R E V U E D E P R E S S E e mois-ci, nous vous proposons plusieurs articles qui vous emmèneront de questions très pragmatiques (voie d’abord des hystérectomies, tamoxifène et cancer de l’endomètre, cancer du col et grossesse) à des sujets plus fondamentaux (facteurs pronostiques de l’envahissement vasculaire dans les cancers du col, adéquation entre traitement de référence et pratique réelle). Si les commentaires de Y. Ansquer, O. Dupuis ou C. Poncelet vous font réagir, écrivez à La Lettre du Gynécologue : vos courriers pourront êtres publiés et discutés par les membres du comité de rédaction. La rédaction C • Quelle voie d’abord pour les hystérectomies sur utérus de moins de 280 g ? Comparaison des taux de complications selon la voie d’abord Hysterectomy outcomes in patients with similar indications. Kovac SR. Obstet Gynecol 2000 ; 95 : 787-93. des utérus de ces trois groupes sont comparables. En revanche, la durée de séjour est légèrement supérieure quand la patiente est opérée par voie abdominale : 4 jours contre 2,5 jours pour les deux autres voies d’abord. Les taux d’adénomyose, de métrorragie et de CIN III sont comparables dans les trois groupes. En revanche, les taux de patientes porteuses de myomes et de prolapsus sont de 75 % et 13 % dans le groupe “abdominal” contre 45 % et 40 % dans le groupe “vaginal”. Le taux global de complications est significativement supérieur pour la voie abdominale : 10,3 % contre 5,3 % pour la voie vaginale. L’auteur de cette étude conclut que les hystérectomies réalisées pour des pathologies utérines confinées à cet organe sur des utérus de moins de 280 g devraient être réalisées par voie basse. Résumé L’objectif de cette étude est de comparer le devenir et les complications des patientes qui ont subi une hystérectomie selon la voie d’abord : abdominale, vaginale ou laparoscopique. Les fichiers des 4 609 patientes qui ont subi une hystérectomie entre 1988 et 1993 à l’hôpital de Saint Louis, dans l’Ohio (États-Unis), ont été analysés. Parmi ceux-ci, les cas où l’utérus pesait plus de 280 g, les hystérectomies réalisées pour tumeur maligne, endométriose, anomalies annexielles ou douleurs pelviennes chroniques, ainsi que les cas où un geste chirurgical complémentaire a été réalisé (cure d’incontinence urinaire, cure de prolapsus, appendicectomie) ont été exclus. Mille quatre cent vingt-sept hystérectomies réalisées par 70 chirurgiens ont été retenues. Les informations ont été obtenues en analysant les fiches de codage des actes et des complications. Neuf cent une hystérectomies ont été réalisées par voie vaginale, 471 par voie abdominale et 55 par voie basse cœlioassistée. L’âge moyen des patientes et le poids moyen Commentaire Cette étude a plusieurs intérêts. • Elle montre la limite des études effectuées par le biais du recueil du codage des actes. Dans cette série, on pourrait penser de prime abord qu’à poids utérin identique l’opérateur est influencé par le type de pathologie utérine pour choisir la voie d’abord. En effet, si le taux d’adénomyose, de métrorragie ou de CIN III est identique dans le groupe “abdominal” et dans le groupe “vaginal”, ce n’est pas le cas pour les patientes porteuses de myomes ou d’un prolapsus. Dans le groupe “abdominal”, il existe des fibromes dans 75 % des cas, contre 45 % des cas dans le groupe “vaginal” ; inversement, le taux de patientes ayant un prolapsus est de 40 % dans le groupe “vaginal” contre 13 % dans le groupe “abdominal”. Ces chiffres ne sont malheureusement pas interprétables. En effet, la définition du terme “prolapsus” n’est pas donnée, et les antécédents des patientes porteuses de myomes (antécédents qui peuvent influencer le choix de la voie d’abord, par exemple antécédent O. Dupuis (hôpital Bichat, service du Pr Madelenat, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris) 54 La Lettre du Gynécologue - n° 256 - novembre 2000 de myomectomie) ne sont pas connus. Enfin, notons que le taux de nullipares et le taux de patientes aux antécédents de césarienne n’est pas connu. • Le taux de complications est influencé par la voie d’abord. Pour les utérus de moins de 280 g chez des femmes sans pathologie annexielle ou endométriosique, la voie d’abord qui expose la patiente à la plus faible morbidité est la voie vaginale. Les hystérectomies abdominales exposent la patiente à un risque de complications pratiquement double par rapport à la voie basse (tableau I). Ainsi, les hémorragies, les infections postopératoires, les complications urinaires et les complications digestives sont plus fréquentes