Automutilations à l’adolescence L. Gicquel, M. Corcos, B. Richard, J.-D. Guelfi

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Automutilations à l’adolescence
L. Gicquel, M. Corcos, B. Richard, J.-D. Guelfi
À la différence de la langue anglo-saxonne qui dispose d’une assez large palette sémantique pour décliner
par différents termes le fait de se faire mal volontairement, le mot francophone le plus usité est celui
d’automutilation. Ce comportement, qui concerne en moyenne de 1 à 4 % de la population générale,
constitue une réalité grandissante au sein de la population adolescente. L’adolescente automutilatrice qui
se coupe les avant-bras avec un rasoir en constitue l’archétype. Les coupures, principal type
d’automutilations impulsives, coexistent en outre fréquemment avec les automutilations compulsives,
dominées par les écorchures. Ces deux variétés de comportement autoagressifs constituent le sousgroupe des automutilations superficielles/modérées, caractéristiques des passages à l’acte à
l’adolescence. Différentes tentatives de classification posent la question du déterminisme du
comportement automutilateur par opposition à son intégration à la psychopathologie du trouble
principal. La classification de Favazza, dont sont issues les variétés d’automutilations précédemment
décrites, constitue un compromis ; bien qu’elle se veuille athéorique, elle ne tient pas moins compte des
comorbidités. Sur ce point, c’est la dimension limite du fonctionnement psychique qui semble commune à
la fois aux troubles comorbides au sein desquels les automutilations se manifestent le plus souvent (à
savoir le trouble de personnalité borderline et les troubles du comportement alimentaire), et au
comportement automutilateur. La présence du comportement automutilateur, dans des contextes
psychopathologiques variés, soulève la question de la pertinence de l’approche transnosographique de ce
phénomène. Cette question des limites, en même temps que la capacité de l’appareil psychique du sujet à
contenir des affects vécus comme débordants, sont au cœur de la problématique sous-tendant le
comportement automutilateur tout comme la dimension addictive. Certaines particularités
psychopathologiques des automutilations, telle que la dimension impulsive ou bien l’analgésie
régulièrement rapportée par les patientes, rencontrent un écho au niveau neurobiologique compte tenu
des perturbations constatées au sein des systèmes sérotoninergique et opioïdes endogènes. Enfin, le
clinicien, souvent déstabilisé par ce passage à l’acte qui agresse sa vocation soignante, et confronté à ses
interrogations à la fois cliniques et psychopathologiques, peine quelquefois à gérer ses contre-attitudes et
à penser les soins. Au-delà de la prise en charge somatique du passage à l’acte automutilateur, il est
impératif d’élaborer une stratégie de soins de manière intégrée et multifocale combinant traitements
médicamenteux et démarches psychothérapeutiques.
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Mots clés : Automutilations ; Adolescence ; Automutilations impulsives et compulsives ;
Limites physiques et psychiques ; Régulation des affects ; Dimension addictive ; Thérapies multifocales
Plan
¶ Introduction
2
¶ Définitions
2
¶ Classifications
2
¶ Épidémiologie
Prévalence en population générale
Répartition selon l’âge et le sexe
Répartition selon le type de comportement automutilateur
Prévalence en milieu psychiatrique
Prévalence et comorbidité
2
2
3
3
3
3
¶ Données sociologiques
Populations concernées
Cas particulier de la prison
3
3
4
¶ Automutilations à l’adolescence
Une évaluation difficile
Les prémisses durant l’enfance et l’adolescence
Question du trauma
4
4
5
6
¶ L’adolescence : l’automutilation à la croisée des chemins
Description clinique
Comorbidités
Modèles psychopathologiques
Données neurobiologiques
6
6
7
8
11
¶ Stratégies thérapeutiques
Cadre de l’urgence
Approche médicamenteuse
Psychothérapies
12
12
12
13
¶ Conclusion
13
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37-216-J-10 ¶ Automutilations à l’adolescence
■ Introduction
Jusqu’alors considéré comme l’apanage des troubles psychopathologiques les plus sévères, le comportement automutilateur
est un phénomène en pleine expansion. Il fait dorénavant
partie des comportements emblématiques de l’adolescence.
Éphémères ou persistants, ces actes autoagressifs sont susceptibles de concerner un très grand nombre d’adolescents, sans que
– pour autant – ceux-ci s’inscrivent par la suite dans une
démarche de soins psychiatriques au long cours. Le comportement automutilateur paraît très souvent hermétique et difficilement tolérable pour l’environnement proche à qui il s’adresse,
et qu’incontestablement il agresse, même si l’acte s’impose plus
au sujet que celui-ci ne le maîtrise et ne l’utilise de manière
manichéenne pour faire souffrir ses proches. L’automutilation
manifeste une souffrance qui ne parvient pas à se dire, à trouver
une voie d’expression symbolique. Cette souffrance ne sait pas
de quoi elle souffre. C’est le désespoir d’un sujet qui ne sait pas
dire ce qui le désespère mais qui exprime, selon son organisation psychique et son économie pulsionnelle singulières, un
appel à l’aide face à une menace devenue contrainte interne.
Les études jusqu’ici consacrées aux automutilations ont eu une
approche essentiellement épidémiologique et descriptive. La
question demeure discutée de savoir s’il faut considérer le
comportement automutilateur comme une entité autonome ou
comme faisant partie intégrante de divers tableaux cliniques,
entrant dans un cadre défini tant sur le plan de la classification
(focalisée ou intégrative) que sur celui des approches compréhensives. La pluralité des modèles psychopathologiques illustre
bien cette indécision : faut-il considérer l’automutilation sous
l’angle d’un déterminisme particulier ou bien sous celui de
l’intégration à la psychopathologie du trouble principal ?
■ Définitions
Dans la littérature anglo-saxonne, les termes de self-injury,
self-harm, deliberate self-harm, intentional self-harm ou bien selfmutilation ou encore non-fatal suicidal behavior, self-inflicted
violence sont le plus souvent employés de manière approximativement équivalente. En français, le mot « automutilation » est
plus régulièrement employé que « passage à l’acte » ou « comportement autoagressif ». Le terme de « parasuicide », commun
aux deux langues, doit être abandonné car il ne fait pas la
distinction entre automutilation et passage à l’acte suicidaire.
En l’absence de définition consensuelle – et s’agissant des
comportements automutilateurs les plus fréquents à l’adolescence – nous retiendrons la définition de Herpertz [1] : c’est un
comportement qui consiste à « se faire mal de façon délibérée,
répétée, de manière directement physique, sans intention
consciente de se suicider et qui ne conduit pas à des blessures
pouvant menacer le pronostic vital ».
Sont donc exclues les automutilations fonctionnellement
graves, les actes sous-tendus par des motivations sexuelles et les
tentatives de suicide à proprement parler.
Les automutilations sont dépourvues d’intentionnalité
suicidaire, même si certains [2] considèrent les automutilations
et les suicides aboutis comme les deux extrêmes d’un même
spectre, et si on relève une augmentation significative du risque
suicidaire dans les automutilations [3-6].
■ Classifications
La question, toujours débattue, est de savoir s’il faut considérer le comportement automutilateur comme une entité clinique
autonome ou bien comme partie intégrante de syndromes
cliniques divers.
La première classification est due à Karl Menninger [7] ; cet
auteur a réparti les automutilations en quatre catégories :
névrotiques, psychotiques, organiques et religieuses ; cette
classification est restée peu employée.
Pattison et Kahan [8] ont introduit, en 1983, le concept de
syndrome d’automutilation délibérée (deliberate self-harm syndrome)
en s’appuyant sur trois paramètres : le caractère direct ou
Tableau 1.
Classification de Kahan et Pattison
Létalité élevée
[12].
Direct
Indirect
Tentative de suicide
Arrêt d’un traitement
vital comme la dialyse
Épisode unique
Épisode unique
Létalité moyenne
Tentatives de suicide
Conduites à risque
Épisodes multiples
Épisodes multiples
Syndrome
d’automutilation
délibérée atypique
Ivresse aiguë
Épisode unique
Épisode unique
Létalité faible
Syndrome
d’automutilation
délibérée (SAD)
Épisodes multiples
Alcoolisme chronique,
obésité sévère, forte
consommation de
tabac
Épisodes multiples
indirect [9], le niveau de létalité (faible, moyen, élevé) [10] et
l’aspect répétitif (épisode unique ou multiple) [11]
(Tableaux 1,2) ; ce syndrome est considéré comme une entité
spécifique, pouvant être classée dans la catégorie du DSM-IV des
« troubles du contrôle des impulsions non classés ailleurs »,
dont les trois traits essentiels sont : l’échec à résister à une
impulsion, la tension croissante préalable et l’expérience de
gratification ou de soulagement pendant le passage à l’acte.
L’individualisation d’une entité syndromique a éclairé ces
comportements, jusqu’alors considérés comme des symptômes
répartis dans différentes catégories (personnalité borderline,
troubles psychotiques...). Pour autant, cette construction
empirique n’a jamais été évaluée par des études cliniques.
La classification actuellement la plus utilisée est celle de
Favazza [13, 14] (Fig. 1), qui regroupe les automutilations en trois
catégories phénoménologiques : majeures, stéréotypiques,
superficielles ou modérées ; cette dernière, la plus fréquente à
l’adolescence, se subdivise en automutilations compulsives et
impulsives.
Elle répartit les automutilations en fonction des comorbidités,
sans perspective psychopathologique, tout en laissant place à
une entité individualisée, le syndrome d’automutilations répétées
(SAR) ; ce dernier peut être isolé ou associé à d’autres comportements impulsifs ; les automutilations y sont de type impulsif
et répétitif ; le trait essentiel en est l’incapacité récurrente à
résister à l’impulsion de s’automutiler physiquement, de
manière directe, sans intention consciente de se suicider.
Favazza a tenté un rapprochement entre les automutilations
et d’autres troubles du contrôle de l’impulsivité, tels que la
boulimie multi-impulsive [16] – avec 75 % d’automutilations
– l’abus de substances psychoactives et la kleptomanie [17].
Les relations entre le SAR et la personnalité borderline sont
complexes ; Herpertz [18] souligne que le taux de personnalité
borderline dans un échantillon baisse considérablement si l’on
exclut les automutilations des critères diagnostiques : le SAR
constitue alors soit un facteur de gravité de la personnalité
borderline, soit un trouble du contrôle des impulsions (TCI)
autonome, associé à un trouble borderline.
Enfin, Schmahl distingue deux sous-types de comportement
automutilateurs chez le sujet borderline en fonction de la
présence ou de l’absence d’analgésie [19].
Dans le DSM-IV [20] , les comportements automutilateurs
figurent dans cinq catégories diagnostiques : la trichotillomanie,
les troubles factices avec symptômes physiques, le masochisme,
les troubles de la personnalité multiple et la personnalité
borderline.
