Projet Biomédical 2013-2014 : ----Sujet d’étude : “Spectrométrie de masse“ Ingé resp.: Yves Maggiore [email protected] Titre : “Utilisation de la spectrométrie de masse dans les laboratoires de biologie hospitalière, applications, principes, matériel, résultats attendus. “ Par Aurélien Gavelle et Victor Meyer Remerciement : Enseignants chercheurs : Christophe FLAUDROPS Jean LORQUIN Maitre de projet Yves MAGGIORE GLOSSAIRE Cryocoupe : Tranche de tissu congelé de l’ordre de 10 à 20 µm d’épaisseur. UPLC : Chromatographie haute performance en phase liquide, technique de séparation de molécules par chromatographie. MS : Spectromètre de masse. MS/MS : La spectrométrie de masse en tandem consiste à sélectionner un ion par une première spectrométrie de masse, à le fragmenter, puis à effectuer une deuxième spectrométrie de masse sur les fragments ainsi générés. Protéomique : désigne la science qui étudie les protéomes, c'est-à-dire l'ensemble des protéines d'une cellule, d'un organite, d'un tissu, d'un organe ou d'un organisme. Ionisations dures : génèrent souvent des ions moléculaires, qui se fragmentent beaucoup et parfois même totalement avant d’avoir eu le temps de sortir de la source. Ions métastables : ions de durée de vie suffisamment longue pour sortir de l’ionisateur mais pas suffisamment pour sortir de l’analyseur et arriver au détecteur. Leurs fragments peuvent être analysés et donnent des informations de structures. Nébulisation : Transformer certains liquides en un nuage de particules extrêmement fines. Rapport m/z : rapport de la masse de la molécule sur son nombre de protons. Peptide : Moins de 100 acides aminés (masse moléculaire moyenne). Protéine : Plus de 100 acides aminés (grosse masse moléculaire). Table des matières I. Présentation du spectromètre de masse ...................................................5 A. Principe et historique ..............................................................................5 B. Principes physiques ................................................................................6 II. Principe de fonctionnement .......................................................................8 A. Les différents types d'ionisateur .............................................................8 B. Analyseur rapport masse / nombre de masse ......................................12 C. Détecteur et Traitement du signal .........................................................15 III. Utilisation dans la pratique ......................................................................16 A. Utilisation du spectromètre de masse en milieu médical ......................16 B. Aspects économique et position sur le marché du matériel Biomédical Aspects réglementaires (normes, dangers potentiels pour utilisateur).......19 C. Perspective d’évolution: (imagerie par spectromètre de masse) ..........20 IV. Conclusion................................................................................................21 Introduction : Le spectromètre de masse est un instrument très répandu dans les domaines scientifiques. La spectrométrie de masse joue aujourd'hui un rôle important dans les études de pollution, de l'environnement et même dans la détection du dopage grâce à sa sensibilité, sa sélectivité et sa possibilité de faire des analyses quantitatives rapides. Il est aussi utilisé dans le domaine du laboratoire hospitalier. En effet, cet instrument permet de détecter et de différencier (qualitativement et quantitativement) la présence de différents particules ou organismes unicellulaires. L'évolution de l'informatique (hardware/software) a également permis à la spectrométrie de masse de connaître son plein épanouissement. Le spectromètre de masse fonctionne par excitation d’un élément à analyser (ionisation) puis par séparation en fonction du rapport masse/nombre de protons de cette particule ionisée (rapport m/z) pour en déterminer la nature. I. Présentation du spectromètre de masse A. Principe et historique La spectrométrie de masse est une technique analytique très puissante et très sensible permettant d'analyser des composés organiques solides, liquides ou gazeux. C'est Joseph John Thomson, déjà célèbre pour avoir découvert l'électron en 1895 (prix Nobel de physique en 1906), qui en a établi le principe en mettant au point un appareil permettant de séparer les