Congrès européen de cardiologie I (Vienne, 22-26 août 1998) Échocardiographie

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N F O R M A T I O N S
Congrès européen de cardiologie (Vienne, 22-26 août 1998)
● Pr H. Lardoux*, Dr P. Pézard**
Échocardiographie
L’échocardiographie occupe, dans les grands congrès
de cardiologie, une place essentielle, véritable baromètre
d’une cardiologie clinique. À Vienne, les thèmes propres
à l’échocardiographie ou développés en commun
avec d’autres sous-groupes de la Société Européenne
ont été nombreux. Cette revue, nécessairement incomplète,
permet de souligner quelques évolutions importantes
dans le domaine des ultrasons.
NOUVEAUX DÉVELOPPEMENTS EN SECONDE HARMONIQUE
Stress écho, foramen ovale, émission pulsée-inversée
(figures 1a, 1b)
La seconde harmonique “bouscule” la pratique conventionnelle
de l’échocardiographie. Plusieurs domaines différents illustrent
cette intéressante évolution : l’échographie de stress, la détection
de foramen ovale perméable par voie transthoracique, et l’émission “pulsée et inversée” en seconde harmonique. Chacun s’accorde à reconnaître la difficulté de la saisie d’images de bonne
qualité, aussi bien au repos qu’au pic de la perfusion de dobutamine, en particulier de la paroi latérale et/ou basale. Ces difficultés ont pour conséquence une importante variabilité interindividuelle.
Figure 1b. Quatre cavités apicale, seconde harmonique couplée au doppler énergie. Injection d’un produit de contraste (Levovist). Amélioration
de la définition des contours de l’endocarde.
Deux équipes renommées, celles de Picano (Pise) et d’Hanrath
(Aix-la-Chapelle), rapportent leur expérience de la seconde harmonique sans injection de produit de contraste et comparent les
images obtenues au repos et au pic du stress, en mode fondamental (usuel) et en seconde harmonique, selon un format digitalisé quad-screen conventionnel. La méthodologie est comparable : lecture des différentes séquences en double aveugle, par
cinq relecteurs pour l’équipe italienne et deux lecteurs pour
l’équipe allemande, avec la particularité pour ces derniers de retenir des patients d’échogénicité médiocre (> deux segments non
évaluables au repos ou au pic). Le nombre moyen des segments
dont la cinétique n’est pas utilisable décroît de façon majeure,
d’environ 50 % en seconde harmonique (Hanrath) (tableau I).
Tableau I. Comparaison du nombre de segments myocardiques non
analysables en stress écho-dobutamine, au repos et au pic chez
38 patients consécutifs (analyse selon les recommandations de
l’American Society of Echocardiography).
Segments non
analysables
Mode fondamental
Mode harmonique
Repos
4,6 ± 3,9
1,9 ± 1,2*
Pic stress
5,9 ± 4,2
3,1 ± 3*
* p < 0,01
Figure 1a. Cardiopathie ischémique - seconde harmonique.
* Hôpital Gilles-de-Corbeil, 59, bd Henri-Dunant, 91100 Corbeil-Essonnes.
** Service de cardiologie nucléaire, CHU d’Angers, 4, rue Larrey,
49000 Angers.
La Lettre du Cardiologue - n° 301 - octobre 1998
Parallèlement, les variations interobservateur se réduisent d’environ 25 %, l’amélioration de la concordance s’établissant principalement au niveau des segments antérieurs et latéraux. Ces
résultats sont confirmés par l’équipe italienne, la concordance
interobservateur s’améliorant de 86 à 92 % ! La pratique de
l’échographie de stress semble donc désormais justifier l’utilisation “en routine” de la seconde harmonique.
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L’échographie transœsophagienne, couplée à une épreuve de
contraste, constitue actuellement la méthode de référence pour le
diagnostic de foramen ovale perméable. L’échographie transthoracique en mode harmonique, couplée à une injection de
contraste, offre de nouvelles perspectives diagnostiques particulièrement innovantes ! À nouveau, deux équipes, l’une suisse
(Berne) et celle d’Hanrath, comparent la sensibilité des deux
méthodes ETO et ETT en mode fondamental et seconde harmonique, avec épreuve de contraste pour la détection de shunts droitgauche à travers le foramen ovale. Les résultats sont concordants :
en échographie transthoracique, le mode harmonique améliore
significativement la qualité de l’imagerie du massif auriculaire,
de 40 % et 21 % respectivement pour les images de médiocre et
moyenne qualité. Surtout, la détection d’un shunt est largement
améliorée en seconde harmonique (2H) par rapport à l’imagerie
en mode fondamental (FO), et paraît même très légèrement plus
sensible qu’en échographie transœsophagienne (ETO) : respectivement 18/60 (FO), 34/60 (2H) et 33/60 (ETO), dans une série
de 60 patients examinés au décours d’un accident ischémique
cérébral inexpliqué.
Dernière évolution technologique de la seconde harmonique,
l’émission “pulsée et inversée”, mise au point par une équipe de
biophysiciens canadiens, permet grâce à un système électronique
de renforcer les signaux “harmoniques” tout en supprimant les
signaux fondamentaux. Le principe théorique est simple et basé
sur une alternance d’émissions ultrasoniques en phase et en opposition de phase, permettant de réaliser la sommation des différents signaux fondamentaux, qui s’annulent, mais aussi des
signaux harmoniques, qui se confondent et ainsi se renforcent.
