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La Lettre de l’Infectiologue - Tome XV - n° 2 - février 2000
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a grippe est un problème de santé publique. Il
existe, à côté des grippes épidémiques saison-
nières, un risque de pandémie. Cette pandémie tient
essentiellement à la variabilité du virus. En effet,
l’analyse des virus montre deux phénomènes : le
phénomène de dérive, correspondant à une modifi-
cation progressive, mutation après mutation, du virus
au fil des épidémies saisonnières (1, 2, 3), et le phé-
nomène de cassure, connu uniquement pour le
virus A correspondant à la transmission d’une nou-
velle souche entre espèces. En effet, l’infection
humaine est possible avec un virus aviaire
(1997 : AH5N1, 1999 : AH9N2). À partir du réservoir
aviaire, il peut y avoir transmission à un hôte inter-
médiaire (le porc) et réassortiment chez ce dernier. Il
peut également y avoir une transmission directe à
l’homme avec réassortiment et possibilité de dissé-
mination interhumaine.
Quels sont les problèmes des grippes saisonnières ?
Quels sont les problèmes additionnels des grippes
pandémiques et leurs implications médicales et
sociales ? En un mot, sommes-nous prêts en cas
d’émergence d’une souche grippale pandémique ?
PROBLÈMES ACTUELS DE LA GRIPPE SAISONNIÈRE
La grippe est habituellement non compliquée, de gravité limi-
tée, avec une toux, de la fièvre, des myalgies, mais des com-
plications peuvent être observées (1) : otites, pneumonies
virales ou bactériennes (précoces ou tardives), atteinte cardio-
vasculaire. La gravité est souvent le fait de décompensation de
pathologies associées : asthme, bronchopneumopathies chro-
niques obstructrices, diabète, affection cardiovasculaire, immu-
nodépression dont celle due au VIH ou à des états particuliers
tels que la grossesse. On compte en France 5 000 morts par an
(10 000 parfois), 30 à 50 000 hospitalisations entraînant un coût
supplémentaire considérable. Chez les sujets de plus de 75 ans,
la mortalité dépasse 2 000 par an, surtout avec le virus AH3N2.
En zone tempérée, on observe toute l’année des cas sporadiques
et parfois des bouffées dans les institutions. Bien que les épi-
démies s’observent l’hiver, il y a des variations quant au début
et à la durée du pic, ainsi qu’à la durée d’activité régionale du
virus.
Les problèmes essentiels concernant les épidémies saisonnières
sont la surveillance de ces épidémies, les techniques diagnos-
tiques des infections virales, la couverture vaccinale et les trai-
tements antiviraux, voire les traitements antibiotiques des sur-
infections bactériennes.
La surveillance est-elle bien faite ?
En France, elle est assurée par deux réseaux : les GROG
(Groupes régionaux d’observation de la grippe) et le réseau
Sentinelles©,qui sont deux réseaux complémentaires. Les
GROG détectent essentiellement les épidémies via l’analyse
des souches en circulation. Le réseau est associé, en effet, à
trente-cinq laboratoires hospitaliers et au système de sur-
veillance militaire. Le deuxième rôle de ces GROG consiste en
la sélection des souches pour les centres mondiaux qui intè-
grent les structures européennes (Eiss : douze pays et Euro-
grog : vingt-sept pays). L’analyse virologique permet de défi-
nir quelles sont les proportions de virus A et B et d’identifier
les différents variants (3). Le réseau Sentinelles©est un réseau
télématique sur les maladies transmissibles qui suit sept mala-
dies et intègre pour la grippe l’aspect saisonnier, déclare l’alerte
lorsque le seuil est dépassé d’une semaine et l’épidémie lorsque
l’infection dépasse deux semaines consécutives.
En dépit d’un manque de surveillance au niveau des zones inter-
tropicales, le réseau mondial semble au point pour la détection
et l’identification des virus grippaux.
!Quels objectifs les réseaux peuvent-ils se fixer ?