par voie abdominale. Plusieurs séries récentes réalisées en France confirment ces données : la série de Crépin, qui rapporte 1 248 hystérectomies vaginales, démontre que la voie abdominale a une morbidité hémorragique et digestive supérieure à celle de la voie vaginale (1). La série de Cohen, qui rapporte 453 hystérectomies vaginales, retrouve une morbidité double pour la voie abdominale par rapport à la voie vaginale (2). Les données américaines de 1997 montrent pourtant que, sur les 604 121 hystérectomies réalisées aux États-Unis, 64 % sont réalisées par voie abdominale. Aux États-Unis, ces données sont disponibles et publiées sur Internet. En France, le codage “PMSI” est réalisé par les médecins et transmis au ministère de la Santé. Malheureusement, ces données ne font pas l’objet d’une publication en libre accès. Il semble probable que, dans notre pays, les proportions soient les mêmes, traduisant le grand nombre d’hystérectomies réalisées par des chirurgiens non gynécologues qui ne sont pas formés à la voie vaginale. En 1995, la série de Sheth (la plus grande : 220 hystérectomies vaginales chez des patientes avec un antécédent de césarienne) a démontré la faisabilité et l’innocuité de la voie vaginale dans cette situation (3). Aujourd’hui, de nombreuses équipes réalisent des hystérectomies vaginales même en cas d’antécédent de césarienne (2, 4). La nulliparité n’est pas non plus synonyme d’étroitesse vaginale et n’est pas une contre-indication absolue (2, 4). L’examen clinique et l’échographie préopératoire sont souvent pris en défaut. Chez une femme obèse, la taille de l’utérus pourra être facilement surestimée ; à l’inverse, une échographie où la mensuration ne prend en compte que la taille du corps utérin pourra sous-estimer le volume utérin. Conscients des limites de l’examen clinique réalisé en consultation, certaines équipes prônent l’examen sous anesthésie générale (3). Le chirurgien peut alors profiter de la relaxation de la paroi abdominale et des releveurs pour apprécier les trois paramètres. La qualité de cette évaluation préopératoire est donc actuellement opérateur-dépendante et corrélée à l’expérience du chirurgien. Il est urgent de développer des outils de mesure de ces trois paramètres. Le choix de la voie d’abord deviendrait alors non pas un art mais une science. R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Lambaudie E et al. Hystérectomies pour lésions bénignes : complications peropératoires et postopératoires précoces. Ann Chir 2000 ; 125 : 340-5. 2. El Ghaoui A et al. Hystérectomie vaginale pour fibrome. Ann Chir 1999 ; 53 : 201-5. 3. Sheth S et al. Vaginal hysterectomy following previous cesarean section. Int J Gynecol Obstet 1995 ; 50 : 165-9. 4. Figueiredo O et al. Vaginal removal of the benign non prolapsed uterus. Obstet Gynecol 1999 ; 94 : 348-51. Tableau I. Taux de complications selon la voie d’abord (%). Complication Voie abdominale (n = 471) Voie vaginale (n = 901) Hémorragie 3,4 2,4 Infarctus du myocarde 0,2 0,2 Fièvre postopératoire et infection 4,0 0,8 • Cancer du col et grossesse : la voie d’accouchement a-t-elle un impact sur le pronostic ? Occlusion 0,4 0,0 O. Dupuis (hôpital Bichat, service du Pr Madelenat, 46, rue Henri-Huchard, Complications urinaires 0,6 0,1 Paris) Perforation vésicale 0,2 0,2 Perforation vasculaire nerveuse ou viscérale 1,5 1,6 10,3 5,3 Total • À l’issue de cette étude, Kovac recommande de réaliser les hystérectomies par la voie vaginale à chaque fois que l’utérus pèse moins de 280 g et qu’il est porteur de myomes, d’une adénomyose ou d’un CIN III chez une femme sans pathologie annexielle ou endométriosique. Cette recommandation confirme les travaux précédents, mais se heurte à la subjectivité de l’examen préopératoire. Toute la difficulté consiste à évaluer en préopératoire les trois critères suivants : taille de l’utérus, mobilité de l’utérus et accessibilité vaginale. L’interrogatoire n’est pas suffisant pour décider de la voie d’abord. La Lettre du Gynécologue - n° 256 - novembre 2000 Cervical cancer diagnosed shortly after pregnancy : prognostic variables and delivery routes. Sood AK et al. Obstet Gynecol 2000 ; 95 : 832-8. Résumé L’objectif de cette étude était de comparer le pronostic carcinologique des patientes chez qui un cancer du col a été diagnostiqué pendant la grossesse (groupe I) avec celui des patientes chez qui un cancer du col a été diagnostiqué dans les six mois du post-partum (groupe II), et de rechercher une éventuelle relation entre le pronostic carcinologique et la voie d’accouchement. Il