DOSSIER THÉMATIQUE La vie après le cancer Après le traitement : reprendre le cours normal de sa vie After treatment, back to the normal social life… M. Cousin 1 L’ un des principaux points du retour à la vie passe par le domaine social. La reprise de son emploi, ou d’un emploi, la reprise de projets d’investissements, mobiliers ou immobiliers, la poursuite des soins de surveillance et la couverture sociale, sont autant de questions que les patients sont amenés à se poser après le traitement de leur maladie. La lourdeur des démarches administratives, alors que la fatigue et les troubles cognitifs sont à leur maximum, font de cette phase de réinsertion sociale une période douloureuse et parfois insurmontable pour certains patients. Les services sociaux sont là pour aider soignants, malades et proches. Voici quelques réponses pour guider le praticien dans son accompagnement. Emploi 1 Assistante sociale, Paris. Si son état de santé permet au patient, après un arrêt maladie – souvent de longue durée –, de reprendre son activité professionnelle, il est important que cela se passe dans les meilleures conditions Pour cela, il ne faut pas hésiter, lorsque le traitement est terminé et que la fin de l’arrêt maladie est programmée, à contacter l’employeur afin de demander à passer la visite de pré-reprise auprès du service médical de l’entreprise. Un bilan sera établi avec le médecin du travail afin d’évaluer les capacités à exercer l’emploi après l’épreuve de la maladie, ou la nécessité d’un reclassement professionnel. Si la reprise à plein temps, immédiate et dans les mêmes conditions n’est pas possible, d’autres solutions peuvent être envisagées : ➤➤ Soit reprendre durant quelques mois en mi-temps thérapeutique, après négociation et accord du 200 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 3 - mars 2010 médecin de la Sécurité sociale et de l’employeur, cela permettant une évolution en douceur vers une reprise à temps complet. Si la formule d’un mi-temps paraît mal adaptée à l’état de santé du patient, une pension d’invalidité catégorie 1 peut s’y substituer. Cette pension peut d’ailleurs être notifiée sur décision du médecin de la Sécurité sociale dès la fin de l’arrêt maladie. ➤➤ Soit prévoir un aménagement des horaires de travail ou une adaptation du poste de travail. Dans chaque département, il existe un SAMETH (Service d’appui au maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés), qui œuvre avec l’AGEFIP (Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées) pour prévenir le plus en amont possible tout risque de licenciement pour des raisons d’inaptitude ou d’aggravation de l’état de santé. L’AGEFIP aide au financement des formations et adaptations au poste de travail. Une rencontre avec cet organisme est toujours possible lorsque le temps de la reprise de l’activité se précise. Dans tous les cas, il semble aussi conseillé de prendre contact avec la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH). En effet, seul cet organisme dépendant du ministère des Affaires sociales et du travail est habilité à accorder une Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), notification qui permet l’accès au secteur réservé par la loi aux travailleurs handicapés. Chaque entreprise de plus de 20 salariés a l’obligation d’avoir un quota de 6 % de travailleurs handicapés. L’ancien malade pourra alors poursuivre son activité au sein de l’entreprise, avec des aménagements et un soutien financier. Cette notification est aussi nécessaire pour obtenir les financements de l’AGEFIP. Résumé L’un des principaux points du retour à la vie passe par le domaine social. La reprise de son emploi, ou d’un emploi, la reprise de projets d’investissements, mobiliers ou immobiliers, la poursuite des soins de surveillance et la couverture sociale, sont autant de questions que les patients sont amenés à se poser après le traitement de leur maladie. Mots-clés Service social Travail Invalidité Cancer Si l’état de santé ne permet plus l’exercice de la profession antérieure, la MDPH peut accompagner la personne dans le processus du reclassement professionnel, toujours sur proposition du médecin de la Sécurité sociale et à l’issue d’une période d’entretiens et d’examens psycho-techniques, afin de notifier un accord pour reclassement dans les meilleures conditions. C’est souvent une heureuse solution pour un retour à l’emploi adapté, mais le processus est long et requiert une solide motivation. C’est aussi la MDPH qui décide de l’attribution de l’allocation adulte handicapé à la personne, à la suite de sa maladie, lorsqu’elle est dans l’incapacité de travailler en raison de son état de santé et n’a pas une ouverture de droits à la Sécurité sociale afin de bénéficier des prestations légales. Une carte d’invalidité peut également être demandée à la MDPH. Cette carte d’invalidité, avec un taux d’incapacité supérieur à 80 %, confère au patient un avantage fiscal (possibilité d’ajouter une demi-part sur sa déclaration de revenus). Si, malheureusement, durant