M I S E A U P O I N T Chimiothérapie du cancer de l’ovaire : actualités sur Caelyx® en 2003-2004 et perspectives Chemotherapy of ovarian cancer: Caelyx® new Trend ● H. Bourgeois1, L. Chauvenet 2, K. Djazouli3, J.M. Ferrero4, A. Floquet5, A.C. Hardy-Bessard 6, A. Lortholary 7, D. Mayeur 8, P. Pautier 9, T. Petit10, S. Piperno-Neumann11, A. Ponzio-Prion 12, I. Ray-Coquard 13 e traitement de référence en première ligne de chimiothérapie peut être considéré en France comme étant l’association carboplatine-paclitaxel. Ce protocole vient d’être reconnu comme le standard européen en traitement de première intention par la Conférence de consensus qui s’est tenue à Baden-Baden en septembre 2004. Quant aux lignes ultérieures de traitement, il existe plusieurs possibilités, aboutissant à des conduites thérapeutiques variables selon les équipes. Les résultats des études cliniques publiées en 2003 permettent cependant de tirer certaines conclusions. Les données récentes de Caelyx® sont intégrées dans cette revue et serviront de base de discussion pour tenter de déterminer la meilleure utilisation actuelle et future de ce médicament et les éventuels essais à développer pour y parvenir. Cette discussion a fait l’objet d’une réunion d’experts, signataires de cet article. L ACTUALITÉS EN 2003 Les études du GOG Il faut noter que le GOG n’a “validé” l’utilisation du carboplatine en première ligne qu’en 2003, avec la publication finale de l’étude comparant l’association carboplatine ASC 7,5 + paclitaxel 175 mg/m2 versus cisplatine 75 mg/m2 sur 24 heures + paclitaxel 135 mg/m2. Un total de 792 patientes avec un cancer ovarien de stade III et une masse résiduelle inférieure à 1 cm a été randomisé : la combinaison à base de carboplatine est moins toxique, plus facile à administrer, et n’est pas inférieure à celle comprenant le cisplatine (1). La question du traitement d’entretien a été posée en comparant 3 à 12 cycles de paclitaxel 175 mg/m2 en monothérapie (réduit en cours d’étude à 135 mg/m2) (2). Deux cent soixantedix-sept patientes en réponse clinique complète après 6 cycles platine + paclitaxel ont été incluses. La survie sans progression (SSP) (21 mois versus 28 mois) est en faveur de l’entretien, et l’étude a été interrompue prématurément. Cependant, le taux de CHU Bretonneau, Tours ; 2 Hôtel-Dieu, Paris ; 3 Schering-Plough, Levallois ; Centre Antoine-Lacassagne, Nice ; 5 Institut Bergonié, Bordeaux ; 6 Clinique armoricaine, Saint-Brieuc ; 7 Catherine de Sienne, Nantes ; 8 Hôpital André-Mignot, Le Chesnay ; 9 Institut Gustave-Roussy, Villejuif ; 10 Centre Paul-Strauss, Strasbourg ; 11 Institut Curie, Paris ; 12 Institut Gustave-Roussy, Villejuif ; 13 Centre Léon-Bérard, Lyon. 1 4 La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n° 5 - septembre-octobre 2004 neuropathie sensitive (15 % versus 23 % de grade 2/3) est lui aussi significativement majoré et ne permet pas de recommander un tel traitement d’entretien : un traitement prolongé au-delà des six cures initiales de carboplatine-paclitaxel, sans aller jusqu’à 12 cycles, mériterait d’être testé. Quant à la dose recommandée de paclitaxel, elle est bien de 175 mg/m2. Omara et al. ont testé sur 449 patientes les doses de paclitaxel administré sur 24 heures, toutes les 3 semaines, de 135 mg/m2, 175 mg/m2, 250 mg/m2 avec G-CSF 5 µg/kg/j ou 250 mg/m2 avec G-CSF 10 µg/kg/j (3). La survie globale (SG) est la même dans les différents groupes, mais les hautes doses sont significativement plus toxiques. Chez 25 patientes réfractaires au platine, l’oxaliplatine 130 mg/m2 s’est révélé décevant, avec une seule réponse partielle et 9 stabilisations