■ Épidémiologie
Prévalence en population générale
Elle a été estimée entre 1 et 4 % de la population générale
américaine [15, 21], et entre 4,6 et 6,6 % au Royaume-Uni [22], où
2
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Automutilations à l’adolescence ¶ 37-216-J-10
Tableau 2.
Syndrome d’automutilation délibérée (SAD) (au sens du DSM-III).
A – Traits cliniques essentiels
demande de soins, ainsi que sa médiatisation après de longues
années de dissimulation, a pu contribuer à en accroître la
prévalence apparente.
1. Impulsion soudaine à s’automutiler avec impossibilité concomitante
de résister à l’impulsion
Répartition selon l’âge et le sexe
2. Sentiment de vécu intolérable auquel la personne ne peut échapper et
qu’elle ne peut contrôler
Pour certains auteurs, la prédominance féminine est très
marquée, de 70 à 97 % [26, 27] ; pour d’autres, elle n’est pas si
notable [28]. Dans le service de psychiatrie de l’adolescent de
l’Institut Mutualiste Montsouris, 21 % des garçons et 31 % des
filles hospitalisés présentent des antécédents d’automutilation,
dans un relevé sur cinq ans.
La fréquence des automutilations est faible chez l’enfant et
s’élève considérablement dès le début de l’adolescence [6] ; elle
atteint 12 à 35 % au sein d’échantillons de lycéens [22]. Seulement 5 % des épisodes sont le fait de personnes de plus de
65 ans [29-31].
3. Anxiété croissante, agitation et colère en réponse à la situation perçue
4. Restriction des processus de perception et de cognition aboutissant à
une sensation d’impasse et d’absence d’alternative
B – Traits associés
1. Signes végétatifs de dépression
2. Sentiments de dévalorisation, de désespoir et d’incurabilité
C – Âge de début
1. Fin d’adolescence
D – Évolution clinique
1. Épisodes multiples à faible létalité, comportement d’autoagressivité
physique
2. Multitude des comportements autodestructeurs à des fins de
dommages physiques, par la même personne
3. Forte probabilité d’augmentation de la létalité des comportements
autoagressifs
4. Poursuite des comportements autodestructeurs plus de 5-10 ans
E – Morbidité
1. Fonction du degré de létalité, le comportement autodestructeur peut
aboutir à altérer de manière ponctuelle une fonction
2. Hospitalisation quelquefois nécessaire pour prendre en charge le
comportement ou ses conséquences
F – Complications
1. Augmentation de la comorbidité en lien avec l’augmentation de la
létalité des comportements autodestructeurs répétés
2. Complication fatale possible d’un ou de plusieurs comportements
autodestructeurs
3. Condamnation sociale, voire rejet des sujets présentant des
comportements autodestructeurs uniques ou répétés considérés comme
déviants ou socialement inacceptables
4. Retentissement physique permanent ou réversible des
comportements autodestructeurs
G – Facteurs prédisposants
1. Absence ou manque d’étayage social et/ou relationnel, dont divorce
parental, séparation, mort d’un proche
2. Abus de drogues et d’alcool
3. Psychose à l’âge adulte
4. Idéation suicidaire et dépressive
H – Prévalence
1. Incidence de 400 à 600 pour 100 000
2. Pic d’apparition entre 16 et 25 ans
3. Population à risque (jeunes en institution, comportements
antisociaux)
I – Sex-ratio
1. Distribution égale entre hommes et femmes
J – Diagnostics différentiels
1. Troubles factices chroniques avec symptômes physiques
2. Troubles somatoformes
3. Syndromes cérébraux organiques
4. Troubles de l’humeur et troubles psychotiques
5. Personnalité borderline, histrionique
170 000 personnes ont été hospitalisées en 1996 à la suite d’un
passage à l’acte automutilateur [23]. Les écarts de prévalence sont
probablement à relier à l’hétérogénéité des approches, source,
dans la plupart des cas, de sous-évaluation.
On a souligné une augmentation nette de l’incidence des
automutilations depuis les années 1960 [24] ; celle-ci était établie
à 0,4 % en 1983 [12], et à 0,7 % en 1988 [25] ; l’extériorisation
croissante de ce comportement, associée à une plus forte
Répartition selon le type de comportement
automutilateur
On distingue :
• les automutilations compulsives : 2 % des patients (majorité de
femmes) de dermatologie présentent des lésions de grattage et
des excoriations cutanées [32] ; 13 à 53 % des cas de syndromes de Gilles de la Tourette, se cognent la tête, se donnent
des coups ou se mordent. L’onychophagie touche près de
44 % des adolescents [33] ;
• les automutilations impulsives qui se rencontrent chez les trois
quarts des patients borderline sont le plus souvent des
coupures (75 %) ou des brûlures (35 %) [27, 34].
Dans 75 % des cas cependant, les automutilations sont tantôt
compulsives, tantôt impulsives.
Prévalence en milieu psychiatrique
Quarante-sept pour cent des adolescents suivis en consultation ont déclaré s’être automutilés au moins une fois [35]. Chez
les adolescents hospitalisés, la prévalence peut atteindre 30 à
61 % [36-38].
Prévalence et comorbidité
La moitié des patients automutilateurs présentent un trouble
du comportement alimentaire [1, 39] ; inversement, 25 à 40 %
des patientes ayant un trouble du comportement alimentaire
s’automutilent, surtout celles ayant un comportement de
purge [40-45], c’est un taux aussi élevé que celui des patientes
hospitalisées [46, 47].
Cinquante-deux pour cent des automutilateurs ont un trouble
de personnalité borderline [1] ; inversement, 80 % des sujets
borderline se sont, à un moment donné, automutilés [48], et
75 % d’entre eux sur un mode impulsif [34].
■ Données sociologiques
Populations concernées
Jusqu’au début des années 1990, les automutilations semblaient concerner principalement certains sous-groupes de sujets
présentant une morbidité psychiatrique importante :
• consultants pour des troubles mentaux ou de sérieuses
perturbations émotionnelles [49-52] ;
• personnes se présentant aux urgences psychiatriques [53, 54] ;
• patients des hôpitaux de jour et des appartements thérapeutiques [52] ;
• patients hospitalisés dans des unités de crise ou dans des
services de psychiatrie [40, 55-64] ;
• jeunes suivis dans des institutions médicalisées, centres
éducatifs fermés, instituts de rééducation [65-71] ;
• détenus [72-75].
Bien que ces sous-groupes présentent toujours de forts taux
d’automutilation, celles-ci semblent être le fait, de plus en plus,
de sujets jeunes issus de la population générale, et jusqu’alors
non inscrits dans un parcours de soins psychiatriques.
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37-216-J-10 ¶ Automutilations à l’adolescence
Automutilations
Majeures
Stéréotypiques
Superficielles / modérées
Rares et généralement
rencontrées dans la
schizophrénie et les états
psychotiques aigus
Elles se rencontrent
généralement dans l'autisme,
les retards mentaux, chez des
patients psychotiques et dans
certains syndromes génétiques
Formes les plus fréquentes
qui se subdivisent
en deux sous-catégories
Automutilations
impulsives
Automutilations
compulsives
SAD
Répétitives
Amputation,
énucléation,
émasculation, etc.
Figure 1.
Se cogner la tête,
se comprimer les yeux,
se mordre les doigts, etc.
Classification de Favazza
[15].
Cas particulier de la prison
On a relevé, chez des adolescents japonais détenus, 17 % de
coupures et 36 % de brûlures [76], taux bien supérieurs à ceux
des adultes incarcérés ; les femmes en détention s’automutilent
cinq fois plus fréquemment que les hommes [74, 77, 78].
La mise en détention constitue un inducteur de passage à
l’acte en déstabilisant un équilibre antérieur précaire par ses
facteurs propres : sevrage induit par l’emprisonnement, isolement, solitude... Les phénomènes de « contamination » symptomatique y sont fréquents [72, 79].
■ Automutilations à l’adolescence
Si certains patients schizophrènes et autistes s’automutilent
parfois gravement (automutilations de type majeure ou stéréotypique), les automutilations les plus fréquemment rencontrées
dans l’enfance et à l’adolescence sont de type « superficielle/
modérée ».
Les transformations corporelles, psychiques et relationnelles
de l’adolescence sont de puissants révélateurs de la qualité des
assises narcissiques précédemment établies ; les attaques du
corps sont généralement considérées comme des tentatives
d’apaisement d’une conflictualité intrapsychique exacerbée.
F. Gardner rapproche les caractéristiques du fonctionnement
psychique adolescent de celles du comportement automutilateur : intensification des pulsions agressives, fragilité du
narcissisme, hypersensibilité à la relation, tendance au passage
à l’acte et propension aux agressions corporelles, liées notamment aux préoccupations concernant la mort ; tout cela peut
être transitoire ou bien conduire au développement de comportements destructeurs, qui seront orientés en gestes autoagressifs
(tropisme féminin) ou hétéroagressifs (tropisme masculin) [80].
Une évaluation difficile
Les automutilations pathologiques doivent être distinguées
des pratiques culturellement signifiantes. Pour Favazza [81] ,
certains rituels comportant des automutilations sont des
activités propres à une culture, transmises de génération en
génération, en lien avec les traditions et les croyances de cette
Écorchures, trichotillomanie,
onychophagie, coups,
morsures, etc.
(isolées ou associées à un trouble
obsessionnel compulsif)
Épisodiques
Coupures, brûlures, etc.
(isolées ou associées à d'autres
troubles dont les troubles
alimentaires)
SAD : syndrome d’automutilation délibérée.
culture et partagées par nombre de ses membres. Les automutilations culturellement ritualisées visent trois grands objectifs
sociétaux : la guérison, la spiritualité et l’ordre ; dans certaines
tribus africaines, par exemple, les scarifications faciales ou
même la section d’une phalange signent l’appartenance au clan.
Selon S. Lambert : « la dimension qui oppose ces pratiques au
champ pathologique réside avant tout dans leur caractère
foncièrement social et symbolique. Même si, déjà, la frontière
ressemble plutôt à une zone de chevauchement, la valeur
d’individuation de ces pratiques relève ici d’une inscription
sociale dont les symboliques s’étendent et se conjuguent depuis
l’intégration dans un groupe de pairs ou d’une lignée de pères
(et/ou de mères) jusqu’à la caractérisation de l’identité sexuelle,
en passant par la quête d’expiation aux accents surmoïques
primitifs » [82]. Inversement, les automutilations pathologiques
tendent à être perçues de manière négative dans la culture
générale et renvoient à un manque de signifiants culturels
partagés, même si elles peuvent être, à titre individuel, riches de
sens et de symboles.
Un petit nombre de rituels automutilateurs à l’adolescence
pourraient s’inscrire dans une sorte d’initiation à l’âge adulte :
pratiques mutilantes à valeur esthétique tels que les piercings
cutanés, nasaux ou génitaux, tatouages ou bien certaines
coupures (body art, par exemple).
