Le Courrier de la Transplantation - Volume I - n o3 - oct.-nov.-déc. 2001
120
Mise
au point
l y a plus de candidats en attente de transplantation que
d’organes disponibles. C’est ce fait qui a conduit à établir des
registres de candidats à la greffe, les listes d’attente, et à éla-
borer des règles de répartition et d’attribution des organes pré-
levés chez les sujets en état de mort cérébrale. Si l’on raisonne
par analogie avec l’après-guerre mondiale, époque à laquelle
les ressources alimentaires limitées devaient être distribuées
équitablement, les règles de répartition sont assimilables au
rationnement qui vise à partager une ressource rare en situa-
tion de pénurie. L’Espagne est d’ailleurs parvenue à circons-
crire le problème en augmentant spectaculairement la disponi-
bilité des organes par une politique volontariste de promotion,
d’organisation et de rémunération de l’activité de prélèvement
sur personne décédée. Il n’y a donc pas eu nécessité, dans ce
paradis de la transplantation, d’établir des règles de répartition
bien définies, et toute latitude est laissée à l’équipe de greffe
associée au service de prélèvement pour l’attribution des gref-
fons. Dans la plupart des autres nations, notamment aux États-
Unis et en Europe du Nord, la pénurie existe et perdure. En
France, si l’on prend l’exemple de la greffe rénale, il y a trois
fois plus de malades à greffer que de transplantations réalisées
annuellement, et les durées d’attente dépassent couramment
plusieurs années. Cela signifie que lorsqu’un organe est trans-
planté, un autre malade n’en bénéficie pas, au détriment de sa
qualité de vie, de sa santé, voire de sa vie s’il s’agit d’une greffe
de foie, de cœur ou de poumon. C’est un choix éthique diffi-
cile, car il faut confronter des critères basés sur l’efficacité médi-
cale et l’équité, qui sont par essence deux principes contradic-
toires. De plus – et c’est là l’obsession des agences de
distribution d’organes – il ne faut perdre aucun greffon au cours
d’un processus guidé et arbitré par des règles et des contraintes
logistiques parfois extrêmement complexes.
POURQUOI UN SYSTÈME DE DISTRIBUTION DES ORGANES ?
Le problème de la pénurie ne se limite pas à son seul aspect
quantitatif. Même s’il y a un nombre identique de candidats et
d’organes prélevés, un système de distribution demeure utile.
En effet, la pénurie se décline avec les particularités de chaque
malade ou groupe de malades (pénurie qualitative), et avec l’ir-
régularité des ressources en greffons dans le temps (pénurie
dynamique). Certains malades doivent recevoir un greffon en
urgence et d’autres un greffon particulier et parfois unique, par
exemple entièrement histocompatible. Enfin, il faut trouver la
meilleure adéquation possible entre les activités de prélèvement
et celles de greffe, dans l’espace défini où s’opèrent les
échanges. Cela justifie qu’il existe, même en période d’abon-
dance, un mode élaboré de distribution des organes qui fonc-
tionne dans l’aire géographique la plus large possible, au mieux
à l’échelon d’une nation.
Les systèmes faisant appel à un score informatisé pondérant les
principaux facteurs d’attribution sont les plus sophistiqués qui
ont été développés et mis en application par les agences de dis-
tribution d’organes dans les pays où la transplantation s’est
organisée. En revanche, ils sont loin d’être les mieux acceptés
et les plus utilisés en pratique, et il faut prendre garde à bien
distinguer les véritables systèmes de score “orientés vers le
patient” de certains comptes de points employés dans des sys-
tèmes de répartition “aux équipes” comme aux États-Unis pour
les reins ou au Royaume-Uni pour les foies. Seul le système
ETKAS[1],qui fonctionne depuis 1996 dans la zone Euro-
transplant pour la répartition des reins, répond à cette défini-
tion (1). Un nouveau modèle nommé MELD[2] devrait être mis
en place prochainement aux États-Unis pour la répartition des
foies à partir d’un score prédictif de l’espérance de vie du
malade inscrit (2).Ce sont ces deux exemples concrets que nous
allons analyser de façon détaillée.