s’agit d’une étude cas-témoins. Le groupe I est composé de 56 cas, le groupe II de 27 cas. Le groupe témoin est composé de cas de cancer du col diagnostiqués plus de 5 ans après un accouchement et appariés un à un avec les 55 R E V U E D cas des groupes I et II selon l’âge, l’histologie, le stade et le traitement. Sur les 27 cas du groupe II, 7 ont accouché par césarienne, 17 par voie vaginale, et trois ont eu une fausse couche. Sur les 7 qui ont accouché par césarienne, il y a eu une récidive (14 %), et sur les 17 qui ont accouché par voie basse, il y a eu 10 récidives (59 %) : cette différence est hautement significative (p = 0,046). En analyse multivariée, les deux paramètres le plus fortement corrélés au taux de récidive sont la voie d’accouchement et le stade du cancer. La survie des femmes dont le diagnostic de cancer du col est fait en postpartum est significativement plus mauvaise que celle du groupe contrôle. En conclusion, Sood recommande la réalisation d’une césarienne prophylactique à chaque fois qu’un cancer du col invasif est diagnostiqué pendant la grossesse. Commentaire Le cancer invasif du col utérin est le cancer le plus fréquemment diagnostiqué chez les femmes enceintes. Néanmoins, compte tenu de son incidence, qui varie entre un cas sur 2 000 à un cas sur 10 000 grossesses, on estime qu’un obstétricien sera confronté à ce problème une fois tous les 10 ans (1). L’originalité de cette étude est de distinguer le devenir des patientes selon que le diagnostic a été fait pendant la grossesse ou dans les six mois qui ont suivi l’accouchement. L’utilisation des registres de cancer du col invasif de l’université de l’Iowa a permis de rechercher, sur une période de 34 ans, les cas diagnostiqués pendant la grossesse. Cinquante-six femmes ont eu un cancer du col diagnostiqué pendant la grossesse et 27 dans les six premiers mois du post-partum. L’attitude thérapeutique prônée dans ces cas dépendait du terme de la grossesse : si le terme était de moins de 20 SA, un traitement immédiat était recommandé (le traitement classique comprenait une hystérectomie radicale avec lymphadénectomie, le fœtus étant laissé in situ). Au-delà de 20 SA, le traitement dépendait de l’âge, de l’histologie et de la taille de la tumeur. Pour les femmes avec un cancer du col au stade Ia ou Ib, le traitement était reporté jusqu’à obtention de la viabilité fœtale. Un examen du col était alors réalisé toutes les trois semaines. À l’issue du traitement, les femmes étaient revues tous les trois mois pendant la première année, tous les quatre mois durant la deuxième année, puis tous les six mois. La répartition des formes histologiques est la même pendant la grossesse qu’en dehors, avec une large majorité de cancers épidermoïdes (plus de 85 %). Dans le groupe I (n = 56), il n’y a eu que trois accouchements par voie basse. Le taux de récidive et la survie globale de ces femmes sont les mêmes que ceux du groupe contrôle. Dans le groupe II (n = 27), il y a eu 14 % de récidives chez les femmes qui ont accouché par césarienne, contre 59 % chez celles qui ont accouché par voie basse. Par ailleurs, la survie des femmes du groupe II est plus mauvaise que celle du groupe contrôle. Plusieurs points de cette série doivent être soulignés. Sur les 27 cas diagnostiqués dans les six premiers mois du post-partum, quatre n’avaient pas eu de frottis cervico-vaginal (FCV) et 6 n’avaient pas de suivi prénatal. Il est donc nécessaire d’insister sur la réalisation du FCV pendant la grossesse. Dans cette série, on peut penser que ce geste aurait permis de 56 E P R E S S E diagnostiquer 10 des 27 cas. Sur ces 27 cas, 11 femmes avaient eu un FCV considéré comme “normal” : cette série confirme donc celle de Coppola, qui montrait les limites du FCV, celuici sous-estimant les lésions dans 20 % des cas (2). En cas de saignement anormal (par exemple post-coïtal) ou de lésion macroscopique visible, on ne doit pas se contenter d’un FCV, qui peut être à tort rassurant, mais exiger un examen colposcopique avec des biopsies dirigées. Cette notion est particulièrement importante. En effet, il semble que, pendant la grossesse, l’apparition de métrorragies entraîne chez les gynécologues un “réflexe” orienté vers la pathologie obstétricale (HRP, placenta praevia..) au détriment des diagnostics gynécologiques classiques. Enfin, sur ces 27 cas, 6 avaient un frottis anormal, mais trois seulement ont eu des biopsies sous colposcopie. Compte tenu de l’absence de complications rapportées dans la littérature en cas de biopsies dirigées