Différents questionnaires, surtout descriptifs, permettent
l’évaluation des comportements automutilateurs en pratique
courante (Tableau 3).
Le self-harm behavior survey (SHBS) comporte 174 questions
qui abordent les aspects sociodémographiques, cliniques et
thérapeutiques et des éléments psychopathologiques, notamment les troubles du comportement alimentaire. Il a été utilisé
par Herpertz [1], ainsi que par Paul [40].
Certains autres questionnaires interrogent la thématique des
troubles alimentaires ; le chronic self-destructiveness scale (CSDS)
explore notamment les comportements impulsifs à haut risque ;
il comporte un score final, le self-destructiveness score, et présente
cinq items en lien avec la problématique alimentaire. Le
Harkavy asnis suicide survey II (HASS-II) est également un
autoquestionnaire mais son approche du comportement automutilateur semble très partielle. L’impulsive and self-harm
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Automutilations à l’adolescence ¶ 37-216-J-10
Tableau 3.
Questionnaires, surtout descriptifs, permettant l’évaluation des comportements automutilateurs en pratique courante.
Auteur
[83]
Chronic self-destructiveness scale (CSDS) Kelley et al.
Self-harm behavior survey (SHBS)
Favazza
[84]
Harkavy asnis suicide survey II (HASS-II) Friedman et Asnis
[85]
[86]
Self-injury survey
Simpson et al.
Impulsive and self-harm questionnaire
Rossotto
Self-injurious behavior questionnaire
(SIB-Q)
Schroeder et al.
Self-injury questionnaire (SIQ)
Vanderlinden et Vandereycken
Timed self-injurious behavior scale
Brasic et al.
Self-harm inventory (SHI)
Sansone et al.
[87]
Functional assessment of self-mutilation Llyod et al.
(FASM)
[88]
[89]
[90]
[91]
[92]
Ottawa self-injury questionnaire (OSI)
Nixon et Cloutier
Self-Injury self-report inventory (SISRI)
Juzwin
[37]
[93]
Année
Items*
1985
73
1986
174
1989
21
1994
31
1997
14
1997
25
1997
54
1997
16
1998
22
1997
41
2001
37
2003
34
* Les réponses sont soit en oui/non, soit de type Likert, soit sous forme de QCM ou bien ouvertes.
Tableau 4.
Individualisation de certains facteurs de risque et signes cliniques d’alerte selon S. Gothard et M. Conroy-Stocker
[95].
Facteurs de risque individuels
Facteurs de risques familiaux
Facteurs de risque sociaux
Présence de troubles psychiatriques (épisode
dépressif majeur par exemple)
Antécédents d’abus sexuels et/ou physiques et de
négligence
Perte récente d’une figure importante (parent,
membre d’une équipe, ami proche, etc.)
Sentiments de désespoir, pessimisme, vision
négative de la vie
Présence d’un comportement automutilateur chez
un membre de la famille ou un ami proche
Influence des médias (célébrité qui s’automutile,
série ou films avec automutilations..)
Abus de substances psychoactives ou d’alcool
Séparation des parents, relations pauvres avec
ceux-ci
Rupture sentimentale
Atteinte récente de l’estime de soi
Attente parentale trop forte ou perçue comme telle, Brimades subies (camarades,..)
notamment de réussite scolaire
Faibles résultats scolaires, angoisse de performance Surprotection familiale
Isolement social/vie en milieu rural
Confrontation à la sexualité
Disponibilité des méthodes d’automutilation
Appartenance à une minorité ethnique
questionnaire comprend une variété d’items relatifs aux comportements impulsifs et autodestructeurs et deux pour les troubles
alimentaires. Le SIB-Q et le timed self-injurious behavior scale sont
des hétéroquestionnaires de 25 et 16 items qui furent surtout
utilisés dans le cadre des retards mentaux. Le self-injury questionnaire (SIQ) explore différents types de comportements autoagressifs et notamment leur intensité. Le self-injury survey explore
également les raisons du passage à l’acte ; il recherche les
antécédents de tentatives de suicide et comporte cinq items sur
les troubles alimentaires. Enfin, le functional assessment of selfmutilation (FASM) n’est pas exhaustif, mais il est de passation
brève. Le self-harm inventory (SHI) est un autoquestionnaire qui
explore en outre le trouble borderline de personnalité. Sa
concordance est de 84 avec les résultats du diagnostic interview
for borderline-revised (DIB-R) de J. Gunderson et al.
À l’inverse, les questionnaires eating disorder inventory (EDI-2),
eating attitude test (EAT-26) ou l’eating disorder examination (EDE),
consacrés aux troubles des conduites alimentaires, n’incluent
aucun item concernant les comportements automutilateurs ; le
self-injury self-report inventory (SISRI) évalue à la fois les comportements autodestructeurs, les troubles alimentaires, les comportements à risque et les abus de substances ; il interroge en outre
le patient sur les motivations de ses passages à l’acte et sur
l’impact de ceux-ci sur sa vie quotidienne.
L’Ottawa self-injury questionnaire (OSI) met l’accent sur la
composante addictive de ce type de comportement.
Simeon et al. recommandent de procéder à une évaluation
clinique rigoureuse précisant les points suivants [94] :
• historique des comportements d’automutilation ;
• présence d’idéations suicidaires ;
• relation temporelle entre suicidalité et comportements
suicidaires ;
• antécédents et fréquence actuelle des automutilations ;
• âge de début, évolution, durée des périodes sans passage à
l’acte, changements au fil du temps ;
• complications ou interventions médicales ;
• motivations, états émotionnels, facteurs déclenchants du
passage à l’acte ;
• suites du comportement, immédiates et ultérieures ;
• degré d’urgence et d’impulsivité ;
• dystonicité (désir de s’arrêter soi-même) ;
• résistance (effort pour s’interrompre soi-même) ;
• contrôle (succès à s’arrêter soi-même) ;
• analgésie ;
• utilisation de substances avant ou pendant le passage à l’acte ;
• histoire familiale de comportements d’automutilation ;
• antécédents personnels de traitement.
Les prémisses durant l’enfance
et l’adolescence
S. Gothard et M. Conroy-Stocker, au Royaume-Uni, ont
individualisé certains facteurs de risque et signes cliniques
d’alerte [95] (Tableau 4).
Pour autant, des personnes présentant certains de ces facteurs
de risque font preuve de capacités de résilience fondées sur trois
ordres de paramètres [96] (Tableau 5).
Les signes évocateurs de l’imminence d’un passage à l’acte
sont les suivants :
• repli par rapport à certaines activités habituelles ;
• fatigue et réticence à se rendre en cours ;
• présence de traces sur le corps et/ou les membres supérieurs ;
• perturbations du sommeil et/ou de l’alimentation ;
• troubles du comportement soudains ;
• comportement autodestructeur, comportement avec prise de
risque (conduite imprudente, ...) ;
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37-216-J-10 ¶ Automutilations à l’adolescence
Tableau 5.
Capacités de résilience pour les personnes présentant certains de ces facteurs de risque fondées sur trois ordres de paramètres
[96].
Environnement
Famille
Enfant
Des réseaux (amis, école,..) soutenants
Au moins une relation parent-enfant de bonne
qualité
Capacités d’apprentissage
Un logement agréable
De l’affection
Capacités de communication
Des relations appropriées avec les adultes
Des règles de vie cohérentes et étayantes
Capacités de résolution de problèmes
Des occasions d’acquérir des connaissances
Des relations stables
Tempérament interactif et sociable
Le choix dans les activités de loisirs
•
•
•
•
•
•
•
certaines paroles comme « je ne peux plus continuer » ;
discuter/plaisanter autour du suicide ;
préoccupations concernant la mort ;
remboursement soudain de dettes, restitution d’objets ;
passage de l’euphorie à la tristesse sans raison apparente ;
don de ses affaires aux autres ;
port d’une arme sur soi.
Question du trauma
Maltraitance durant l’enfance et automutilations
De nombreuses études ont conclu à l’existence d’un lien très
significatif entre abus subis durant l’enfance et survenue
ultérieure de comportements automutilateurs, suggérant en cela
un facteur étiologique. Santa Mina et al. ont recherché les liens
entre abus sexuels ou physiques dans l’enfance et automutilations et tentatives de suicide, en colligeant 29 études parues
entre 1988 et 1998 [97].
Le pourcentage de femmes automutilatrices indiquant avoir
subi des abus sexuels dans l’enfance varie suivant les études
entre 49 et 95 % [98, 99].
Quatre études ont comparé le comportement automutilateur
au sein d’échantillons de sujets abusés ou bien non abusés ;
77,3 % des sujets abusés ont un comportement automutilateur
contre 47,6 % chez les sujets non abusés [100]. Favazza fait état
de 62 % d’abus subis dans l’enfance (29 % d’abus sexuels et
physiques, 17 % d’abus sexuels seuls et 16 % d’abus physiques
isolés) [27]. Yeo et Yeo [101] ont relevé une prévalence de 50 %
d’abus et ont souligné la forte tendance (93 %) à la surconsommation médicamenteuse. Le comportement serait plus répétitif
chez les sujets abusés [102].
Van der Kolk et al. estiment que les tentatives de suicide
répétées sont fortement liées aux antécédents d’abus sexuel dans
l’enfance, et que les comportements automutilateurs sont plutôt
corrélés à des antécédents de négligence dans l’enfance [103] ; ils
insistent sur la valeur prédictive de ce type d’antécédents et sur
le fait que l’absence d’attachement sécurisant contribue à les
maintenir ; le comportement automutilateur résulterait de la
réactivation du traumatisme infantile par une situation
stressante [104].
L’automutilation constitue donc un indice de présomption
d’antécédents de maltraitance durant l’enfance. Elle reflète aussi
très souvent un trouble structurel de personnalité de type
borderline ; des antécédents d’abus et de maltraitance sont en
effet fréquemment retrouvés, aussi bien dans le comportement
automutilateur isolé que dans celui qui s’inscrit dans ce trouble
de la personnalité et dans ce trouble de la personnalité considéré isolément.
Éducation et valorisation
personnalité borderline ; ils ont individualisé un sous-groupe de
patientes « superdestructrices », qui débutent les automutilations
dès l’enfance et développent de manière concomitante un
comportement suicidaire [105].
Pour d’autres, les carences affectives constituent le facteur
prédictif le plus puissant d’un comportement automutilateur ; le
manque de protection parentale joue un rôle aussi important
que les abus dans l’échec des sujets borderline à développer des
régulations émotionnelles modulées, dont les automutilations
constitueraient un substitut [103]. Bien évidemment, abus et
carences sont fréquemment, si ce n’est constamment associés.
■ L’adolescence : l’automutilation
à la croisée des chemins
Walsh a regroupé les facteurs régulièrement mentionnés par
les adolescents automutilateurs en quatre catégories [108]
(Tableau 6).