de 5 à 6 mois, au prix de toxicités neurologiques, hématologiques et gastro-intestinales assez conséquentes (4). Enfin, sur 837 échantillons tumoraux étudiés, 95 (11,4 %) surexprimaient HER2 2+ ou 3+. Quarante et une patientes éligibles, multitraitées pour la plupart, ont reçu le trastuzumab. Le taux de réponse objective n’est que de 7,3 % pour une survie sans progression médiane de 2 mois (5). Les études des autres groupes ICON et AGO ont montré que le paclitaxel pouvait avoir une place en deuxième ligne, plus de 6 mois après une chimiothérapie à base de platine, dont 40 % environ de patients, après platine + paclitaxel, avec un gain de 10 % en SSP, de 7 % en survie à 2 ans, de 5 mois en médiane de survie globale (6). DIFFÉRENTES ÉTUDES PRÉSENTÉES À L’ASCO MÉRITENT D’ÊTRE RELEVÉES Le traitement séquentiel par 4 cycles de topotécan, après 6 cycles de l’association carboplatine-paclitaxel, n’apporte rien (7). En revanche, le schéma hebdomadaire à 4 mg/m2 aurait une myélotoxicité plus faible, avec 32 % de réponse objective (8, 9). La reprise du platine, même en cas de rechute précoce, peut s’avérer supérieure à des protocoles sans platine : meilleur taux de réponse et gain en SSP et SG (10). Plusieurs études ont démontré l’intérêt du paclitaxel hebdoma205 I S E A U daire en deuxième ligne chez des patientes sensibles (11-13). Notons aussi que l’EPO administrée avant la chirurgie chez des patientes modérément anémiques est créditée d’une tendance (p = 0,053) à une meilleure SG (14). Du congrès ECCO 2003, nous pouvons retenir l’intérêt potentiel de l’association gemcitabine 1 000 mg/m2 (J1 et J8) + carboplatine ASC 4 J1 (J1 = J21) chez des patientes en deuxième ligne rechutant plus de 6 mois après platine. Le taux de réponse objective est de 60 %, mais la toxicité hématologique n’est pas négligeable (15). P O I N T 100 90 80 70 Survie globale M Caelyx® SG : 63 sem. 60 50 Topotécan SG : 60 sem. HR = 0,82 (IC95 : 0,68-1,00) p = 0,05 40 30 20 ACTUALITÉS CAELYX® EN 2003 ET 2004 Résultats Quatre cent soixante-quatorze patientes ont été traitées. La majorité des patientes (90 %) avait un stade avancé de la maladie au moment du diagnostic. La médiane de l’intervalle libre par rapport à la chimiothérapie antérieure à base de platine est d’environ 7 mois, même si certaines patientes ont rechuté près de 9 ans après leur premier traitement. La majorité des patientes était résistante au platine. Résultats d’efficacité L’actualisation des données confirme les premiers résultats et démontre le bénéfice apporté par Caelyx® en termes de SG non seulement pour les patientes sensibles, mais aussi pour l’ensemble de la population en échec, avec 63 semaines versus 60 semaines ; le risque de décès est réduit de 18 % avec Caelyx® ; hazard-ratio : 0,82 (0,68-1,00) ; p = 0,05 (figure 1). Les survies à un an et à deux ans ont été respectivement de 56 % et de 35 % pour les patientes traitées par Caelyx® versus 54 % et 24 % pour les patientes traitées par topotécan. Dans le sous-groupe de patientes sensibles au platine, la SG a été de 112 semaines dans le bras Caelyx® versus 77 semaines dans le bras topotécan ; p = 0,02. La réduction du risque de décès était de 37 %, avec un hazard-ratio de 0,63 (0,47-0,85). Les survies à un an et à deux ans ont été respectivement de 79 % et de 55 % pour les patientes sensibles au platine et traitées par Caelyx® versus 68 % et 33 % pour les patientes sensibles et traitées par topotécan (figure 2). En revanche, aucune différence n’a été démontrée dans le sousgroupe des patientes réfractaires. 