sous colposcopies effectuées pendant la grossesse, il nous semble souhaitable, à chaque fois qu’un frottis est anormal pendant la grossesse, de compléter le bilan par une colposcopie, qui ne doit pas se limiter à l’examen sous loupe binoculaire, mais doit s’accompagner de biopsies dirigées. Cette série met également en évidence le caractère délétère des cas de cancer du col diagnostiqués dans les six premiers mois du post-partum. Ce pronostic défavorable est expliqué en partie par le taux de récidive, qui est lié non seulement au stade du cancer mais aussi à la voie d’accouchement : les patientes ayant accouché par voie basse ont un risque de récidive de 59 %, contre 14 % pour celles qui ont accouché par césarienne. Cette étude confirme les résultats de l’étude de Jones (1) (la plus large série de cancers du col pendant la grossesse). Dans cette série, 75 % des femmes “césarisées” survivaient, contre seulement 55 % des femmes qui avaient accouché par voie basse. On notera enfin que cette étude confirme la possibilité de greffe métastatique sur l’épisiotomie en cas d’accouchement par voie basse chez une femme porteuse d’un cancer invasif du col. Ce risque, qui était déjà souligné en 1994 par l’étude de Cliby (3), n’est pas seulement théorique, comme le rappelle encore dans cette série le cas d’une patiente atteinte d’un stade IIa, qui a développé, cinq mois après un AVB, une récidive au niveau de l’épisiotomie et est décédée. En conclusion, on retiendra plusieurs recommandations (tableau I). Le frottis cervical fait partie des actes de dépistage pendant la grossesse. Une colposcopie avec biopsies dirigées est indiquée en cas de symptômes évocateurs (métrorragies Tableau I. Recommandations pour la pratique courante. Situation clinique Frottis anormal Lésion cervicale macroscopique Métrorragies post-coïtales Cancer invasif Conduite à tenir pendant la grossesse Colposcopie avec biopsies dirigées Colposcopie avec biopsies dirigées même si le frottis est normal Colposcopie avec biopsies dirigées même si le frottis est normal En cas de grossesse à terme, accouchement par césarienne La Lettre du Gynécologue - n° 256 - novembre 2000 post-coïtales), de lésion cervicale macroscopique (même si le frottis est normal) ou de frottis anormal. Pendant la grossesse, les femmes métrorragiques doivent avoir un bilan non seulement obstétrical mais aussi gynécologique. Quelle que soit la conduite adoptée pour la poursuite de la grossesse, les données actuelles permettent de penser qu’en cas de cancer cervical invasif, un accouchement par voie basse expose la femme à un risque de récidive plus élevé et à une moins bonne survie. R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Jones WB et al. Cervical carcinoma and pregnancy. Cancer 1996 ; 77 : 1479-88. 2. Coppola A et al. The clinical course of cervical carcinoma in situ diagnosed during pregnancy. Gynecol Oncol 1997 ; 67 : 162-5. 3. Cliby WA et al. Cervical cancer complicated by pregnancy : episiotomy site recurrences following vaginal delivery. 1994 ; 84 : 179-82. • Les barrières antiadhérentielles préviennent-elles la formation d’adhérences postopératoires ? Étude comparative de 5 barrières chez le rat C. Poncelet (hôpital Saint-Louis, service du Pr Clot, 1, avenue ClaudeVellefaux, 75475 Paris Cedex 10) Effects of five different barriers materials on postsurgical adhesion formation in the rat. Hellebrekers B et al. Human Reprod 2000 ; 15 : 1358-63. Résumé La formation d’adhérences postopératoires concerne toutes les disciplines chirurgicales. Différents traitements ont été proposés afin de la prévenir, ces adhérences étant la source de nombreuses complications. L’un de ces traitements consiste en l’utilisation d’une “barrière”. Cette étude avait pour but de comparer l’efficacité préventive de cinq matériaux différents dans un modèle expérimental standardisé de rat. Les cinq matériaux suivants ont été testés : solution de Ringer Lactate®, Tissucol ® (colle biologique à base de fibrine), Polyactive ® (copolymère de polyéthylèneglycol et de polybuthylèneterephtalate), Seprafilm® (acide hyaluronique et carboxyméthylcellulose) et Preclude peritoneal membrane® (polytétrafluoroéthylène expandu), et comparés entre eux ainsi qu’avec un groupe témoin. Cent dix animaux ont été inclus et randomisés dans les différents groupes (20 animaux pour chaque matériau testé et 10 dans le groupe témoin). La chirurgie standardisée, réalisée sous anesthésie générale, consistait en une abrasion péritonéale pariétale bilatérale avec suture, sans lavage et sans