Ce procédé permet, par rapport à la seconde harmonique “conventionnelle”, une amélioration significative de la détection du
contour de l’endocarde ainsi que de l’appréciation de la perfusion myocardique après injection d’agent de contraste.
antithrombotique par aspirine pour les 3-6 mois suivant la procédure sont les données essentielles de ce travail. Ces données
sont voisines de celles de l’équipe de Hambourg (Allemagne) qui
présente les résultats de deux séries consécutives de 25 patients
ayant bénéficié, pour l’une, d’une prothèse d’Angel-Wings et,
pour la seconde, d’une prothèse d’Amplatzer. Cette dernière paraît
plus simple dans son positionnement, permettant de réduire ainsi
le temps d’exposition aux rayons X, ainsi que les complications
liées à la procédure.
Figure 2a. Fermeture de CIA type ostium secundum par prothèse
d’Amplatzer.
COMMUNICATION INTERAURICULAIRE ET FORAMEN OVALE :
FERMETURE INTERVENTIONNELLE OU CHIRURGICALE ?
(figures 2a-2b)
Vieux débat que celui de la fermeture des CIA par cathétérisme
interventionnel ou chirurgie thoracique ! Le combat s’annonce
de plus en plus inégal, d’autant que les endoprothèses les plus
récentes, “Angel-Wings” et surtout “Amplatzer”, fournissent des
résultats immédiats et à moyen terme très satisfaisants. B. Meier
(Berne) rapporte une expérience de fermeture interventionnelle
chez 42 patients porteurs de CIA de type ostium secundum avec
shunt significatif (rapport QP/QS > 1,5). Le diamètre de la CIA
est évalué en échographie transœsophagienne (n = 17), et de façon
systématique en cours de procédure par ballon. Le diamètre
moyen de la CIA est de 22 mm (8-34 mm). La qualité du résultat final (absence de shunt résiduel appréciée par échographie de
contraste) est directement liée au diamètre de la CIA : fermeture
complète pour un diamètre moyen de 20 mm, shunt résiduel
minime (< 5 bulles) pour un diamètre de 22 mm, shunt modéré
(> 5 bulles) pour un diamètre de 25 mm. Les cinq échecs d’implantation correspondent à des diamètres supérieurs à 30 mm.
Une seule complication grave (embolie de la prothèse), une hospitalisation de brève durée (3 jours en moyenne), un traitement
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Figure 2b. Contrôle ETO à 4 semaines. Épreuve de contraste confirmant
l’absence de shunt résiduel et d’un passage anormal droit-gauche.
La fermeture des PFO est un sujet encore plus sensible : cliniquement, il importe de démontrer la relation entre l’accident
ischémique cérébral et le PFO ; le risque artériel cérébral, sous
traitement antithrombotique ou traitement anticoagulant, reste
actuellement mal connu ; anatomiquement, le shunt inversé
démontré par l’épreuve de contraste est excentré, situé entre la
membrane de la fosse ovale et la portion céphalique du septum
interauriculaire. Malgré ces difficultés, B. Meier (Berne) a retenu,
sur des critères neurologiques (AVC, AIT) et ETO (épreuve de
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contraste positive), 62 patients qui ont bénéficié d’une fermeture
de foramen ovale perméable par prothèse (Sideris, Angel-Wings,
Cardio-Seal ou Amplatzer). La fermeture complète a été obtenue
chez 70 % des patients (tableau II).
Tableau II. Fermeture par endoprothèse de foramen ovale perméable.
Évolution du shunt (échographie de contraste) avant et après procédure.
Avant procédure
Après procédure
Groupe 0 (0 bulle)
0
45
Groupe 1 (< 5 bulles)
0
7
Groupe 2 (> 5 bulles)
2
2
Groupe 3 (> 25 bulles)
60
6
En dehors d’un accident de migration partielle de prothèse, l’évolution sous aspirine est favorable : deux accidents emboliques sur
un suivi de 750 patients/mois (ces deux patients présentaient un
shunt résiduel post-procédure). Ces résultats ont conduit les
auteurs à mettre en route une étude prospective comparant l’attitude médicale (anticoagulant) et l’attitude interventionnelle...
(à suivre).
FIBRILLATION AURICULAIRE :TOUJOURS...
La fibrillation auriculaire suscite toujours un grand intérêt, aussi
bien pour les électrophysiologistes que pour les échocardiographistes ! La sidération auriculaire après cardioversion tient-elle
au mode utilisé, choc électrique ou réduction médicamenteuse ?
L’équipe de Lublin (Pologne) répond de façon négative à cette
double question. Dans une première série de 70 patients examinés en échographie transœsophagienne (fonction de l’auricule
gauche) avant et 30 minutes après cardioversion électrique (endocavitaire ou externe), la sidération auriculaire observée lors du
retour en rythme sinusal est constante, quels que soient le mode
utilisé, l’intensité requise et le nombre de chocs électriques. Dans
un second groupe, obligatoirement plus restreint, de 20 patients
réduits médicalement (hétérogénéité des antiarythmiques), examinés en échographie transœsophagienne avant cardioversion, et
dans l’heure (!) suivant la cardioversion, le même phénomène de
sidération de l’auricule gauche est observé. Pour ces auteurs, quel
que soit le mode de réduction, la sidération de l’auricule gauche
est constante et justifie le recours systématique à une anticoagulation encadrant la cardioversion.
