Brèves… Brè ves… L’anorexie vient en lisant

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Brèves…B
Un amaigrissement excessif aboutit à
une dénutrition avec perte de masse
musculaire et à des dysfonctionnements cardiaques incluant des troubles du rythme et une hypotension
artérielle. Les personnes anorexiques
présentent également des altérations
des systèmes digestif, immunitaire et
endocrinien. La dénutrition est sévère
lorsque l’indice de masse corporelle
(IMC) est inférieur à 13, et le pronostic
vital est en jeu pour un IMC en dessous
de 11. Le trouble du comportement
alimentaire survient fréquemment à la
suite d’un régime amaigrissant faisant
descendre l’IMC en dessous d’un
seuil critique. La prévalence de l’anorexie mentale, qui est plus élevée chez
les adolescentes (2 %) que chez les
garçons (9 filles pour 1 garçon), est en
constante augmentation. Cette pathologie concerne essentiellement les filles
de 12 à 20 ans, mais peut apparaître dès
l’âge de 9 ou 10 ans. L’anorexie est une
maladie multifactorielle qui dépend de
facteurs d’ordre métabolique, génétique, psychologique et culturel. Des
chercheurs du Minnesota ont étudié
l’impact des articles de presse grand
public prônant des régimes minceur
sur le développement de troubles du
comportement alimentaire. Pour cela,
ils ont suivi pendant 5 ans l’évolution
staturopondérale ainsi que les habitudes alimentaires et de lecture de
2 516 collégiens (55 % de filles, 45 %
de garçons). Van den Berg et al. révèlent que 14 % de ces jeunes adolescents lisaient régulièrement des articles
relatifs à l’amaigrissement au début de
l’étude, sans toutefois développer par
la suite un culte excessif de la minceur.
Les adolescentes s’adonnant à ce genre
de lecture étaient plus nombreuses
(44 %) au début de l’enquête, sans
qu’il puisse être établi de corrélation
avec leur poids initial. Les jeunes filles
lisant fréquemment ce type de magazine dès la prime adolescence étaient
deux fois plus nombreuses, 5 ans
après, à s’infliger de fortes restrictions
alimentaires que celles qui n’en avaient
jamais lu. Les auteurs ont constaté que
la privation alimentaire s’accompagnait
d’autres comportements pathologiques,
tels que les vomissements volontaires,
l’usage de laxatifs et la consommation excessive de tabac. Cet article
publié dans la revue Pediatrics met en
lumière l’influence des médias dans le
développement de l’anorexie mentale
et révèle la nécessité de restreindre la
diffusion des magazines faisant l’éloge
de la maigreur auprès des jeunes
adolescentes.
E. Louiset,
Inserm U413, université de Rouen.
✓ Van den Berg et al. Pediatrics 2007;119:
e30-e37.
La fin de la dictature
d’un marqueur biologique ?
La mesure du taux de calcitonine plasmatique fait désormais consensuellement partie du bilan initial des nodules
thyroïdiens (1). L’élévation de ce
chiffre au-dessus des 100 ng/l, en basal
ou après stimulation, amène à proposer
une thyroïdectomie totale avec curage
ganglionnaire, seule thérapeutique
curatrice. Idéalement, le taux postopératoire de ce marqueur biologique doit
alors être égal à zéro (2). Bien souvent
ce n’est pas le cas, ce qui amène à la
fois à une recherche de foyers sécréteurs résiduels et est générateur d’angoisse pour le patient soumis à la
dictature d’un marqueur biologique.
En effet, cette quête du tissu anormal
restant n’aboutit qu’irrégulièrement,
la masse de tissu résiduel pouvant être
réduite, et nos moyens de détection
insuffisamment sensibles compte tenu
de la lenteur d’évolution de ce genre
de tumeur. C’est ce type de situation
et son influence sur la survie libre
de récidive et globale qu’ont évalué
de Groot et al. à partir d’une série de
120 patients atteints d’un carcinome
médullaire de la thyroïde et suivis
pendant une durée moyenne de 8 ans
(3). Soixante-dix-neuf patients, soit
les deux tiers de la cohorte, ont gardé
une maladie évolutive, au moins sur
le plan biologique, en postopératoire.