hémostase. De ce fait, les cornes utérines étaient au contact du site “dépéritonisé”. La barrière était appliquée de manière unilatérale ; ainsi, chaque animal était son propre témoin, et une comparaiLa Lettre du Gynécologue - n° 256 - novembre 2000 son entre les différents animaux était réalisable. Les animaux étaient sacrifiés à J15 et les adhérences évaluées de manière standardisée. La solution de Ringer Lactate® n’apportait aucun bénéfice. Les quatre autres barrières diminuaient significativement la formation d’adhérences postopératoires par rapport au groupe témoin (p < 0,0001). Seuls Preclude peritoneal membrane® et Seprafilm® permettaient une diminution de la formation des adhérences comparativement au déficit péritonéal controlatéral servant de contrôle interne (p < 0,01). Les auteurs concluent à l’efficacité des barrières Seprafilm® et Preclude peritoneal membrane®. Ces deux barrières pourraient être utilisées comme matériaux contrôles dans d’autres études du même type. Commentaire La formation d’adhérences postopératoires concerne toutes les disciplines chirurgicales. En gynécologie, leur responsabilité a pu être largement démontrée, notamment dans le cadre de l’infertilité, des douleurs pelviennes, de complications digestives, avec un taux d’adhérences (tous types confondus) allant de 50 à 95 % (1). De ce fait, de nombreux “artifices chirurgicaux” ont été proposés et ont donné des résultats inégaux. Ces différents moyens représentent un enjeu colossal, comme en témoignent les multiples publications. Cette étude confirme les données rapportées précédemment concernant l’inefficacité de la solution de Ringer Lactate®. Les études utilisant les solutés macromoléculaires ont déjà démontré leur manque d’efficacité et leurs risques (2). La Preclude peritoneal membrane®, même si elle diminue les adhérences, a plusieurs inconvénients, notamment la nécessité de la maintenir en place en la suturant sur le site potentiellement adhérentiel, et son caractère non résorbable imposant son ablation dans un deuxième temps chirurgical. Ces remarques sont valables également pour la barrière de Gore-Tex®. L’utilisation de Tissucol® a obtenu, à ce jour, des résultats contradictoires (3). À notre connaissance, seuls Seprafilm® et Interceed® pourraient avoir un intérêt dans la réduction des adhérences postopératoires (4). Enfin, une transposition des résultats obtenus chez l’animal à la femme n’est pas licite. En effet, très peu d’études animales ont utilisé comme protocole opératoire une hémostase soigneuse et exhaustive avec un lavage abondant du site chirurgical. Cependant, à ce jour, aucun matériau n’a démontré une augmentation du taux de grossesse après son utilisation au cours d’une chirurgie gynécologique (5). R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Diamond M. Reduction of adhesions after uterine myomectomy by Seprafilm membrane (HAL-F) : a blinded, prospective, randomized, multicenter clinical study. Seprafilm Adhesion Study Group. Fertil Steril 1996 ; 66 : 904-10. 2. Jansen R. Failure of intraperitoneal adjuncts to improve the outcome of pelvic operations in young women. Am J Obstet Gynecol 1985 ; 153 : 363-71. 3. Tulandi T. Effects of fibrin sealant on tubal anastomosis and adhesion formation. Fertil Steril 1991 ; 56 : 136-8. 4. Sawada T et al. Postoperative adhesion prevention with an oxidized regenerated cellulose adhesion barrier in infertile women. J Reprod Med 2000 ; 45 : 387-9. 5. Farquhar C et al. Barrier agents for preventing adhesions after surgery for subfertility. Cochrane Database Syst Rev 2000 ; CD000475. 57 R E V U E D • Analyse multivariée de l’envahissement vasculaire et lymphatique comme marqueur prédictif de métastases ovarienne et ganglionnaire chez des patientes ayant un cancer du col utérin C. Poncelet (hôpital Saint-Louis, service du Pr Clot, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75475 Paris Cedex 10) A multivariate analysis of blood vessel and lymph vessel invasion as predictors of ovarian and lymph node metastases in patients with cervical carcinoma. Sakuragi N et al. Cancer 2000 ; 88 : 2578-83. Résumé L’envahissement par des cellules tumorales des vaisseaux sanguins ou lymphatiques constitue un événement critique dans la constitution des métastases. L’envahissement lymphovasculaire est un facteur pronostique du cancer du col. À ce jour, aucune étude n’avait distingué l’envahissement vasculaire de l’envahissement lymphatique. Les auteurs ont revu rétrospectivement les examens anatomopathologiques de 239 patientes opérées pour un cancer