206 10 0 0 26 52 78 104 130 156 182 208 234 Semaines depuis le début du traitement Figure 1. Caelyx® versus topotécan : survie globale, toutes patientes (16). Les SG étaient identiques entre les deux bras, lorsque l’on considère la présence, ou non, d’une tumeur de plus de 5 cm. La SSP des patientes sensibles a été significativement prolongée avec Caelyx® : 28,9 et 23,1 semaines ; p = 0,046, avec une réduction de 24 % du risque de récidive ; hazard-ratio : 0,76 (0,58-1,00). La tolérance a été, dans l’ensemble, meilleure dans le bras Caelyx® que dans le bras comparateur. Une toxicité hématologique importante a été observée, notamment sous topotécan, nécessitant très souvent l’utilisation de facteurs de croissance hématopoïétiques (29,1 % versus 4,6 %), d’érythropoïétine (23,1 % versus 6,3 %) et de transfusions globulaires (57,8 % versus 14,9 %). En termes de tolérance extrahématologique, le topotécan a entraîné plus d’alopécie : 48,9 %, dont 6 % d’alopécie sévère, contre 16 % dans le bras Caelyx®, dont 1,3 % d’alopécie sévère. Une érythrodysplasie palmoplantaire (EPP), liée à Caelyx®, a été observée dans 48,9 % des cas, dont 22,8 % de cas sévères. La mucite a également été plus fréquente sous Caelyx®. Enfin, aucun signe ou symptôme d’insuffisance cardiaque n’a été signalé dans l’ensemble de la population. 100 90 80 Caelyx® 70 Survie globale Caelyx® a aussi fait l’objet de plusieurs travaux ; on retiendra surtout l’amélioration significative de la SG chez les patientes en deuxième ligne platino-sensibles, obtenue avec Caelyx® par rapport au topotécan : 112 versus 77 semaines ; p = 0,002 (16). Cette étude randomisée de phase III, multicentrique et internationale, ayant inclus 481 patientes, avait conduit à l’AMM pour Caelyx® dans le cancer de l’ovaire en rechute (17). Les patientes étaient stratifiées en fonction de la sensibilité au platine et de la présence, ou non, d’une masse tumorale d’au moins 5 cm. Les patientes étaient randomisées entre Caelyx® 50 mg/m2 toutes les 4 semaines et topotécan 1,5 mg/m2/j, 5 jours, toutes les 3 semaines. Le traitement pouvait être maintenu en cas de poursuite du bénéfice clinique. L’objectif principal était l’évaluation de la SSP et de la SG. Topotécan 112 sem. versus 77 sem. (p = 0,002) 60 50 40 30 20 10 0 0 26 52 78 104 130 156 182 208 234 Semaines depuis le début du traitement Figure 2. Caelyx® versus topotécan : survie globale, patientes sensibles (16). La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n° 5 - septembre-octobre 2004 Nouvelles associations à Caelyx® en deuxième intention De nombreux essais de phase II ont été publiés ou présentés en congrès, testant plusieurs associations selon des schémas divers. ✓ Associations avec le cyclophosphamide. L’efficacité paraît prometteuse et le profil de tolérance favorable, avec notamment l’absence de toxicité de grade sévère (18). Une étude de phase I-II d’escalade de dose française (étude CACY) est en cours à Bordeaux et sa région dont les résultats devraient être rapportés courant 2005. ✓ Associations avec le carboplatine, protocole PACA (Caelyx®Paraplatine®). Plusieurs schémas et doses ont été développés et sont recommandés selon que l’intervalle est de 4 ou de 3 semaines (19, 20). L’efficacité est tout à fait prometteuse (21-24) (taux de réponse objective dépassant les 60 % et une SSP de plus de 9 mois). L’étude de phase II développée par le groupe GINECO (21) a inclus 105 patientes traitées par Caelyx® 30 mg/m2 et carboplatine ASC 5 toutes les 4 semaines. Soixante pour cent des patientes avaient reçu une première ligne de chimiothérapie et 40 % deux lignes. Le nombre de cycles administrés est variable de 1 à 10, avec une médiane de 6 cycles (1-10). Le profil de tolérance a été marqué par une neutropénie grade 3/4 dans 23 % des cycles, avec une neutropénie fébrile chez 3 % des patientes seulement. Le support par G-CSF, transfusions globulaires et de plaquettes a été nécessaire chez 16 %, 12 % et 3 % des patientes, respectivement. Les réductions et les retards de doses ont été nécessaires dans 7 % et 20 % des cycles, respectivement. La tolérance non hématologique a été acceptable, avec 32 % de nausées/vomissements grade 2-3, 12 % d’alopécie grade 1, 8 % de fatigue, 11 % d’EPP grade 2 et 12 % de mucite grade 2-3. Le taux de réponse est de 63 % (65 patientes sur 105), dont 38 % de réponse complète. La réponse sur le CA125 est de 65 % (figures 3 et 4). La SSP est de 9 mois et la SG de 31,1 mois malgré le traitement antérieur et le nombre de patientes ayant rechuté dans les 12 mois. Ces résultats peuvent être favorablement comparés aux données de l’association paclitaxel-carboplatine de l’ICON4. L’équipe sud-africaine a également présenté les résultats récents de son étude de phase II (24) : cet essai prévoyait l’association de Caelyx® 50 mg/m2 et carboplatine ASC 5 toutes les 4 semaines chez des patientes présentant un cancer de l’ovaire en rechute avec un intervalle libre de 6 mois ou plus. Vingt-neuf patientes ont ainsi reçu 133 cycles (médiane de 4 cycles, 1-8 cycles). Sur 21 patientes évaluables, 11 réponses complètes et 5 réponses partielles ont été observées ; 5 patientes ont vu leur cancer stabilisé. La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n° 5 - septembre-octobre 2004 1,0 0,9 Survie globale (%) 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0 0 10 20 30 40 Mois Figure 3. Étude PACA : survie globale 31,2 mois. 1,0 0,9 TF1 ≥ 12 mois : 33 mois 0,8 Survie globale (%) Conclusion Cette analyse récente confirme l’efficacité de Caelyx® dans le cancer de l’ovaire en échec d’un premier traitement à base de platine. Une supériorité en SG de Caelyx® versus topotécan a été démontrée sur l’ensemble de la population et sur le sous-groupe de patientes sensibles au platine. De même, si une tendance a été retrouvée en termes de SSP dans la population globale, cette différence est statistiquement significative lorsque l’on compare le sous-groupe des patientes sensibles au platine. Les profils de tolérance sont différents. 0,7 0,6 TF1 < 12 mois : 24 mois 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0 0 10 20 30 40 Mois Figure 4. Étude PACA : survie globale en fonction de l’intervalle libre. Le profil de tolérance est acceptable, avec une neutropénie grade 3/4 chez 8 et 3 patientes respectivement, une thrombopénie grade 3 chez 8 patientes ; les EPP ont été peu fréquents, avec seulement deux cas de toxicité grade 3. Ces résultats viennent confirmer la tolérance et l’efficacité de cette association. ✓ Association avec l’ifosfamide. Un essai de phase I IDOL avait été réalisé et présenté à l’ASCO 2000 par le groupe GINECO (25) ; la phase II est en cours. Le schéma de traitement prévoit d’associer Caelyx® 40 mg/m2 à l’ifosfamide 1,7 g x 3/j i.v. en continu toutes les 4 semaines. Les résultats de cette étude, qui doit inclure 120 patientes, seront prochainement disponibles. ✓ Associations avec l’oxaliplatine (26). Schéma de traitement : Caelyx ® 40 mg/m 2 + oxaliplatine 120 mg/m 2 sur 3 semaines. L’efficacité, avec un taux de réponse objective de plus de 50 % et une SSP dépassant les 9 mois, sur 20 patientes lourdement prétraitées, mérite d’être confirmée. ✓ Associations avec la gemcitabine. Deux études portant sur un faible effectif ont démontré une certaine efficacité, qu’il faut confirmer (27, 28). Le