Réduire le délai de reconnaissance des épidémies et de l’iden-
tification des virus circulants. À cet effet, il faut souligner l’in-
térêt qu’il y aurait à développer des tests unitaires “grand
L
Peut-on dire “autant d’yeux, autant de points de vue” ?
Sans doute pas, mais notre conviction est qu’il y en aura toujours plusieurs
sur les sujets exprimés dans cette rubrique.
Aussi, notre souhait est que, face à un point de vue donné (dans La Lettre), d’autres s’expriment.
À vos plumes !
La grippe en l’an 2000 : sommes-nous prêts ?
!
P. V eyssier
Service de médecine interne,
Centre hospitalier de Compiègne,
60321 Compiègne.
public” à côté des techniques sophistiquées mais utiles que sont
les techniques de biologie moléculaire qui, bien que moins sen-
sibles que la culture, ont l’avantage de donner des résultats plus
rapides.
Délivrer plus rapidement l’information de l’existence d’une
épidémie et certainement œuvrer pour rendre possible la pré-
vision de la dissémination géographique, afin d’organiser la
prévention dans les zones non encore atteintes.
Évaluer l’efficacité vaccinale, c’est-à-dire apprécier le rap-
port entre la prévention et la couverture vaccinale qui est
variable selon les années.
Enfin, déterminer et évaluer les modalités de prise en charge
sur le terrain, et tout particulièrement la place des antiviraux
dans cette prise en charge.
Quels sont les problèmes thérapeutiques ?
La grippe touche surtout les patients âgés avec des antécédents
respiratoires. On connaît les risques d’exacerbation en cas de
mucoviscidoses, d’asthme et de bronchopathies chroniques obs-
tructrices (BPCO) qui s’accompagnent d’une augmentation des
hospitalisations liée à l’âge, mais aussi à l’existence d’antécé-
dents respiratoires. Dix-neuf à 25 % des hospitalisations lors
d’épidémies grippales s’observent chez les BPCO avec augmen-
tation de la mortalité en cas de pathologie cardiovasculaire (4).
Il faut prévenir la grippe sporadique et épidémique par la vac-
cination qui réduit les épisodes respiratoires, les hospitalisa-
tions chez les personnes âgées (1, 2, 3) et les patients ayant une
atteinte respiratoire.
!Qu’en est-il de la prévention par la vaccination ?
Pour l’instant, les efforts se sont concentrés sur l’utilisation de
vaccins inactivés chez les personnes âgées et chez les patients
ayant des facteurs de risque prédisposant à une gravité particu-
lière de la grippe (8, 9, 10, 11, 12). Ainsi, on observe que ce
type de vaccin réduit le risque grippal de 70 à 90 % chez les per-
sonnes âgées de moins de 65 ans et de 30 à 70 % chez les sujets
de plus de 65 ans vivant en ville. Pour les personnes de plus de
65 ans vivant en institution, la vaccination s’accompagne d’une
réduction de 30 à 40 % des complications, de 50 à 60 % des
hospitalisations et de 80 % de la mortalité. Il est également
recommandé de procéder à la vaccination des personnes pou-
vant disséminer le virus, notamment le personnel soignant. Tou-
tefois, en dépit de ces recommandations, il est à noter que la
couverture vaccinale est encore insuffisante, tout particulière-
ment chez les personnes à haut risque et âgées de moins de
65 ans. Il serait, par ailleurs, important d’avoir un vaccin plus
efficace au sens où il produirait une protection plus durable. Une
réponse possible à ce problème pourrait être la fabrication de
vaccins atténués vivants qui, néanmoins, exigent des procédures
de fabrication lourdes (stock d’œufs très important), sont d’un
coût non négligeable (13,14)et peuvent induire des effets secon-
daires. L’idéal serait d’avoir des vaccins adaptés aux souches
circulantes, de fabrication facile, ne dépendant pas de la pro-
duction d’œufs, donnant une immunité plus large et plus durable.