invasif du col de l’utérus : 94 stades Ib, 15 stades IIa, 93 stades IIb, 37 stades IIIb. L’analyse des paramètres cliniques et anatomopathologiques comportait une évaluation des envahissements vasculaire et lymphatique à partir des lames histologiques sans coloration ou marquage spécifiques. Ces données ont été comparées entre elles en analyses uni- et multivariées. L’incidence de l’envahissement lymphatique était supérieure à celle de l’envahissement vasculaire tous stades confondus (p < 0,05). L’envahissement vasculaire était, tous stades confondus, plus fréquent en cas d’adénocarcinome qu’en cas de carcinome épidermoïde (p < 0,05). L’envahissement lymphatique et l’envahissement paramétrial étaient corrélés à l’envahissement ganglionnaire en analyse multivariée (p < 0,0001). En outre, l’envahissement vasculaire, l’envahissement paramétrial et l’adénocarcinome étaient tous corrélés à l’existence d’une métastase ovarienne en analyse multivariée (p < 0,05). Enfin, l’envahissement vasculaire, l’existence de métastases ovariennes et l’envahissement ganglionnaire diminuaient la survie. En conclusion, l’envahissement vasculaire, évalué indépendamment de l’envahissement lymphatique sur des coupes histologiques aux colorations standards, pourrait être un facteur pronostique chez des patientes atteintes de cancer du col utérin. Commentaire Des études récentes, basées sur une analyse multivariée, ont démontré la valeur pronostique de l’envahissement lymphovasculaire chez des femmes traitées pour un carcinome cervical (1). Les corrélations entre, d’une part, l’envahissement lymphatique et l’envahissement ganglionnaire et, d’autre part, l’envahissement vasculaire et les métastases ovariennes, 58 E P R E S S E confirment la double voie de dissémination des carcinomes cervicaux et suggèrent que l’envahissement ovarien se fait par voie hématogène. Dans cette étude, l’appréciation de l’envahissement vasculaire et lymphatique était basée sur des coupes histologiques standard sans coloration particulière ni immunomarquage spécifique. Cela permettrait de disposer d’un facteur pronostique de détermination aisée, reproductible, peu onéreux et complémentaire des marquages vasculaires évaluant l’angiogenèse tumorale, dont la valeur pronostique a également été démontrée (2). Enfin, certaines études, notamment dans l’adénocarcinome endométrial, ont suggéré que la détermination de l’envahissement lymphovasculaire sur des coupes histologiques standard était plus pertinente qu’un immunomarquage spécifique des microvaisseaux dans l’évaluation du pronostic (3). L’originalité de cette étude a été d’étudier de façon distincte l’envahissement vasculaire et l’envahissement lymphatique, et de permettre ainsi de démontrer que l’envahissement vasculaire diminuait la survie. R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Ishikawa H et al. Prognostic factors for adenocarcinoma of the uterine cervix. Gynecol Oncol 1999 ; 73 : 42-6. 2. Obermair A et al. The influence of vascular space involvement on the prognosis of patients with stage Ib cervical carcinoma : correlation with results from immunostaining for Factor VIII-related antigen. Cancer 1998 ; 82 : 689-96. 3. Tsuruchi N et al. The prognostic significance of lymphovascular space invasion in endometrial cancer when conventional hematoxylin and eosin staining is compared to immunohistochemical staining. Gynecol Oncol 1995 ; 57 : 307-12. • Risque et pronostic des cancers de l’endomètre sous tamoxifène Y. Ansquer, E. Laszlo (hôpital Édouard-Herriot, service des Prs Dargent, Mellier et Thoulon, 5, place d’Arsonval, 69437 Lyon Cedex 03) Risk and prognosis of endometrial cancer after tamoxifen for breast cancer. Bergman L, Beelen MLR, Gallee MPW et al. Lancet 2000 ; 356 : 881-7. Résumé Le tamoxifène augmente le risque de cancer de l’endomètre. Cependant, peu d’études ont fourni des estimations du risque en fonction de la durée d’exposition et de la dose reçue, et le pronostic de ces cancers n’a pas été étudié. Les auteurs ont entrepris une étude cas-témoins nationale (Pays-Bas) sur le risque et le pronostic du cancer de l’endomètre après tamoxifène reçu dans le cadre d’un traitement adjuvant du cancer du sein. Les modalités du traitement par tamoxifène ainsi que les autres facteurs de risque de cancer endométrial ont été étudiés chez 309 femmes ayant développé La Lettre du Gynécologue - n° 256 - novembre 2000 un cancer de l’endomètre après cancer du sein comparées à 860 contrôles (cancer du sein sans cancer de l’endomètre). Pour 276 cas de cancer endométrial, les