Description clinique
Âge de début
Les automutilations commencent dans 59 % des cas vers
12-13 ans et pour près d’un quart des cas vers 10-11 ans ou
auparavant [109].
Différents types d’automutilations
Les automutilations compulsives comprennent les écorchures, la
non-cicatrisation entretenue des plaies et les coups autoinfligés ; viennent ensuite : les morsures, l’onychophagie,
l’arrachage de la peau autour des ongles, la trichotillomanie à
fort tropisme féminin.
Près des deux tiers des sujets présentant un trouble des
conduites alimentaires considèrent le vomissement comme une
autoagression. Rappelons d’ailleurs la fréquence du mérycisme
dans les troubles des conduites alimentaires.
Parmi les automutilations impulsives, épisodiques ou répétitives, les coupures sont de loin les plus fréquentes, souvent
effectuées par rasoir, mais aussi par morceaux de verre, couteaux, ciseaux.... Les brûlures, notamment par cigarette, arrivent
au deuxième rang.
Les automutilations sont plus fréquemment compulsives
qu’impulsives, mais elles sont régulièrement associées ou
pratiquées en alternance ; cette association renvoie, dans un
continuum, au spectre impulsivité/compulsivité [110]. Rappelons
que Favazza observe, dans 78 % des cas, un recours à des
méthodes multiples [27].
Maltraitance durant l’enfance, automutilations
et personnalité borderline
Séquence comportementale
Un lien entre antécédents d’abus sexuels dans l’enfance et
survenue d’automutilations chez les patients présentant une
personnalité borderline a pu être établi [105], à la différence de
Zweig-Frank et al. qui n’avaient pu, au préalable, établir dans
leur étude sur automutilation et dissociation chez ces sujets ce
type de lien [106]. En fait, la prolongation dans le temps de
l’abus sexuel serait la plus prédictive [107].
Certains considèrent le symptôme automutilation comme très
discriminant (79 %, dans leur cohorte) pour le diagnostic de
Cette description en cinq étapes stéréotypées concerne avant
tout les automutilations impulsives : un événement déclenchant
s’accompagne d’un malaise croissant sur fond d’humeur dysphorique (morosité, tristesse, irritabilité...), voire de torpeur ou
de sentiment de dissociation. Ensuite naît la conviction de se
retrouver dans une impasse relationnelle, et l’envie de se faire
mal, à laquelle il semble impossible de résister. Un très court
laps de temps sépare la décision et la mise en acte, qui procure
un soulagement d’intensité et de durée variables [111].
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Automutilations à l’adolescence ¶ 37-216-J-10
Tableau 6.
Facteurs régulièrement mentionnés par les adolescents automutilateurs en quatre catégories selon Walsh
Échanges entre adolescents
Influences environnementales
[108].
Influence directe des médias
Psychologie individuelle
Expérience régulière d’émotions fortes Stress important généré par l’école et
et manque de stratégies d’adaptation le travail
Médiatisation des automutilateurs et
de leurs histoires personnelles
Réduction temporaire de la tension et
rétablissement d’une sorte d’équilibre
psychique
Abus de substances au sein de
groupes, vécus comme un rite
initiatique
Mise en scène dans des clips musicaux L’automutilation présente des aspects
de comportements automutilateurs
importants de communication
Forte compétition scolaire et rivalité
professionnelle conduisant à
l’isolement et à la méfiance
Début précoce des abus de substances Influence des médias sur
Influence de certains personnages
l’automédication (achats en ligne sans publics de premier plan,
ordonnance)
automutilateurs
Stratégies d’adaptation
dysfonctionnelles via l’usage de
substances et/ou d’automutilations
Amalgame entre fêtes et prise de
toxiques
Possibilité de « planer » facilement
accessible
L’automutilation procure un
sentiment de contrôle et de puissance
Augmentation du nombre d’émissions
de télévision consacrées à
l’automutilation
Fonction identitaire vis-à-vis des pairs Prééminence de la consommation sur Forums de discussion sur Internet
et des adultes d’un comportement
le bien-être personnel
consacrés à l’automutilation
marginal, provocant
Cohésion du groupe fondée sur des
comportements condamnés ou
craints par les adultes
Faible disponibilité des parents,
absence d’étayage apaisant et
structurant
Nombreux sites Internet personnels
donnant des informations détaillées et
explicites
Les jeunes sont dans l’agi :
Priorité de l’individualisme et mise à
automutilations dramatiques, visibles l’écart des sujets en situation de
et induisant des réactions immédiates détresse
Banalisation du comportement
automutilateur au sein du groupe via
l’acceptation de tatouages, piercing,
etc.
Glorification de l’image corporelle et
établissement de critères esthétiques
peu accessibles, sources de mésestime
de soi
Rapprochement entre comportement
automutilateur et body art
Les automutilations compulsives sont davantage ritualisées,
voire automatiques.
Raisons évoquées et facteurs déclenchants
D’une manière générale, les sentiments au moment du
passage à l’acte sont principalement une tension intérieure et
un sentiment de vide.
Les raisons évoquées sont : la volonté de soulager un sentiment de désespoir ou de dépression, d’échec ou de frustration,
de rejet ou de solitude, d’excitation pénible et souvent de
colère ; le besoin d’exprimer un sentiment de haine envers soimême et de se punir, d’obtenir des soins et l’attention des
autres, le souhait de changer son apparence corporelle, d’appartenir à un groupe et de cesser de se sentir seul, celui d’exercer
un contrôle sur soi, de s’empêcher de penser au suicide ou
d’agir des projets de suicide, de ne plus se sentir engourdi et
sans lien avec la réalité.
Localisations
Si n’importe quelle partie du corps peut être concernée,
certaines localisations sont privilégiées ; c’est le cas du bras et
du poignet, à tel point que Rosenthal et al. ont décrit le wrist
cutting syndrome [112]. Les autres zones sont les cuisses, le cuir
chevelu, les lèvres, les mains et les doigts ; les scarifications
prennent une signification particulière quand elles se situent à
proximité des organes génitaux.
Il s’agit de lésions superficielles, n’altérant généralement pas
le pronostic fonctionnel, même si elles peuvent laisser des
cicatrices visibles.
Phénomène de contagion dans les collectivités
Des épidémies d’automutilations sont susceptibles de se
produire dans différentes collectivités : prisons, internats,
services hospitaliers [15, 113, 114]. Dans les groupes de patients
hospitalisés, par exemple, la contagion de ces comportements
débouche parfois sur de véritables épidémies délicates à contrôler. Ces épidémies surviennent préférentiellement dans des
institutions plutôt coercitives, à l’instar des prisons, mais un
cadre institutionnel insuffisamment ferme et sécurisant les
favorise également. Les passages à l’acte successifs surviennent
alors le même jour ou sur plusieurs jours consécutifs, impliquant préférentiellement un petit sous-groupe de patients,
individuellement prédisposés, fréquemment entraînés par un
leader et engagés dans des relations privilégiées et dysfonctionnelles, souvent de rivalité [67, 68]. Les scarifications peuvent
servir à réguler l’impact des multiples dynamiques relationnelles
à l’œuvre dans le groupe des patients, et sources d’une excitation autrement peu maîtrisable. Il peut s’agir de rapprochés
érotisés entre eux, de sentiments de rivalité pour obtenir
l’attention préférentielle de l’équipe soignante ou de l’affirmation d’une solidarité (menacée par les angoisses internes au
groupe) contre les soignants et les soins, présentés comme un
adversaire commun et fédérateur. Ces épidémies se produisent
en effet presque toujours dans une ambiance de dénigrement
des soins, tout en constituant un appel à l’intervention de
l’équipe soignante [36].
Comorbidités
Les troubles des conduites alimentaires – notamment la
boulimie – et le trouble borderline de la personnalité sont
étroitement associés au comportement automutilateur.
Automutilations et troubles des conduites
alimentaires
Dans la boulimie
Les troubles alimentaires sont un des diagnostics le plus
fréquemment associés aux automutilations [1, 39, 115]. Inversement, les sujets présentant un trouble alimentaire courent plus
de risques de développer un comportement automutilateur [40].
Ces troubles partagent beaucoup de points communs :
majorité féminine, début à l’adolescence, insatisfaction à l’égard
du corps, ascétisme, sentiment d’inefficience, qui impliquent
souvent une attitude autopunitive [15]. En outre, l’usage des
laxatifs et des vomissements est souvent présenté comme un
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37-216-J-10 ¶ Automutilations à l’adolescence
comportement autoagressif. Les boulimiques qui s’automutilent
auraient un indice de la masse corporelle plus élevé que les
autres [116].
On a pu isoler un sous-groupe de patients présentant un
syndrome multi-impulsif, caractérisé par l’association à la perte
du contrôle alimentaire de comportements tels que l’alcoolisme,
l’usage de drogues, les automutilations, les tentatives de suicide,
la sexualité et les achats compulsifs [16, 42, 117]. Le trait d’union
entre ces pathologies pourrait être la présence d’abus et de
maltraitances durant l’enfance [116].
On a également tenté d’individualiser un syndrome faisant
alterner automutilations et autres comportements impulsifs, tels
que les troubles alimentaires [15, 118].
Les automutilations chez les boulimiques ont les caractéristiques suivantes [119] :
• les automutilations compulsives (vomissements, se ronger
profondément les ongles, se mordre, s’arracher les cheveux)
diffèrent des automutilations impulsives (coupures, brûlures,
abus de laxatifs, abus de substances et d’alcool, tentatives de
suicide) ;
• on constate une forte association entre les automutilations
impulsives et la boulimie, effet « protecteur » des traits
compulsifs ;
• le vomissement (compulsif) est vécu comme moyen de
compenser la perte de contrôle liée à l’impulsivité ;
• l’automutilation est considérée comme « partie intégrante »
de la boulimie ;
• la coexistence d’automutilations impulsives et compulsives
est en faveur de dysfonctionnements psychologiques et d’une
symptomatologie dépressive plus sévère ;
• plus la durée d’évolution de la boulimie est longue, plus le
risque de développer des automutilations est important ;
• les automutilations ont, dans la boulimie, valeur de recherche
du sens de la réalité et de l’identité ;
• la compulsivité est plutôt caractéristique du début de la
boulimie, et diminue avec la chronicisation de celle-ci ;
• il y a une alternance des phases d’automutilations et de
phases mobilisant d’autres comportements impulsifs, dont la
boulimie [118] ;
• on peut individualiser un sous-groupe de boulimiques multiimpulsives ;
• on pose l’hypothèse d’une base psychopathologique commune entre les deux dimensions : automutilations et
boulimie.
Dans l’anorexie
Les difficultés du contrôle de l’impulsivité sont davantage le
fait des anorexiques non restrictives et les patientes anorexiques
avec conduites de purge sont plus proches des boulimiques que
des anorexiques restrictives [120-124].