Chez 19 d’entre eux, la source rési-
duelle de sécrétion de calcitonine n’a
jamais pu être localisée en dépit d’une
surveillance médiane de 143 mois.
Plusieurs conclusions intéressantes
sont issues de cette étude. Les facteurs
de risque de persistance d’une maladie
évolutive occulte après chirurgie d’exérèse thyroïdienne incluent les stades
TNM (III et IV) ainsi que la présence
d’un envahissement ganglionnaire et/
ou extrathyroïdien. Le premier et le
troisième facteurs sont les déterminants
de la survie sans récidive. L’envahissement extrathyroïdien est le seul facteur
indépendant conditionnant la durée de
vie globale. Pour les stades tumoraux
les plus faibles, sans extension extrathyroïdienne, la survie apparaît en
effet similaire à celle de la population
générale. Une élévation supérieure à
deux fois le taux postopératoire de la
calcitoninémie au cours de l’année qui
suit l’intervention est prémonitoire
d’une réduction de la durée de vie en
liaison avec la maladie. En dehors de
ces circonstances, la persistance d’une
hypercalcitoninémie – après un traitement chirurgical apparemment curateur et sans que puisse être détectée la
source de sécrétion résiduelle de calcitonine – ne devrait donc pas engendrer
de trop fortes inquiétudes, mais plutôt
permettre de rassurer le patient et son
médecin traitant.
rèves…
L’anorexie vient en lisant
J.M. Kuhn, service d’endocrinologie
et maladies métaboliques,
CHU de Rouen.
1. Pacini et al. Eur J Endocrinol 2006;154:787803.
2. Joly et al. Ann Endocrinol 1997;58:2S53.
3. D e G ro o t e t a l . C l i n E n d o c r i n o l
2006;65:729-36.
Mutations du récepteur
de l’ACTH
et hypoaldostéronisme
Le syndrome de déficit isolé en glucocorticoïdes de type 1 correspond à une
insuffisance surrénalienne. Il se manifeste en général précocement pendant la
vie néonatale ou l’enfance. Il se traduit
par des crises d’hypoglycémie lors
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007
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Brèves…
Brèves…
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d’épisodes infectieux pouvant conduire
à des convulsions, voire un coma, à des
infections fréquentes, à une susceptibilité aux allergies et à une hyperpigmentation cutanée. Sur le plan biologique,
les taux de cortisol plasmatique sont
très bas, non stimulables par le Synacthène® (tétracosactide), alors que les
taux circulants d’ACTH sont très
élevés, traduisant une résistance spécifique à l’ACTH. Les taux d’aldostérone
et de rénine sont en général normaux et
répondent correctement à l’activation
de l’axe rénine-angiotensine. Il s’agit
d’un syndrome génétique de transmission autosomique récessive à incidence
faible. Une vingtaine de mutations du
récepteur de l’ACTH (MC2R) ont été
identifiées chez des patients atteints du
syndrome de déficit isolé en glucocorticoïdes de type 1. Lin et al. ont recherché
de nouvelles mutations du gène codant
le MC2R chez 22 enfants souffrant de
ce type de syndrome, dont 19 cas isolés
et 3 familiaux. Les auteurs ont retrouvé
deux mutations ponctuelles précédemment décrites dans la littérature, à
savoir la mutation S74I, correspondant
à la substitution de la sérine 74 par une
isoleucine dans le second domaine
transmembranaire, et la mutation
R146H, conduisant au remplacement de
l’arginine 146 par une histidine dans la
seconde boucle intracellulaire du récepteur. Ces mutations affectent la liaison
de l’hormone et la transduction du
signal. De plus, Lin et al. ont identifié
deux nouvelles délétions, l’une d’un
nucléotide en position 560 chez deux
enfants, et l’autre de trois nucléotides
en position 579-581 chez quatre nourrissons présentant une hypoplasie surrénalienne. Ces deux délétions entraînent
l’apparition précoce de codons stop en
position 215 et 193, ce qui génère des
formes tronquées et non fonctionnelles
du récepteur. Les enfants porteurs de
ces délétions ont présenté au cours
d’épisodes infectieux une hyponatrémie et une hyperkaliémie associées
à une faible aldostéronémie, malgré
une activité de la rénine plasmatique
élevée. Ce tableau clinique a nécessité
un traitement par minéralocorticoïdes.
