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Correspondances en Onco-Hématologie - Vol. VIII - n° 1 - Janvier-février 2013
VOCABULAIRE
Vocabulaire
L
a guérison est un état souhaitable 
et souhaité. Mais, à la différence 
de la santé, d’ailleurs plus diffi-
cile à définir que la maladie, la guérison a un 
passé, qu’elle supprime, et ce passé est un 
mal. La maladie, l’accident corporel sont des 
attaques ; la guérison est le résultat d’une 
défense. Car le verbe guérir, qui vient des 
langues germaniques, tout comme guerre, 
correspond à l’allemand wehren, “défendre”. 
Les mots français guérir et guérison ont été 
apportés dans notre langue de fonds latin 
par les Francs, qui étaient plus portés sur le 
combat que sur la médecine. Aussi guarir, 
en ancien français, comme son modèle 
francique warjan, signifie-t-il “défendre, 
protéger” ; s’il est devenu guérir, c’est par 
l’influence du dialecte champenois. En se 
francisant – on pourrait même dire en se 
champagnisant –, guérir s’est dédoublé, 
pour dire à la fois recouvrer la santé et 
rétablir la santé de quelqu’un. De même, la 
guérison peut être un processus naturel et 
spontané – on guérit facilement d’un rhume, 
en général – ou l’effet d’une thérapeutique, 
qui peut être lourde, longue, complexe – 
en général, encore, on ne guérit pas tout 
seul d’une cardiopathie : on est guéri par 
la médecine. Guérison, le nom, efface cette 
distinction ; il ne s’intéresse qu’au résultat. 
Pourtant, ce résultat est lui-même multiple, 
à tel point que la guérison d’un mal n’est 
pas forcément celle du malade, qui est un 
organisme, un tout. Ce qui permet de dire, 
par une assez mauvaise plaisanterie : il est 
mort guéri ! Dans le processus de guérison, il 
y a toute l’action raisonnée de la médecine, 
de la chirurgie, mais il y a aussi de l’inexpli-
cable. “La guérison, mon amie, la vraie gué-
rison. Cela vient mystérieusement. On ne la 
sent pas tout de suite”. C’est ce qu’écrivait 
Colette, dans un chapitre des Vrilles de la 
vigne, intitulé : “La guérison”. Il est vrai qu’elle 
parlait de la guérison d’un amour malheu-
reux. Mais n’y a-t-il pas dans toute guérison 
une action secrète de la conscience et de 
l’inconscient, de la force vitale ? La guérison 
est une défense réussie, une levée de siège 
contre les attaques ; la force du traitement 
est protectrice, et il faut qu’elle s’appuie 
sur l’énergie des assiégés. Pour guérir un 
blessé, un malade – verbe transitif –, il faut 
qu’il veuille guérir–intransitivement, abso-
lument. Il arrive que la grammaire parle vrai.
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* © Le Courrier de la Transplantation 2004;1:6.
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   GUÉRISONS* Par Alain Rey, directeur de la rédaction du Robert, Paris