Il ressort de l’étude de Favaro que [120] :
• les automutilations impulsives sont plus fréquentes chez les
anorexiques avec conduites de purge que chez les anorexiques restrictives ;
• le taux d’automutilations dans l’anorexie est cependant
comparable à celui trouvé dans la boulimie [40, 45] ;
• la coexistence d’automutilations impulsives et compulsives
est prédictive d’une rupture de suivi.
Automutilations et trouble de la personnalité
de type borderline
Cinquante à 80 % des sujets borderline s’engagent dans des
automutilations (et la moitié des automutilateurs ont un trouble
limite de personnalité). En quoi diffèrent-ils des autres ? Et la
survenue d’un tel comportement dans le cours évolutif du
trouble de la personnalité est-elle significative ?
Les automutilations sont avant tout de type impulsif (coupures, brûlures) ; les sujets borderline qui s’automutilent ont des
scores plus élevés au DIB-R pour les dimensions impulsivité/
action, affects, psychoticisme et relations interpersonnelles ainsi
qu’au niveau global (index borderline) [125]. L’automutilation et
la suicidalité ont pu être considérés comme les « meilleurs »
critères d’inclusion pour le diagnostic de trouble borderline [126].
La présence d’un comportement automutilateur constitue un
indice de gravité dans la mesure où les passages à l’acte
suicidaires sont alors plus sévères [127] . L’automutilation y
apparaît comme un moyen « d’autopréservation », de régulation
des affects, de résistance contre la dissociation et le suicide [128].
L’apparition de comportements autoagressifs dans la trajectoire
du sujet borderline témoigne d’une instabilité structurelle plus
marquée : plus forte incidence de processus primaires d’agression, de perturbations graves des limites, de représentations
pathologiques de l’objet, d’idéalisation défensive, de dévalorisation et de clivage [129, 130].
Modèles psychopathologiques
Villalba et Harrington [131] et surtout Suyemoto [132] ont
procédé dans leurs revues de la littérature à une synthèse des
différents modèles psychopathologiques. Ces derniers, issus des
principales théories, apportent différents éclairages, souvent
complémentaires, du comportement automutilateur.
Approche cognitivocomportementale : modèle
environnemental
L’automutilation aurait une genèse double :
• d’une part, un « modelage » familial porteur d’abus amènerait
le sujet à lier la douleur à l’attention qui lui est portée
(conditionnement opérant) ;
• d’autre part, un renforcement est fourni par les bénéfices
apportés par les réactions des proches ; ce comportement, en
effet, confère une sorte de statut social et offre la possibilité
d’exercer un certain contrôle sur les autres ou de les impliquer. Ce modèle décrit également les phénomènes de contagion (boucle : observation – récompense – imitation).
Approches psychanalytiques
Modèle antisuicide
Le comportement automutilateur est considéré comme une
façon d’éviter le suicide. L’automutilation éviterait une destruction complète en canalisant les propensions destructrices.
Certains ont parlé de « microsuicides », sous-tendus par « l’illusion de maîtrise de la mort ». S. Ferenczi voit, dans le sacrifice
des organes génitaux (autocastration), selon lui prototype de
toutes les automutilations, « l’ultime rempart contre le suicide
(...) comme une tentative de l’individu, privé de ses moyens
d’action sur le milieu, de les rétablir au travers de son
corps » [133]. Action salvatrice en deçà des fonctions symboliques
ultérieurement décrites par B. Bettelheim ou tentative de
présymbolisation archaïque ? La question demeure [134].
Modèle interpersonnel : question des limites psychiques
Les théories du développement des relations d’objet et la
psychologie du soi mettent l’accent sur la nécessité pour un
sujet d’affirmer les limites de son self. Les craintes d’abandon
suscitent d’intenses émotions menaçant le soi du patient, son
manque de limites le conduisant à éprouver toute perte d’objet
comme perte d’une partie de soi, et tout rapproché affectif
comme un risque de fusion. Pour citer C. Matha et C. Savinaud,
« le passage à l’acte renvoie à une pulsionnalité débordante en
quête de limites qui semblent ne pouvoir s’éprouver que dans
la réalité. S’éprouver dans la réalité d’un acte devient une
tentative d’évaluer sa propre réalité, solidité, dans le monde
extérieur, un effort pour se sentir réel » [135]. La peau représentant une limite fondamentale entre soi et les autres, telle une
enveloppe narcissique qui protège du chaos possible du monde,
et le sang et les cicatrices représentant des marqueurs de la
réalité du soi, l’automutilation renforce une représentation de
soi séparée et différenciée [57, 136-138]. Certaines automutilations
sont « des coupures de la surface et mettant en acte dans le réel
une coupure non advenue dans le symbolique. Les scarifications
peuvent être comprises comme un retour dans le réel de ce qui
a défailli dans le symbolique et, en cela, elles renvoient toujours
au stade de la construction de la séparation subjective entre le
sujet et l’Autre, c’est-à-dire le stade du miroir » [139]. Alors que
pour O. Douville, « il n’y a pas à tenir là le conventionnel
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Automutilations à l’adolescence ¶ 37-216-J-10
discours portant sur le défaut de symbolique, mais bien davantage à repérer un geste symbolique qui se répète compulsivement. Il y a un défaut de nouage du symbolique aux registres
du réel et de l’imaginaire » [140] . Ces patients seraient en
difficulté pour se représenter séparé et distinct de leurs objets
primaires en particulier leur mère, du fait notamment d’un
attachement insuffisamment sécurisant (limites individuelles
floues, angoisses d’intrusion et de fusion alternant avec des
angoisses d’abandon). L’agir sur le corps viserait à parer aux
angoisses de dépersonnalisation liées au retour à l’état indifférencié primaire, à le contrôler pour y trouver quelque chose de
l’ordre d’une union acceptable (c’est-à-dire en particulier non
déshumanisante ou dépressogène), mais également à
l’induire [141]. De fait, l’acte automutilateur, quand il se chronicise et se ritualise, est moins impulsif que compulsif, moins
impérieux qu’organisé. De plus, lorsque l’adolescent automutilateur se porte mieux et entre dans un processus d’autonomisation à l’égard de ses parents, il éprouve souvent le besoin de
revenir à ces actes autoagressifs, à y « re-goûter », comme pour
« ne pas couper le cordon ombilical qui le relie à son
passé » [142]. Nous considérons que ce symptôme renvoie à un
autosadisme ; un sadisme agi et « réfléchi », au sens de retournement contre soi d’une agressivité non élaborée étayant le
sentiment d’existence par la douleur : « Partout (...) où ça fait
mal c’est moi, je ne suis pas seulement comme mes parents, je
suis aussi différent de mes parents, mon individualité consiste
en la souffrance que j’éprouve » dit F. Zorn [143]. Sa fonction
économique serait, dans le meilleur des cas, de permettre au
sujet de se détacher du masochisme passif orchestré par l’objet
(authentiquement pervers ou vécu comme tel, à la mesure de
l’investissement du sujet pour lui) et de s’approprier l’érogénéité
de son propre corps ; de répondre à la mainmise de l’objet sur
son corps, ou à la persistance d’une indifférenciation. Ce
comportement masochique est sous-tendu par « la représentation qu’une même peau appartient à l’enfant et sa mère, peau
figurative de leur union symbiotique (...). Le processus de
défusion et d’accès de l’enfant à l’autonomie entraîne une
rupture et une déchirure de cette peau commune » ou, dans les
cas moins sévères, par le sentiment de la persistance de
l’emprise de l’objet sur le sujet [136]. On comprend, dès lors, que
l’attaque vise autant l’objet que le sujet. L’angoisse contre
laquelle lutte ce sadisme autocentré est plus une angoisse
d’abandon, conséquence de la défusion (fantasme premier
d’union symbiotique mère-enfant suivi d’une césure secondaire,
sorte de « parentectomie » plus expressive que métaphorique
d’un besoin de séparation psychique), qu’une angoisse paranoïde de morcellement. Surtout, elle s’apparente à une mise en
acte sur le corps de la menace séparation-castration. Selon J.
Gillibert, l’autosadisme est une forme d’autoérotisme autodestructeur, substitut régressif de l’autoérotisme œdipien, qui vise
à recréer l’unité au niveau du corps du sujet [144]. Ainsi nous ne
serions pas en présence d’un autoérotisme qui console ou
contient le sujet face à la perte, ou même qui affirme son
autosuffisance (se passer physiquement de l’objet pour en jouir
fantasmatiquement), mais face à un autoérotisme mortifère qui
témoignerait à l’origine de l’agrippement à l’objet. Aussi,
comme le rappelle P. Givre, s’il existe donc une propension
naturelle chez l’adolescent à se replier sur l’activité autoérotique,
le mouvement régressif peut être tel que ce passage de l’objectalisation à l’autoérotisme aboutit à cette forme d’autosabotage,
pour reprendre le concept de P. Jeammet, qu’est l’autosadisme [145, 146]. Le sujet incorpore l’objet, l’attaque, tente de le
rencontrer dans la haine, le maîtrise, en triomphe, se vide de lui
(laisser le sang couler, explorer les berges de la plaie). On doit
relever la faible fréquence des objets transitionnels chez les sujets
borderline. On sait que le corps de l’enfant, indifférencié de
celui de la mère, peut parfois constituer le substitut archaïque
d’un objet transitionnel [147]. C’est alors sur ce corps indifférencié que le sujet effectue les travaux d’exploration de l’objet, et
que se déploient l’amour et l’agressivité à son égard, comme le
fait l’enfant sain avec son objet transitionnel, aussi chéri que
maltraité, maquillé que défiguré. Soulignons, avec B. Rosenberg,
que la sortie du masochisme érogène primaire, par la voie de
l’autosadisme, peut permettre une certaine forme de désexualisation et de culpabilité et, par conséquent, aller vers la constitution d’une névrose [148]. Cependant, l’organisation psychique
peut aussi bien prendre la forme d’un aménagement pervers,
aménagement qui n’a cependant pas la solidité d’une perversion, à la trame nécessairement serrée. Cet autosadisme reste
impulsif-compulsif sans intentionnalité et sans conscience de
son origine interne et de sa fin. Il lutte contre une menace
dépressive ou, comme le pointe C. Chabert, « contre une dérive
mélancolique soutenue par l’autoaccusation, réclamant répétitivement des mesures de rétorsions humiliantes et mortifères »,
en cherchant un apaisement, plus qu’il n’est sous-entendu par
une recherche de plaisir [149]. Ou, pour reprendre Ternyck, « la
solution masochique serait alors une version pubertaire de
l’élaboration de la position dépressive » [150]. Le masochisme
« gardien de la vie » n’a pu se constituer, qui permet de contenir
dans la sphère psychique les velléités autopunitives et les
mouvements de récupération de l’objet, au lieu de les agir sur
le corps. On observe souvent que la douleur physique que ces
patients s’infligent a une vertu, si ce n’est une fonction, de
réanimation psychique ; ils retrouvent alors en dehors des crises
un certain fonctionnement névrotique hystérique au sein
duquel l’interdit du rapproché incestueux protège des menaces
sur le narcissisme. Dans les formes les plus archaïques, la
clinique met en évidence moins douleur et culpabilité qu’anesthésie et honte, témoignant donc plus d’un registre d’investissement narcissique que d’un registre objectal. C’est toujours
l’objet maternel qui est visé du fait du « choix » de l’attaque
corporelle (corps issu de la mère) et, en cela, l’acte automutilateur est toujours la forme inversée de l’union pulsionnelle mèreenfant ; la souffrance provoquée agresse et le sujet et l’objet,
étroitement mêlés. Est-ce l’aménagement pervers d’un fantasme
maternel mortifère projeté dans le moi, auquel l’enfant obéit
tout en s’évertuant à le déchiffrer ? Est-ce le témoin du contreinvestissement de la perte de l’objet idéal des relations infantiles, et la reprise active de l’objet qui s’éloigne, ce qui nous
rapprocherait des observations de Spitz sur les automutilations
des enfants précocement carencés ? Un compromis entre
possession et séparation permettant alors un minimum de
différenciation. Au-delà du problème délicat des fantasmes
mortifères inconscients, la question de l’impossible rivalité avec
la mère narcissique ne s’éclaire-t-elle pas des travaux de R. Girard
sur le masochisme et le mimétisme ? À savoir que le sujet,
pressentant la fragilité de son objet dominateur et pour le faire
exister, accepte, dans une position sacrificielle, de maintenir par
sa conduite son objet en position de domination (mère de sa
douleur), et de rester son enfant [151]. En tout état de cause, le
sujet est à la fois celui qui s’inflige les blessures et celui qui les
reçoit, à la fois le sadique et le masochiste [135].