la période de l’arrêt maladie, un licenciement est intervenu, il est indispensable de prendre contact avec le Pôle emploi, dès la fin de cet arrêt, afin de percevoir les allocations Assedic. Les personnes bénéficiant d’une pension d’invalidité de catégorie 1 auront droit aux allocations dans les mêmes conditions que les autres, en complément de leur pension. La mesure est la même en cas d’invalidité de catégorie 2. En effet, s’il y a eu licenciement durant l’arrêt maladie, il est possible sous certaines conditions de percevoir ces allocations, qui seront alors servies partiellement. Lorsqu’une personne se présente au Pôle emploi avec une notification RQTH, elle est orientée vers un service spécifique pour une recherche dans le secteur réservé. Invalidité Si l’état de santé ne permet pas la reprise de l’activité professionnelle, le médecin de la Sécurité sociale peut proposer, après un certain temps d’arrêt, le passage en invalidité. Cette mesure est effective lorsque le praticien estime que l’état du patient est stabilisé. Elle ouvre le droit à des pensions. ➤➤ Pension de catégorie 1 : possibilité de travailler à mi-temps ; le montant de la pension étant égal à 30 % du salaire de base (plafonné) des dix meilleures années de travail. ➤➤ Pension de catégorie 2 : la personne ne peut plus travailler ; la pension accordée correspond à 50 % du salaire de base des dix meilleures années de travail. À cela s’ajoutent généralement le complément des caisses de prévoyance ou, éventuellement, des aides sociales sous certaines conditions (allocation supplémentaire invalidité). ➤➤ Pension de catégorie 3 : pour les personnes ne pouvant plus travailler et ayant besoin de l’aide d’une tierce personne pour effectuer les actes quotidiens de la vie. Le montant est celui de la pension de catégorie 2 assorti d’un forfait tierce personne, actuellement de 1 029,10 €, non imposable. Highlights One of the main points of return in the life passes by the social domain. The resumption of its employment, or an employment, the resumption of projects of investments, movable or real estate, the pursuit of the care of survey and the social coverage, are so many questions as are brought to arise the patients after the treatment of their disease. Keywords Social care Work Cancer Démarches administratives Il est toujours utile de vérifier auprès de son centre de Sécurité sociale que son dossier est en ordre, à savoir : ➤➤ que l’exonération du ticket modérateur pour longue maladie parte bien de la date du jour où le diagnostic a été établi ; ➤➤ que tous les soins en rapport avec la maladie exonérante ont été remboursés à 100 % ; ➤➤ que les informations concernant l’ALD (Affection de longue durée), ainsi que celles sur la pension d’invalidité sont bien indiquées sur la carte Vitale. Lorsque la fin de l’arrêt maladie se situe au moment du soixantième anniversaire, il est possible de demander une mise en retraite pour inaptitude au travail. L’inaptitude est jugée par le médecin de la Sécurité sociale. Le fait d’être reconnu inapte entraîne immédiatement l’attribution d’une retraite à taux plein (même si le nombre de trimestres cotisés est inférieur à celui exigé par les accords en cours pour les personnes valides). D’autre part, il faut savoir que toute décision de la caisse de Sécurité sociale peut être contestée. Il faudra alors être patient, car les délais d’instruction des dossiers sont très longs. La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 3 - mars 2010 | 201 DOSSIER THÉMATIQUE La vie après le cancer Après le traitement : reprendre le cours normal de sa vie Vie pratique Mutuelles Bien que le cancer entraîne une prise en charge à 100 % des soins et médicaments, il est vivement conseillé de garder sa mutuelle ou, si les ressources sont modestes, de faire auprès du centre de Sécurité sociale la demande de CMU complémentaire. En effet, le forfait journalier facturé par l’hôpital ou le centre de soins n’est pas remboursé par la Sécurité sociale. Par ailleurs, certains dépassements tels que le forfait “chambre seule” ou “lit d’accompagnant” n’entrent pas non plus dans la prise en charge de la Sécurité sociale. Quelques mutuelles prennent en compte ce type de dépense, qu’il est important de connaître avant de prendre certaines orientations. Compléments aux indemnités journalières et à la pension d’invalidité En règle générale, tout salarié cotise à une caisse de prévoyance. Lors de l’arrêt maladie (sauf en cas de subrogation, c’est-à-dire lorsque le salarié perçoit son salaire intégralement et que les indemnités sont servies à l’employeur), l’organisme de prévoyance complète les indemnités journalières selon un taux propre à chaque organisme et sur présentation des décomptes de la Sécurité sociale. Lorsqu’il y a attribution d’une pension d’invalidité, les organismes de prévoyance complètent la pension de catégorie 2. En effet, les personnes ayant une pension de catégorie 1 reçoivent un salaire à temps partiel en complément, ou encore les allocations de l’Assedic. Il