schéma utilisé prévoyait l’administration 207 M I S E A U toutes les 3 semaines de 25 mg/m2 ou 30 mg/m2 de Caelyx® et 650 mg/m2 J1 et J8 de gemcitabine. Une troisième étude vient d’être présentée à l’ASCO 2004. Vingtsix patientes ont reçu un traitement associant Caelyx® 25 mg/m2 à J1 et gemcitabine 650 mg/m2 J1 et J8 (29). Les patientes, dont 68 % avaient une tumeur sensible au platine, avaient reçu deux lignes de chimiothérapies antérieures (1-4 cycles). Un taux de réponse objective de 64 % a été retrouvé, dont 7 réponses complètes, et la SSP était de 7 mois (6-18 mois). Un cas de thrombopénie grade 4 a été rapporté. ✓ Associations avec le topotécan (30-32). Trois études de phase II sont encore préliminaires, mais semblent avoir démontré une certaine efficacité en termes de réponse objective. ✓ Maintien de la réponse et tolérance de Caelyx® administré en traitement de maintenance dans les tumeurs gynécologiques. Une analyse rétrospective a été effectuée chez 18 patientes traitées par des associations à base de Caelyx® et chez qui le traitement par Caelyx® a été poursuivi dans le but de prolonger l’intervalle libre sans progression (33). Le traitement consistait en Caelyx® 30 à 40 mg/m2 toutes les 4 à 6 semaines. Dix-sept patientes avaient reçu antérieurement des traitements à base de platine (1 à 3 lignes de chimiothérapie), et une patiente avait été traitée par radiothérapie après la chirurgie. Dix patientes ont reçu Caelyx® en maintenance. Aucune altération de la fonction cardiaque n’est survenue chez ces 10 patientes ; de même, il n’y a pas eu de toxicité hématologique cumulative avec une dose cumulée médiane de 920 mg/m2 de Caelyx® (465-1715 mg/m2). Le délai jusqu’à progression sous Caelyx® en maintenance a été comparable avec celui des traitements antérieurs chez les patientes avec un cancer de l’ovaire, suggérant ainsi que cet agent a un impact positif et prolonge la SSP. ACTUALITÉS CAELYX® EN PREMIÈRE LIGNE ✓ Triplet en première ligne carboplatine-paclitaxel-Caelyx® : le schéma est efficace. Le bénéfice de l’association carboplatineCaelyx® en efficacité est testé dans le cinquième bras du GOG avec Caelyx® une cure sur deux, mais le profil de tolérance mérite d’être amélioré. ✓ Caelyx®-carboplatine en consolidation après paclitaxelcarboplatine : l’intérêt d’un tel schéma reste à confirmer. ✓ La faisabilité de l’administration de Caelyx® en traitement de consolidation en relais après une chimiothérapie par paclitaxel-platine semble être démontrée dans une étude ayant inclus 30 patientes de stades IIIC et IV en réponse complète après la première chimiothérapie (34). Données pharmaco-économiques Une modélisation économique d’après l’étude de Gordon a été réalisée dans différents pays, et notamment en France, dans les centres de l’Assistance publique : Caelyx® est une option intéressante sur le plan économique. Prise en charge des EPP Un schéma bihebdomadaire de Caelyx® à la dose de 20 mg/m2/sem. semble pouvoir réduire les incidents de type EPP chez des 208 P O I N T patientes lourdement prétraitées pour leur cancer de l’ovaire : 24 patientes sur 65 traitées selon ce protocole ont présenté une toxicité cutanée, dont seulement 4 cas de grade 4 (35). Une autre étude a mis en évidence une réduction des EPP grâce au refroidissement des pieds et des mains et au respect d’une hygiène adaptée stricte (36). Conclusion ✓ Les platines et le paclitaxel restent des médicaments “incontournables” dans la prise en charge du cancer de l’ovaire en première ligne. ✓ L’intérêt des traitements d’entretien doit être rediscuté. ● Caelyx® consolide sa position et montre une supériorité