Cette étude révèle que les mutations
entraînant une perte de fonction du
MC2R se traduisent non seulement par
une insuffisance en glucocorticoïdes,
mais également par un déficit en aldostérone, tout particulièrement au cours
d’un stress aigu (fièvre, convulsion),
une restriction sodée ou une période de
relative insensibilité aux minéralocorticoïdes (période néonatale). Les auteurs
recommandent d’évaluer l’activité de la
rénine plasmatique, l’aldostéronémie et
la balance ionique chez tous les enfants
souffrant d’un syndrome de déficit isolé
en glucocorticoïdes de type 1.
E. Louiset,
Inserm U413, université de Rouen.
✓ Lin et al. Clinical Endocrinology
2007;66:205-10.
Thé et tétons
À l’inverse des formes pubertaires,
considérées comme physiologiques et
le plus souvent spontanément régressives, les gynécomasties prépubertaires, qui peuvent relever d’étiologies
sévères, sont majoritairement de cause
non identifiée (1). Hendley et al. (2)
ajoutent une nouvelle cause à la liste
des étiologies connues. Ils rapportent
les cas de trois garçons, âgés respectivement de 4,5 ans, 8 ans et 10 ans, qui
ont consulté pour une gynécomastie
bilatérale d’apparition récente. Les
deux plus âgés avaient une ébauche de
pilosité pubienne. Pour tous, le volume
des testicules, en position intrascrotale,
était de 3 ml. Aucune anomalie de la
vitesse de croissance n’a été retrouvée.
Le reste de l’examen clinique était
normal pour l’âge. Le taux des gonadotrophines et ceux des stéroïdes
s’inscrivaient dans les valeurs habituelles de l’enfant prépubère. Hormis
la gynécomastie, le point commun de
ces observations, identifié après une
enquête quasi policière, est l’utilisation
d’huiles de bain, de shampoings ou de
savons contenant de l’huile de lavande
ou d’arbre à thé. La gynécomastie est
apparue quelques semaines après l’utilisation fréquente de ces produits et
s’est notablement réduite ou a disparu
après cessation de leur emploi.
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007
La démonstration de la responsabilité de ces huiles dans la genèse de la
gynécomastie a utilisé des méthodes
de transfection cellulaire et d’expression de gènes rapporteurs en présence
des produits suspects, d’agonistes et
d’antagonistes des stéroïdes sexuels.
L’activité de type estrogénique a été
évaluée sur une lignée de cellules
MCF-7 transfectées avec un vecteur
d’expression inductible par les estrogènes. L’huile de lavande comme celle
de l’arbre à thé possèdent un effet
estrogénique dose-dépendant dans ce
modèle. Cet effet, qui atteint pour les
concentrations les plus élevées 50 %
de celui de l’estradiol (10 -9 M), est
totalement annulé par la présence de
1 mM d’un antiestrogène spécifique.
L’expression de gènes sous un contrôle
estrogénique positif (MYC et CTSD)
ou négatif (IGFBP3) est également
stimulée ou inhibée par l’estradiol,
l’huile de lavande ou l’huile d’arbre à
thé, effets antagonisés par l’adjonction
de l’antiestrogène. Un effet antiandrogénique de ces produits a été également
recherché à l’aide d’une méthodologie
similaire sur des cellules MDA-kb2.
Les huiles de lavande et celles d’arbre
à thé réduisent l’effet de la dihydrotestostérone aussi fortement que le
flutamide, antagoniste spécifique du
récepteur des androgènes.
La survenue de ces gynécomasties
s’explique très vraisemblablement par
l’association de facteurs combinés
incluant effets estrogénique et antiandrogénique associés, sensibilité
individuelle de l’utilisateur et manière
dont les produits responsables sont
employés (dose, fréquence et durée
d’application). La fréquence de cette
“iatrogénie” reste à préciser, mais ces
cas cliniques attirent une fois de plus
l’attention sur les effets indésirables
potentiels des “disrupteurs” hormonaux
contenus dans nombre de produits,
notamment cosmétiques.
J.M. Kuhn, service d’endocrinologie
et maladies métaboliques,
CHU de Rouen.
1. Einav-Bachar et al. Clin Endocrinol
2004;61:55-60.
2. Hendley et al. N Engl J Med 2007;356:479-85.
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