Modèle sexuel
Les liens entre sexualité et automutilations sont suggérés par
leur absence avant la puberté, la forte corrélation avec les abus
sexuels et l’incidence élevée de dysfonctions sexuelles chez les
patients. Les automutilations sont conçues comme des symptômes de compromis au sein de relations d’objet impliquant la
sexualité, la vie et la mort : elles protègent des pulsions de mort
tout en les exprimant et visent à contrôler la sexualité, à éviter
des pensées ou des actions à dimension sexuelle. Elles surviennent au moment où la puberté ravive la problématique œdipienne et constituent un moyen de surmonter des conflits
intrapsychiques liés à l’association de fantasmes sexuels et de
pulsions agressives [152]. Elles servent à « purifier » le corps,
considéré comme la source, plus ou moins dissociée du soi, de
ces fantasmes. Elles constituent également une façon de passer
d’une position passive à une position active, de reprendre la
maîtrise de pulsions sexuelles vécues comme intrusives et
« passivantes » ; l’activité sexuelle précoce et les fréquents
fantasmes de viol seraient induits par les automutilatrices pour
soulager l’anxiété en lien avec leurs préoccupations sexuelles en
prenant contrôle sur elles [153]. Dans le contexte d’un développement psychoaffectif perturbé, l’effraction cutanée pourrait
prendre valeur de pénétration [154]. La place des menstruations
dans la dynamique de ce comportement est discutée ; 60 % des
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37-216-J-10 ¶ Automutilations à l’adolescence
automutilations surviendraient durant les menstruations
auxquelles 65 % des patientes indiquent mal réagir. Rosenthal
estime que « l’automutilation pourrait être un moyen de
négocier le trauma génital et le conflit induit par les menstruations » [112]. Asch et Roy pensent que la même dynamique de
dépendance/autonomie qui sous-tend les actes sexuels sadomasochistes se retrouve dans le cadre de l’automutilation [155, 156].
Évoquer le sadomasochisme peut paraître problématique lorsque
la clinique montre le peu d’érogénéité imprégnant les comportements automutilateurs. Celle-ci ne se dévoile souvent que lors
d’un suivi au long cours, mais il est tout aussi vrai qu’à la
longue, le masochisme perd de sa charge libidinale pour se
transformer en masochisme moral. Pour le dire en deux phrases,
c’est la différence entre ce qu’évoquent Marcel Proust : « Le vice
n’est que l’érotisation du chagrin », et J.K. Huysmans : « La
douleur est le vrai désinfectant de l’âme » [157, 158]. Le fantasme
d’attaque de la mère, dans un premier temps psychiquement
vécu, semble se diluer dans l’agir sur un corps peu différencié
de l’objet. Par une sorte de déconnexion psychique, l’investissement de la souffrance infligée au corps maternel s’estompe, ce
qui marque la fin de la lutte entre sujet et objet. La souffrance
du corps propre devient l’ultime représentant de cette mère
frustrante ; le sujet investit la souffrance elle-même, la volupté
de la douleur remplace le manque, et il ne peut élaborer le
deuil. Il dit, à juste titre, qu’il ne sait pas de quoi ni pourquoi
il souffre. Son aliénation dynamique laisse la place d’une
organisation essentiellement économique.
Ce qui est aliénant (en dehors des cas d’emprise incestueuse
de l’objet par le sujet), c’est cette quête d’un désir et donc d’une
reconnaissance venant de l’objet, par lui jamais exprimé, ou
toujours vécu comme inauthentique car enfermé dans son
narcissisme, ou encore toujours insuffisant face à l’avidité sans
frein du sujet : l’objet a-t-il témoigné de son désir, l’a-t-il adressé
ailleurs (quel est l’objet de l’objet ?), ou s’en est-il trouvé
entravé ? Cela pose au sujet la question de son origine : de quel
désir est-il issu ? Comment désirer ce désir (flou) de l’objet,
comment s’y retrouver et s’y reconnaître ? Quoi qu’il en soit,
l’automutilation à l’adolescence ne sauve pas de l’emprise
psychique exercée par la perversion narcissique (réelle ou vécue
comme telle) de l’objet parental, car le sujet demeure inscrit
dans les scénarios fantasmatiques attribués aux parents. Ceuxci, plus ou moins énoncés (maîtrise, disqualification, humiliation sadique) mais très tôt perçus par l’enfant, l’ont touché alors
qu’il était livré lui-même à ses propres fantasmes masturbatoires.
Ils entrent en collusion avec les représentations inconscientes de
celui-ci (scénario sadique) et court-circuitent le travail de liaison
des représentations préconscientes. L’automutilation attaque ces
représentations au sein même du corps qui les a stimulées, mais
elle échoue à les annuler ou à les évacuer durablement. De fait,
le sujet ne fait que s’y enliser. Bientôt, le maintien du lien à
l’objet ne pourra plus se faire que par l’intermédiaire de ces
chaînes signifiantes : « je suis ce que tu dis que je suis et te le
montre de manière monstrueuse en miroir de la vision monstrueuse que je pense que tu as de moi. En étant ce que tu veux
que je sois, j’annule toute possibilité de séparation. J’imite le
désir que tu as de moi, seul désir qui me donne une valeur...
qu’elle soit négative ou positive importe peu » pourrait vouloir
dire à son objet le sujet automutilateur. L’automutilation est
alors une « monstration », démonstration monstrueuse, en ce
qu’elle n’est jamais autosuffisante et a perpétuellement besoin
d’une confirmation par le regard de l’autre [159].
Synthèse des approches psychanalytiques
Les automutilations ne peuvent se limiter à un symptôme
névrotique de compromis entre pulsions agressives ou sexuelles
et défenses. En tant qu’actes antiaffects, antipensée et antiobjet, elles témoignent toujours de la fragilité des fondements
de l’identité et du positionnement par rapport à l’objet primaire. La représentation des limites du sujet par rapport à
l’objet, la séparation des enveloppes – donc les limites du soi
– sont au cœur de cette problématique, en même temps que la
capacité de l’appareil psychique à contenir des affects vécus
comme débordants. C’est cette dimension « limite » du fonctionnement psychique, commune à tous les syndromes au sein
desquels les automutilations se manifestent le plus souvent
(personnalité borderline, trouble du comportement alimentaire,
syndrome post-traumatique, psychopathie...) qui sous-tend ce
comportement. L’automutilation, qui effectue une externalisation dans le corps de la souffrance psychique, est une action
dirigée tout autant contre l’objet que contre le sujet, visant à
contenir le surgissement d’angoisses émanant de fantasmes
inconscients archaïques. Elle est une attaque contre le corps,
vécu comme source quasi étrangère au moi des pulsions
sexuelles du sujet, vécu également comme étant sous la domination de l’objet, englobé par lui ou le contenant. La pulsionnalité, vécue comme le « cheval de Troie de l’objet dans le
moi », est dangereuse, notamment parce qu’elle pousse à
investir l’objet, investissement qui constitue une menace pour
l’identité. L’automutilation soutient l’investissement d’une
représentation de soi et de ses limites, permettant de se différencier de l’objet, d’un sujet engagé dans une double lutte
laissant peu de souplesse au fonctionnement psychique :
l’agrippement à l’objet, repris s’il s’éloigne et rejeté s’il s’approche, doit conjurer tant le risque d’abandon et de dépression que
le risque d’intrusion et de fusion dépersonnalisante. Les
automutilations visent la maîtrise des pulsions, de l’objet et du
soi, très condensés dans ce fonctionnement psychique
archaïque.
Régulation des affects et dimension addictive
Au-delà des différents modèles théoriques précédemment
évoqués et qui concernent tout ou partie des sujets automutilateurs, deux dimensions-clés semblent être communes à la
plupart de ces sujets : la fonction de régulation des affects et la
dimension addictive.
Régulation des affects
Modèle de régulation des affects. L’automutilation tend à
externaliser et à maîtriser des émotions intolérables : sentiment
d’abandon ou de rejet, souvent de colère retournée contre soi
par peur de détruire les autres. Elles « matérialisent » une
souffrance émotionnelle mal identifiable en une douleur
physique dont on s’affirme maître [111].
Doctors fait l’hypothèse d’une incapacité infantile à intérioriser des objets et une représentation de soi stables, à établir une
capacité à s’autoapaiser, qui conduit à rechercher une réponse
environnementale [153]. Les pensées agressives liées au sentiment
d’abandon sont dès lors vécues comme insurmontables, car
activant des représentations négatives de soi et de l’objet, et
conduisent à la conviction qu’il vaut mieux se blesser soimême que de faire du mal aux autres.
L’automutilation valide une expérience interne négative tout
en exprimant la profondeur des sentiments vis-à-vis des autres,
en raison des difficultés du sujet à verbaliser ses émotions [153] ;
elle est liée à l’incapacité à manier le langage et la communication symbolique pour exprimer les affects et serait utilisée
comme un « symbole évocateur primitif » qui manifeste le
sentiment, communique une expérience subjective, contrôle le
vécu affectif par la mise à distance et l’externalisation, et
protège les autres de l’émotion. Les personnalités alexithymiques sont fréquentes parmi les automutilateurs. Cela souligne
l’échec du sujet à traiter correctement l’information émotionnelle, tant celle émanant de soi (gestion des affects, question de
la figuration et de la représentation) que celle émise par l’objet,
dans un vécu de « dépression essentielle » (sans objet) ; l’automutilation y a une visée de réanimation corporelle et
psychique.
