Quoi de neuf D en imagerie ?

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2001-2003
Quoi de neuf
en imagerie ?
● R. Gilles*, E. Netter** (* Polyclinique de Bordeaux Nord-Aquitaine. ** Centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy)
ans le domaine de l’imagerie, il est logique de penser
que les nouveautés sont toutes issues de progrès technologiques. Pourtant, le dépistage organisé des cancers
du sein par la mammographie, technique dite “ancienne” car analogique, a profondément bouleversé la communauté médicale en substituant une action de santé publique à une relation individuelle. Bien
entendu, ces dernières décennies ont vu l’apparition de nouvelles
techniques telles que la sénologie interventionnelle, voire de nou-
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veautés technologiques telles que l’imagerie par résonance magnétique et la mammographie numérique. Cependant, toutes n’ont pas
profondément modifié le diagnostic et la prise en charge de la pathologie mammaire. La sénologie interventionnelle a eu un impact tout
particulier, car elle a modifié le rôle et la place des radiologues dans
la communauté médicale. L’imagerie par résonance magnétique et
la mammographie numérique n’ont pas encore bouleversé le diagnostic et la prise en charge de la pathologie mammaire.
Le dépistage du cancer du sein
Le dépistage organisé des cancers du sein est un thème médicosocial qui a suscité discours, promesses politiques, polémiques et
discussions passionnées. Ces débats ont été enflammés, car ils
concernent, d’une part, une communauté médicale hétéroclite et,
d’autre part, de nombreux intervenants sociaux tout aussi disparates. Les femmes, pourtant actrices les plus concernées, s’expriment peu sur le sujet. Mal informées, elles sont parfois induites en
erreur par des prises de position médiatisées ou des campagnes de
promotion tendancieuses.
Pourtant, la thématique paraît relativement simple : avec plus de
10 000 morts par an en France, le cancer du sein est non seulement
un problème de santé publique, mais aussi un excellent modèle de
dépistage. Il est difficile, pour une communauté médicale en mutation, d’accepter une action de santé publique. À une relation individuelle, base de la pratique médicale, se substitue la participation
à une action collective, à laquelle il faut adhérer en acceptant de
perdre son libre arbitre. Cette action implique une intégration de
données économiques et épidémiologiques que la majorité des
acteurs de santé n’ont apprises ni sur les bancs de la faculté ni lors
des actions de formation continue. Cela est d’autant plus difficile
que les interlocuteurs de ces acteurs de santé sont des représentants
des autorités de tutelle, elles aussi en pleine mutation, qui imposent leur réflexion de maîtrise des coûts à la médecine aussi bien
de ville qu’hospitalière. Ce carcan économique n’est pas le seul
responsable des retards pris dans ce domaine. Les différents acteurs
médicaux ont bien fait état de leurs dissensions. On peut rappeler
quelques polémiques, certaines éteintes, telles que l’utilité même
du dépistage, le nombre d’incidences et la périodicité des contrôles,
d’autres encore vivaces, telles que le problème du dépistage entre
40 et 50 ans et la possibilité de cohabitation du dépistage organisé
et du dépistage sur prescription individuelle.
Malgré ces difficultés intrinsèques, des campagnes de dépistage
organisé se sont mises en place dans plusieurs pays d’Europe et sont
actuellement en cours de généralisation en France.
La sénologie interventionnelle
Les techniques de prélèvement guidées par l’imagerie (mammographie, échographie) ont acquis une place prépondérante dans la prise
en charge diagnostique des lésions infracliniques. Cette évolution très
rapide des matériels et donc de ces techniques s’est faite par étapes,
et a été grandement facilitée par la mise en place des campagnes de
dépistage du cancer du sein.
Avant 1990, le diagnostic des anomalies infracliniques découvertes
sur un examen mammographique et/ou échographique est effectué
par ce qu’il convient d’appeler la biopsie chirurgicale diagnostique.
En 1990, Parker, jeune radiologue interventionnel, transpose la
La Lettre du Sénologue - n° 19 - janvier/février/mars 2003
technique des prélèvements guidés par l’imagerie de la prostate à
la pathologie mammaire et publie ses premiers résultats. Dans les
années qui suivent, de nombreux travaux précisent ces différentes
techniques et leurs résultats, qui diffèrent en fonction de l’image
radiologique. Pour les masses non palpables, les techniques stéréotaxiques ou échographiques sont équivalentes, avec une sensibilité de 99 % et une spécificité de 100 %. Pour le diagnostic des
foyers de microcalcifications, les résultats ne sont pas excellents,
avec une sensibilité de 90 %. À partir de 1997, le développement
de la macrobiopsie assistée par l’aspiration (large core vacuum
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assisted biopsy des Anglo-Saxons) fait profondément évoluer le
diagnostic des foyers de microcalcifications, avec une sensibilité et
une spécificité de l’ordre de 100 %, en tous points comparables à
celles de la biopsie chirurgicale après repérage radiologique.