atomes par leur masse, montrant ainsi l'existence d'isotopes stables du néon. Cette séparation des atomes réalisée en 1908 constitue le premier exemple de la spectrométrie de masse. La spectrométrie de masse possède de nombreuses applications. Elle permet de déterminer la masse moléculaire, de corréler le spectre d'un composé avec sa structure, d'expliquer des mécanismes de ruptures de liaisons, de trouver les facteurs rendant plus ou moins probable la formation de l'un ou l'autre des fragments ioniques. Par spectrométrie de masse, on peut réaliser des analyses qualitatives et quantitatives. C’est une technique très sensible : des limites de détection inférieures au nanogramme et même au picogramme sont souvent atteintes. Actuellement, les progrès les plus spectaculaires se rencontrent dans le domaine de l'analyse des molécules biologiques (protéines, sucres...) et dans l'étude des polymères grâce à une nouvelle technique : l'électrospray. Celle-ci permet de travailler sur des molécules multichargées et de connaître avec précision la masse moléculaire du composé analysé. (cf. partie III) B. Principes physiques Le spectromètre de masse utilise les propriétés des atomes pour analyser l'échantillon. Un atome est constitué de protons, de neutrons et d'électrons. La masse de l'atome est essentiellement contenue dans les protons et les neutrons. Les atomes de l'élément chimique que l’on veut déterminer sont ionisés dans une chambre à vide. Il existe plusieurs procédés d'ionisation. Les ions ainsi produits sont ensuite accélérés par un champ électrique pour former un faisceau d'ions qui va passer dans un champ magnétique. Ce champ exerce une force qui dévie les ions du faisceau d'autant plus que l'ion est léger. Les ions sont ainsi séparés selon leur masse, leur trajectoire dépendra du rapport m/z m= masse de l’atome ou de la molécule z= nombre de charges (nombre de protons) portées par l’atome ou la molécule Un spectromètre de masse est donc composé d'un minimum de 4 parties: d'un système d'introduction de l'échantillon d'une source d'ions ou chambre d'ionisation d'un analyseur qui sépare les ions en fonction de leur masse et de leur charge d'un détecteur qui détecte les ions sortant de l'analyseur Le vide étant fait dans chacun de ces éléments. Figure 1: structure d'un spectromètre de masse Exemple d'analyse pour le méthane: On soumet le composé moléculaire, ici : le méthane CH4, porté à l'état gazeux, à un bombardement d'électrons. Sous ce bombardement, certaines molécules éjectent un électron et deviennent des radicaux CH4+ (ion moléculaire ou ion parent). Ces radicaux peuvent se fragmenter par rupture de certaines liaisons et devenir des cations de masse inférieure qui à leur tour peuvent se fragmenter ... Ainsi dans l'exemple du méthane, en plus de l'ion parent on peut obtenir: CH3+; CH2+;CH+; C+. On trace le graphique suivant: en ordonnée, on porte l'abondance relative des ions détectés (100 pour le plus abondant). en abscisse, le rapport m/e; comme e vaut 1 (par hypothèse nous ne considérons que les ions positifs portant une charge élémentaire), ce rapport est égal à m. Analyse du spectre: On aperçoit que dans l'exemple choisi, le pic correspondant à l'ion le plus abondant (100) est celui de masse 16, c'est-à-dire celui de l'ion moléculaire CH4+. ou ion parent (sa masse est pratiquement celle de la molécule car la masse de l'électron perdu est négligeable). Le pic de masse 15 (CH3+) a une abondance relative d'environ 85. Le pic de masse 14 (CH2+.) a une abondance relative d'environ 10. Figure 2 : spectre du méthane obtenue grâce au spectromètre de masse Le pic de masse 13 (CH+) a une abondance relative d'environ 4. Le pic de masse 12 (C+.) a une abondance relative d'environ 1. Peut-être ajouter pourquoi il y a si peu de C+ ou de CH + par rapport à CH4+ ? II. Principe de fonctionnement A. Les différents types d'ionisateur La source d'ionisation : elle consiste à vaporiser les molécules et à les ioniser. Une source d'ionisation peut être utilisée soit en mode positif pour étudier les ions positifs, soit en mode négatif pour étudier les ions négatifs. Plusieurs types de sources existent et sont utilisés en fonction du résultat recherché et des molécules analysées. Ionisation par impact électronique, (E.I., Electronic ionisation) : Un faisceau d'électrons est utilisé pour