Durée de l’anticoagulation après cardioversion ? Elle serait de
quatre semaines, selon l’American College of Physicians ; est-ce
une règle intangible ou une attitude excessive ? L’équipe de SolerSoler (Barcelone) est partie du constat que 50 à 75 % de la fonction mécanique atriale est restaurée au terme des huit jours suivant la cardioversion. Ainsi, près de 300 patients ayant bénéficié
d’une cardioversion pour fibrillation auriculaire ou flutter ont été
répartis dans deux sous-groupes : l’un recevant une héparine classique sous-cutanée puis un traitement anticoagulant oral, le
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second une HBPM (nadroparine à dose curative en deux injections) pour une durée de traitement de 15 jours au maximum après
cardioversion. Aucun accident embolique n’a été observé dans
ces deux groupes non randomisés, mais seuls deux accidents
hémorragiques ont été constatés dans le groupe HBPM. Ainsi,
pour les patients à faible risque embolique, une anticoagulation
de brève durée semble justifiée. Face à une telle simplification
du traitement, la place des HBPM (posologie, durée, surveillance)
reste bien sûr à préciser.
Selon Camm (Londres), l’activité procoagulante, mesurée par le
niveau des fragments de la prothrombine F1 et F2, est significativement plus élevée au niveau de l’auricule gauche que dans
d’autres sites de prélèvement (en peropératoire) : aorte, oreillette
gauche, veine cave supérieure. La stase sanguine mais aussi la
sécrétion de facteurs endothéliaux procoagulants pourraient donc
expliquer ces constatations. Bref, si l’auricule gauche reste l’objet de l’attention des échographistes et/ou hématologistes, l’orifice des veines pulmonaires, en particulier supérieures, constitue
actuellement l’intérêt des électrophysiologistes (Haissaguerre,
N Engl J Med 1998 ; 339 : 659-66)...
DOPPLER TISSUE IMAGING (DTI) (figures 3a et 3b)
Avec la seconde harmonique, le doppler énergie et le color kinesis, le doppler tissue imaging (DTI) constitue l’une des méthodes
quantitatives pour apprécier l’ischémie myocardique. Des équipes
françaises (Rouen et Créteil) se sont de longue date intéressées à
cet outil ultrasonore. G. Derumeaux et M. Ovize (Rouen et Lyon)
ont rapporté une élégante étude expérimentale comparant les variations du raccourcissement systolique du myocarde lors de l’ischémie provoquée (occlusion de l’IVA) en comparant une méthode
de référence (cristaux ultrasoniques) au DTI, au niveau de l’endocarde et de l’épicarde. Le gradient de vitesse entre l’endocarde
et l’épicarde décroît significativement durant les périodes d’ischémie. Surtout, il existe une excellente corrélation entre les variations du gradient systolique (endocarde et épicarde) pour ces deux
méthodes. Cela permet de conclure que le DTI peut être utilisé
pour la quantification de l’ischémie myocardique transmurale.
Figure 3a. Quatre cavités apicale, mode DTI. Analyse colorimétrique des
vélocités du septum interventriculaire en systole et diastole.
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M.R. Cowie (Londres) nous propose une hiérarchie actualisée
des étiologies de l’insuffisance cardiaque (tableau III) à partir
d’une étude portant sur 151 000 personnes. Dans cette population, il a été détecté 220 nouveaux cas sur une période de 20 mois,
avec une incidence environ deux fois moindre chez la femme que
chez l’homme. Lors d’un suivi moyen de 26 mois, on observe
101 décès, dont 89 de causes cardiovasculaires. La survie est de
81 % à un mois, 63 % à un an et 54 % à deux ans... Le pronostic
de l’insuffisance cardiaque reste sévère.
Tableau III. Étiologies de l’insuffisance cardiaque (d’après l’exposé de
M.R. Cowie sur l’étude d’Hilligdon).
Figure 3b. Quatre cavités apicale. Mesure, au tiers apical du septum, des
vélocités systoliques (vers le capteur) et diastoliques (à distance du capteur).
Dans une série de 13 patients étudiés par écho-dobutamine (viabilité), en période post-infarctus, l’équipe de Créteil a montré
l’amélioration des vélocités intramyocardiques aussi bien en systole qu’en diastole, dans les segments myocardiques viables, et
ce en accord avec les données isotopiques. L’amélioration des
logiciels permettant une approche quantitative des vélocités intramyocardiques contribuera à une meilleure analyse segmentaire
au repos et après épreuve pharmacodynamique.
Pr H. Lardoux
Insuffisance cardiaque
ÉPIDÉMIOLOGIE DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE
Un symposium et plusieurs communications étaient consacrés à
ce sujet afin de tenter de clarifier et d’actualiser nos données sur
la fréquence de l’insuffisance cardiaque. Il y a en effet de quoi
s’inquiéter. Aux Pays-Bas, l’incidence de l’insuffisance cardiaque
est passée de 120 à 180 pour 100 000 habitants entre 1980 et
1993, équivalente chez l’homme et la femme (A. Mosterd, Rotterdam). L’énoncé d’une prévalence dans la population globale
n’a pas de sens et celle-ci doit être analysée selon diverses tranches
d’âge. Dans l’étude de Rotterdam, portant sur 7 993 patients, elle
est de 1 % environ avant 65 ans et s’élève progressivement jusqu’à 16 % dans la tranche d’âge de 85 à 95 ans. D’une façon générale, la prévalence tend à augmenter chez les sujets âgés de plus
de 70 ans et à diminuer dans la population plus jeune. Cette évolution s’accompagne d’une diminution des formes aiguës de la
maladie au profit des formes chroniques et serait la conséquence
paradoxale de l’amélioration de la prise en charge de l’infarctus
comme de l’hypertension artérielle ou des cardiomyopathies dans
la population générale.
Le diagnostic de l’insuffisance cardiaque reste d’ailleurs malaisé.