Si un tel vaccin était disponible, il faudrait considérer les pro-
blèmes de stratégie. L’exemple japonais a montré que la vacci-
nation des enfants n’était pas bien suivie et ne limitait pas tout
risque épidémique. On peut proposer de vacciner les forces de
travail, comme cela s’est fait en Russie. Il vaut probablement
mieux vacciner les personnes à risque. Une vaccination plus
large serait à rediscuter si le vaccin était vivant, administré par
voie nasale avec une immunité plus durable, mais il faut souli-
gner qu’en cas de pandémie, a priori, le vaccin n’est pas utile.
Cela pose donc le problème des antiviraux dans le domaine de
la prévention.
!Existe-t-il une place pour les antiviraux en prophylaxie ?
Il est clair que l’amantadine n’est guère utilisée en préventif,
alors qu’elle donne une protection contre la grippe A chez les
patients non vaccinés, et qu’elle peut donner une protection
supplémentaire chez les patients vaccinés dans les institutions
ou dans les établissements où il y a un risque élevé d’infection
durant les bouffées épidémiques (12). À la posologie de 200 mg
pendant 10 jours, l’amantadine peut prévenir dans 70 à 80 %
des cas la maladie chez les sujets jeunes, mais son utilisation
est nécessairement limitée du fait des effets secondaires. Les
inhibiteurs de la neuraminidase, tels que oseltamivir et zana-
mivir, qui sont efficaces dans l’infection expérimentale à virus
grippal et chez l’homme (6,7) sont bien tolérés, mais n’ont reçu
l’agrément dans un certain nombre de pays que pour le traite-
ment curatif de la grippe, et pas encore pour le traitement pro-
phylactique. Il est donc nécessaire de faire des essais dans le
cadre de la prévention, en particulier chez des personnes âgées
intitutionnalisées. Mais il est difficile de dire maintenant si ces
molécules intéressantes pourront limiter les épidémies et la dif-
fusion du virus via une diminution de l’excrétion virale.
Reste aussi à savoir quel est le risque d’apparition de souches
résistantes à ces nouvelles molécules.
Quoi qu’il en soit, ces molécules pourraient avoir des indica-
tions en prophylaxie. Il faut évaluer le rapport coût/bénéfice,
en particulier chez les personnes à risque et les sujets âgés ins-
titutionnalisés. Leur usage dans cette indication sera basé sur
un diagnostic rapide et un suivi des groupes et des individus
exposés. Peut-être sera-t-il utile de discuter l’indication dans
les groupes de personnes utiles à la société par leur métier ou
leur responsabilité. Tout cela reste à apprécier. Il peut être
important en cas d’épidémie de prévoir de compléter l’effica-
cité du vaccin en donnant ces produits à titre prophylactique,
en particulier dans l’attente de l’immunité postvaccinale lors
d’épidémies dans des communautés non vaccinées (personnels
soignants, agents des entreprises publiques, etc.) (3).
!Les traitements curatifs
L’antibiothérapie. Elle ne traite pas la grippe. L’antibiothé-
rapie est là pour traiter les surinfections, fréquentes au cours
de la grippe ; toutefois, il n’existe pas d’argument pour une pro-
phylaxie antibiotique des pneumonies bactériennes faute de
connaître les facteurs de risque de ce type de surinfection.
L’antibiothérapie curative doit avoir des indications claires
puisque lors des épidémies, il n’y a environ que 30 % de
surinfection.