prélèvements anatomopathologiques ont été revus. Le statut des récepteurs hormonaux et l’expression de p53 ont été étudiés par immunohistochimie. Le tamoxifène a été utilisé chez 108 (36,1 %) des 299 cas et 245 (28,5 %) des patientes du groupe contrôle (risque relatif 1,5, IC 95 % 1,1-2,0). Le risque relatif de cancer endométrial augmente avec la durée du traitement (p < 0,001), avec un risque relatif de 2,0 (1,2-3,2) pour une durée de traitement de deux à cinq ans et de 6,9 (2,4-19,4) pour une durée d’au moins cinq ans. Les cancers de l’endomètre de stades III et IV sont plus fréquents dans la population traitée pendant plus de deux ans que dans la population contrôle (17,4 % contre 5,4 % ; p = 0,006). Les utilisatrices de longue durée ont un risque plus important de développer une tumeur mésenchymateuse mixte ou un sarcome utérin (15,4 % contre 2,9 %, p < 0,02), une tumeur p53-positive (31,4 % contre 18,2 %, p = 0,05) ou une tumeur estro-récepteurs-négative (60,8 % contre 26,2 %, p < 0,001). La survie à trois ans spécifiquement liée au cancer de l’endomètre est significativement diminuée dans la population traitée par tamoxifène pour une durée supérieure à deux ans (76 % pour une durée de traitement de cinq ans et 85 % pour une durée de deux à cinq ans, contre 94 % dans la population contrôle). Les cancers de l’endomètre apparus sous tamoxifène ont un pronostic plus sombre, qui semble lié à des critères histopronostiques plus défavorables. Ces résultats ne remettent pas en cause l’utilisation du tamoxifène dans le traitement du cancer du sein, mais posent le problème de son utilisation en prévention de ce même cancer. Commentaire L’augmentation du risque de cancer de l’endomètre liée à l’utilisation du tamoxifène est actuellement bien démontrée. La prise de ce médicament multiplie le risque de cancer de l’endomètre par un facteur variant de 2 à 7,5 selon les études (1). En revanche, le pronostic de ces cancers reste controversé (2, 3). L’étude néerlandaise publiée le 9 septembre dans The Lancet retrouve un pronostic défavorable pour les cancers de l’endomètre apparus chez les utilisatrices à long terme du tamoxifène. Comme le souligne K. Gelmon dans son éditorial (4), une des limites de cet article est que la période d’inclusion débute en 1976, date à laquelle l’association tamoxifène-cancer de l’endomètre n’était pas reconnue, ce qui peut expliquer un diagnostic tardif et par conséquent un pronostic défavorable. Ces résultats ne remettent bien sûr pas en cause l’utilisation du tamoxifène en adjuvant dans le traitement du cancer du sein, mais invitent à une grande vigilance et nous interrogent sur le bien-fondé de l’attitude qui consiste à ne pas explorer l’endomètre des patientes sous tamoxifène en l’absence de métrorragies. Ces résultats sont aussi, comme le soulignent les auteurs, un argument contre l’utilisation du tamoxifène en prévention du cancer du sein chez les femmes à risque génétique. Dans les années à venir, le raloxifène ou d’autres modulateurs des récepteurs aux estrogènes (SERM) pourraient remplacer avantageusement le tamoxifène. La Lettre du Gynécologue - n° 256 - novembre 2000 R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Early Breast Cancer Trialists Collaborative Group. Tamoxifen for early breast cancer : an overview of the randomised trials. Lancet 1998 ; 351 : 1451-67. 2. Barakat R. Tamoxifen and endometrial cancer : most cancers are early stage and highly curable. Eur J Cancer 1998 ; 34 (Suppl. 4) : S-49-S-50. 3. Magriples U, Naftolin F, Schwartz PE et al. High grade endometrial carcinoma in tamoxifen-treated breast cancer patients. J Clin Oncol 1993 ; 11 : 48590. 4. Gelmon K. One step forward or one step back with tamoxifen ? Lancet 2000 ; 356 : 868-9. • Relation entre la qualité du traitement initial des cancers du sein opérables et la généralisation du traitement conservateur Y. Ansquer (hôpital Édouard-Herriot, service des Prs Dargent, Mellier et Thoulon, 5, place d’Arsonval, 69437 Lyon Cedex 03) Relation between appropriateness of primary therapy for early-stage breast carcinoma and increased use of breast conserving surgery. Nattinger AB, Hoffmann RG, Kneusel RT, Schapira MM. Lancet 2000 ; 356 : 1148-53. Résumé La chirurgie conservatrice du sein est un traitement beaucoup plus complexe que la mastectomie, car une incision séparée est nécessaire pour le curage axillaire, et une radiothérapie postopératoire est systématiquement réalisée. Les auteurs ont postulé que l’adoption de cette thérapeutique dans la pratique clinique a pu