On estime que la proportion des diagnostics corrects posés en
médecine générale se situe entre 25 et 50 %... Or seule une infime
minorité des patients, de 9 à 20 % selon les études et leurs biais
de recrutement, est prise en charge par un cardiologue.
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– Coronaropathies chroniques
– Coronaropathies avec infarctus
– HTA
– Valvulopathies
– Fibrillation auriculaire
– Autres (CPC, CMH, alcool)
– Inconnue
17 %
19 %
14 %
7%
5%
5%
33 %
BÊTABLOQUANTS ET INSUFFISANCE CARDIAQUE
Un des temps forts de l’ESC 98 a été sans conteste la présentation des résultats de l’étude CIBIS II (Cardiac Insufficiency BIsoprolol Study) qui testait, sur 2 647 patients aux stades III (83 %)
ou IV (17 %) de la NYHA, les effets sur la morbi-mortalité dans
l’insuffisance cardiaque du bisoprolol, avec une posologie cible
de 10 mg, atteinte progressivement en six mois.
Prévue initialement pour une durée de trois ans, l’étude a été arrêtée prématurément après que la deuxième analyse intermédiaire
prévue au protocole ait montré que l’objectif principal était atteint
dès le 18e mois de suivi : chez l’insuffisant cardiaque symptomatique et stabilisé par un traitement conventionnel associant IEC
et diurétiques, le bisoprolol donné à la dose de 1,5 à 10 mg/j réduit
de 35 % les décès de toutes causes (p = 0,00006), de 40 % les
décès par mort subite (p = 0,001) et de 30 % les hospitalisations
pour insuffisance cardiaque (p = 0,002).
Deux éléments particulièrement intéressants de cette étude sont
d’une part la prise en compte de tous les patients dans l’analyse,
sans phase de pré-inclusion permettant d’exclure les patients ne
tolérant pas le traitement, et, d’autre part, la relative rareté des
arrêts de traitement en cours d’étude, de l’ordre de 15 % sous
bisoprolol comme sous placebo (H.J Dargee, Glasgow).
Comme le rappelle le Pr Lechat, père de CIBIS I et de sa “grande
petite” sœur, CIBIS II est la première étude spécifiquement prévue à cette fin démontrant une réduction de mortalité dans l’insuffisance cardiaque liée à l’administration d’un bêtabloquant.
Le caractère ß1-sélectif du bisoprolol, qui l’oppose au carvédilol ou au bucindolol, peut laisser penser qu’il s’agit bien d’un
effet de classe et non seulement de molécule.
Peu de patients en stade IV de la NYHA sont inclus dans les essais
sur les bêtabloquants dans l’insuffisance cardiaque. Reprenant
les données de six essais réalisés aux États-Unis sur le carvédilol et incluant 1 202 patients, M.B. Fowler ne retrouve que
38 patients au stade IV au moment de l’inclusion. À ce stade, les
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amélioration (± 60 %), stagnation (± 30 %) et aggravation de l’état
clinique sont identiques sous bêtabloquant ou placebo, de même
que la constatation d’effets secondaires, quasi constante (> 90 %).
Lors de ces essais, 32 autres patients sont passés en stade IV après
randomisation. Cette éventualité était plus fréquente (5 % vs 1,3 %)
et moins souvent réversible (27 % vs 60 %) sous placebo que sous
bêtabloquant.
IEC ET ANTAGONISTES DES RÉCEPTEURS AT1 DE L’ANGIOTENSINE
L’étude ELITE, comparant losartan et captopril chez les sujets
âgés, a montré que l’inhibiteur des récepteurs AT1 de l’angiotensine était mieux toléré que l’IEC et tendait à réduire la mortalité, en particulier par mort subite. Deux sous-études d’ELITE
étaient présentées à Vienne. La première mesurait par questionnaire la qualité de vie chez les patients enrôlés aux États-Unis.
L’amélioration est comparable avec les deux traitements... lorsqu’ils sont suivis. Logiquement, les auteurs concluent donc que
la qualité de vie est meilleure sous losartan, parce qu’il y a moins
d’arrêts de traitement avec cette molécule (A.J. Cowley, Ann
Arbor).
La deuxième étude cherchait une explication à la réduction des
morts subites observée sous losartan. Reprenant les ECG de
90 participants de l’étude ELITE, P. Brooksby (Ann Arbor)
observe que la dispersion du QT et du QT corrigé augmente au
cours des 48 semaines de traitement par captopril, alors qu’elle
reste inchangée sous losartan, le ralentissement de la fréquence
cardiaque étant faible et identique dans les deux groupes.
INHIBITEURS CALCIQUES - ÉTUDE MACH 1
On attendait beaucoup de l’étude MACH 1 (Mortality Assessment in Congestive Heart failure), qui évaluait les effets sur les
symptômes et la morbi-mortalité cardiovasculaire du mibéfradil,
un inhibiteur spécifique des canaux calciques T, doué à ce titre
de propriétés vasodilatatrices périphériques et coronaires importantes, associées à un effet chronotrope négatif mais sans effet
inotrope. Cette molécule était testée aux doses de 50 et 100 mg
versus placebo avec 1 295 patients dans chaque groupe, en stade
II (± 26 %), III (± 64 %) et IV (± 10 %) de la NYHA, avec une
FE < 35 % (en moyenne 24,5 %) et un diamètre télédiastolique
> 60 mm, restant symptomatiques avec une distance parcourue
au cours d’un test de marche de 6 minutes inférieure à 400 m,
malgré un traitement conventionnel optimal.
