Construire une culture de lutte systématique
O
n reconnaît deux types de
douleurs dont l’approche est
tiples. La douleur est basiquement
sensorielle mais elle renvoie aussi
à l’affectivité et aux émotions du
sujet. Elle intègre en outre une si-
gnification cognitive ou intellec-
tuelle. Les manifestations compor-
tementales ne sont pas anodines et
l’impact socio-économique, cultu-
rel, ethnique, voire religieux, en-
gendre des réactions différentes
suivant les personnes.
Depuis la période antique, la
douleur a été un sujet majeur d’in-
terrogations. L’opium est le premier
analgésique cité. Au XVIIIesiècle, le
protoxyde d’azote, appelé égale-
ment gaz hilarant, est découvert
par un chimiste britannique, Jo-
seph Priestley. Ce n’est qu’au mi-
lieu du XIXesiècle que la démons-
tration d’anesthésie par l’éther lors
des interventions chirurgicales est
faite par William Green Morton.
Aujourd’hui, les gaz reviennent
grâce à leur mode d’administration
plus fiable et à leur aide dans les
actes douloureux de courte durée.
Un défi culturel
Malgré la loi (décret du 6 sep-
tembre 1995 du Code de déonto-
logie médicale ; article L 710-3-1
du Code de la santé publique,
loi du 28 mai 1996), le plan trien-
nal de lutte contre la douleur,
certains patients souffrent encore.
Or, “toute personne a le droit de
recevoir des soins visant à sou-
lager sa douleur. Celle-ci doit
être, en toutes circonstances, pré-
venue, évaluée, prise en compte
et traitée...” Phénomène culturel,
manque de formation des soi-
gnants, voire manque d’informa-
tions des patients, la douleur est in-
suffisamment prise en charge en
France et elle l’est surtout de ma-
nière très hétérogène. Des pompes
à morphine présentes dans certains
établissements ne sont pas utili-
sées ! En 2001, l’évaluation du pro-
gramme réalisé par la Société fran-
çaise de santé publique a montré
qu’une prise de conscience s’était
opérée et que des changements no-
tables étaient intervenus mais que
plusieurs dysfonctionnements per-
sistent. Il est du devoir des infir-
miers d’exiger une formation tant
dans l’apprentissage de l’évaluation
de la douleur et de ses outils que
dans l’utilisation des techniques et
des effets secondaires des médica-
ments. Dès que le patient arrive, le
souci de le soulager doit être
constant, d’autant qu’une douleur
s’anticipe aujourd’hui, notamment
en postopératoire ou dans certains
soins. Sans nier le rôle des Centres
antidouleur, indispensables, leur
recours peut signer l’échec des thé-
rapeutiques. En effet, la douleur
doit s’intégrer systématiquement à
la prise en charge d’un patient,
quelle que soit sa pathologie. Et,
compte tenu des moyens théra-
peutiques actuels, il n’y a pas de
petites douleurs, celles-ci pouvant
s’accompagner d’une charge émo-
tionnelle intense.
A.-L.P.
La loi fait obligation de traiter la douleur. Aujourd’hui, les actes
courts ou moyennement douloureux peuvent aussi bénéficier
d’une prise en charge analgésique adaptée. Il n’y a pas de
“petites douleurs”.
Douleur
16 Professions Santé Infirmier Infirmière - No43 - janvier-février 2003
différente : d’une part, la douleur
aiguë de courte durée (douleurs
postopératoire, post-traumatique)
ou celle provoquée par certains
actes de soins ; d’autre part, la
douleur chronique souvent re-
belle. Celle-ci persiste alors dans
la durée et résiste aux traitements
antalgiques. Elle retentit de façon
intense sur la qualité de vie des
patients et de leur entourage.
Un effet subjectif
Quelle que soit la douleur, elle est
subjective car seul celui qui la
ressent peut la juger. D’où l’intérêt
des échelles d’autoévaluation. Les
composantes sont en effet mul-
La pratique infirmière
particulièrement
concernée
Le nouveau Programme national
quadriennal comporte trois nou-
velles priorités : la douleur provo-
quée par les soins et la chirurgie, la
douleur de l’enfant et la prise en
charge de la migraine.
Pour cela, 5 objectifs sont fixés :
associer les patients au traitement
par une meilleure information ;
améliorer l’accès à des structures
spécialisées pour la personne souf-
frant de douleurs chroniques ;
améliorer l’information et la for-
mation des personnels de santé ;
amener les établissements de
santé à s’engager dans un pro-
gramme de prise en charge de la
douleur ;
–renforcer le rôle infirmier, no-
tamment dans la prise en charge de
la douleur provoquée.
Rappel des paliers OMS
Palier 1 : analgésiques périphériques,
inhibiteurs des cyclo-oxygénases, pa-
racétamol et anti-inflammatoires non
stéroïdiens (AINS), associés ou non à
des thérapeutiques adjuvantes.
Palier 2 : analgésiques centraux
agonistes faibles ou agonistes-
antagonistes (peu de produits pour
les enfants), associés ou non à des
antalgiques périphériques et/ou
des adjuvants.
Palier 3 : antalgiques centraux ago-
nistes µ, dont le chef de file est
la morphine, associés ou non à des
antalgiques non opiacés et/ou
adjuvants.
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