CRITÈRES DATTRIBUTION D’UN GREFFON À UN MALADE
Quel que soit le système utilisé, souple ou contraignant, qu’il
soit appliqué par l’homme ou par l’ordinateur, les éléments
pris en compte pour l’attribution d’un organe à un malade sont
universels et s’appuient sur les principes généraux de justice
et d’utilité. Sans entrer dans le détail de ces très nombreux cri-
tères, rappelons qu’il faut bien distinguer la transplantation
d’un organe “vital” de la greffe rénale. L’attribution d’un
!C. Hiesse*
* Département médical et scientifique, établissement français des greffes,
75012 Paris.
Analyse des systèmes de scores
pour la répartition et l’attribution
des organes prélevés en vue de transplantation
I
[1] Eurotransplant Kidney Allocation System.
[2] Model for End-Stage Liver Disease.
Le Courrier de la Transplantation - Volume I - n o3 - oct.-nov.-déc. 2001
121
Mise
au point
greffon hépatique ou cardiaque doit se fonder sur l’espérance
de vie du malade. Il faut éviter de faire l’erreur de considérer
comme un déterminant d’évaluation ou de répartition la durée
d’attente, souvent inversement proportionnelle à la mortalité
et à la gravité de l’état clinique au moment de l’inscription. La
problématique est différente en transplantation rénale : l’his-
tocompatibilité donneur-receveur a été imposée par les immu-
nologistes il y a plus de trente ans comme base des règles de
répartition. Malgré une remise en cause de son influence à la
lumière de l’amélioration générale de l’efficacité et de la tolé-
rance des traitements immunosuppresseurs, elle demeure
importante (3), mais c’est la durée d’attente qui est devenue le
critère d’attribution le plus sensible. Il est perçu par le public
comme le principal facteur d’équité. De plus, il a été démon-
tré que les résultats de la greffe étaient moins bons chez les
malades greffés après une attente prolongée (4). L’un des
objectifs du programme d’Eurotransplant est de diminuer le
nombre de malades attendant depuis plus de cinq ans.
MÉTHODES DE RÉPARTITION DES ORGANES
Même si, in fine, un greffon est toujours transplanté à un patient
donné, il y a deux grands modes de répartition possibles : le
greffon est proposé à une équipe qui se charge de l’attribuer,
ou il est attribué directement à un malade.
Le greffon prélevé peut être proposé à une équipe, soit
à proximité du lieu de prélèvement (répartition “locale”),
soit par un système de tours de rôle. L’équipe a la respon-
sabilité de l’attribution à l’un des malades de sa propre liste
en fonction des critères qui lui semblent les meilleurs. Cette
méthode se base d’abord sur une conception qui prévaut lar-
gement parmi les praticiens de la transplantation : attribuer
un greffon est une décision médicale complexe, “floue”,
basée sur d’innombrables critères qui ne peuvent pas tous
être “modélisés”, par exemple la motivation des patients.
Cette responsabilité doit être celle des médecins ou des chi-
rurgiens en charge de la greffe, d’ailleurs les mieux placés
lorsqu’il s’agit d’évaluer la gravité de l’état clinique du
patient, facteur déterminant du choix d’attribution en trans-
plantation hépatique ou cardiaque. Un argument supplé-
mentaire est le caractère incitatif au prélèvement d’une trans-
plantation réalisée localement, au bénéfice d’un malade
inscrit dans le centre où s’effectue le prélèvement. Enfin, et
cela est particulièrement valable dans le cas de la trans-
plantation d’organes thoraciques, l’attribution locale permet
de raccourcir la durée d’ischémie froide, facteur pronostique
déterminant. En revanche, on peut reprocher à ce système
son caractère arbitraire et une certaine opacité, notamment
vis-à-vis des pouvoirs publics et des associations de malades.