induire un décalage entre les soins recommandés et ceux reçus. Les auteurs ont utilisé le US National Surveillance, Epidemiology, and End Results Tumour Registry pour étudier 144 759 femmes âgées de plus de 30 ans opérées d’un cancer du sein entre 1983 et 1995. Ils ont calculé, par intervalles de trois mois, la proportion de femmes ayant reçu le traitement recommandé par la National Institutes of Health Consensus Conference de 1990 : mastectomie totale avec curage axillaire ou tumorectomie avec curage axillaire et radiothérapie. La proportion des femmes recevant le traitement recommandé est passée de 88 % en 1983-1989 à 78 % à la fin de 1995. Ce déclin a été observé dans tous les sous-groupes d’âge, de race, de stade et de densité démographique. La proportion des femmes ayant subi une forme non recommandée de mastectomie reste stable (aux alentours de 2,7 %) tout au long de la période d’étude. La proportion de celles ayant eu une chirurgie conservatrice du sein non recommandée (pas de radiothérapie et/ou pas de curage axillaire) est passée de 10 % en 1989 à 19 % à la fin de 1995. Même si la plupart des femmes ont reçu le traitement recommandé, la proportion des femmes ayant bénéficié de ce traitement a diminué aux États-Unis entre 1990 et 1995. Puisque la proportion des femmes ayant eu un traitement conservateur du 59 R E V U E D E sein a augmenté, et parce que ce traitement a plus de risques d’être utilisé de façon non recommandée, la proportion des femmes traitées de façon non recommandée a augmenté. B O N N E R E S S E radiothérapie), et ils en déduisent que leur postulat est juste. Pour les auteurs, l’utilisation du ganglion sentinelle n’était pas suffisamment répandue au moment de l’étude pour expliquer le phénomène. En revanche, le recueil de l’information sur les traitements ne dépasse pas les quatre premiers mois suivant le diagnostic du cancer. Aussi ne peuvent-ils pas exclure l’éventualité que l’élargissement des indications de chimiothérapie soit responsable d’un retard dans la réalisation de la radiothérapie, et donc que l’inadéquation des traitements ne soit qu’apparente. Pour le groupe de patientes qui n’a pas eu le traitement recommandé, il est regrettable de ne pas disposer de plus d’informations, tant sur le type de traitement reçu que sur la survie. Commentaire Les auteurs ont postulé que l’introduction du traitement conservateur dans la prise en charge du cancer du sein, parce qu’il est plus complexe que le recours à la mastectomiecurage, est source de traitement inadéquat. La formulation strictement épidémiologique est, à la première lecture, assez déroutante pour le clinicien. À l’heure de l’évaluation du ganglion sentinelle, voudrait-on remettre en cause le traitement conservateur pour les cancers du sein de petite taille (1) ? Bien sûr, il n’en est rien, et cet article est fort intéressant, car il nous invite à être vigilants lorsque nos pratiques médicales évoluent. Les auteurs ont observé, sur la période d’étude, une diminution du pourcentage de patientes recevant le traitement de référence (mastectomie-curage, ou tumorectomie-curage et A P R ÉFÉRENCE B IBLIOGRAPHIQUE 1. Krag D et al. The sentinel node in breast cancer : multicenter validation study. N Engl J Med 1998 ; 339 : 941-6. Z - V O U ✁ S ! À découper ou à photocopier Tarifs 2000 Merci d’écrire nom et adresse en lettres majuscules ❏ Collectivité ................................................................................. à l’attention de .............................................................................. FRANCE / DOM-TOM / Europe ÉTRANGER (autre qu’Europe) ❐ 580 F collectivités (88,42 €) ❐ 700 F collectivités (127 $) Dr, M., Mme, Mlle ........................................................................... ❐ 460 F particuliers (70,12 €) ❐ 580 F particuliers (105 $) Prénom .......................................................................................... ❐ 290 F étudiants (44,21 €) ❐ 410 F étudiants (75 $) ❏ Particulier ou étudiant joindre la photocopie de la carte Pratique : ❏ hospitalière ❏ libérale ❏ autre............................... POUR RECEVOIR LA RELIURE ...................................................................................................... ❐ 70 F avec un abonnement ou un réabonnement (10,67 €, 13 $) ❐ 140 F par reliure supplémentaire (franco de port et d’emballage) (21,34 €, 26 $) MODE DE PAIEMENT Code postal ................................................................................... 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