Après un suivi de trois ans, il n’apparaît aucun bénéfice de ce
traitement en termes de mortalité totale, mortalité cardiovasculaire, morbidité ou selon un critère combinant mortalité et morbidité... L’analyse en sous-groupe fait même ressortir un effet
défavorable du traitement chez la femme, les sujets âgés de plus
de 70 ans, les patients en classe IV, les sujets en fibrillation auriculaire. L’association à un traitement antiarythmique, et en particulier à l’amiodarone (association présente chez 226 patients
sous mibéfradil et 280 patients sous placebo), apparaît particulièrement délétère car susceptible d’induire des torsades de pointe.
La Lettre du Cardiologue - n° 301 - octobre 1998
RÉÉDUCATION ET PRISE EN CHARGE DES INSUFFISANTS
CARDIAQUES
Les Italiens et les Australiens semblent s’intéresser particulièrement aux effets de la rééducation physique chez l’insuffisant cardiaque au stade II ou III de la NYHA. P.L. Temporelli (Veruno)
montre qu’un programme d’entraînement durant six mois avec
un exercice à 50 % du pic de VO2 s’accompagne d’effets favorables tout à fait significatifs sur les capacités d’effort sous-maximale et maximale, sur la qualité de vie, et d’une tendance à la
diminution des volumes ventriculaires gauches (tableau IV).
Tableau IV. Effets de l’entraînement physique dans l’insuffisance cardiaque (d’après la communication de P.L. Temporelli et coll.).
Critère
Entraînement
(n = 45)
p
Contrôle
(n = 45)
p
Capacité d’effort (w)
Pic VO2 (ml/kg/min)
Marche 6 min (m)
+ 18 (75)
+ 2,4 (13,8)
+ 76 (385)
< 0,0001
< 0,006
< 0,001
+ 1 (77)
- 0,1 (13,8)
- 1 (369)
NS
NS
NS
VTD écho (ml/m2)
VTS écho (ml/m2)
FE écho (%)
- 7 (142)
- 10 (107)
+ 4 (25)
< 0,006
< 0,05
< 0,001
+ 9 (147)
+ 8 (110)
0 (25)
< 0,01
< 0,01
NS
Dans chaque colonne, le premier nombre correspond à la variation observée à 6 mois d’intervalle et le deuxième nombre, entre parenthèses, à la valeur moyenne initiale. Les valeurs
de p traduisent la significativité des variations observées dans le groupe soumis à un entraînement et dans le groupe contrôle.
A. Sindone (Sydney) observe que ce bénéfice se maintient à
moyen terme (recul moyen de 17 mois) après la fin des séances,
en particulier chez les patients qui, outre les exercices physiques
de réadaptation, avaient également bénéficié d’un programme
d’éducation et de discussion. Un “rafraîchissement” périodique
est cependant sûrement nécessaire si l’on considère que, dans le
meilleur des cas, il n’y a guère plus de la moitié des rééduqués
qui ait augmenté son activité physique quotidienne ou qui, plus
simplement, se rappelle les consignes et conseils qui lui ont été
prodigués.
Le travail présenté par R. Belardinelli (Ancône) tend à suggérer
que la réadaptation, ou plutôt l’entraînement physique, puisque
ses patients bénéficiaient de trois séances par semaine pendant
huit semaines, puis de deux séances par semaine pendant un an,
s’accompagne d’une amélioration de la capacité fonctionnelle de
20 % environ (p < 0,005) mais aussi d’une tendance à la réduction de la mortalité (p = 0,01) et des réhospitalisations pour insuffisance cardiaque (p = 0,02).
Cardiomyopathies hypertrophiques et
septectomie chimique
Une session était consacrée à ce procédé thérapeutique dont la
technique s’affine petit à petit. Ainsi, P. Boekstegers (Munich)
constate que des doses d’alcool plus faibles que celles utilisées
jusqu’à présent, soit 1,5 ml par branche septale, avec un maximum de 3 ml par procédure, semblent démontrer la même efficacité en termes de réduction du gradient à court ou moyen terme
15
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et d’amélioration clinique, mais au prix d’un infarctus moins
important et de moins de complications (aucun BAV définitif sur
18 procédures). La sélection de la ou des artère(s) septale(s) à
injecter se fait habituellement en cours de procédure par occlusion temporaire au ballon. L. Faber (Bad Oyenhausen) suggère
de recourir à l’échographie de contraste intramyocardique, l’agent
de contraste étant injecté sélectivement et successivement dans
les septales suspectes. Comparant les résultats obtenus chez
61 patients explorés ainsi et 30 explorés de façon conventionnelle, il observe à la fois un résultat plus constant en termes de
réduction du gradient (chez 94 % des sujets au lieu de 64 %), une
diminution de la taille de l’infarctus thérapeutique, et moins de
BAV complets nécessitant un appareillage.
Partiellement en accord avec ces deux communications, F.H. Gietzen (Bielefeld) observe une corrélation entre le taux de CPK libérées après la procédure et d’une part la quantité d’alcool injectée
(p < 0,001), d’autre part le risque de BAV complet au décours de
la procédure (p = 0,029), mais aussi avec le degré de réduction
du gradient mesuré sur une contraction postextrasystolique. La
même équipe compare les risques et les bénéfices de ce traitement selon l’âge des patients. La procédure reste efficace chez
les sujets de plus de 60 ans, mais avec une réduction plus progressive du gradient que chez les sujets plus jeunes, où elle est
immédiate, et au prix d’une légère diminution de la FE globale
et d’une fréquence accrue de BAV nécessitant un pacemaker définitif (22 % au lieu de 8 %).