Modèle dissociatif. Ce modèle se centre sur la création ou le
maintien du sens de soi et de l’identité face à des émotions
internes qui l’altèrent et de nombreux travaux considèrent que
la fonction des automutilations est de mettre un terme à un
vécu dissociatif [62]. Bien que le mode d’action en soit peu clair,
il semble que l’écoulement du sang autant que la douleur soit
un facteur clé.
Dimension addictive
Certains sujets se vivent comme de véritables toxicomanes
devenus dépendants de leur comportement, qui semble alors
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Automutilations à l’adolescence ¶ 37-216-J-10
Tableau 7.
Comportement automutilateur selon cinq dimensions interdépendantes [49, 160, 161].
Honte et culpabilité
à l'égard de l'automutilation
Dégoût de soi-même
et montée de la tension
Dimension environnementale
Antécédents familiaux (troubles psychiques, violence, abus de
substances, automutilations, suicide)
Antécédents personnels (négligence, attachement problématique, perte
d’un parent, abus physiques et/ou sexuels durant l’enfance)
Environnement familial déstabilisant
Atouts et forces de la famille
Éléments déstabilisants récurrents (perte, relations conflictuelles, abus,
proches qui s’automutilent...)
Expérience d'un
soulagement de la tension
Dimension biologique
Vulnérabilité biologique de la régulation émotionnelle
Un événement déclencheur
augmente la détresse
Anomalies du système limbique ?
Dysfonction du système sérotoninergique ?
Dysfonction du système des opioïdes endogènes ?
Altération du seuil de perception de la douleur ?
Dimension cognitive
Passage à l'acte
automutilateur
Interprétations, croyances, évaluation négative de certains éléments de
l’environnement, pessimisme
Cognitions auto-induites liant les automutilations et le soi
Pensées, images et réminiscences d’un traumatisme
Figure 2. Schématisation de la dimension addictive de l’automutilation
selon Gothard et Conroy-Stocker [95].
Dimension affective
Prédisposition à des émotions fréquentes, intenses et soutenues
Émotions négatives déclenchant un comportement autoagressif : colère,
anxiété, tension, honte, dépression, tristesse...
évoluer de manière autonome et constituer une forme d’identité. Gothard et Conroy-Stocker ont schématisé la dimension
addictive de l’automutilation, soulignant son caractère cyclique
et répétitif [95] (Fig. 2).
On souligne en outre que les personnes présentant de hauts
niveaux de colère internalisée risqueraient plus que les autres de
s’installer dans ce mode addictif [37]. Enfin, le bénéfice économique attaché au comportement addictif (acte antipensée avec
répression élective des sentiments reliant à l’objet, soulagement
et décharge de l’agressivité, contrôle ou maîtrise triomphante de
l’objet, identité de compensation, etc.) et l’autorenforcement de
la conduite contribuent à réorganiser l’ensemble de la personnalité autour de lui, abrasant jusqu’à les annuler les associations
psychiques avec les scénarios fantasmatiques qui l’avaient
généré.
Modèle bio-psycho-social
Selon cette approche à la fois intégrative et multifactorielle,
synthèse transmodale en quelque sorte, le comportement
automutilateur repose sur cinq dimensions interdépendantes [49,
108, 160] (Tableau 7).
Données neurobiologiques
Deux neurotransmetteurs ont été particulièrement étudiés : la
sérotonine, dans le cadre du contrôle des impulsions, et les
opioïdes endogènes, dans celui des perturbations du ressenti de
la douleur [162].
Automutilations compulsives
La dimension compulsive, commune à différents comportements automutilateurs, ne semble pas posséder de traduction
biochimique univoque.
On a constaté, dans la trichotillomanie, une plus grande
efficacité – transitoire – des inhibiteurs de la recapture de la
sérotonine (IRS) par rapport à des agents noradrénergiques [163].
L’intérêt de la domipramine dans cette même indication a été
signalée [164] de même que la potentialisation des IRS par des
petites doses de pimosides [165].
Les taux de 5HIAA dans le liquide céphalorachidien (LCR) ne
sont pas significativement différents entre les témoins et les
sujets atteints de trichotillomanie, ce qui pose la question de
savoir si l’on doit toujours ranger ce comportement dans le
spectre des troubles obsessionnels [166].
Émotions et/ou dissociation en lien avec des pensées, images et
réminiscences d’un traumatisme
Dimension comportementale
Antécédents de troubles du comportement (hétéroagressivité, abus de
substances, tendance à l’isolement, etc.)
Préparation du passage à l’acte : choix du lieu, obtention des moyens,
recherche de solitude
Comportements d’après-coup : reprise des activités, endormissement,
échanges avec les autres sur le passage à l’acte
La piste des opioïdes endogènes ne semble pas davantage
concluante [167, 168].
L’exacerbation de la trichotillomanie chez des enfants traités
par méthylphénydate et la relative efficacité des neuroleptiques
atypiques fournit un indice sur l’implication de la dopamine [169, 170].
Automutilations impulsives
Ces automutilations ne constituent pas non plus un phénomène homogène, aussi est-il raisonnable de s’attendre à ce
qu’elles soient associées à des altérations neurobiologiques
variées.
Sérotonine
L’hypoactivité sérotoninergique a été associée à une diminution du contrôle des impulsions dans la dépression, le suicide,
la boulimie, les troubles borderline, l’abus d’alcool, les gestes
autoagressifs des retardés mentaux et chez les criminels
violents [171-175]. Les dosages biologiques, statiques aussi bien
que dynamiques, l’étude des récepteurs ou du transporteur de la
sérotonine, l’imagerie fonctionnelle, tous les résultats s’accordent à reconnaître une forte corrélation inverse entre les
niveaux d’impulsivité, d’agressivité (dont les automutilations),
voire de suicidalité et l’activité sérotoninergique : plus le
système de la sérotonine est hypoactif et plus les dimensions
d’agressivité et d’impulsivité sont élevées [176-178].
Si l’on intègre les troubles de personnalité (dont le trouble
borderline), il devient difficile de différencier, en termes de
dysfonctionnement du système sérotoninergique, les automutilateurs des non-automutilateurs, ce qui soulève la question de
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37-216-J-10 ¶ Automutilations à l’adolescence
« l’autonomie » du comportement automutilateur par rapport
aux troubles associés. On peut faire l’hypothèse d’un dysfonctionnement sérotoninergique commun à certains troubles
(contrôle des impulsions, personnalité), trouvant parfois, dans le
comportement automutilateur, une expression comportementale
spécifique combinant une forte autoagressivité à un faible
contrôle de l’impulsivité.
Rôle des opioïdes endogènes
Certaines caractéristiques cliniques du comportement automutilateur semblent soutenir une hypothèse impliquant les
opioïdes endogènes (dont la b-endorphine), à savoir :
• engourdissement psychique pendant les automutilations =>
anesthésie opioïde ;
• escalade en termes de répétition et de sévérité des automutilations => addiction ;
• dysphorie postcritique => repli sur soi.
Partant de ce constat clinique, quels pourraient en être les
soubassements neurobiologiques ? Deux hypothèses principales
sont à évoquer.
Tout d’abord, l’hypothèse addictive considère le système des
opioïdes endogènes comme initialement fonctionnel. Ce
système serait chroniquement surstimulé sous l’influence
d’automutilations répétées. Le sujet automutilateur développerait ainsi un phénomène de tolérance vis-à-vis de ses propres
opioïdes avec ce que cela implique en termes d’induction d’une
boucle d’autorenforcement et donc de chronicisation du
comportement autoagressif [111, 161, 179, 180].
Coid a constaté que les automutilateurs présentaient des taux
plasmatiques élevés de metenképhaline tout comme Sandman a
pu constater des sécrétions de b-endorphines élevées peu après
le passage à l’acte [179, 181]. Sandman a également pu noter un
découplage de la sécrétion entre b-endorphines et adrenocorticotrophic hormone (ACTH) chez certains patients automutilateurs
chroniques.
D’autres ont pu mettre en évidence que l’ACTH avait une
fonction de protection contre la tolérance aux opiacés et que la
sécrétion isolée de b-endorphine prédisposait à un phénomène
de tolérance, conduisant à des automutilations répétées [182].
En outre, sans l’effet renforçateur de la vigilance de l’ACTH,
la liaison « non-contrebalancée » des b-endorphines au niveau
du cortex cingulaire antérieur pourrait, comme le soulignent
Davis et al., conduire à un phénomène d’hypovigilance et ainsi
augmenter l’insensibilité à la douleur [183].
Enfin, une étude des automutilations chez des sujets présentant un retard mental a pu mettre en évidence qu’une dissociation postautomutilation des peptides de la pro-opiomélanocortine (POMC) prédisait une réponse thérapeutique à la
naltrexone et que les sujets ayant le taux de b-endorphines le
plus élevé en postautomutilation étaient ceux présentant la plus
grande amélioration sous naltrexone [181].
Une autre hypothèse considère le système des opioïdes
endogènes comme constitutionnellement dysfonctionnel et le
comportement automutilateur comme un syndrome développemental. Cette vulnérabilité pourrait induire un comportement
automutilateur à un moment du développement psychoaffectif
du sujet sous l’influence de différents facteurs, qu’ils soient
internes et/ou externes.
Lors d’une expérience chez des primates, où il fut procédé à
un isolement social précoce, se sont développées des automutilations répétées et, d’un point de vue neurophysiologique, il a
été constaté que cela induisait une réduction des connexions
dendritiques au niveau du cortex et du cervelet, que cela
produisait des changements morphologiques dans le striatum et
que cela altérait la microstructure neuronale hippocampique. En
outre, cet isolement précoce a altéré les taux régionaux de
norépinephrine, de dopamine, de sérotonine, de substance P et
d’enképhaline [184]. Enfin, cette expérience a également montré
que la réponse au stress de l’axe hypothalamo-hypophysaire
était perturbée. Le stress induit la sécrétion hypothalamique de
POMC, une prohormone ensuite clivée en ACTH, melanocyte
stimulating hormone (MSH) et b-endorphines. L’analgésie induite
par le stress explique l’apparente insensibilité présentée par les
soldats et/ou athlètes blessés et pourrait jouer le même rôle dans
le cadre d’automutilations répétées [185].