en deuxième ligne en monochimiothérapie par rapport au topotécan : l’étude de Gordon confirme la place de leader de Caelyx® en échec au platine, surtout chez les patientes sensibles. ● L’association Caelyx®-carboplatine paraît la plus prometteuse des options thérapeutiques alternatives. PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT POUR CAELYX® Place des anthracyclines aujourd’hui en première ligne L’adriamycine est l’anthracycline de référence. Elle est utilisée dans les cancers de l’ovaire à des doses variant de 30 à 60 mg/m2. Trois méta-analyses ont évalué l’addition de l’adriamycine à une chimiothérapie en traitement initial, deux ont sélectionné les essais comparant cisplatine-cyclophosphamide (CP) à cisplatinecyclophosphamide-adriamycine (CAP) (37, 38), et la troisième, plus globale, a inclus tous les essais (39). Les méta-analyses montrent un bénéfice statistiquement significatif en termes de survie globale en faveur de l’addition de la doxorubicine à l’association cyclophosphamide-cisplatine. La méta-analyse de West a analysé les mêmes données que celles de la méta-analyse (40) de Fanning avec une autre méthode statistique. Cette étude retrouve un bénéfice en termes de SG en faveur du CAP (40,1 % pour le CAP versus 36,6 % pour le CP ; p < 0,01 ; odds-ratio : 1,51 ; IC95 : 1,07-2,21). La médiane de survie est augmentée de 1,9 mois (25,6 versus 27,5). La méta-analyse de Fanning a étudié l’effet propre de la doxorubicine : un effet qualitatif est suggéré par cette analyse. Cependant, la toxicité supplémentaire liée à la doxorubicine n’a pas été évaluée dans ces méta-analyses, et la question du bénéfice réel de la doxorubicine reste posée compte tenu du faible gain de survie médiane (1,9 mois) (41). Deux études ont testé l’apport d’une anthracycline (épirubicine) à l’association carboplatine-paclitaxel, dans une étude randomisée carboplatine-paclitaxel versus carboplatine-paclitaxelépirubicine (42, 43). Si les premiers résultats suggéraient un gain en efficacité, il ne semble pas que la triple association se traduise par un gain de survie sans progression (44), et la toxicité semble plus lourde que la bithérapie. Il est possible que Caelyx®, dont le profil de toxicité est très différent de celui des anthracyclines non liposomales, puisse apporter le même bénéfice avec une meilleure tolérance. Il faudra alors se reposer la question de l’intérêt des anthracyclines dans le cadre d’un essai clinique randomisé de phase III. La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n° 5 - septembre-octobre 2004 Place de Caelyx® en deuxième ligne Avec l’étude de Gordon, Caelyx® a montré son intérêt en deuxième ligne pour les patientes réfractaires aux sels de platine ou non. L’étude PACA du groupe GINECO, associant le carboplatine à Caelyx®, a conforté la place de Caelyx® et montré sa bonne tolérance en association avec le Paraplatine® (19, 45). Différentes études préliminaires déjà rapportées ont montré les données de tolérance de Caelyx® en association avec l’endoxan, l’oxaliplatine, le topotécan, la gemcitabine, les taxanes ou l’ifosfamide. On peut donc s’interroger sur l’apport de ces différentes options thérapeutiques pour les patientes réfractaires aux sels de platine. Dans ce cadre, un schéma bihebdomadaire de Caelyx®-gemcitabine ou hebdomadaire de Caelyx®-cyclophosphamide pourrait être testé, d’autant plus que, pour des raisons de tolérance, de commodité, mais aussi d’efficacité, de nombreux traitements sont réalisés selon des schémas hebdomadaires (46, 47), et que l’adriamycine hebdomadaire s’est avérée préalablement très intéressante (48). Ainsi, des schémas