Étudiant les conséquences ECG et échographiques de la septectomie par l’alcool, M.Y. Henein (Londres) montre que cette
méthode agit probablement non seulement par la création d’un
infarctus septal, qui élargit le diamètre de la chambre de chasse,
mais aussi par une modification de la séquence d’activation ventriculaire aboutissant à une désynchronisation de la contraction,
rejoignant en cela le mode d’action de la stimulation en mode
DDD également proposée dans cette indication.
Insuffisance coronaire
PRISE EN CHARGE DES ACCIDENTS CORONARIENS CHEZ LA
FEMME
La question couramment débattue dans les congrès américains :
“Les femmes victimes d’un infarctus du myocarde sont-elles
moins bien prises en charge que les hommes ?”, “titille” maintenant toutes les (bonnes) consciences, avec des réponses nuancées
mais plutôt rassurantes dans la plupart des pays.
Ainsi, S. Gottlieb (Jérusalem), étudiant les modalités de prise en
charge de 2 867 infarctus traités dans 25 unités différentes, conclut
qu’en Israël, elles sont identiques pour les deux sexes (traitement,
explorations, revascularisations), mais que les femmes présentent une mortalité supérieure à celle des hommes lors de la phase
hospitalière (17,5 % vs 9,5 %) en raison d’un âge plus avancé et
d’une comorbidité plus élevée (HTA, diabète).
Pour J. Goudevenos (Ioannina), il en serait de même en Grèce,
où les femmes bénéficient aussi souvent que les hommes d’une
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procédure de revascularisation (avec une plus grande proportion
d’angioplasties) dès lors qu’elles présentent une coronaropathie
significative, ce qui est plus rare que chez l’homme (48 % vs 78 %
des sujets coronarographiés), et même si au départ elles présentent plus fréquemment une HTA (61 % vs 32 %) ou un diabète
(31 % vs 17 %). Ces deux facteurs de risque sont rapportés avec
une fréquence comparable (HTA : 56 %, diabète : 37 %) dans
une étude israélienne sur l’infarctus chez la femme présentée par
Gallimidi (Hadera).
En Grande-Bretagne, les femmes sont hospitalisées plus tard que
les hommes, avec un appel plus tardif du médecin traitant, une
attente plus longue de l’ambulance et un diagnostic d’infarctus
moins fréquemment posé dès l’admission dans les centres hospitaliers généraux. Ensuite, elles bénéficient de la même prise en
charge et du même pronostic, après correction de l’influence de
l’âge et des antécédents dans cette comparaison (T.J. Bowker,
Londres).
Y a-t-il à nouveau un paradoxe français ? Reprenant 2 519 observations (801 femmes et 1 718 hommes) d’infarctus pris en charge
dans divers hôpitaux (publics ou privés), F. Delahaye (Lyon)
constate que si les femmes font l’objet d’une thrombolyse aussi
souvent que les hommes (après correction en fonction de l’âge),
elles sont, en revanche, moins explorées par ECG d’effort ou coronarographie et “bénéficient” moins souvent d’une revascularisation. Si ce bénéfice est mis entre guillemets, c’est parce que, en
dépit de tout cela, elles présentent un pronostic hospitalier équivalent à celui des hommes. L’auteur s’interroge sur ce qui se passerait si les deux sexes étaient pris en charge de la même façon...
La réponse serait-elle sur les rives du Jourdain ?
CORONAROPATHIES ET DIABÈTE
Scintigraphie myocardique chez le diabétique
L’assertion selon laquelle une scintigraphie myocardique normale témoigne d’un bon pronostic n’est que partiellement vraie
chez les diabétiques. Cette restriction avait déjà été montrée par
l’équipe de Grenoble (Vanzetto, ACC 97) et se trouve confirmée
par un travail qui nous vient de Nancy (M. Angioï), au cours
duquel 116 diabétiques explorés par scintigraphie au thallium
après effort, dipyridamole ou épreuve mixte ont été suivis pendant deux ans. Dans cette population, les deux meilleures
variables prédictives de l’évolution sont le caractère pathologique
de la scintigraphie (p = 0,001) et la présence d’antécédents coronariens (p = 0,005), mais, comme on peut le voir sur le tableau V,
.../...
Tableau V. Fréquence annuelle de survenue d’événements coronariens
chez les diabétiques selon le caractère normal ou pathologique de la
scintigraphie au thallium 201 (d’après M. Angio et coll.).
Diabète
+
+
+
+
-
ATC coronariens
+
+
±
Thallium
% événements/an
+
+
-
44 %
9%
7%
2%
< 1 % (*)
* D’après les données habituellement rapportées dans la population générale.
La Lettre du Cardiologue - n° 301 - octobre 1998
I
.../...
une scintigraphie normale ne peut être considérée comme rassurante que si le patient n’a pas de passé coronarien. Est-ce la conséquence d’une évolutivité particulièrement rapide des lésions chez
le diabétique ?
Revascularisation percutanée chez le diabétique
Depuis l’étude BARI, nous avons la notion que, globalement,
l’évolution à moyen ou long terme après revascularisation instrumentale est moins bonne chez les diabétiques que dans la population générale, et qu’une revascularisation chirurgicale serait
peut-être préférable dans cette population. Une session de l’ESC 98
était consacrée à l’analyse plus détaillée de divers facteurs qui
pourraient rendre compte de cette différence.
