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Blocage des canaux calciques T : une évolution
dans le traitement des maladies cardiovasculaires*
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e Dr F.T. Tomaselli (Baltimore, États-Unis) a passé en
revue les données disponibles sur le rôle biologique des
canaux calciques T. La technique du patch clamp a
permis l’identification des canaux de type T caractérisés par leur
activation à un faible niveau de dépolarisation, par leur inactivation rapide et leur blocage sélectif par le mibéfradil. Les canaux
de type T ont un rôle en physiologie cardiovasculaire dans l’activité pacemaker des cellules automatiques du nœud sinusal, dans
la régulation de la vasomotricité par les cellules musculaires
lisses, mais aussi dans certaines cellules neuro-hormonales assurant la régulation de la sécrétion de rénine, d’aldostérone et de
noradrénaline. Les canaux de type T sont absents des cellules
musculaires ventriculaires adultes normales mais semblent pouvoir être réexprimés dans le myocarde ischémique et dans des
myocardiopathies hypertrophiques expérimentales. Enfin, l’expression des canaux calciques de type T varie en fonction des différentes phases du cycle cellulaire et paraît accrue en phase S. Ils
pourraient ainsi être impliqués dans les processus prolifératifs
cellulaires comme ceux constatés dans l’évolution de l’athérosclérose. Cette dernière particularité constitue une cible de
recherche très intéressante dans les maladies cardiovasculaires.
Le Dr J.A. Sarsero (Melbourne, Australie) a envisagé l’étude de
la sélectivité des différents antagonistes calciques sur des tissus
humains isolés à partir de prélèvements peropératoires (pontages
aorto-coronaires). Quatre antagonistes des canaux L (félodipine,
nifédipine, amlodipine et vérapamil) et un antagoniste des canaux
T (mibéfradil) ont été comparés sur le blocage exercé au niveau
artériel (A) et myocardique (M). Le rapport A/M est maximal
avec le mibéfradil (blocage artériel 41 fois plus élevé que le blocage myocardique) ; il décroît avec les autres molécules (12 avec
la félodipine, 7 avec la nifédipine, 6,95 avec l’amlodipine) et
s’inverse avec le vérapamil (blocage myocardique 5 fois plus
élevé que le blocage artériel). La très haute sélectivité artérielle
du mibéfradil pourrait être due à la rareté des canaux de type T
dans le myocarde sain et pourrait expliquer son absence d’effet
inotrope négatif.
Le Dr P. Meredith (Glasgow, Grande-Bretagne) a insisté sur
l’importance des propriétés pharmacocinétiques et pharmacodynamiques d’une molécule dans son efficacité clinique. Si la pharmacocinétique explique la concentration du médicament en fonction de la dose administrée, les propriétés pharmacodynamiques
déterminent la réponse clinique à la dose administrée. Le mibéfradil a une longue demi-vie, supérieure de 17 à 25 heures à celle
des autres antagonistes calciques comme le vérapamil ou les dihy-
* Symposium Produits Roche, Orlando, 9 novembre 1997, 70es sessions de
l’American Heart Association, 13-16 novembre 1997.
La Lettre du Cardiologue - n° 288 - février 1998
dropyridines. Sa biodisponibilité est de 70 à 90 %. Le rapport
trough/peak (effet en fin de dose/effet au pic de dose) est très
favorable, atteignant 81 % avec une dose de 50 mg et 92 % avec
la dose de 100 mg. La fréquence cardiaque est ralentie en
moyenne de 5 battements par minute et la variation circadienne
de la pression artérielle est maintenue. Le point particulier d’une
interférence avec la simvastatine a été abordé pour souligner que
les rares cas de rhabdomyolyse rapportés concernent essentiellement des patients greffés rénaux traités de façon concomitante
par simvastatine, ciclosporine et mibéfradil, l’association des
deux premières molécules étant déjà connue pour accroître le
risque d’intolérance musculaire.