Question de l’analgésie induite par le stress
La sensation douloureuse est altérée chez les sujets automutilateurs chroniques. On relève une insensibilité à la douleur ou
analgésie pour près de 50 % des sujets automutilateurs ayant un
trouble de la personnalité de type borderline [111]. Schmahl et al.
ont pris appui sur ce phénomène pour élaborer une dichotomie
parmi les automutilateurs borderline sur la base de l’analgésie
ressentie ou non [19]. Ils se sont intéressés à la fonction et à
certaines dimensions psychopathologiques comme la dissociation et l’anxiété. Enfin, une voie non opioïde de l’analgésie
induite par le stress impliquerait un mécanisme endocannabinoïde [186]. Cela renvoie à une étude qui a mis en exergue une
diminution de la perception de la douleur chez certains sujets
borderline, ce phénomène n’étant pas opioïde-dépendant dans
la mesure où le test à la naltrexone (antagoniste) s’est avéré
négatif [187].
■ Stratégies thérapeutiques
Cadre de l’urgence
Nombre de patients sollicitant des soins immédiatement
après leurs automutilations sont accueillis dans des structures
hospitalières d’urgence. Outre les soins somatiques, prioritaires,
l’objectif est de les inscrire dans une prise en charge au long
cours adaptée à leur problématique psychologique globale.
L’attitude thérapeutique initiale semble déterminante pour la
suite des soins [108] ; il convient d’éviter les termes du registre du
passage à l’acte suicidaire [49, 188] ; l’attention suffisamment
bienveillante est d’autant plus importante que ce passage à
l’acte concerne souvent des personnalités pour lesquelles
l’établissement de liens est difficile [189].
Certaines interventions psychothérapeutiques sont plus
efficaces qu’un traitement médicamenteux prescrit de manière
opératoire [190].
Approche médicamenteuse
Le traitement médicamenteux ne doit jamais être l’unique
réponse [108] ; il s’inscrit dans une perspective de gestion au long
cours d’une vulnérabilité plutôt qu’en termes d’intervention
ponctuelle et l’on est fréquemment conduit à des polythérapies
(Tableaux 8,9).
Tableau 8.
Synthèse des données concernant les psychotropes employés dans le
cadre des automutilations compulsives.
Psychotropes
Remarques
IRSS, IRSN
Efficacité possible de la fluoxétine et de la
venlafaxine dans la trichotillomanie
Efficacité aléatoire des IRS pour les piqûres
compulsives ; sertraline et fluoxétine ont
été conseillées [191, 192]
Tricycliques
Efficacité possible de la clomipramine dans
la trichotillomanie et l’onychophagie
Antagonistes opioïdes
Quelques patients trichotillomanes
répondeurs
Autres
Quelques réponses sous lithium dans la
trichotillomanie
IRSS : inhibiteur de la recapture sélective de la sérotonine ; IRSN : inhibiteur de la
recapture de la sérotonine et de la noradrénaline.
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Automutilations à l’adolescence ¶ 37-216-J-10
Tableau 9.
Synthèse des données concernant les psychotropes employés dans le cadre des automutilations impulsives.
Psychotropes
Symptômes-cibles associés
Remarques
IRSS, IRSN
Impulsivité, dépression, anxiété, irritabilité,
agressivité
Un des traitements les plus recommandés. Possible réponse clinique à faible dose
même si le traitement de l’impulsivité nécessite souvent des doses élevées
Thymorégulateurs
Labilité de l’humeur, impulsivité, anxiété
Le divalproate de sodium semble être le mieux toléré. La carbamazépine pourrait
induire une augmentation de fréquence des dépressions. Risque d’autolyse avec
le lithium et faible efficacité
Antagonistes opioïdes
Plus grande efficacité en cas d’antécédents d’abus
sexuels dans l’enfance ou d’analgésie durant le
passage à l’acte
Peut-être plus efficace chez les automutilateurs avec analgésie. Efficacité
controversée
b-bloquants
Impulsivité, agressivité, dissociation,
surexcitation
Le propranolol est le plus hypotenseur orthostatique ; tous les b-bloquants sont
dépressogènes
Antipsychotiques
Agressivité, anxiété, sensation de morcellement
Tenir compte des effets secondaires et de leur retentissement sur l’image de soi.
Certains patients borderline sont plus réceptifs à de petites doses de
neuroleptiques classiques
Benzodiazépines
Anxiété, irritabilité
À utiliser avec précaution du fait du risque de dépendance. Les molécules à demivie courte impliquent plus un risque de passage à l’acte par désinhibition
IMAO
Dépression, sensation de rejet
Intérêt potentiel pour les formes résistantes de dépression ou de dysthymie.
Risque d’interactions médicamenteuses et autolytiques
Tricycliques
Dépression
Risque autolytique. Les effets noradrénergiques risquent d’augmenter
l’impulsivité et les troubles du comportement
IMAO : inhibiteurs de la monoamine oxydase ; IRSS : inhibiteur de la recapture sélective de la sérotonine ; IRSN : inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la
noradrénaline.
Psychothérapies
Automutilations compulsives
Les approches psychanalytiques mettent l’accent sur les
significations possibles du comportement automutilateur et
prennent en compte la personnalité globale. Les thérapies
cognitivocomportementales ciblent certains paramètres en lien
avec le début, le maintien et l’extinction de ce comportement.
Il existe autant de modalités d’abord psychodynamiques de la
trichotillomanie que d’articles sur le sujet [193]. Les approches
comportementales (autosurveillance, inversion des habitudes,
conditionnement classique, conditionnement opérant) sont
quelquefois associées à une composante cognitive. La combinaison d’une psychothérapie et d’un traitement médicamenteux
est préférable à la psychothérapie seule, le traitement devant
être poursuivi au-delà de l’arrêt de la psychothérapie [194, 195].
Automutilations impulsives
Place de la thérapie dialectique comportementale
Cette thérapie, élaborée par Marsha M. Linehan, s’est orientée
vers la prise en charge globale de la souffrance liée au trouble
de la personnalité borderline. L’objectif principal est de permettre au sujet d’acquérir de nouvelles stratégies d’adaptation,
notamment de gestion des émotions, afin d’accroître le contrôle
vis-à-vis des passages à l’acte autoagressifs et de tendre à
l’extinction [49].
Approche psychodynamique
Les différentes expériences psychothérapeutiques ont conduit
Guralnik et al. à souligner cinq points [196] :
• maintien d’une posture empathique ;
• abord initialement factuel puis amorce prudente du travail
d’associations ;
• travail d’introspection pouvant amener le sujet à réfléchir sur
quelle(s) partie(s) de lui-même ou d’autrui est dirigée l’agression ; la distinction agresseur/agressé peut être une entreprise
complexe et mouvante ;
• question du lien sadomasochiste alors souvent abordée ;
• à mesure que la dynamique du lien se poursuit, certaines
modalités relationnelles qui prennent alors valeur d’alternative.
Cette démarche, centrée sur l’étayage d’un moi défaillant,
peut conduire à la mise en place de défenses et de stratégies
d’adaptation permettant au sujet de prendre de la distance visà-vis de certains affects débordants. Elle reste éloignée d’une
approche psychanalytique classique qui, tout en s’assurant du
maintien de la cohésion du moi, fait travailler le sujet sur ce qui
le déborde, ce qui saigne en lui.
■ Conclusion
Pris dans le bruit, quelquefois assourdissant, des passages à
l’acte variés et répétés de l’adolescence, les automutilations, par
ailleurs desservies par leur hétérogénéité clinique et psychopathologique et fréquemment amalgamées à des gestes suicidaires,
ont vu leur individualité souvent réduite au seul statut de
symptôme. L’évaluation clinique de tout adolescent en détresse
psychologique doit impérativement comprendre la recherche
d’un passage à l’acte automutilateur. De la même manière
qu’une coupure impulsive au poignet n’équivaut pas à une
phlébotomie, l’automutilation n’est pas un symptôme comme
un autre. Elle peut révéler une souffrance majeure, voire
témoigner d’une escalade dans une détresse, ou bien signifier
que les dernières lignes de défense sont en train de vaciller.
Aussi, passé une nécessaire prise en considération de ce signal
d’alerte par le clinicien et les structures institutionnelles, il s’agit
de panser la souffrance au-delà du symptôme, sans pour autant
l’oublier, et concevoir la prise en charge à la fois de manière
intégrée et plurifocale. En fait, l’automutilation doit toujours
retenir l’attention des soignants. Les interactions symptôme/
structure sont à la fois nombreuses et complexes. Le passage à
l’acte autoagressif évolue au fil du temps, tout comme la
souffrance dont il témoigne et qui elle-même fluctue dans son
expression clinique. Il peut même s’en désolidariser tant les
aspects addictifs peuvent être puissants. Cette tentative de
structuration par l’extérieur peut contribuer à la stabilisation,
même précaire, d’une structure défaillante, car c’est bien de cela
dont il s’agit à la base, même si c’est au prix d’un lien aliénant
et appauvrissant. Enfin, ce passage à l’acte, forme de maltraitance que le sujet s’inflige à lui-même, survient très fréquemment à la suite d’autres types de maltraitances, infligées
durant l’enfance, telles que les négligences émotionnelles ou les
abus sexuels. Cela explique sans doute la fréquence de la
dysrégulation émotionnelle et de l’organisation borderline de la
personnalité identifiées chez nombre d’adolescents
automutilateurs.
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37-216-J-10 ¶ Automutilations à l’adolescence
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Points essentiels
• Rechercher systématiquement un comportement
automutilateur lors d’une consultation médicale ou
psychologique avec un(e) adolescent(e).
• Être sensibilisé aux signes d’alerte d’un passage à l’acte
automutilateur.
• Suspecter des antécédents de maltraitance survenus
durant l’enfance.
• Ne jamais banaliser un comportement automutilateur,
particulièrement s’il se répète.
• Distinguer le passage à l’acte automutilateur d’un geste
suicidaire.
• Considérer le comportement automutilateur à la
lumière de la problématique globale présentée par l’adolescent(e).
• Penser les soins de manière intégrée et dans une
optique multifocale.
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L. Gicquel, Psychiatre, chef de clinique assistant ([email protected]).
Université Paris V, clinique des maladies mentales et de l’encéphale, Hôpital Sainte-Anne, 100, rue de la santé, 75014 Paris, INSERM U669, 97, boulevard de
Port-Royal, 75679 Paris cedex, France.
M. Corcos, Psychiatre, maître de conférences des Universités, praticien hospitalier.
B. Richard, Psychiatre.
Département de psychiatrie de l’adolescent et du jeune adulte, Institut Mutualiste Montsouris, 42, boulevard Jourdan, 75674 Paris cedex 14, France.
J.-D. Guelfi, Psychiatre, praticien universitaire, praticien hospitalier, chef de service.
Psychiatre, université Paris V, clinique des maladies mentales et de l’encéphale, Hôpital Sainte-Anne, 100, rue de la santé, 75014 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gicquel L., Corcos M., Richard B., Guelfi J.-D. Automutilations à l’adolescence. EMC (Elsevier Masson SAS,
Paris), Psychiatrie/Pédopsychiatrie, 37-216-J-10, 2007.
Disponibles sur www.emc-consulte.com
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