l'ionisation. Les électrons sont projetés (avec une grande énergie cinétique). Lorsqu’ils atteignent les molécules, ces dernières peuvent perdre un électron et s’ioniser positivement par une lacune d’électron (M+) pour une plus faible énergie cinétique. Si, l'énergie des électrons est suffisante le faisceau d'électrons casse en fragments caractéristiques la molécule. Plus il y a d'énergie plus la fragmentation sera importante. L'ionisation est réalisée dans une Figure 3 : principe d'ionisation par impact chambre d'ionisation où règne un vide de 10-9 à électronique 10-7 Torr (mm Hg). Ionisation chimique (C.I., Chemical Ionisation) : Le principe de l'ionisation chimique est le même que pour l'ionisation électronique : arracher un électron à la molécule ou la fragmenter. La différence concerne l’interception des molécules qui se fait dans un gaz, appelé gaz de réactif. Les molécules produites sont des molécules ionisées positivement avec un proton supplémentaire. Cette méthode utilise un gaz réactif à Figure 4 : principe d'ionisation la pression d'environ 1 mm Hg. chimique Le gaz ionisé par un faisceau d'électrons donne une série d'ions qui à leur tour réagissent avec les substances à analyser. L’utilisation de divers gaz, parmi lesquels l'ammoniac, le méthane et l'isobutane est possible. La réaction d'ionisation est la suivante : Cette dernière méthode est dite méthode "douce", elle casse beaucoup moins les molécules que la précédente. Ionisation par bombardement d’atomes rapides (F.A.B., Fast atom bombardment): Cette méthode est faite pour ioniser de grosses molécules qui ne sont pas vaporisables sous vide. Un faisceau d'atomes neutres (Argon Ar ou Xénon Xe) à forte énergie cinétique vont ioniser les substances non volatiles. Les substances peuvent être ionisées soit à l'état solide, soit sous la forme de solution dans une matrice. Le plus souvent du glycérol forme la matrice, mais parfois des mélanges tels que le Magic Bullet (mélange de 4/1 de 1,4-dithio-L-threitol et de 1,4-dithioerythritol) sont utilisés. Les ions produits par bombardement sont vaporisées. L'ionisation Figure 5 : principe d'ionisation par s'effectue à température ambiante. Elle fournit bombardement d’atome rapide avec en abondance des ions pseudo-moléculaires principe de sélection des atomes rapides (même molécule à analyser mais avec un H en plus) cela forme le mode positif. La molécule est chargée positivement. Si la molécule n'est pas chargée le mode est qualifié de négatif. Ce type d'ionisation convient parfaitement pour les peptides et les petites protéines. Mais les spectres par impact électronique ne permettent pas toujours d’accéder à la masse de ces composés Ionisation par électrospray (appelé aussi électronébulisation, alias ESI) La spectrométrie de masse est un moyen direct d’analyse du composé étudié pour connaître sa forme et sa masse. Elle permet d’étudier des molécules lourdes. La spectrométrie complète les techniques existantes comme la chromatographie ou l’électrophorèse. L’électrospray est un processus d’ionisation qui se produit en phase liquide et à pression atmosphérique. Les substances sont dissoutes dans une solution. La solution est ionisée puis pulvérisé. Un courant de gaz chaud « sèche » les gouttelettes. Le solvant disparaissant, les ions de même charge dans les gouttes finissent par ne plus pouvoir se supporter, la faisant exploser en plusieurs gouttelettes plus petites. Figure 6 : principe d'ESI Les charges sont distribuées sur les peptides de façon statistique ; un même peptide peut en porter plusieurs. APCI (ionisation chimique à pression atmosphérique) C’est une technique d’ionisation en phase gazeuse. Elle est basée sur l’ionisation d’une molécule d’analyte à partir d’un gaz de transport ionisé (Azote). Elle est utilisée comme méthode d'ionisation pour la spectrométrie de masse, préférentiellement couplée à une chromatographie en phase liquide. Figure 7 : fonctionnement APCI Le principe est de pulvériser dans une chambre l’élément mélangé à de l’azote. On chauffe à de hautes températures la chambre (350 ~500 °C). L’éluant dû à la chromatographie s’il y en a et l’analyte (l’élément à analyser) sont vaporisés avec l’azote (gaz de transport). L’ionisation de la molécule analyte se fait dans la chambre de vaporisation. Une forte différence de potentiel entre la chambre et une aiguille