Une enquête portant sur 10 000 patients a montré que 10 %
d’entre eux ont au moins un facteur de risque (antécédents ORL,
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respiratoires, diabète, tabac, alcool), et que 9 % font une sur-
infection. L’infection basse survient avant le dixième jour dans
54 % des cas, tandis que les infections hautes (otites) survien-
nent plutôt après. Le diagnostic des surinfections bronchiques
est clinique, alors que celui des pneumonies nécessite en plus
une radiographie thoracique. Compte tenu des bactéries res-
ponsables des surinfections (Streptococcus pneumoniae, Hae-
mophilus influenzae mais aussi Staphylococcus aureus), on peut
recommander l’abstention d’antibiotiques dans la bronchite
aiguë du sujet sain, un traitement oral dans la surinfection des
BPCO (amoxicilline-acide clavulanique, céfuroxime-axétil,
pristinamycine). Dans les pneumonies, compte tenu du risque
staphylococcique, on peut proposer en milieu hospitalier amoxi-
cilline + acide clavulanique, 3 à 4 g/j en intraveineuse ou céfu-
roxime, 750 mg 2 fois/j. On peut également proposer la pristi-
namycine per os, 3 g/j. Dans les pneumonies, le traitement
est urgent après évaluation des indices de gravité [Score de Fine
(5)]; la décision d’hospitalisation ou du recours aux soins
intensifs peut être envisagée pour traitement antibiotique et
surveillance.
Les antiviraux ont-ils un rôle dans le traitement curatif ?
Pour être actifs, les antiviraux doivent être administrés préco-
cement (pas au-delà de 48 heures après le début des symptômes),
ce qui nécessite bien sûr un diagnostic rapide et des réseaux de
surveillance qui puissent donner l’alerte, afin de permettre un
traitement immédiat, éventuellement de type préemptif.
L’efficacité du traitement sera jugée sur la réduction de la durée
de la maladie et la réduction de l’excrétion du virus. Il y a une
variabilité des souches dans leur sensibilité aux antiviraux. On
connaît l’apparition de souches résistantes. Il est nécessaire de
surveiller de manière régulière les mutations possibles, de déter-
miner les conditions qui favorisent l’émergence des souches
résistantes. Enfin, il est tout à fait important d’apprécier la tolé-
rance à long terme.
Les agents antiviraux comme l’amantadine et la rimantadine, uti-
lisés en curatif à la phase aiguë (200 mg per os pendant 7 jours),
réduisent la durée de la maladie et diminuent l’excrétion du virus.
La rimantadine a moins d’effets secondaires que l’amantadine,
qui a une toxicité neurologique. Cette toxicité impose une réduc-
tion de la posologie chez les personnes âgées. Enfin, il y a 10 à
25 % de souches résistantes. Il existe une résistance croisée entre
les deux molécules. Seule l’amantadine est disponible.
Les inhibiteurs de la neuraminidase, tels que zanamivir et osel-
tamivir, qui, là encore, doivent être administrés très tôt au début
de la maladie, réduisent de 1 à 2,5 jours la fièvre mais aussi les
complications dans 6 % des cas chez les sujets sains et dans
30 % des cas chez les sujets à risque. Il y a peu d’effets secon-
daires avec ces médicaments, à l’exception de bronchospasmes
avec le zanamivir et de troubles digestifs avec l’oseltamivir. Il
est difficile d’affirmer dans l’immédiat qu’ils seront capables
de réduire la survenue des complications graves et de contrôler
la circulation virale, en un mot, de contrôler la grippe. Ces pro-
duits sont plus coûteux que l’amantadine, mais moins toxiques
(3, 6, 7). Il est très probable que les phénomènes de résistance
liés à la consommation de ces médicaments et le coût de ces
derniers limiteront leur utilisation dans les institutions.
ASPECTS PARTICULIERS DE LA PANDÉMIE
La survenue d’une pandémie, probable mais imprévisible,
constitue le véritable “challenge” pour la population, les soi-
gnants, les organismes de santé publique et les responsables
gouvernementaux.
La pandémie aura un impact mondial sur la morbidité et la mor-
talité, avec une évolution planétaire en quelques semaines ou
mois, une épidémiologie atypique (perte du caractère saison-
nier et rôle variable de l’âge dans l’impact de la grippe et de ses
complications). Serons-nous prêts, que pourrons-nous faire ?