Par ailleurs, même si une décision individuelle d’attribution
peut s’avérer parfaitement fondée, elle peut s’opposer, sur
le plan médical et sur celui de l’équité, aux intérêts de santé
publique d’une communauté de candidats à la greffe au-delà
de l’échelon d’une équipe : région, nation, voire groupe de
nations comme la “zone Eurotransplant”. L’Organisation
mondiale de la santé insiste pour que l’accès à la greffe soit
équitable à l’échelon de chaque nation, quelles que soient la
race, les opinions, la religion et les ressources financières
des malades. L’absence de règles claires d’attribution
empêche d’appliquer des actions qui pourraient, en fonction
d’objectifs définis au préalable, avoir un effet positif sur l’ef-
ficacité de l’appariement greffon-receveur (et donc les résul-
tats de la greffe) et l’équité d’accès à la greffe. La méthode
“d’attribution à l’équipe” est acceptable s’il n’y a pas de
pénurie ; elle est également adaptée aux greffes dans les-
quelles l’ischémie doit être la plus courte possible, comme
la transplantation cardiaque ou pulmonaire. Un avatar de ce
type de répartition est le système de “tour d’équipes”, lar-
gement utilisé en France pour l’attribution des greffons dans
certaines régions. Il ne prend en compte ni l’inégalité du
nombre de malades inscrits, ni l’inégalité d’accès aux gref-
fons, ni les différences entre les capacités des équipes. Il n’a
qu’une justification politique : équilibrer l’activité entre les
équipes, et génère de grandes injustices entre les malades,
même s’il est assorti de facteurs de pondération.
Le mode de répartition “au malade”, ou attribution
directe centralisée, est basé sur les besoins d’une plus
grande équité et d’une parfaite transparence vis-à-vis du
public et des autorités de santé. C’est la seule méthode de
gestion des malades urgents, notamment dans le domaine
de la transplantation hépatique, et des malades ayant des
difficultés pour obtenir un greffon. Il s’agit par exemple des
hyperimmunisés en transplantation rénale, qui doivent avoir
accès à un “pool” de donneurs très large, à l’échelon natio-
nal, voire international. Mais comment s’effectue le choix
du patient, dans un tel principe de répartition ? N’aban-
donne-t-on pas, dans ce système rigide, la souplesse de l’at-
tribution et son caractère de décision médicale ? C’est le
cas du système traditionnel d’algorithme, utilisé en France
depuis des lustres pour la distribution de certains reins dans
certaines régions. Il consiste en l’application d’un choix
hiérarchique utilisant des critères simples : le plus grand
nombre d’identités HLA entre donneur et receveur, puis, à
égalité de compatibilité, le taux décroissant d’anticorps anti-
HLA, puis, à taux d’anticorps équivalent, la durée d’attente
décroissante. L’ordinateur est utilisé ici pour avoir une fonc-
tion de filtrage (pour maintenir la compatibilité stricte ABO
ou définir un niveau minimal d’histocompatibilité pour les
hyperimmunisés, par exemple), puis de simple tri séquen-
tiel, avec édition d’une liste de malades. Si le critère utilisé
comme première clé de tri reste valide, le système fonc-
tionne, mais si sa pertinence médicale et scientifique dimi-
nue, comme pour le nombre d’identités HLA, il perd sa jus-
tification première et devient même inique. C’est la rigidité
de ces algorithmes qui les rend difficilement acceptables.
C’est pourquoi il est logique qu’ils puissent être remplacés
par des modèles plus complexes, mais infiniment plus satis-
faisants à tous égards.
Le Courrier de la Transplantation - Volume I - n o3 - oct.-nov.-déc. 2001
122
Mise
au point
EXEMPLE D’EUROTRANSPLANT DANS LA DISTRIBUTION
DES REINS AU MALADE” PAR UN SYSTÈME CENTRALISÉ
INFORMATISÉ BASÉ SUR UN SCORE COMPOSITE
L’intérêt évident d’un système de score est de gommer le carac-
tère rigide de la hiérarchisation, en pondérant dans une fonction
mathématique les principaux critères de choix des patients. Cela
apporte ainsi la souplesse nécessaire à un mode d’attribution cen-
tré sur le malade, mais qui, incontestablement, entame le libre
arbitre du médecin. La façon la plus simple (mais pas forcément
la seule) de construire cette fonction est de faire une somme pon-
dérée des variables élémentaires : X = a1x1+a
2x2+…+ a
nxn.
