Aspirine et cancer du pancréas : association non fortuite

REVUE DE PRESSE
L’ASPIRINE : UN FACTEUR DE RISQUE DE CANCER
DU PANCREAS CHEZ LA FEMME !
Schernhammer ES, Kang JH, Chan AT et al. A prospective study of aspirin use and the risk of
pancreatic cancer in women. J Natl Cancer Inst 2004; 96:22-8.
La Nurses’s Health Study est une étude américaine de cohorte réalisée chez près de 120000 infirmières
suivies près de 30 ans. Elle représente une mine de renseignements épidémiologiques et a déjà
bouleversé quelques dogmes en gastro-entérologue, en particulier en matière de cancérogenèse
colique, cette étude remet en cause le rôle protecteur de la consommation de légumes.
En dehors du tabagisme et de certains syndromes génétiques rares, peu de facteurs de risque sont
formellement établis à ce jour dans la survenue de cancers pancréatiques. Il a été suggéré par de
nombreuses études(mais jamais formellement établi) que l’aspirine pouvait protéger de l’apparition de
plusieurs types de cancers digestifs. Un tel effet protecteur avait été confirmé in vitro sur des modèles
de carcinogenèse pancréatique mais fort peu de données cliniques n’étaient venues confirmer ces
travaux expérimentaux, d’où le travail réalisé par l’équipe de Harvard .
Patients et méthodes ; L’enregistrement des données a débuté dès 1976 chez 121700 infirmières
âgées de 30 à 55 ans. A partir de 1980, des questionnaires bisannuels concernant la consommation
d’Aspirine ou d’AINS, l’existence d’un surpoids, d’un tabagisme ou la survenue d’un diabète étaient
remplis. Parallèlement, tous les cas de cancers du pancréas déclarés dans l’étude étaient enregistrés
(après confirmation médicale), ainsi que tous ceux non déclarés mais dépistés par le registre national
de mortalité. Enfin les cas de cancers survenant dans les 2 premières années après prise d’Aspirine ou
AINS n’étaient pas retenus pour éliminer tout biais lié à une consommation d’antalgiques pour cancer
non diagnostiqué. Après exclusion des données manquantes, 88378 femmes étaient suivies pendant en
moyenne 18 ans, soit un total de 1475262 personnes-années.
Résultats : Au total, 161 cas de cancers pancréatiques ont été retenus. A la baseline, 43% des
femmes avaient une consommation régulière d’aspirine (> 2 comprimés/semaine. Ce groupe
« Aspirine » ne différait pas du groupe non-consommateur à l’exception d’une proportion plus
importante de surpoids et de diabète. Dans le groupe « Aspirine », il existait un sur-risque de
cancer du pancréas de 43% (RR=1,43, IC 95 : 1,05-1,95) après ajustement sur l’âge, le
tabagisme, l’activité physique, le diabète et le BMI. Cependant le risque n’augmentait pas en
cas de consommation importante alors qu’une prise régulière de plus de 20 ans exposait à un
risque supérieur de 58% par rapport aux non-consommatrices (RR 1,58, IC 95 :1,03-2,43).
Enfin, le risque semblait le plus important chez les femmes au BMI supérieure à 25 (RR 1,78, IC 95 :
1,08-2,94). De façon intéressante, la prise régulière d’AINS n’était pas liée à un risque majoré
de cancer du pancréas (RR 1,2, IC 95 :0,79-1,8).
Au total une consommation régulière et prolongée d’aspirine chez la femme expose à un risque
majoré de cancer du pancréas, surtout en cas de surpoids. Ces conclusions établis sur une
population exclusivement féminine ne peuvent être extrapolées, sans études complémentaires, à
la population masculine. Aucune explication physiopathologique ne peut être avancée mais ces
données incitent une nouvelle fois à la plus grande prudence en ce qui concerne toute
recommandation de santé publique quant à l’intérêt de prise régulière d’aspirine.
Pascal Artru. , Gérard Lledo
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