Les pandémies du XXesiècle (1918 : AH1N1, 1957 : AH2N2
et 1968 : AH3N2) ont été à l’origine d’une très forte mortalité
(20 millions en 1918 et 10 millions en 1968). Il n’a pas été
observé de dissémination géographique en 1997-98.
Les projections d’une grippe pandémique non vaccinale sont
pour la France de 20 000 à 50 000 morts, 70 à 200 000 hospi-
talisations, 5 à 10 millions de consultations et 8 à 15 millions
de malades.
Sommes-nous prêts ? Les points forts sont la qualité de la sur-
veillance, les vaccins et les antiviraux, la préparation des soi-
gnants et des services d’urgences, la communication et les déci-
sions des autorités gouvernementales.
Surveillance
Au plan national, les réseaux fonctionnent bien avec les méde-
cins généralistes et les pédiatres, les laboratoires hospitaliers
des réseaux et le réseau militaire. Les réseaux européens sont
en place : la reconnaissance des cas, la notification hebdoma-
daire, l’identification des virus sont opérationnelles en routine.
L’articulation avec l’OMS est bonne : en cas d’apparition d’un
nouveau virus (en Asie ?), il sera possible de déceler son arri-
vée (il faudra raccourcir le délai de huit jours de l’annonce
écrite) et de déclencher les mesures “préventives”. Les autori-
tés devront en urgence informer et donner leurs instructions à
la population et aux intervenants sanitaires en fonction des
caractéristiques cliniques de l’épidémie (type des complica-
tions, âge et mortalité), différentes selon les épidémies.
Au niveau européen et aux États-Unis, la surveillance est
satisfaisante, même si, dans certains États, la reconnaissance
du virus, la connaissance de la progression de l’épidémie, les
recueils de morbidité et de mortalité (en France) sont inégaux.
Toutefois, on connaît peu de choses sur la circulation virale en
zone tropicale.
Vaccins
S’agissant d’un virus non vaccinal, il faut, après identification
et obtention d’une souche stable, préparer un vaccin, le pro-
duire en quantité suffisante, le distribuer. Il faut régler le pro-
blème de la distribution nationale ou internationale, essayer
d’obtenir un vaccin avec une seule injection et faire en sorte
que les autorités préparent les textes établissant les populations
prioritaires (police, contrôleurs aériens, personnels des trans-
ports, travailleurs, soignants ?).
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Antiviraux
La place des antiviraux en cas de pandémie reste encore incon-
nue. Aussi est-il nécessaire d’étudier les inhibiteurs de neura-
minidase en période épidémique, en curatif, mais aussi en pro-
phylaxie, chez les sujets à risque, les personnes âgées, les
populations en collectivité, avant de déterminer leur usage en
situation de crise. Faudra-t-il les utiliser seulement en curatif,
en limitant leurs usages aux personnes “indispensables” au
maintien de l’activité sociale et économique, ou pourra-t-on les
utiliser de manière plus large ?
Seront-ils utilisables en prophylaxie, chez quelles populations
pendant la durée de circulation du virus, en sachant qu’il y a
des risques d’effets indésirables et de sélection de souches résis-
tantes (3, 6, 7) ?
Information du public
Elle doit être immédiate et claire, relayée par les médias : type
de l’épidémie, population à risque. Ne pas aller aux urgences
de l’hôpital, utiliser des traitements symptomatiques sans l’as-
pirine, savoir que les antibiotiques ne sont pas utiles au début,
proposer la possible obtention des traitements au long cours
(diabète, hypertension artérielle, etc.) sans consultation, direc-
tement à la pharmacie, expliquer le recours à certains antivi-
raux selon les recommandations officielles, prévoir le recours
à des “non-médecins” pour orienter les patients en assistant les
généralistes.
Information du corps médical
Informer le corps médical en temps réel de l’arrivée de l’épi-
démie et des décisions à prendre (cellule grippe-Internet).
Diffuser le plus tôt possible des ordonnances type (grippe
adulte, grippe enfant) avec les traitements symptomatiques.