Le Dr I. Kobrin (Nutley, États-Unis) a rapporté les différentes
études expérimentales animales en faveur de l’effet protecteur du
mibéfradil sur les organes cibles. Ainsi la courbe de survie de rats
spontanément hypertendus (rats SHR-SP) est significativement
améliorée après 15 semaines de mibéfradil par rapport au groupe
contrôle, tandis que le risque d’accidents vasculaires cérébraux
est diminué. Chez des rats hypertendus sous régime salé DOCA,
le mibéfradil non seulement diminue la pression artérielle d’une
amplitude équivalente à celle obtenue avec l’amlodipine mais
aussi réduit significativement la protéinurie et les lésions glomérulaires, effets non observés avec l’amlodipine. Le mibéfradil a également permis une réduction de la masse ventriculaire
gauche équivalente à celle obtenue avec l’aténolol. Chez des rats
hypertendus sous régime salé DOCA soumis à une angioplastie
carotidienne au ballon, la néoprolifération intimale réactionnelle
est diminuée sous mibéfradil mais persiste sous amlodipine ou
sous vérapamil, alors même que les effets antihypertenseurs sont
équivalents.
Le Dr F.H. Messerli (La Nouvelle-Orléans, États-Unis) a expliqué le problème posé par l’activation neurosympathique réflexe
liée aux traitements antihypertenseurs antagonistes calciques. Il
a rappelé les effets délétères de cette régulation neuro-hormonale, l’élévation du taux de norépinéphrine étant directement corrélée aux événements cardiovasculaires morbides (arythmies,
infarctus du myocarde), voire mortels. À partir d’une recherche
Medline exhaustive, il a pu répertorier les modifications cliniques
(pression artérielle, fréquence cardiaque) et biochimiques (taux
de norépinéphrine) imputables au traitement antihypertenseur et
les analyser en fonction des caractéristiques pharmacologiques
des différentes molécules. Les antagonistes calciques à courte
durée d’action stimulent à court et long terme l’activité sympathique. Cet effet délétère diminue avec les formes à longue durée
d’action, d’autant plus qu’il s’agit d’antagonistes non dihydropyridines. Ces différences entre les diverses classes d’antagonistes calciques devraient faire l’objet d’une évaluation clinique
dans des études prospectives de morbi-mortalité.
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Le Dr C.M. Pratt (Houston, États-Unis) a posé la question du
traitement de l’ischémie silencieuse ou ischémie indolore.
Quelle que soit la méthode d’évaluation choisie (holter ECG,
test d’effort, tomographie par émission de positrons, scintigraphie), l’ischémie silencieuse est apparue comme une situation
fréquente, soit prédominante comme chez le diabétique, soit associée à des épisodes symptomatiques. Sa valeur prédictive péjorative est maintenant reconnue dans plusieurs études. L’étape suivante consiste à vérifier l’hypothèse selon laquelle le traitement
de l’ischémie silencieuse pourrait améliorer le pronostic. L’étude
pilote ACIP (Asymptomatic Cardiac Ischemia Pilot study), menée
chez des patients coronariens ayant déjà bénéficié d’une angioplastie coronaire, apporte des éléments de réponse. Une stratégie
de prise en charge guidée sur les seuls symptômes détermine une
mortalité à un an de 4,5 % contre 1,5 % avec une stratégie guidée par l’ischémie silencieuse.
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Le Dr T.B. Levine (Farmington, États-Unis) a précisé l’état du
développement du mibéfradil dans l’insuffisance cardiaque. Il a
rappelé les résultats favorables de l’étude expérimentale animale
conduite sur un modèle d’insuffisance cardiaque ischémique chez
le rat : le mibéfradil améliore la survie à 9 mois de façon équivalente au cilazapril, sans détérioration de la fonction ventriculaire gauche, et avec une réduction concomitante de la masse ventriculaire gauche et de la fibrose interstitielle.
L’étude clinique humaine MACH 1 (Mortality Assessment in
Congestive Heart Failure Trial) a randomisé 2 590 patients insuffisants cardiaques (classes II à IV et FEVG < 35 %) pour recevoir, en plus du traitement conventionnel oral, soit le mibéfradil, soit un placebo. La mortalité constitue le critère de jugement
principal. Les résultats devraient être connus dans le courant de
l’année 1998.
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La Lettre du Cardiologue - n° 288 - février 1998
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