située dans la chambre apporte des électrons. Cela ionise le gaz (de transport) ambiant. Le gaz ionisé forme un plasma en bout d’aiguille. La molécule est alors ionisée dans ce plasma par des ions radicalaires du gaz. Toutes ces réactions s’effectuent à pression atmosphérique. Cette méthode génère des ions directement à partir de la solution. Le spectromètre est capable d'analyser des composés non polaires. Cette méthode d’ionisation analogue à l’ionisation par électrospray. Les ions du gaz sont présents à pression atmosphérique, les collisions entre les gaz ionisé et les molécules analytes sont plus nombreuses. L’APCI est d’autant plus efficace. Ionisation laser assistée par matrice M.A.L.D.I. (Matrix Assisted Laser Desorption Ionisation) C’est technique d'ionisation douce et sous vide permettant l'analyse de biomolécules et de grosses molécules organiques. Le principe est de placer l’élément à analyser dans une matrice. Cette matrice est une solution liquide d’eau pure, de cristaux ainsi qu’une solution organique. Ces composés peuvent varier en fonction de la nature de la molécule analyte. Le mélange est placé sur une plaque de métal (coupelle MALDI). Le solvant (eau et solution organique) est vaporisé. Seuls restent les cristaux qui emprisonnent la molécule analyte. Matrice et analyte sont alors co-cristallisés. La coupelle est placée dans le vide. Figure 8 : principe d'ionisation par laser assistée par matrice MALDI On projette un laser sur le la coupelle. Ce sont les cristaux qui absorbent en premier l’énergie du laser. Cette énergie est ensuite transmise à l’analyte qui ce ionise. L’ensemble est projeté dans le vide par l’énergie disruptive du laser. En somme le laser casse les cristaux et disperse les ions. Les ions sont quasi moléculaires. Ils ont une lacune qui peut être comblée par un proton ou un cation (la molécule devient chargée positivement). Mais cette lacune peut être aussi enlevée par soustraction d’un proton. La molécule devient alors chargée négativement. B. Analyseur rapport masse / nombre de masse Les analyseurs : Ils se différencient par leur principe de mesure du rapport m/z Premier instrument à secteur magnétique (marche sur le principe l’énergie cinétique des ions). On peut utiliser deux méthodes : La première est la plus simple. L'ion est éjecté depuis la chambre d’ionisation dans le tube analyseur. L’ion est placé dans un milieu soumis à un champ magnétique uniforme et constant, généré par un électroaimant, perpendiculaire au plan de sa trajectoire. Le champ magnétique crée permet de modifier la trajectoire de l’ion chargé : plus l’ion est lourd, moins sa trajectoire est modifiée, plus il est léger et plus sa trajectoire sera modifiée. Les ions sont sélectionnés suivant leur masse. Pour obtenir le spectrogramme de l’élément analysé on fait Figure 9 : analyseur de MS à secteur magnétique varier la tension dans l’aimant pour modifier le champ magnétique. En effet, plus la tension est importante dans l’électroaimant et plus la force sur l’ion sera importante. On va alors capter des ions plus lourds. Ce système propose alors une bande passante qui dépend de la taille du tube analyseur. La deuxième méthode permet une mesure avec une bande passante plus précise. On appelle cela un analyseur à double focalisation. Le principe est de placer en amont de l’aimant un étage pour sélectionner des ions à la même énergie cinétique. Cet étage est appelé secteur électrostatique. Cette méthode est appelée à double focalisation car l’aimant et le secteur électrostatique on les mêmes propriétés que les lentilles convergentes. Comme ces dernières le Figure 10 : analyseur à double focalisation secteur électrostatique fait converger uniquement les ions de même énergie cinétique dans le tube analyseur. Pour cela, on place en sortie de l’ionisateur une fente. Le faisceau d’ion est rétréci. Les ions passent dans « un secteur électrostatique ». Dans cette partie, les ions sont légèrement déviés en fonction de leur énergie cinétique. En sortie du secteur électrostatique, une deuxième fente ne laisse passer que les ions de même énergie cinétique voulue. Les autres ions ont trop été déviés, ils ne passent pas la fente. Cette sélection est indépendante de la masse. On place ensuite l’électroaimant comme dans la méthode précédente. La position des fentes est choisie en fonction