Littérature Psoriasis et lymphocytes Th17 Psoriasis and Th17 lymphocytes F. Froeliger, L. Martin (Service de dermatologie, université d’Angers) L e psoriasis est une dermatose affichante et fréquente dont le retentissement psycho-social et les complications peuvent être importants. La plaque de psoriasis se caractérise histologiquement par une hyperplasie épidermique, un infiltrat lymphocytaire dermo-épidermique et une dilatation des vaisseaux du derme. Le psoriasis est désormais considéré comme une maladie auto-immune médiée par les lymphocytes. Cette brève mise au point bibliographique précise quelle est l’implication des Th17 dans le psoriasis, et comment celle-ci peut ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques. Immunopathogénie du psoriasis : la voie des Th17 Les lymphocytes Th1, considérés jusqu’alors comme les seuls lymphocytes activés en cause dans la genèse du psoriasis, constituent une toute nouvelle lignée lymphocytaire qui semble impliquée dans de nombreuses pathologies inflammatoires autoimmunes (1). Ils sont en effet retrouvés en grand nombre dans les plaques de psoriasis (2). Les cytokines qu’ils sécrètent sont pro-inflammatoires et pro-acanthosiques chez la souris (3). Les cellules T naïves sont activées par des cellules présentatrices de l’antigène (CPA). En fonction de l’environnement cytokinique accompagnant cette présentation de l’antigène, le lymphocyte peut devenir Th1, Th2, Th17 ou Treg (T régulateur) [4]. Les CPA impliquées dans le psoriasis comportent beaucoup plus de cellules dendritiques immatures (CD11c+, BDCA1-) – en provenance du sang circulant – que dans une peau saine. Ces cellules semblent favoriser l’activation en Th1 et en Th17 (5). La polarisation est fonction des cytokines produites localement. L’activation en lymphocyte Th1 nécessite la présence d’INF-γ et d’IL12. Les lymphocytes Th17 sont produits sous l’influence d’IL23, ainsi que d’IL6 et de TGF-β, qui favorisent l’expression du récepteur à l’IL23 (3, 4). Une fois activé, le lymphocyte Th17 produit également des cytokines. L’IL6 entretient la différenciation des cellules T naïves en Th17 (4). L’IL17, qui a mis en évidence la lignée Th17, semble jouer un rôle important dans les manifestations de la polyarthrite rhumatoïde et de la maladie de Crohn mais ne paraît pas impliquée dans le psoriasis cutané. En revanche, l’IL22, également produite par le Th17, a montré sa responsabilité dans la genèse de plaques psoriasiformes dans des modèles murins. Elle stimule la prolifération et la différenciation des kératinocytes. Lorsque le gène codant pour l’IL22 est absent chez la souris transgénique, la stimulation des lymphocytes Th17 engendre une plaque psoriasique significativement moins importante (3). On retrouve également une corrélation entre le taux circulant d’IL22 et la sévérité de la maladie (6). Il est intéressant de noter que l’IL20, cytokine effectrice dans la voie Th1-médiée de formation du psoriasis, peut se fixer sur les kératinocytes via les récepteurs de l’IL22 (4). Ces récepteurs sont donc probablement impliqués dans la genèse de plaques de psoriasis, qu’elle soit médiée par les Th1 ou par les Th17. Perspectives thérapeutiques Au regard de cette nouvelle vision de la pathogénie du psoriasis, on peut imaginer plusieurs nouvelles cibles thérapeutiques : les cellules dendritiques immatures (CD11c+, BDCA1-), les cytokines permettant la différenciation en Th17 (IL6, TGF-β, IL23), les Th17 eux-mêmes, et IL22, la cytokine en cause dans la différenciation kératinocytaire. Quelques essais de phase III sont en cours concernant des biothérapies agissant sur la voie des Th17. L’ustekinumab, testé versus placebo dans les essais PHOENIX 1 et 2, est un anti-IL12 et un anti-IL23. Il agit donc à la fois sur la voie Th1 et sur la voie Th17. À 12 semaines de traitement, plus de 65 % des patients ont atteint le PASI75, avec une bonne tolérance (7). Depuis le 15 décembre 2008, il est autorisé sur le marché canadien. Le tocilizumab (anti-IL6) est prometteur dans le cadre de la polyarthrite rhumatoïde, mais aucune étude relative au psoriasis n’est pour le moment publiée. Le lymphocyte Th17 est électivement activé dans la peau psoriasique, et les cytokines qu’il sécrète sont impliquées dans la création de plaques de psoriasis. De nouvelles biothérapies intervenant dans la voie des Th17 sont déjà à l’essai. Mais d’autres cibles thérapeutiques restent à développer. II Références bibliographiques 1. Park H, Li Z, Yang X et al. Nat Immunol 2005;6:1069-70. 2. Pène J, Chevalier S, Preisser L et al. J Immunology 2008;180:7423-30. 3. Zheng Y, Danilenko D, Valdez P et al. Nature 2007;445:648-51. 4. Sabat R, Philipp S, Höflich C. Exp Dermatol 2007;16:779-98. 5. Zaba LC, Fuentes-Duculan J, Eungdamrong N et al. J Invest Dermatol 2009; 129:79-88. 6. Wolk K, Witte E, Wallace E et al. Eur J Immunol 2006;36:1309-23. 7. Papp KA, Langley RG, Lebwohl M et al. Lancet 2008;371:1675-84. Images en Dermatologie • Vol. II • n° 2 • avril-mai-juin 2009 71