est important de savoir que les personnes licenciées quelque temps avant de tomber malade, même si elles ont cotisé pendant de longues années, perdent, hélas, le bénéfice de ce complément. Relation avec le service des impôts Les indemnités journalières perçues lors d’un arrêt maladie pour cancer ne sont pas soumises à déclaration au service des impôts. Si la Sécurité sociale n’envoie aucun décompte au patient, c’est qu’il n’y a rien à déclarer. Bien souvent, par peur, les personnes calculent le montant de leurs indemnités et l’indiquent sur leur déclaration de revenus, s’exposant ainsi à une imposition injustifiée. Celle-ci est toutefois récupérable, même sur 3 années, en présentant 202 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 3 - mars 2010 au service des impôts une attestation de la Sécurité sociale indiquant la nature de ces indemnités. En ce qui concerne la pension d’invalidité, elle est à déclarer et peut être imposable. Relation avec les services bancaires Depuis la loi du 31 janvier 2007 relative à l’accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé, et instituant une convention nationale (convention AREAS [S’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé]), il devrait y avoir une facilitation de l’accès aux prêts et de leur assurance pour les personnes présentant un risque en raison de leur état de santé. Les prêts à la consommation, dans la limite d’un plafond de 15 000 euros et avec une durée de remboursement inférieure à 4 ans, sont envisageables sans avoir à remplir préalablement un questionnaire de santé. Il est donc possible de souscrire cet emprunt sans mentionner ses antécédents néoplasiques, à condition d’être âgé de moins de 50 ans. En ce qui concerne les prêts immobiliers ou les prêts professionnels, importants pour la réinsertion professionnelle des anciens malades, la convention AERAS permet de souscrire un emprunt plafonné à 300 000 euros pour les moins de 70 ans. Le coût de l’assurance est plafonné pour l’acquisition de la résidence principale et les prêts professionnels. Les assurances couvrent, dans le cadre de cette convention, les risques de décès, d’invalidité totale temporaire ou permanente, et la perte totale et irréversible de l’autonomie. Il est par la suite possible de faire appel à une commission de médiation (de la convention AERAS - 61, rue Taibout - 75009 Paris), en cas de désaccord sur les termes du contrat d’assurance. L’association “Vivre avec” a largement participé aux discussions menées autour de cette convention et constitue un recours utile et aidant pour les malades (www.vivreavec.org). Aides financières Après évaluation, le fonds d’action sociale de la Caisse primaire d’assurance maladie peut attribuer différentes aides à ses assurés qui se retrouvent dans une situation difficile sur le plan financier. Cela peut être une aide alimentaire à la suite d’une diminution importante des revenus, ou une aide DOSSIER THÉMATIQUE relais, afin de pallier les délais d’obtention, souvent trop longs, des prestations légales. Il peut encore s’agir d’un financement pour une participation à l’intervention du service de maintien à domicile (prise en charge d’heures d’aide ménagère, de portage de repas) ou d’une aide pour l’achat de prothèses ou de matériel médical peu remboursé. La Ligue contre le cancer peut aussi être sollicitée sur ces mêmes sujets. Face à la complexité de toutes ces informations, afin de ne pas se perdre dans ce qui peut paraître un dédale administratif et d’accéder à la solution la mieux adaptée à la situation de chacun, il est vivement conseillé de ne pas rester seul avec ses problèmes et ses interrogations. Pour cela, des associations et services sociaux compétents existent, notamment le service social spécialisé de la Caisse régionale d’assurance maladie. Ce service met à la disposition des malades des travailleurs sociaux, qui sauront être à l’écoute, afin de les informer et de les accompagner durant tout le temps nécessaire à la restauration de la situation. Il organise aussi très régulièrement des séances collectives d’information sur l’arrêt longue maladie, o t r e i n f o m é d i c■a l e l’invalidité et autresV thèmes. edimarksanté Adresses utiles ● ● ● ● ● ● Institut national du cancer ; Cancer info service : plateforme d’information pour les malades et les proches 0810 810 821 – www.e-cancer.fr Assurance maladie www.ameli.fr Convention Aéras www.lesclesdelabanque.com – www.aeras-infos.fr Association Vivre avec www.vivreavec.org Ligne nationale contre le cancer www.ligue-cancer.net Adresse utile à Paris Service social de la CRAMIF 17-19, avenue de Flandre - 75954 Paris Cedex 19 www.cramif.fr Tél. : 01 40 05 32 64 edimark U n a u t re re g a rd sur v otre spécialité Un autre regard sur votre spécialité Retrouvez en vidéo les actualités de votre spécialité sur www.edimark.tv Vous pourrez à tout instant télécharger nos reportages en podcast et poster vos commentaires et vos questions à nos experts. 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