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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 4, juillet-août 2007
Brèves…
Brèves…
Chirurgie de l’obésité
et espérance de vie
La chirurgie de l’obésité morbide
comporte trois méthodes essentielles :
la pose d’un anneau gastrique (le
gastric banding), la gastroplastie verti-
cale calibrée et le bypass gastrique. Les
deux premières méthodes réduisent
le volume de la poche gastrique soit
par anneau ajustable, soit par pose
d’agrafes. La troisième court-circuite la
partie initiale du grêle. Réalisées par des
mains expertes, sur la base d’indications
précises, posées après une évaluation
polydisciplinaire (endocrino-chirurgico-
psychologique), ces interventions s’as-
socient à un taux de mortalité évalué de
0,1 à 2 % selon les séries publiées. Les
gains post-chirurgicaux sont manifestes
sur les plans pondéral, tensionnel, venti-
latoire et métabolique. La palme de l’ef-
ficacité revient au bypass gastrique. Dix
ans après la réalisation de l’intervention,
la perte moyenne de poids est d’environ
15 % avec les premières méthodes et
25 % avec la troisième. Après ces inter-
ventions, les chiffres de pression arté-
rielle sont améliorés chez 2 patients sur 3,
les troubles métaboliques et le syndrome
d’apnées du sommeil dans 80 à 90 % des
cas (1, 2). Par ailleurs, la qualité de vie
est significativement améliorée (3). Il
restait à montrer de façon objective si, à
ces améliorations des facteurs de risque
vasculaire, s’associait une réduction de
la mortalité. En effet, les études observa-
tionnelles publiées antérieurement indi-
quaient une augmentation des décès de
cause cardiovasculaire (4), résultat para-
doxal compte tenu des effets bénéfiques
sur des facteurs de risque de premier
plan. Deux études (5, 6) qui viennent
d’être publiées apportent une réponse à
cette question. La chirurgie bariatrique
(2 010 patients pour l’étude suédoise et
près de 10 000 pour l’étude américaine)
réduit de 25 % en moyenne le risque de
décès, ce qui est tout à fait significatif
par rapport à une population contrôle
(respectivement, 2 037 et 9 628 pour
chacune des deux études) dont l’obésité
est traitée par des méthodes convention-
nelles. Les deux principales causes de
décès dans cette population, qui restent
l’infarctus myocardique et le cancer, sont
très clairement moins fréquentes dans le
groupe de patients opérés. Seules les
causes de décès non liées à la maladie
apparaissent plus fréquentes chez les
patients traités par chirurgie bariatrique,
sans qu’il y ait d’explication précise à ce
constat. Globalement, les deux études
sont convergentes pour conclure qu’à
l’amélioration des facteurs de risque
vasculaire s’associe une réduction
significative du risque de décès après
traitement de l’obésité morbide par une
approche chirurgicale. Ces résultats sont
importants, car ils démontrent les bien-
faits de cette approche sur une survie qui,
chez le patient gravement obèse, peut
être réduite de 5 à 20 ans en l’absence de
contrôle efficace du surpoids (7).
JMK
Sjöström L et al. N Engl J Med 2004;351:2683-93.
De Maria EJ. N Engl J Med 2007;356:2176-83.
Folope V et al. Eur J Clin Nutr 2007 (sous presse).
Pamuk ER et al. Ann Intern Med 1993;119:744-8.
Sjöström L et al. N Engl J Med 2007;357:741-52.
Adams T et al. N Engl J Med 2007;357:753-61.
Fontaine KR et al. JAMA 2003;289:187-93.
Hyperthyroïdie, radio-iode
et décès
L’iode radioactif (131I) constitue l’un
des moyens thérapeutiques de l’hyper-
thyroïdie. Il est même utilisé en traite-
ment de première ligne dans les pays
anglo-saxons. Si l’administration d’une
dose thérapeutique de 131I permet de
résoudre le problème de l’hyperthyroïdie,
son innocuité n’apparaît pas certaine.
Par exemple, il a été montré qu’en fonc-
tion de la dose cumulée reçue, certains
patients traités par 131I en complément
d’un traitement chirurgical pour carci-
nome différencié de la thyroïde pouvaient
développer des lésions malignes secon-
daires (notamment coliques) [1]. Les
doses utilisées pour traiter l’hyperthy-
roïdie sont cependant très inférieures à
celles employées dans un but anticarci-
nologique. Le risque de répercussions à
long terme de ce traitement en est-il de
ce fait totalement écarté ? C’est à cette
question qu’une équipe finlandaise (2)
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
répond sur un sujet où les études anté-
rieurement réalisées donnaient des résul-
tats contradictoires (3, 4). Une cohorte
d’environ 3 000 patients traités par 131I
pour hyperthyroïdie a été comparée à
une cohorte de témoins euthyroïdiens
appariés pour l’âge et le sexe. Le recul
pour les patients les plus anciennement
traités est de 37 ans. Le risque de décès
par maladie cardiovasculaire ou par
carcinome digestif est significativement
supérieur dans le groupe traité par radio-
iode à celui relevé dans le groupe témoin.
Il est deux fois et demi supérieur pour le
cancer gastro-intestinal et deux fois plus
élevé pour les causes cardiovasculaires ou
respiratoires. L’analyse des nombreuses
données de cette étude fait ressortir que
les décès de cause cérébrovasculaire sont
vraisemblablement imputables à l’hy-
perthyroïdie elle-même (qu’elle qu’en
soit la cause) et non pas au traitement
par radio-iode. À l’inverse, il paraît plau-
sible que le traitement par 131I soit l’un
des facteurs intervenant dans la survenue
plus fréquente de carcinomes digestifs,
notamment gastriques. Ces résultats
doivent-ils faire remettre en cause les
possibilités de traitement de l’hyperthy-
roïdie par iode radio-actif ? La réponse
est doublement négative, à la fois parce
que l’exception culturelle française nous
amène à utiliser ce procédé thérapeutique
avec beaucoup plus de parcimonie que
nos confrères anglo-saxons et parce que
les doses d’iode radio-actif administrées
pour le traitement de l’hyperthyroïdie
sont de fait modestes. L’enseignement
essentiel de cette étude est que, s’il est
bien évident qu’il faut traiter l’hyperthy-
roïdie dès que possible, l’emploi d’un
traitement curatif par 131I implique une
surveillance à long terme à la fois pour
s’assurer du maintien en euthyroïdie et
être attentifs aux risques particuliers de
surmortalité modérée, mais sans doute
bien réelle, de cette population.
JMK
Rubino C et al. Br J Cancer 2003;89:1638-44.
Metso S et al. J Clin Endocrinol Metab
2007;92:2190-6.
Hall P et al. Acta Endocrinol 1993;128:230.
Franklyn JA et al. Lancet 1999;353:2111-5.
1.
2.
3.
4.