à partir de la 36eheure du début de l’IDM ne diminue pas
significativement le risque de survenue de décès cardiaque ou de
récidive d’IDM non fatal ou d’ischémie myocardique réfractaire
sur un suivi de six mois. Ce résultat négatif tient sans doute à une
faible mortalité globale (1,5 %), probablement en rapport avec
l’exclusion des patients en insuffisance cardiaque, et avec un
faible nombre de sujets ayant des antécédents d’IDM préalable
(3 % pour le diltiazem, 2 % pour le groupe placebo).
Cependant, le traitement par diltiazem réduit les complications
cardiaques non fatales, en particulier le recours à une revascula-
risation myocardique (angioplastie coronaire ou pontage aorto-
coronaire), motivé par des récidives ischémiques myocardiques.
Les résultats obtenus sous diltiazem sont indépendants du
bêtablocage (45 patients du groupe diltiazem étaient également
sous bêtabloquants).
C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil
Diltiazem in acute myocardial infarction treated with throm-
bolytic agents : a randomised placebo-controlled trial.
Boden WE, Van Gilst WH, Scheldewaert RG et al. for the
INcomplete infarction Trial of European Research Collaborators
Evaluating Prognosis post-Thrombolysis (INTERCEPT)
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Lancet
2000 ; 355 : 1751-6.