Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 4, juillet/août 2005
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Première partie : thyroïde – parathyroïde
picotement et brûlure avec photo-
phobie, larmoiement clair, gène au
vent ; le test à la fluorescéine met
facilement en évidence l’étendue de
la kératite.
•Les ulcères cornéens,souvent cen-
traux, sont plus rares. Ils peuvent se
surinfecter, puis devenir un abcès
et se perforer en l’absence d’un trai-
tement approprié en urgence. La
réduction de l’acuité visuelle par
perte de transparence de la cornée
ou la perte anatomique sont toute-
fois exceptionnelles.
■La neuropathie optique
Elle est rare, mais grave. Uni- ou
bilatérale, alors asymétrique, elle
se traduit par une baisse d’acuité
visuelle (en dehors de toute atteinte
cornéenne).
•Le déficit du champ visuel associé
est variable: scotome central ou para-
central, déficit arciforme ou hémia-
nopsique. La surveillance du champ
visuel, de la vision des couleurs et
des contrastes permet le suivi de
l’évolution. Le fond d’œil retrouve
un œdème ou une pâleur papillaire
ou, dans un cas sur deux, une papille
normale. On peut également retrou-
ver une dilatation veineuse au fond
d’œil ou des plis choroïdiens.
L’évolution peut conduire à une perte
irréversible plus ou moins complète
de la vision en l’absence de traite-
ment rapide. Cette souffrance du
nerf optique est liée à l’augmenta-
tion du volume des muscles oculo-
moteurs et de la graisse orbitaire.
Cette compression prédomine à
l’apex orbitaire et est responsable,
soit d’une compression directe du
nerf, soit d’une compression de sa
vascularisation entraînant son isché-
mie.
•L’augmentation du tonus oculaire,
parfois considérable, peut entraîner
une souffrance de type glaucoma-
teux qui peut être irréversible. La
surveillance de la tension oculaire et
son traitement sont impératifs.
Les formes sévères sont celles qui
associent des signes inflammatoires,
une exophtalmie supérieure à 23-
24 mm au Hertel, des troubles oculo-
moteurs, cornéens ou une atteinte
du nerf optique. Elles nécessiteront
un traitement et un suivi ophtalmo-
logique afin d’éviter l’apparition de
complications graves ou irréver-
sibles.
La forme dite maligne est représen-
tée par l’apparition ou l’aggravation
aiguë des différents symptômes :
œdème conjonctival et palpébral
avec rougeur intense, exophtalmie
>25mm, limitation importante de la
mobilité oculomotrice, inocclusion
palpébrale nette, kératite centrale ou
abcès, baisse d’acuité visuelle ou
atteinte du champ visuel, hypertonie
oculaire élevée >33 mmHg (signes
de gravité).
Seront en particulier recherchées
l’atteinte cornéenne (kératite ou
ulcère) devant une inocclusion pal-
pébrale et une limitation de mobi-
lité oculaire et une atteinte du nerf
optique (les formes à gros muscles
au scanner, une hypertonie oculaire
importante) qui font toute la gravité
de ces formes malignes et qui néces-
sitent un traitement en urgence.
Ces formes malignes surviennent
classiquement lors de modifications
brutales de l’état thyroïdien avec
passage en hypothyroïdie (iode
radioactif, chirurgie thyroïdienne)
ou de choc psycho-affectif. Ces
formes surviennent plutôt chez les
fumeurs et les hommes.
Apport de l’imagerie
La tomodensitométrie incluant des
coupes axiales transverses dans le
plan neuro-oculaire et des coupes
coronales apporte de nombreux ren-
seignements : la mesure de l’exoph-
talmie par l’indice oculo-orbitaire
sur les coupes axiales, l’hypertrophie
musculaire prédominant en posté-
rieur sur les coupes coronales, l’aug-
mentation du compartiment grais-
seux orbitaire et extra-orbitaire.
L’IRM permet de retrouver un
hypersignal au centre des muscles
en mode T2 traduisant un œdème
musculaire et une période active de
l’ophtalmopathie.
Traitement
Traitement curateur
L’évolution spontanée de la phase
aiguë de la maladie se fait sur une
période de 6 mois à deux ans. Cette
phase inflammatoire évolue par pous-
sées, éventuellement accompagnées
de périodes d’amélioration spontanée
partielle. Une phase chronique fibro-
tique et cicatricielle fait suite, sur un
mode plutôt stable.
Lors des poussées inflammatoires,
la gène fonctionnelle peut être impor-
tante et on se méfiera de la survenue
de complications ophtalmiques.
L’évaluation clinique ophtalmo-
logique recherchera des complica-
tions :
– cornéenne avec un test fluo ;
– oculomotrice avec la survenue
d’une diplopie ;
– une neuropathie optique avec
mesure du tonus oculaire, de l’acuité
visuelle et du champ visuel.
•Les problèmes cornéens seront
améliorés par des larmes artificielles
ou mieux par des gels lacrymaux de
durée plus prolongée et plus confor-
table plusieurs fois dans la journée
et surtout le soir au coucher avec, si
besoin, une occlusion mécanique
par pansement occlusif. La tarsorra-
phie peut être utile temporairement
en cas d’exophtalmie majeure avec
risque de perforation cornéenne.
•La survenue d’une diplopie sera
améliorée par le port d’un prisme
sur lunette ou par occlusion de l’œil
le moins mobile, de préférence. Un
geste chirurgical sur les muscles
oculomoteurs ne sera réalisé qu’à
un stade séquellaire pour supprimer
le port de prisme.
•La survenue d’une neuropathie
optique ou d’une forme maligne
nécessitera un traitement médical
urgent par corticothérapie. Celle-ci
doit se faire à dose immunosup-
pressive de 1 à 1,5 mg/kg pendant
un mois, puis arrêt relativement
rapide. La prolongation d’une corti-
cothérapie qui est inefficace est
inutile.