DOSSIER THÉMATIQUE
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. IX - mai-juin 2006
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Cancer de l’estomac
Gastric adenocarcinoma
D. Pezet*
L
e cancer de l’estomac garde la deuxième place des can-
cers digestifs en France avec 7 000 nouveaux cas et
5 000 morts par an (1). Les formes distales et de type
histologique intestinal sont en diminution alors que les formes
proximales et de type histologique diffus progressent. Le pro-
nostic est péjoratif avec un taux de survie à 5 ans de 15 % tous
stades confondus et de 40 % pour les malades opérés et réséqués
(2). Ce bref exposé a pour but de faire état des nouveautés publiées
en 2005 dans le domaine du cancer gastrique.
Une étude de A. Lassen et al. (3) publiée dans Gastroenterology
s’est intéressée aux ulcère dégénérés éventuellement cicatrisés
par un traitement antisécrétoire préalable à l’endoscopie. Cette
étude réalisée au Danemark sur 27 829 personnes, consultant pour
épigastralgies, avec un suivi médian de 2,7 ans a trouvé 461 can-
cers à la première fibroscopie. Le nombre de cancers apparus pen-
dant le suivi était le même chez les non-consommateurs d’anti-
sécrétoires (44/100 000) que chez les consommateurs (46/100 000).
Le nombre de cancers non diagnostiqués à la première fibrosco-
pie est donc faible et non influencé par la consommation d’anti-
sécrétoires.
Helicobacter pylori (Hp) est reconnu par l’OMS comme un car-
cinogène de type I. Les études les plus récentes montrent qu’une
variabilité génotypique d’Hp et de l’hôte explique que le risque
de cancer gastrique à 8 ans chez les porteurs d’Hp reste faible, de
l’ordre de 3 % si le portage est découvert sur une muqueuse nor-
male, et de 8 % si le portage est découvert au stade de métapla-
sie (4-6). Le simple dépistage de masse du portage d’Hp n’est
donc pas d’actualité.
Concernant le bilan préthérapeutique, des études de 2005 sur des
effectifs de 70 à 80 malades ont mis en évidence des performances
médiocres du PET scan concernant le staging du cancer gastrique.
Ainsi, si la spécificité de l’envahissement ganglionnaire est supé-
rieure à 90 %, sa sensibilité n’est que de 30 à 40 %, soit inférieure
ou égale à celle de la tomodensitométrie (7-9). Rien ne permet
donc de justifier le PET scan systématique dans cette indication
hors étude.
En 2005, plusieurs publications se sont intéressées à la résection
des cancers gastriques par laparoscopie. La laparoscopie a notam-
ment été étudiée pour le traitement des formes superficielles.
S. Sakuramoto et al. (10) ont ainsi publié une série de 111 malades
dont 55 traités par laparoscopie hand assisted et 56 par laparo-
scopie seule. Un curage de type D2 était systématique. Aucune
conversion n’était nécessaire et les curages étaient conformes aux
critères de qualité admis au prix d’une durée d’intervention d’en-
viron 4 heures. Les études comparatives avec la laparotomie n’ont
jamais été randomisées et, au mieux, le groupe laparoscopie a été
apparié à un groupe laparotomie. Ainsi, E. Mochiki et al. (11) ont
publié une série de 103 malades dont 30 avaient plus de 70 ans.
Une comparaison par appariement était faite en respectant les deux
groupes d’âge, ce qui ne semblait pas influencer les résultats.
H. Noshiro et al. (12) ont apparié 37 gastrectomies par laparosco-
pie avec 31 laparotomies. S. Usui et al. (13) ont apparié 20 gas-
trectomies laparoscopiques avec 19 par laparotomie. Globalement,
la tendance est, comme souvent pour les indications de résection
viscérale, une intervention plus longue, mais une hospitalisation
plus courte, moins de douleurs et moins de complications. L’ab-
sence d’étude randomisée ne permet pas de recommander cette
voie d’abord en dehors d’études prospectives.
Aucune étude n’a, en 2005, contredit la revue de la littérature de
T. Lenhert et K. Buhl (14) sur les techniques de reconstruction
après gastrectomie totale. Le maintien d’un transit duodénal par
interposition œso-duodénale de jéjunum ne semble pas avoir d’in-
térêt et la confection d’un montage en Y avec réservoir semble
avoir un intérêt nutritionnel et de qualité de vie limité aux pre-
miers mois postopératoires. La technique de reconstruction reste
donc au libre choix de l’opérateur.
