Cas clinique Rétine Gestion d’une hémorragie intravitréenne chez le patient diabétique Intravitreous hemorrhage in a diabetic patient S. Baillif-Gostoli, P. Gastaud (Service d’ophtalmologie, hôpital Saint-Roch, CHU de Nice) U Intravitreous Hemorrhage • Proliferative Diabetic Retino­ pathy • Panretinal photo­ coagulation • Vitrectomy. n jeune homme de 25 ans, diabétique de type I, consulte pour une baisse d’acuité visuelle brutale de l’œil droit évoluant depuis 15 jours. Examen À l’interrogatoire, le patient révèle avoir négligé son suivi médical depuis 2 ans. Son diabète est très mal équilibré, avec une hémoglobine glyquée (HbA1c) à 9,7 %. Sa tension artérielle est stable à 130/70. Il a bénéficié de quelques séances de photocoagulation panrétinienne (PPR) aux 2 yeux, mais ne s’est pas présenté aux séances suivantes. Sa dernière consultation ophtalmologique date de plus de 1 an. L’examen ophtalmologique retrouve une acuité visuelle droite à “voit bouger la main”. L’acuité visuelle gauche est à 5/10 Pa2. Le segment antérieur est sans particularité et ne montre pas de rubéose irienne. Les détails du fond d’œil droit sont inaccessibles du fait de la densité de l’hémorragie intravitréenne (figure 1). L’échographie en mode B montre une rétine à plat. À gauche, le patient présente une rétinopathie diabétique proliférante sévère insuffisamment traitée par laser. L’angiographie à la fluorescéine droite met en évidence les lacis néovasculaires ainsi que des territoires rétiniens ischémiques. Des impacts de photocoagulation épars sont visibles (figure 2). Une PPR gauche est débutée le jour même. Elle est complétée en 2 séances à l’aide d’un laser multispots PASCAL (PAtterned SCAnning Laser) [1]. Une indication chirurgicale est posée pour l’œil droit. Elle est effectuée 10 jours après la consultation, à la suite d’un bilan général (diabète, fonctions rénale et cardiaque). La chirurgie a consisté en une vitrectomie avec ablation du cortex vitréen postérieur, dissection des proliférations fibrovasculaires et réalisation d’une PPR par endolaser. L’acuité visuelle droite à 3 mois est de 5/10 Pa2. La PPR est complète (figures 3 et 4). Discussion La conduite à tenir en cas d’hémorragie intravitréenne du patient diabétique varie en fonction des critères cliniques. La panphotocoagulation périphérique doit être commencée rapidement sur tout territoire rétinien périphérique accessible. La chirurgie est urgente (moins de 15 jours) en cas de rubéose irienne ou de décollement de la rétine tractionnel associé. La chirurgie doit être rapide (moins de 6 semaines) en cas d’absence de PPR, de monophtalmie ou d’hémorragie intravitréenne bilatérale, ou en cas d’hémorragie rétrohyaloïdienne prémaculaire. Elle doit aussi être rapide chez le jeune patient diabétique de type I pour lequel les proliférations fibrovasculaires sont très actives et le risque d’évolution vers la rétraction et le décollement de rétine majeur (2). En dehors de ces situations, une surveillance attentive peut être préconisée afin ­d’attendre la régression spontanée de l’hémorragie intravitréenne. Une injection d’anti-VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) peut être préconisée, avec prudence (3). II 50 Hémorragie intravitréenne • Photocoagulation panrétinienne • Rétinopathie diabétique proliférante • Vitrectomie. Images en Ophtalmologie • Vol. VI • no 2 • avril-mai-juin 2012 Légendes Figure 1. Imagerie peropératoire de l’œil droit montrant la densité de l’hémorragie intravitréenne. Figure 2. Angiographie à la fluorescéine de l’œil gauche : cliché infrarouge (a) montrant des voiles néovasculaires prépapillaires et prérétiniens, une hémorragie rétrohyaloï­ dienne sous l’arcade vasculaire temporale inférieure, quelques cicatrices de photo­ coagulation périphérique ; cliché à 22 sec. (b) permettant d’observer des territoires ischémiques au pôle postérieur et en péri­ phérie temporale et inférieure ; cliché à 32 sec. (c) mettant en évidence des voiles néovasculaires à partir desquels le colorant diffuse. Figure 3. Clichés postopératoires à 1 mois : clichés d’angiographie à la fluorescéine à 1 mn 33 sec. (a) montrant une panphotocoa­ gulation incomplète avec une néovasculari­ sation prérétinienne et prépapillaire encore active, comme en témoignent ces petites diffusions ; OCT (b) montrant une rétine inflammatoire (points hyper-réflectifs) avec une lame de liquide sous-rétinien. Figure 4. Clichés postopératoires à 3 mois : clichés d’angiographie à la fluorescéine à 55 sec. (a) montrant une panphotocoagu­ lation complète sans néovascularisation active ; OCT (b) montrant un profil fovéolaire conservé sans œdème maculaire ou liquide sous-rétinien. Cas clinique Rétine a 2 b c 200 µm 200 µm 200 µm 200 µm 200 µm 200 µm 200 µm 200 µm 1 a a b b 3 4 200 µm Références bibliographiques 1. Palanker D, Blumenkranz MS. Panretinal photocoagulation for proliferative diabetic retino­pathy. Am J Ophthalmol 2012;153(4):780-1. 2. Early vitrectomy for severe vitreous hemorrhage in diabetic retinopathy. Four-year results of a randomized trial: Diabetic Retinopathy Vitrectomy Study report 5. Arch Ophthalmol 1990;108(7):958-64. 3. Hornan D, Edmeades N, Krishnan R, Khan J, Lochhead J. Use of pegaptanib for recurrent and nonclearing vitreous haemorrhage in proliferative diabetic retinopathy. Eye (Lond) 2010; 24(8):1315-9. Images en Ophtalmologie • Vol. VI • no 2 • avril-mai-juin 2012 51