La combinaison de facteurs médicaux (HLA, probabilité de mis-
match, durée d’attente, matching-age) et logistiques (prime au
prélèvement local, balance prélèvement-transplantation) est aisée,
et permet d’éviter les dérives. Le système centralisé ETKAS
assure la répartition de tous les greffons rénaux prélevés dans les
six pays de la zone Eurotransplant (Belgique, Pays-Bas, Luxem-
bourg, Allemagne, Autriche et Slovénie) parmi un pool de plus
de 12 000 inscrits. Lorsqu’un prélèvement est effectué, ses carac-
téristiques sont transmises au centre de régulation de Leiden (Pays-
Bas), saisies dans l’ordinateur où réside la liste d’attente euro-
péenne, et le logiciel effectue en quelques minutes le classement
des malades “élus” selon l’ordre des points calculés par la for-
mule du score Eurotransplant (tableau I). Le rein est proposé et
attribué en cas de cross-match négatif aux malades ayant le score
le plus élevé. Les poids respectifs des variables dans le score ont
été déterminés, d’une part, à partir d’approximations appuyées
sur des simulations et, d’autre part, par ajustement lors de l’ap-
plication réelle des règles choisies. Des objectifs ont été claire-
ment définis : diminuer le nombre des malades en attente pro-
longée et ceux ayant un accès difficile aux greffons (par exemple,
groupes HLA rares ou homozygotes), maintenir une balance
d’échanges raisonnable entre les nations, et garantir des résultats
de transplantation optimaux par l’appariement HLA. Ces objec-
tifs font l’objet d’évaluations régulières publiées dans la littéra-
ture et les rapports d’Eurotransplant (1). Celles-ci ont montré
notamment que le nombre des malades en attente depuis plus de
cinq ans et d’hyperimmunisés diminuait sur la liste européenne.
En France, le nombre de malades appartenant à ces deux catégo-
ries augmente régulièrement. L’acceptabilité de ce système par
les 68 centres affiliés est excellente, principalement en raison du
bon fonctionnement de la “balance” prélèvement-greffe et de la
distribution : 60 % des reins sont greffés localement, 20 % dis-
tribués à l’échelon national et 20 % à l’échelon international. Un
élément important est la réactivité du système, qui peut subir des
amendements en fonction du résultat des évaluations, débattus à
l’occasion de meetings trimestriels réunissant des représentants
transplanteurs de chaque nation, et immédiatement mis en œuvre
dans le programme informatique. Enfin, il faut bien comprendre
que, pour qu’un système de ce type fonctionne, il faut qu’il soit
appliqué dans un pool de receveurs et de donneurs le plus large
possible, au minimum à l’échelon national. Il perd sa cohérence
s’il fonctionne à l’échelon local, voire régional.
A
TTRIBUTION AUTOMATIQUE DU REIN EN CAS DE TRANSPLANTATION EXTRARÉNALE
(
YCOMPRIS GREFFE REIN
-
PANCRÉAS
)
Priorités successives :
"Échange obligatoire pour les malades à 0 incompatibilité
"Malades hyper-urgents
"Programmes spéciaux : Eurotransplant Senior Program, HIT, AM, “en bloc”, etc.