L’anatomopathologiste reste le contrôle de qualité du chirurgien.
Une équipe de Minneapolis (15) a étudié l’adéquation du nombre
de ganglions prélevés avec les recommandations officielles
(15 pour un curage D1). Sur une base de données de 3 593 malades
opérés d’un cancer gastrique non métastatique, seuls 32 % avaient
un curage satisfaisant. Le nombre médian de ganglions examinés
était de 10, et 9 % des malades n’avaient aucun ganglion examiné.
* Service de chirurgie viscérale, CHU de Clermont-Ferrand.
dpezet@chu-clermontferrand.fr
© La Lettre du Cancérologue - Volume XV - n° 2 - mars-avril 2006.
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Le nombre de ganglions examinés était supérieur chez les malades
N+, les malades jeunes et chez les femmes. La qualité de l’exé-
rèse doit être prise en compte dans la prise de décision postchi-
rurgicale et l’organisation des études comparatives.
Concernant les traitements adjuvants, l’année 2005 sera marquée
par la publication d’une des probables dernières études de chi-
miothérapie systémique versus chirurgie seule (16). Il s’agit d’une
compilation de deux études qui ont randomisé au total 397 malades
après résection gastrique et qui a testé le FAMTX ou FEMTX (épi-
rubicine en remplacement de l’adriamycine). L’étude est négative,
la survie globale et la DFS à 5 ans étaient respectivement de
44,43 % et 41,42 % dans le bras chimiothérapie et contrôle.
Les résultats de l’étude MAGIC ont été présentés à l’ASCO 2005
(17). Cette étude a permis de randomiser 503 malades atteints de
cancer du bas œsophage du cardia ou de l’estomac entre la chi-
rurgie seule ou une chimiothérapie pré- et postopératoire. La chi-
miothérapie consistait en 3 cycles d’ECF préopératoires et
3 cycles postopératoires, soit 9 semaines de traitements pré- et
postopératoire. Les inclusions étaient constituées de 74 % de can-
cers gastriques. Outre le bénéfice sur la résécabilité et le volume
tumoral rapporté dès l’ASCO 2003, cet abstract montrait un béné-
fice en survie à 5 ans net (36 versus 23 % ; p < 0,009) et en PFS
(HR : 0,66 ; p = 0,0001) pour le bras chimiothérapie. Ces résul-
tats pour lesquels une confirmation par la publication est atten-
due, induisent une alternative à la radio-chimiothérapie de type
Mac Donald. La FFCD a, dans ce domaine, un projet d’essai de
phase II de radio-chimiothérapie préopératoire ou postopératoire
avec FOLFORI (coordonnateur : P. Michel). Il existe par ailleurs
un projet PETACC d’essai de phase II randomisé de radio-chi-
miothérapie préopératoire ou postopératoire avec 5-FU, docétaxel
et oxaliplatine, préalable à un essai de phase III ayant comme bras
de référence un schéma de chimiothérapie préopératoire (type
MAGIC) [coordonnateur : E. Van Cutsem].
Concernant les études de phase III de chimiothérapie des adéno-
carcinomes gastriques métastatiques, seul un abstract de l’ASCO
(18) a résumé les résultats d’une étude testant l’association docé-
taxel + cisplatine + 5-FU (DCF) versus 5-FU + cisplatine. Les
résultats sont en faveur du bras DCF pour le taux de réponse, la
survie sans récidive et la survie globale (10,2 mois versus
8,5 mois ; p = 0,006), au prix d’une toxicité hématologique plus
importante. Aucun article original n’est venu en 2005 modifier signi-
ficativement la prise en charge de ces malades et l’inclusion dans
l’essai intergroupe FFCD-GERCOR-FNCLCC-AERO 03-07 : ECC
(épirubicine-cisplatine-capécitabine) puis FOLFORI versus FOL-
FORI puis ECC, est plus que jamais d’actualité.
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Prochain dossier thématique à paraître en septembre 2006
Hépatite Chronique B
Coordination : P. Sogni (Paris)
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