Cette évolution, parfaitement intégrée par les recommandations de
l’ANAES, est actuellement freinée par les contraintes budgétaires
générées par nos autorités de tutelle : “Lorsque le degré de suspicion
de l’image fait recommander une vérification histologique, celle-ci
doit être, à chaque fois que cela est possible, réalisée par voie percutanée”.
L’imagerie par résonance magnétique
Cette nouveauté technologique qu’est l’imagerie par résonance
magnétique (IRM) du sein a connu ses premiers développements au
travers des publications des Drs Heywang et Kaiser en 1985. L’intérêt majeur en est l’étude morphologique, mais surtout l’approche physiopathologique tissulaire des tumeurs du sein par le biais de leur vascularisation.
L’IRM est une technique d’imagerie non traumatisante et non irradiante. L’interprétation repose sur deux approches diagnostiques complémentaires que sont l’étude cinétique et morphologique des lésions
prenant le contraste après injection de gadolinium. L’absence de prise
de contraste après injection de gadolinium permet d’exclure toute suspicion de lésion invasive, puisque l’IRM du sein possède une excellente valeur prédictive négative. En présence d’une prise de contraste,
l’analyse morphologique et cinétique permet de classer les lésions en
fonction de leur valeur prédictive positive. En raison de son excellente
sensibilité, elle suffit à exclure avec une grande fiabilité toute suspicion de cancer du sein soulevée par la clinique ou l’imagerie.
Actuellement, l’IRM est un examen réservé aux situations diagnostiques difficiles, essentiellement chez des patientes atteintes
d’un cancer du sein, et notamment en cas de suspicion de récidive locale, d’évaluation d’une chimiothérapie néoadjuvante, de
diagnostic d’une adénopathie axillaire isolée. D’autres indications, qui se développent dans les différents pays européens
ainsi qu’aux États-Unis, sont le bilan préopératoire d’un cancer
du sein et le dépistage des femmes à haut risque de cancer du
sein. En France, le recours à cette méthode diagnostique est
freiné par le nombre insuffisant d’équipements autorisés et, par
voie de conséquence, d’équipes rompues à cette technique.
La mammographie numérisée
Depuis dix ans, la transition vers la mammographie numérique est
régulièrement annoncée. La mise sur le marché du premier mammographe numérique a fait l’objet de nombreuses controverses en raison
d’une médiatisation plus commerciale que médicale et de performances considérées comme équivalentes à celles de la mammographie analogique. Il est d’ailleurs assez surprenant de constater qu’aux
États-Unis des recommandations ont été publiées afin de rassurer les
femmes ayant eu un examen avec ce type d’appareils, alors qu’en
France c’est exactement le contraire qui s’est passé. Ces controverses
ont conduit à l’absence d’agrément dans le cadre des campagnes natio-
CONCLUSION
Paradoxalement, les principales évolutions dans le domaine de
l’imagerie mammaire sont plutôt dues à des modifications et
à l’adaptation de techniques existantes. Les campagnes de
dépistage du cancer du sein et, surtout, la sénologie interventionnelle ont profondément modifié la place des différents
intervenants dans le diagnostic en pathologie mammaire. Cette
prise en charge plus complexe, car diversifiée, nécessite une
coopération clinique, chirurgicale, radiologique et anatomopathologique. La nécessité d’une spécialisation en sénologie
est de plus en plus évidente, mais celle-ci ne pourra se développer que dans le cadre d’équipes pluridisciplinaires.
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nales de dépistage. Actuellement, les nouveaux appareils possèdent
des caractéristiques techniques plus performantes et permettent l’élaboration de protocoles de contrôle de qualité. Cependant, l’interprétation de ces images numériques est différente et nécessite, comme toute
nouvelle technologie, un temps d’apprentissage.
Actuellement, l’intérêt de ces mammographes numériques réside principalement dans le développement de systèmes d’aide informatisée au
diagnostic, dans la réduction des coûts grâce à la suppression des film,
dans l’amélioration du stockage et la transmission des données plutôt
que dans l’amélioration de la détection des cancers du sein.
Congrès 2003
en imagerie
SOFMIS
Luxembourg, 23-24 mai 2003
Dépistage et diagnostic précoce :
apport du numérique
http://www.sofmis.lu
Société Française de radiologie
Paris, 18-22 octobre 2003
RSNA
Chicago, 30 novembre-5 décembre 2003
La Lettre du Sénologue - n° 19 - janvier/février/mars 2003
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