Parmi ceux-ci a été évoqué le fait que les lésions sont plus souvent pluritronculaires chez les diabétiques. Qu’en est-il chez les
diabétiques présentant une lésion monotronculaire ? Comparant
l’évolution de 107 diabétiques de type II porteurs de lésions
monotronculaires traitées par angioplastie à celle d’un groupe
apparié de non-diabétiques, Angioï montre que le pronostic reste
moins bon chez les diabétiques, et ce malgré une évolution comparable de la lésion cible dans les deux groupes. Cela suggère
donc que la différence de pronostic tient à une évolutivité plus
importante sur les autres vaisseaux chez le diabétique.
La qualité du geste de revascularisation est cependant souvent
moins bonne chez les diabétiques : sur une série de 485 diabétiques traités par angioplastie à Lille, présentée par E. Van Belle,
il est observé à 6 mois 49 % de resténoses non occlusives (≥ 50 %
avec flux TIMI 2 ou 3) et 13 % d’occlusions (flux TIMI 0 ou 1).
Quinze pour cent des patients présentent une occlusion au
contrôle, cette proportion passant à 24 % en cas de double ATC
et à 36 % lorsqu’il y a eu trois vaisseaux traités initialement.
La fréquence des resténoses reste également plus importante
après mise en place d’une endoprothèse. Dans la série comparative présentée par J.J. Alonso (Valladolid), elle est de 34 % au
lieu de 20 % (p = 0,01), mais il ne s’agissait pas des mêmes lésions
initiales, les diabétiques présentant plus de lésions pluritronculaires (80 % vs 57 % ; p < 0,01) ou complexes, de type B2 ou C
(68 % vs 49 % ; p < 0,01).
Il faut noter que, malgré ce résultat angiographique moins satisfaisant, l’évolution clinique à 6 mois et la mortalité à 2 ans restent comparables chez les diabétiques et non-diabétiques. Une
évolution clinique comparable après pose d’endoprothèses dans
deux populations de 96 diabétiques et 328 non diabétiques est
également rapportée par M. Elsner (Francfort), et ce malgré une
réponse proliférative plus marquée chez les diabétiques, responsable d’une réduction de la lumière légèrement et non significativement plus importante lors du contrôle angiographique à
six mois.
I. Moussa (New York) arrive aux mêmes conclusions : même si
le diabétique tend à présenter une réaction intimale plus marquée
que le non-diabétique, l’évolution en termes de resténose clinique
reste très proche de celle observée dans la population générale
tant que l’on compare des lésions de même complexité. Dès lors,
la conclusion de F. Navarro (Madrid) selon laquelle la mise en
place d’un stent doit être préférée à la simple angioplastie chez
le diabétique, car elle ramène le risque de resténose au niveau
observé dans la population générale, paraît séduisante, même si
La Lettre du Cardiologue - n° 301 - octobre 1998
N F O R M A T I O N S
elle repose sur une série “un peu courte” de 47 diabétiques
(tableau VI).
Tableau VI. Fréquence des resténoses selon le procédé de revascularisation (d’après F. Navarro, Madrid).
ATC par ballon
Diabétiques
(n = 47)
Non-diabétiques
(n = 178)
64 %
p = 0,02
29 %
Endoprothèse
27 %
NS
22 %
CARDIOLOGIE INTERVENTIONNELLE
Le traitement de la resténose sur endoprothèse
Plusieurs options thérapeutiques sont théoriquement possibles
pour traiter une resténose sur stent, comme une angioplastie
“simple” au ballon, la pose d’un nouveau stent, une athérectomie
rotationnelle, ou enfin le laser.
M.J. Perez-Vizcayno (Madrid) traite par angioplastie au ballon
56 patients présentant une resténose symptomatique sur stent et,
lors d’un suivi moyen de 14 mois, observe que le seul facteur prédictif d’événement ultérieur, observé dans 28 % des cas, est un
délai d’apparition de la resténose inférieur à 4 mois.
S.K. Sharma (New York) compare les résultats obtenus sur resténose sur stent par angioplastie sous forte pression (12-16 atm) et
athérectomie rotationnelle (suivie d’une inflation à 4-6 atm) lors
de l’essai ROSTER, randomisant 84 patients. La surveillance de
chacune de ces procédures par échographie endocoronaire montre
que la dilatation obtenue par athérectomie est due aux trois quarts
à l’athérotome et, pour le cas restant, à la compression de plaque
par le ballon, sans réexpansion de l’endoprothèse, alors que celle
obtenue par ATC sous forte pression est liée pour 62 % à la
compression de la plaque et pour 38 % à la réexpansion du stent.
L’athérectomie permet d’obtenir une meilleure dilatation immédiate (p = 0,04), avec moins de dissection et un recours plus rare
à la pose d’une deuxième endoprothèse (p < 0,01). Lors d’un suivi
moyen de 6 ± 3 mois, la fréquence des resténoses avec manifestations cliniques est quasiment deux fois plus faible qu’après ATC
(19 % vs 36 %, p = 0,08). Les auteurs concluent donc que l’athérectomie est supérieure à l’angioplastie dans cette indication.
J. vom Dahl (Aachen) montre cependant que le résultat à moyen
terme d’une athérectomie pour resténose sur stent est fortement
dépendant de la longueur de l’hyperplasie intimale initialement
traitée. Ainsi, sur une série de 100 patients dont la resténose initiale a pu être traitée avec succès dans 97 % des cas et qui restent
indemnes de manifestation clinique lors d’un suivi de 5 ± 4 mois,
il observe que la fréquence des resténoses angiographiques
(≥ 50 %) est de 9 % seulement lorsque l’étendue de la resténose
initiale était ≤ 10 mm, mais s’élève à 78 % lorsque la lésion traitée dépassait 40 mm.