hebdomadaires de Caelyx® associé au paclitaxel, par exemple, paraissent promoteurs en termes de faisabilité (49). Il reste à confirmer l’efficacité de ce schéma. Chez les patientes sensibles, le protocole PACA mérite d’être étudié dans une large étude de phase III. Une telle étude devrait démarrer prochainement dans le cadre de l’International Gynecologic Study Group (IGSG). Quant à la chimiothérapie en première intention, un schéma séquentiel de type PACA après paclitaxel-carboplatine pourrait également représenter une voie intéressante à explorer. CONCLUSION Cette revue des données scientifiques actuelles permet de montrer les perspectives de développement possible de Caelyx® dans la prise en charge du cancer de l’ovaire telle qu’elle est organisée aujourd’hui. Caelyx®, par son excellente tolérance, notamment en association, peut prétendre à se positionner en première ligne de traitement (si l’adjonction des anthracyclines aux taxanes est confirmée), mais aussi en deuxième ligne pour les patientes réfractaires (seul ou en association à de nouvelles chimiothérapies) ou encore sensibles aux sels de platine (en association avec le carboplatine). De nouvelles modalités d’administration sont à évaluer. Concernant son intérêt en association aux nouvelles thérapeutiques ciblées, si celles-ci sont confirmées, son mode d’action, ses modalités d’administration et sa tolérance peuvent en faire un partenaire intéressant. ■ R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S 1. Ozols RF, Bundy BN, Greer BE et al. Phase III trial of carboplatine and paclitaxel compared with cisplatin and paclitaxel in patients with optimally resected stage III ovarian cancer: a Gynecologic Oncology Group Study. J Clin Oncol 2003;21,17:3194-200. 2. Markman M, Liu PY, Wilczynski S et al. Phase III randomized trial of 12 versus 3 months of maintenance paclitaxel in patients with advanced ovarian cancer after complete response to platinum and paclitaxel-based chemotherapy: a Southwest Oncology Group and Gynecologic Oncology Group trial. J Clin Oncol 2003;21,13:2460-5. 3. Omura GA, Brady MF, Look KY et al. Phase III trial of paclitaxel at two dose levels, the higher dose accompanied by filgrastim at two dose levels in platinum-pretreated epithelial ovarian cancer: an intergroup study. J Clin Oncol 2003;21,15:2843-8. 4. Fracasso PM, Blessing JA, Morgan MA et al. Phase II study of oxaliplatin in platinumresistant and refractory ovarian cancer: a Gynecologic Group Study. J Clin Oncol 2003;21,15:2856-9. La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n° 5 - septembre-octobre 2004 5. Bookman MA, Darcy KM, Clarke-Pearson D et al. Evaluation of monoclonal humanized anti-HER2 antibody, trastuzumab, in patients with recurrent or refractory ovarian or primary peritoneal carcinoma with overexpression of HER2: a phase II trial of the Gynecologic Oncology Group. J Clin Oncol 2003;21,2:283-90. 6. ICON and AGO Collaborators. Lancet 2003;361:2099-106. 7. Pignata S et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1791. 8. Morris R et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1846. 9. Bhoola S et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1905. 10. Pujade-Lauraine E et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1811. 11. Dunton CJ et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1876. 12. Sakamoto H et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1943. 13. Rose PG et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1932. 14. Marinaccio M et al. Proc Am Soc Clin Oncol 2003, abstract 1952. 15. Kose F et al. 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