"Malades électifs choisis par ordre de points du score
Score : calculé sur 1 160 points
Critères d’attribution Pondération Maximum points Formule
HLA-A, B, DR 4 400 (35 %) 400 x (1-nombre d’incompatibilités HLA/6)
Probabilité d’incompatibilité 1 100 (8 %) 100 x (1-[ABO[1] x (1-[% anticorps anti-HLA/100]) x (INCp0[2] + INCp1)])1 000
Durée d’attente (DA) 2 200 (17 %) 200 x ([DA + bonus]/durée d’attente maximale)
Distance donneur-équipe greffe 2,6 260 (23 %) Local = 260 ; régional = 208 ; national = 104 ; international = 0
Balance import/export 2 200 (17 %) 200 x ([meilleure balance - balance du pays]/[meilleure balance - plus mauvaise
balance])
- Bonus pédiatrie : receveur pédiatrique 0-5 ans : + 3 ans ; 6-10 ans : + 1 an ; 11-15 ans : + 2 ans.
- HLA score doublé : receveur pédiatrique.
- Non-résident : pas de points “logistiques” (distance donneur-équipe de greffe, balance import-export).
- Durée d’attente : calculée à partir de la mise en hémodialyse.
- Règles de compatibilité ABO : un donneur O peut donner exclusivement à un receveur O ou B.
- Profil d’acceptation des reins par centre et par malade enregistré dans le système en fonction de critères immunologiques (compatibilité), d’âge, etc.
- À mettre en œuvre en 2002 : points pour age-matching donneur-receveur.
[1] ABO : fréquence du groupe sanguin ABO dans la population.
[2] INCp0 et INCp1 : probabilité pour un receveur de trouver un donneur à 0 et 1 incompatibilité en fonction de la fréquence des groupes HLA-A, B, DR.
Tableau I. Système de répartition des reins ETKAS (Eurotransplant Kidney Allocation System).
Le Courrier de la Transplantation - Volume I - n o3 - oct.-nov.-déc. 2001
123
Mise
au point
SYSTÈME MELD : EXEMPLE DE LA MISE EN APPLICATION
D’UNE MODÉLISATION DE LA SURVIE
POUR LA DISTRIBUTION DES FOIES AUX ÉTATS-UNIS
Le système actuel de répartition des foies aux États-Unis repose
sur le regroupement des malades en plusieurs catégories (sta-
tuts 1, 2A, 2B et 3), dont la gravité est évaluée par les éléments
de la classification de Child-Pugh-Turcotte. La distribution des
greffons s’effectue selon cette hiérarchie et selon l’échelon géo-
graphique de répartition. Ce système a fait l’objet de vives cri-
tiques, car le facteur “durée d’attente”, utilisé pour départager
(tie break) les malades à l’intérieur de chaque catégorie, entraîne
une dérive qui est de greffer les malades attendant depuis plus
longtemps et ayant un meilleur pronostic, au détriment de ceux
dont la vie est menacée à court terme. C’est à l’initiative du
Département fédéral de la Santé qu’une réflexion est engagée
en 1998 pour corriger cette aberration. Le système MELD (qui
devrait entrer en application fin 2001) est un nouveau principe
de distribution dont l’objectif principal est de diminuer la mor-
talité en liste d’attente. Le risque de décès des malades à court
terme en l’absence de transplantation est mesuré par un score
utilisant des critères biologiques (2). Ce modèle avait été éla-
boré aux Pays-Bas pour évaluer le pronostic des cirrhotiques
devant subir la pose d’un shunt intrahépatique par voie trans-
jugulaire. Un certain nombre de points et une pondération sont
affectés à chaque donnée biologique et additionnés dans le
score, qui peut aller de 10 à 40 points[3]. Pour valider le carac-
tère prédictif de ce score sur la mortalité à trois mois et un an,
les Américains l’ont testé dans un groupe de malades hospita-
lisés pour complications d’une hépatopathie chronique ; dans
un deuxième temps, ils l’ont appliqué à un groupe de malades
inscrits sur la liste d’attente de greffe hépatique entre novembre
1999 et juin 2000. L’étiologie de la maladie hépatique a été reti-
rée du modèle définitif. L’intérêt de ce score par rapport à la
classification de Child (qui comprend des éléments subjectifs)
est le nombre réduit des paramètres biologiques, quantifiables
et reproductibles, et par conséquent sa simplicité et son objec-
tivité. À côté des “super-urgences” de la catégorie 1 (hépatites
fulminantes, retransplantation immédiate), tous les autres
malades en attente de greffe sont regroupés dans une même
catégorie, et classés par score MELD décroissant en vue de
l’attribution d’un greffon. Le score se modifie au fur et à mesure
de l’évolution des résultats biologiques. De manière analogue,
la répartition selon un modèle prédictif de survie pourrait être
étudiée pour la transplantation cardiaque, où l’influence
des critères de gravité de l’état du malade avant greffe sur le
pronostic vital a été récemment évaluée (5).