de la distance focale du secteur électrostatique et de l’aimant. Cette méthode est très utile car elle augmente considérablement la résolution de l’analyseur. Deuxième type d’instrument sur séparation des ions fondées sur la vitesse des ions (TOF Time of Flight) Le principe est d’accélérer les ions avec un champ électrique de valeur connue dans un tube. Les ions qui ont la même charge sont propulsés par le champ électrique à la même vitesse. La vitesse des ions dépend du rapport masse/charge. On mesure le temps mis par une particule chargée pour atteindre un détecteur situé à une distance connue. Ce temps dépendra du rapport masse/charge de la particule considérée. Ce sont les particules les plus lourdes qui seront accélérées aux vitesses les plus basses. La détermination du rapport masse/charge découle de ce temps de vol et de la connaissance des autres Figure 11 : analyseur temps de vol paramètres expérimentaux comme la position du détecteur et la tension Ici la trajectoire des ions est courbe pour augmenter le d'accélération. temps de vol sans augmenter la taille de l’appareil. Troisième instrument le quadripôle. Fonctionne sur la transmission des ions traversant un champ électrodynamique (quadripôle) Les analyseurs quadripolaires sont constitués de quatre barres parallèles circulaires, disposées symétriquement autour d'un axe. Ces quatre barres sont associées électriquement deux par deux. A une paire d'électrodes est appliqué un potentiel électrique de la forme : F(t) = u + v.cos(w.t) u est l'amplitude de la tension continue. v est l'amplitude de la tension haute fréquence. w est la pulsation (fréquence de l'ordre de 2 MHz). A l'autre paire d'électrodes est appliqué un potentiel opposé -F(t). Les ions formés dans la source sont introduits à une extrémité du quadripôle. Les champs magnétiques dont les directions sont perpendiculaires à l’axe des barres communiquent un mouvement oscillatoire aux ions. Le mouvement des ions est décrit par des équations dites de Mathieu dont la résolution montre que seuls les ions ayant une valeur du rapport m/z comprise dans une certaine bande possèdent une trajectoire stable et sont transmis par le quadripôle. Les autres ions sont captés par les électrodes. Ce rapport m/z dépend de la distance séparant les électrodes, de la fréquence et des tensions u et v. En pratique puisque les deux premières valeurs sont constantes, seules varient les tensions u et v. En balayant entre 0 et les valeurs maximales des amplitudes des tensions continues et de hautes fréquences appliquées aux électrodes, les ions sont transmis successivement par le filtre dans l'ordre croissant des valeurs du rapport m/z, avec une résolution constante. Figure 12 : Analyseur à quadripôle Le quatrième type d’instrument fonctionne sur le mouvement périodique dans un champ magnétique ou électrodynamique (pièges ou trappes à ions) Cet analyseur a pour principe de conserver une quantité précise (de l’ordre de quelques centaines d’ions) dans un piège à ions. Ce piège à ion est constitué de 3 éléments : deux électrodes (dites chapeau du à leur forme) et une électrode centrale. Cela forme un quadripôle. Les ions provenant de Figure 13 : Analyseur piège à ions l’ioniseur rentrent dans par la première électrode dite chapeau et arrive dans l’électrode centrale. Les ions sont maintenus par le champ électromagnétique dans l’électrode centrale. Les ions piégés vont ensuite s’entrechoquer entre eux. On peut rajouter un gaz inerte (hélium) dis de collision pour augmenter cette fragmentation. Si on applique une tension avec une période de l’ordre de la radiofréquence, la fragmentation est amplifiée par résonance. On éjecte ensuite les électrons en fonction de leur masse en faisant varier la tension dans le piège à ion. Cinquième et sixième instrument, « l’orbitrap » et l’analyseur à résonance cyclotronique (I.C.R. Ion cyclotron resonance) Le principe est de piéger les ions dans une chambre sous vide entre deux électrodes. Dans cette chambre, les ions auront un mouvement circulaire maintenus par un champ magnétique. Chaque ion passe plusieurs fois devant les électrodes de manière périodique. A chaque passage une image de courant est laissée par l’électron. Cette Figure 14: Schéma trace de courant forme un signal sinusoïdal dont on peut tracer Orbitrap le spectre de fréquence par transformée de Fourrier. De ce spectre on déduis la masse des ions chaque fréquence étant spécifique à un rapport m/z. Plusieurs milliers d’ions peuvent être analysés simultanément. La différence entre l’orbitrap et le ICR est la forme de la chambre du cylcotron et des électrodes. Dans le cas de l’ICR la chambre où sont piégés les électrons serai de forme cubique à l’inverse de l’orbitrap (cf. figure 15) C. Détecteur et Traitement du signal Le détecteur et système de traitement : le détecteur transforme les ions en signal électrique. Plus les ions sont nombreux, plus le courant est important. De plus, le détecteur amplifie le signal obtenu pour qu'il puisse être traité informatiquement. Comme les analyseurs et les sources, il existe différents types de détecteurs. Ils sont tous basés sur des principes physiques différents, mais leur rôle reste le même, compter les ions. C'est une partie placée sous vide (10-5 - 10-7 Torr). Les plaques photographiques sont le détecteur historique. La plaque est enduite d'une émulsion de bromure d'argent. Elle noirci lorsqu’elle détecte une valeur relative d'ions. Cette technique est très peu sensible. Figure 15 : Plaque photographique utilisée comme détecteur pour un les premières expériences sur la spectrométrie de masse Le cylindre de Faraday a pour principe le suivant : le transfert de charge de l'ion est détecté sur une surface conductrice, puis le signal est amplifié. Cette technique est précise mais peu sensible, avec une certaine lenteur de mesure et un bruit de fond important. Le multiplicateur d'électrons est le détecteur le plus courant. Le signal est amplifié par la formation d'électrons secondaires à l'aide de tubes en verre dopés au plomb (dynode). Il possède une bonne sensibilité, avec une amplification forte mais il est moins précis que le cylindre de Faraday. Il a en outre une durée de vie limitée. La galette de micro canaux, autre détecteur, peut être considérée comme assemblage de multiplicateurs d'électrons. Le multiplicateur de photons est dérivé du multiplicateur d'électrons : le signal est amplifié par la formation d'électrons secondaires à l'aide de tubes en verre dopés au plomb (dynode). Ceux-ci sont accélérés vers un écran phosphorescent où ils sont convertis en photons. Ces photons sont ensuite détectés par le photomultiplicateur. Il présente une bonne sensibilité, avec amplification forte mais le balayage est moins rapide qu'avec un multiplicateur d'électrons. III. Utilisation dans la pratique A. Utilisation du spectromètre de masse en milieu médical Un des grands enjeux de la spectrométrie de masse est son potentiel d’application clinique, du point de vue du dépistage et/ou du diagnostic, du à sa sensibilité, sa spécificité et sa rapidité de mise en œuvre dans la détection et le dosage de protéines biomarqueurs de pathologies. Elle est généralement fondée sur la séparation des protéines contenues dans un mélange complexes d’un fluide corporel, par chromatographie liquide haute performance (HPLC), couplée à l’analyse par spectrométrie de masse. La possibilité de synthétiser des protéines par génie biotechnologique, ainsi que la synthèse de peptides marqués, ont permis le dosage de tels marqueurs grâce à la réalisation d’une banque de données. La spectrométrie de masse permet, par exemple, de réaliser une détection et une quantification du facteur létal de l’anthrax dans le sérum : o La bactérie Bacillus Antracis constitue une arme biologique lorsqu’elle est inhalée sous sa forme sporulante. o L’infection doit être détectée de façon précoce mais les techniques de diagnostic existantes, bien que sensibles, sont longues (plus de 8 jours). Le léthal-factor (LF) est une protéine enzymatique entraînant l’apoptose (mort programmée) des cellules en ciblant les MAP kinases (protéinekinases qui catalysent la phosphorylation des protéines MAP). o L’utilisation d’un spectromètre de masse permet de détecter le LF en 4h, avec un seuil de détection de 0,05 ng/ml, soit 400 fois moins qu’en ELISA (20 ng/mL). Un autre exemple d’utilisation de spectromètre de masse : la mise au point d’un test de dépistage de la maladie de Wilson par LC-MS/MS. o La maladie de Wilson est une maladie rare. Elle est provoquée par une mutation dans le gène ATP7B qui code un transporteur ATPase du Cu2+ localisé dans le réticulum endoplasmique (un transporteur est une protéine qui évacue le Cu2+ contre son gradient de concentration en hydrolysant de l’ATP). Cette protéine permet au cuivre de se complexer à l’Apocéruloplasmine pour former la Céruloplasmine, qui est sécrétée. o La mutation entraîne une perte de fonctionnalité de la Céruloplasmine qui transporte et régule 90% du Cu2+, ce qui provoque une accumulation de ce dernier entrainant un tableau clinique chez le patient pouvant conduire à la mort. Comme toutes les maladies rares, un dépistage systématique n’est pas recherché, et c’est dans le but de palier à ce problème qu’une technique permettant un dépistage précoce, simple et fiable chez le nouveau-né, a été mise en place. o La méthode utilisée pour le dépistage est basée sur la quantification par UPLC-MS/MS (cf. glossaire) du biomarqueur de la maladie de Wilson, la Céruloplasmie, à partir d’une goutte de sang séchée. La plateforme technique de chromatographie et spectrométrie de masse s’intègre dans la plateforme « Proteomique et analyse fonctionnelle des protéines » de l’Unité de Recherche sur les Maladies Infectieuses et tropicales Emergentes. L’utilisation d’un spectromètre de masse permet d’analyser la structure des biomolécules, d’identifier les protéines et les micro-organismes. Un exemple d’utilisation du spectromètre de masse dans le cadre de Proteomique et analyse fonctionnelle des protéines est à l’hôpital de la TIMONE à Marseille. Il y est situé un laboratoire spécialisé dans la recherche sur les maladies infectieuses et tropicales. L’une des plateformes présente est dédiée à la chromatographie et à la spectrométrie de masse. L’équipe de chromatographie et spectrométrie de masse accompagne à la fois les biologistes de l’Hôpital et les chercheurs de l’URMITE. La plateforme a deux objectifs : le diagnostic clinique et le développement de méthodes (par biotypage avec un MALDI-TOF-MS, par proteomique et par chromatographie) Etage du Spectromètre de masse Type Catégorie de molécule analyte et propriétés E.I. C.I. Petites molécules, composées organiques et atomes A.P.C.I. Ionisateur F.A.B. Peptides E.S.I. Composées de haute masse M.A.L.D.I. Analyseur Secteur magnétique Peu couteux et balayage élevé T.O.F. Très grande sensibilité Quadripôle Polyvalent rapide, possible de faire des montages HPLC et MS Peu couteux et balayage élevé Piège à ions Très précis mais supporte un faible nombre d’ion dans son enceinte ICR Grand sensibilité et précision mais très couteux et volumineux Orbitrap Présente l’avantage de ne pas utiliser d’aimant supra conducteur B. Aspects économique et position sur le marché du matériel Biomédical Aspects réglementaires Aspect réglementaire : Les spectromètres de masses sont des appareils de classe A. C’est-à-dire que ce sont des instruments qui peuvent être utilisés dans le milieu industriel. « Il s'agit d'appareils qui, par des moyens d'ordre électrique, mesurent, indiquent ou enregistrent une ou plusieurs grandeurs électriques ou non électriques, ainsi que des appareils non-mesureurs tels que générateurs de signaux, étalons de mesure, alimentations, transducteurs, transmetteurs, etc. » CEI 61010 Les spectromètres de masse sont adaptés aux environnements CEM. La norme associée est la EN 55011 pour la compatibilité électromagnétique et la EN 61326-1 pour la compatibilité Electromagnétique en Europe. Et pour la sécurité le matériel ce rapport à la norme de sécurité internationale spécifique à l’Europe numéro EN 61010-1, EN 61010-2-061 Toutes ces normes sont relatives aux appareils électriques de mesure et de régulation et de laboratoire. Aspect économique : Dans le domaine de l’occasion le spectromètre de masse se trouve des prix allant de 13 500 € à 90 000 €, neuf les prix peuvent monter jusqu’à plusieurs centaines de milliers d’euro. Interface machine utilisateur : A l’origine le spectromètre de masse ne délivre en sortie qu’un signal électrique plus ou moins intense désignant la présence d’ions dans le détecteur. Grâce au une interface et des logiciels d’acquisitions performants l’utilisateur est directement capable d’observer le spectrogramme sans besoin de retraiter l’information. Mieux, certains logiciels sont maintenant fournis avec des bases de données qui reconnaissent automatiquement les composés, les métabolites. Les logiciels sont aussi capables de faire la différence en la molécule analyte et des perturbations ou des impuretés parasites. Pour augmenter la précision des résultats plusieurs centaines de spectrogrammes peuvent êtres tracé par seconde. Certain usent aussi d’empreintes isotopiques pour des identifications sures. Ils permettent aussi l’ajout de spectre pour faire évoluer sa base de donnée et repérer plus facilement les analytes. C. Perspective d’évolution: (imagerie par spectromètre de masse) L’utilisation du spectromètre de masse en tant qu’imagerie est une perspective intéressante pour la spectrométrie de masse. Ce type de spectrométrie est dite ISM (Imagerie par Spectrométrie de Masse ) et utilise un spectromètre masse MALDI-TOF. L’idée est d’établir une cartographie spatiale de la répartition moléculaire dans une cellule au ou un tissu avec un spectromètre de masse . L’imagerie MALDI a été introduite par l’équipe de Richard Caprioli (Vanderbilt University, Nashville, USA) et est maintenant en plein essor. Cette méthode s’avère particulièrement adaptée pour la recherche de marqueurs biologiques. Le principe de cette technologie consiste à déposer sur une plaque de dépôt de type MALDI une cryocoupe. Un dépôt de matrice est ensuite réalisé sur la cryocoupe par nébulisation à pression atmosphérique. L’échantillon est finalement introduit dans la chambre d’analyse sous vide du spectromètre. Un faisceau laser (type UV) va irradier l’échantillon durant quelques secondes comme suivant la méthode décrite dans le II. Cette zone précise où le laser pointe est appelé « spot ». Grace au spectromètre de Figure 16 : Principe de l’imagerie MALDI-TOF. A. Une coupe masse on connait maintenant congelée est déposée sur un support. Une analyse précisément la composition de la microscopique est effectuée. La coupe est recouverte de cryocoupe à cet endroit. matrice avant d’être analysée en MALDI-TOF. B. Le laser va balayer la surface de la coupe et un logiciel informatique va permettre de reconstituer une image bidimensionnelle de la répartition des molécules. Une superposition entre la carte de répartition des molécules et l’observation microscopique peut être réalisée pour obtenir une localisation précise de la molécule dans le tissu. L’expérience est répétée à intervalles réguliers sur la cible. Une fois la totalité de la zone d’analyse irradiée, un logiciel de retraitement permet de sélectionner des molécules sur les différents spectres et de reconstituer des cartes de densité ionique, appelées images, des signaux sélectionnés. Chaque spot correspond à un pixel de l’image et la distance entre chaque spot à la résolution spatiale. Cette technique permet de localiser simultanément plusieurs composés biologiques (protéines, peptides, lipides, sucres, métabolites) d’intérêt, directement sur un tissu et avec une résolution spatiale de l’ordre de 50 μm. IV. Conclusion Malgré les perspectives très intéressantes de la spectrométrie de masse, il est à noter que certaines limites existent (en ce qui concerne les applications du MS en milieu biomédical). En effet la préparation des échantillons reste une étape critique, il faut obtenir une protéine la plus pure possible dans le solvant adéquat. C’est pourquoi actuellement de nombreuses publications sont axées sur les techniques de séparation des échantillons en amont. Elle sera choisie en fonction du type d’appareil utilisé et des protéines étudiées. Le solvant doit lui aussi être sélectionné avec soin afin de ne pas interférer avec les peptides présents en solution. La spectrométrie de masse n’est pas utilisée en première ligne pour la quantification. En effet le besoin d’étalon interne peut présenter quelques inconvénients lors des analyses. Cependant elle reste une technique de choix en protéomique. Bibliographie : http://www-esbs.u-strasbg.fr/notesdecours/3eme-annee/gap/MmeSanglier0510-05/Intro_SS.pdf http://www.culture.gouv.fr/culture/conservation/fr/methodes/spectrom.htm#Ret our_2 http://fr.wikipedia.org/wiki/Spectrom%C3%A9trie_de_masse https://www.u-picardie.fr/plateforme/icap/pres_ms.php http://www.pcipresse.com/spectraanalyse/wpcontent/uploads/2012/05/SA250_20-26.pdf http://culturesciences.chimie.ens.fr/content/quest-ce-que-la-spectrometrie-demasse-751 http://jflemen.iutlan.univ-rennes1.fr/CHIMIE/SPECMAS/specmas2.htm Utilisation de la spectrométrie de masse Electrospray pour l’étude structurale des protéines de Philippe GUY