La triple comparaison athérectomie rotationnelle-athérectomie
par laser et angioplastie par ballon faite sur 221 patients du Heart
Center de Leipzig tend à montrer que si le résultat immédiat est
équivalent entre les deux modes d’athérectomie (et légèrement
19
I
N F O R M A T I O N S
supérieur à celui obtenu en termes de diamètre luminal avec l’angioplastie simple), seul celui obtenu par athérotome rotationnel
se maintient à moyen terme. Lors du contrôle à six mois, en effet,
le diamètre luminal obtenu après laser rejoint celui observé après
angioplastie simple, passant de 2,65 ± 0,49 à 1,36 ± 0,82 mm. Il
est intéressant de noter qu’ici comme dans la présentation précédente, l’élargissement de la lumière obtenu initialement lors
d’une procédure d’athérotomie est autant lié au geste de dilatation complémentaire qu’au “debulking” lui-même et que, même
avec la meilleure technique, près de la moitié de ce bénéfice est
perdu après six mois de suivi (tableau VII).
Tableau VII. Évolution du diamètre luminal selon le procédé de traitement, athérectomie ou angioplastie (d’après la communication de
B. Lauer et coll., Leipzig).
Procédure
Diamètre luminal moyen (mm)
initial post-“debulking” post-ATC
à 6 mois
Rotationnelle
Par laser
ATC “simple”
0,93
0,94
0,86
1,81
1,83
-
2,64
2,65
2,33
1,92
1,36
1,29
R. Köster (Hambourg) semble également réservé sur la qualité à
moyen terme du traitement par laser. Sur 89 patients dont la resténose sur stent avait été ainsi traitée, il observe en effet une mort
subite, un infarctus et 44 récurrences angineuses. Soixante-dixneuf de ces patients ont été contrôlés par angiographie : 50 présentent une resténose supérieure à 50 % (n = 24) ou à 70 %
(n = 26). Cela fait beaucoup, même s’il s’agissait de patients particulièrement à risque, dont les stents avaient été implantés sur
une occlusion, dans un pontage ou des artères de petit calibre, ou
enfin sur des sténoses multiples.
Dans l’expérience de R.M. Siegel (Phoenix), la mise en place
d’une deuxième endoprothèse est peut-être la méthode de choix,
au moins par comparaison à l’angioplastie par ballon seul, non
pas pour la fréquence des succès primaires, identique avec les
deux méthodes, mais pour la qualité du résultat clinique lors d’un
suivi moyen de 7,7 mois.
Évolution à long terme après revascularisation percutanée
J.J. Goy (Lausanne) rapporte l’évolution à 5 ans de 134 patients
traités après randomisation par chirurgie ou ATC par ballon pour
sténose monotronculaire de l’IVA. Même si la mortalité cardiaque
et le nombre d’infarctus avec onde Q ou la proportion de patients
restant symptomatiques sont faibles et comparables dans les deux
20
groupes, la comparaison est apparemment à l’avantage de la chirurgie, grâce à laquelle 91 % des patients sont indemnes d’événements à cinq ans contre 62 % seulement dans le groupe traité
par ATC (p < 0,05). La différence tenant quasi exclusivement à
la fréquence des revascularisations secondaires (36 % après ATC
contre 9 % après pontage), la véritable question pratique et économique est de savoir ce qu’il faut choisir, entre un séjour chirurgical et deux passages en salle d’angioplastie.
On dispose maintenant d’un recul de dix ans sur les premières
endoprothèses mises en place. D. Carrié (hôpital Purpan, Toulouse) a suivi par angiographies à 6 mois, 5 ans puis 10 ans le site
d’implantation de 7 stents type wallstent. Cette étude montre que
le pourcentage de sténose reste stable, aux alentours de 30 % entre
le sixième mois et dix ans1.
C. Karam rapporte le suivi à 9 ans des 71 premières endoprothèses de type Palmaz-Schatz mises en place sur une lésion monotronculaire à la clinique Pasteur de Toulouse. Il confirme que la
resténose tardive est rare et que la proportion de patients indemnes
d’événement à 9 ans atteint 70,4 %, les événements étant représentés par 3 décès dont deux non cardiaques, 7 infarctus, 3 pontages et 16 réangioplasties. Quant aux Hollandais de Rotterdam,
c’est à partir d’une série de 1 000 patients suivis de 1 à 11 ans
(en moyenne 29 mois) qu’ils mettent en exergue l’amélioration
spectaculaire apportée par l’introduction de la ticlopidine mais
insistent sur la fréquence non négligeable (près de 40 %) des événements secondaires incitant à poursuivre la recherche d’un traitement préventif de la resténose.
Revascularisation et qualité de vie : déception...
Une amélioration de la qualité de vie après pontage aorto-coronarien a été observée, mais peu d’études se sont intéressées à cette
question après revascularisation percutanée. Deux posters allemands apportent une réponse plutôt pessimiste, alors même que
le geste a été un succès et que l’angor a disparu. À la quatrième
semaine après intervention, H. Richter-Görge (Essen) note une
détérioration significative chez de nombreux sujets, qui sont
moins actifs, se sentent plus fatigués, ont plus le sentiment d’être
malades et de risquer de “mourir d’une attaque” qu’avant...
M. Zirbes (Bonn) montre que ce malaise est persistant puisque,
à six mois, un tiers des patients seulement se considèrent en
meilleure santé et que près de la moitié restent sur une estimation péjorative de leur état.
Dr Ph. Pézard
1. Le graphique illustrant cette étude est disponible sur le site de Planète-Roche.
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