CONCLUSION
On ne peut que déplorer le caractère hétéroclite de notre
système hybride de répartition et d’attribution des organes, basé,
en dehors de la gestion des rares malades urgents ou priori-
taires, sur une répartition “à l’équipe” (répartition locale ou par
tour), assortie dans certains cas et dans certaines régions d’une
attribution directe “au malade”, en fonction de règles algorith-
miques obsolètes. Il y a, en outre, d’incompréhensibles dispa-
rités entre des aires de répartition : les sept interrégions, arbi-
trairement découpées à la fin des années 1980. On peut y voir
l’expression de la diversité et de la spécificité de chaque région.
Mais un cirrhotique a-t-il, en France, un accès identique à la
greffe hépatique, selon qu’il réside dans la ville X ou le village
Y? Un insuffisant rénal attendra-t-il aussi longtemps, selon
qu’il s’inscrit dans le centre A ou dans le centre B ? Sauf à espé-
rer que l’importation du “miracle espagnol” réduise soudaine-
ment le problème de la pénurie d’organes, la réponse aux ques-
tions précédentes, bien sûr négative, doit amener à nous
interroger sur la question de fonder un nouveau système sur
des objectifs de santé cohérents. Un système de score est-il le
plus approprié, notamment pour répartir les greffons rénaux et
hépatiques, et à quel niveau géographique, national ou régio-
nal pourrait-on l’appliquer ? Personne n’a démontré qu’un
mode d’attribution directe centralisé “au malade” était
supérieur, en termes de résultats de greffe, à l’attribution
délocalisée par une équipe, et les données médiocres de survie
du greffon dans la zone Eurotransplant (vraisemblablement sans
rapport avec le mode de distribution) sont critiquées (1). Une
unité de régulation disposant d’un outil informatique perfor-
mant, pour expérimenter par exemple un système de score
établi selon des standards médicaux approuvés et régulièrement
évalués par les professionnels, serait à coup sûr un progrès
incontestable, tout particulièrement pour améliorer l’équité
d’accès des malades à la greffe. #
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. De Meester J, Persijn GG, Wujciak T et al. The new Eurotransplant kidney
allocation system. Report one year after implementation. Transplantation 1998 ;
66 : 1154-9.
2.Wiesner RH, McDiarmid SV, Kamath PS et al. MELD and PELD : application
of survival models to liver allocation. Liver Transpl 2001 ; 7 : 567-80.
3. Schnitzler MA, Hollenbeak CS, Cohen DS et al. The economic implications of
HLA matching in cadaveric renal transplantation. N Engl J Med 1999 ; 341 :
1440-6.
4. Meier-Kriesche HU, Port FK, Ojo AO et al. Effect of waiting time on renal
transplant outcome. Kidney Int 2000 ; 58 : 1311-7.
5. Deng MC, de Meester MJ, Smits JMA et al. Effect of receiving a heart trans-
plant : analysis of a national cohort entered on to a waiting list, stratified by heart
failure severity. Br Med J 2000 ; 321 : 540-5.
[3] MELD Risk Score : 10 x [0,957 x loge(creatinine mg/dl) + 0,378 x loge
(bilirubine mg/dl) + 1,120 x loge, (INR) + 0,643 x cause of cirrhosis (0 alcohol,
cholestatic, 1 other etiologie)].
1 / 4 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !