TRIBUNE
Figure. Cycle de télésurveillance. Les données sont transmises chaque jour vers un
centre de services et sont consultées par une infirmière spécialisée en insuffisance
cardiaque. Si les données ou les tendances indiquées sont en dehors des limites
préétablies, l’infirmière appelle le patient pour des informations supplémentaires.
Elle peut donner des conseils, modifier les doses de médicament ou inciter à une
consultation avant la date prévue.
Reproduit avec l’autorisation de BMJ Publications.
Transmission
des données
Consultation
Cardiomessenger
La Lettre du Cardiologue • n° 435 - mai 2010 | 9
qualité. Les données disponibles indiquent que le taux d’hospi-
talisation pour insuffisance cardiaque pourrait être réduit, bien
que le nombre d’hospitalisations reste presque inchangé, et
que le taux de mortalité serait réduit comparativement à celui
obtenu grâce aux soins traditionnels. Des études comparant le
télésuivi aux soins prodigués par les meilleurs spécialistes ont
montré des résultats semblables, mais avec un taux d’hospita-
lisations en urgence pour décompensation diminué (3). Le suivi
des études actuelles est compris entre 90 jours et 12 mois ; des
données sur le plus long terme doivent être obtenues.
Quel est le coût de l’implantation d’un tel système ? Malheu-
reusement, les analyses de coûts sérieuses manquent. Néan-
moins, les données disponibles indiquent que ces systèmes ne
permettent probablement pas d’économies, mais qu’ils sont
plus rentables que d’autres procédés normalement financés
par les régimes de santé. Dans un contexte où les hôpitaux
sont payés pour l’hospitalisation, et non pour le télésuivi
ou le contact téléphonique, implanter un tel système peut
s’avérer problématique.
Le télésuivi constitue un complément aux soins cliniques
traditionnels, et exige un changement des habitudes de travail
de ceux qui s’y impliquent. La charge de travail par patient
est modérée ; notre expérience dans le cadre de notre étude
(HOME–HF) menée dans la région de l’ouest de Londres
indique qu’au cours d’une période de 6 mois, après la sortie de
l’hôpital, 64 % des patients ont transmis des données exigeant
au moins un contact téléphonique avec l’infirmière spécia-
lisée. Cela représentait en moyenne un appel par personne
suivie chaque mois. Dans 19 % des cas seulement, une visite
anticipée pour examen à la clinique s’est avérée nécessaire ;
dans la plupart des cas, des conseils par téléphone concernant
le style de vie, l’observance médicamenteuse ou la modifi-
cation des doses de diurétique ont été suffisants.
Les patients présentant une insuffisance cardiaque s’adap-
tent très bien à la technologie de télésurveillance. Les séries
étudiées ont révélé un taux d’adhésion supérieur à 80 %,
et un bon niveau de satisfaction (96 % des patients). Une
étude qualitative menée dans la région de l’ouest de Londres
a montré que les patients trouvent ce type de suivi rassurant.
Ils affirment que cette surveillance les aide à comprendre leur
état et leur thérapie (4). C’est souvent l’équipe de soins qui
trouve difficile de s’adapter à la nouvelle façon de travailler !
Le télésuivi est la technologie de l’avenir. Il ne remplacera
jamais la pratique “habituelle”, mais il permettra aux équipes
de soigner un nombre beaucoup plus important de patients
et de leur apporter à domicile le bénéfice de leur expertise.
Partout en Europe, des décideurs appuient fortement cette
orientation, et les données en sa faveur sont de plus en plus
irréfutables. Pour un grand nombre de services de cardiologie,
l’introduction de cette méthode de soins est un défi, mais le
partage des pratiques optimales et l’enseignement apporté par
les erreurs commises lors de tentatives précédentes finiront
par assurer l’adoption de cette nouvelle approche, appropriée
et sans danger, par la plupart des services cardiologiques, dans
les décennies à venir. Par conséquent, un plus grand nombre
de patients aura accès à un personnel possédant l’expertise
appropriée, l’état des patients sera surveillé de plus près, la
décompensation sera détectée plus tôt et le traitement sera
optimisé. Nous avons besoin de plus d’informations concer-
nant les patients les plus aptes à bénéficier de ces systèmes,
la durée nécessaire d’utilisation de ces systèmes après une
hospitalisation, l’identification des paramètres à mesurer,
et la manière de présenter l’information à un professionnel
de santé pour qu’il puisse prendre la meilleure décision. La
formation du personnel et l’évaluation du fonctionnement
des services sont essentielles dans le processus d’adoption
de cette technologie. Mais, dans les années à venir, nous
allons sûrement nous demander comment nous avons pu
nous passer de la télésurveillance. ■
Références bibliographiques
1. Dickstein K, Cohen-Solal A, Filippatos G et al. ESC
guidelines for the diagnosis and treatment of acute
and chronic heart failure 2008: the Task Force for the
diagnosis and treatment of acute and chronic heart
failure 2008 of the European Society of Cardiology.
Developed in collaboration with the Heart Failure
Association of the ESC (HFA) and endorsed by
the European Society of Intensive Care Medicine
(ESICM). Eur J Heart Fail 2008;10(10):933-89.
2. Clark RA, Inglis SC, Mc Alister FA, Cleland JG,
Stewart S. Telemonitoring or structured telephone
support programmes for patients with chronic heart
failure: systematic review and metaanalysis. BMJ
2007;334(7600):942.
3. Dar O, Riley J, Chapman C et al. A randomized trial of
home telemonitoring in a typical elderly heart failure
population in North West London: results of the
Home-HF study. Eur J Heart Fail 2009;11(3):319-25.
4. Riley J, Dar O, Gabe J, Cowie MR. Telemonitoring
in heart failure: Changing roles and challenging
relationships? Eur J Cardiovasc Nurs 2008;7:S58.