Proposer pour validation une fiche médicale type qui pourrait
être utilisée lors de la pandémie (avec les facteurs de risque, les
signes de gravité) pour assurer la continuité des soins entre soi-
gnants de ville et hôpital.
Assurer des formations sur les facteurs de risque reconnus (1),
les signes de gravité imposant l’hospitalisation (rythme respi-
ratoire > 30, trouble de la vigilance, PAS < 90 mmHg, tempé-
rature < 35 °C ou > 40 °C, FC > 125).
Médicaments utilisables
Présenter sur Internet les conditions d’utilisation du vaccin (?),
des antiviraux (?), en précisant les populations prioritaires et
en exposant au jour le jour les modalités de recours aux filières
de soins (aides par infirmière, malades à traiter en ambulatoire,
malades à hospitaliser).
Pour les antibiotiques, exposer avec quelques recommandations
leur intérêt dans les surinfections de BPCO, de l’asthme, leur
urgence dans les pneumonies bactériennes initiales ou secon-
daires, leur inutilité en prophylaxie.
Les filières de soins sont-elles prêtes ? Comment les utiliser ?
Y a-t-il une capacité suffisante en lits, en locaux d’héberge-
ment, pour l’assistance respiratoire ? La capacité des morgues
est-elle suffisante ?
Les plans ORSEC peuvent répondre partiellement à la dispo-
nibilité nationale ; les dispositions départementales et locales
doivent être fixées et des listes alternatives établies – un plan
ORSEC grippe doit être rédigé et évalué.
Les structures d’urgence ne doivent pas être utilisées pour des
consultations mineures et les structures de soins doivent être
classées selon leur niveau technique de prise en charge :
Niveau 1 : surveillance clinique simple avec possibilité de
dépister l’apparition de signes de gravité.
Niveau 2 : oxymétrie de pouls souhaitable. Oxygénothérapie
possible, antibiothérapie parentérale et aérosols.
Niveau 3 : possibilité d’évaluer complètement le patient (gaz
du sang et radio) ainsi que de soins intensifs ou de réanimation.
Aux niveaux 1 et 2, il faut pouvoir réévaluer le patient à J2 pour
décider de la suite.
Il faut pouvoir transformer en niveau 2 tous les lits de jour pour
renforcer les lits d’urgence. Le recours à la filière de soins et
aux traitements doit être possible pour tous les patients.
Le recours aux examens complémentaires doit être restreint.
La radio pulmonaire doit être limitée à la suspicion de pneu-
monie.
Les autorités doivent exprimer clairement les priorités en cas
de pandémie.
Que recommander aux autorités en l’an 2000 ?
"La promotion dès maintenant d’études cliniques sur les béné-
fices de traitements symptomatiques.
"Le développement de l’information sur la lutte contre la trans-
mission virale, la compréhension du rôle de l’antibiothérapie
dans les complications infectieuses de la grippe et son inutilité
en prophylaxie.
"L’amélioration des délais de réponse virologique, avec une
attention particulière portée au test de diagnostic rapide et aux
modalités de prise en charge.
"La création d’un site électronique d’information sur la pan-
démie, qui devrait être testé en période interpandémique, et
d’une fiche type d’observation avec facteurs de risque, risques
de gravité, disponible sur le site, utilisable pour assurer la prise
en charge continue entre généraliste et hôpital. Au plan régio-
nal, l’établissement de la liste des moyens d’accueil avec recom-
mandation aux responsables sanitaires, sur l’utilisation des
filières de soins (ORSEC grippe).
"Le maintien du calendrier vaccinal pour éviter la survenue
d’autres infections. Le vaccin trivalent antigrippal a un intérêt
en limitant la circulation de sous-types de virus A et de virus
B qui peuvent accompagner le nouveau virus, et en assurant
une protection partielle vis-à-vis d’antigènes communs.
"Le développement de la recherche sur un vaccin de produc-
tion rapide, en quantité suffisante et en une injection.
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"Le développement des antiviraux et la mise à disposition de
formes pédiatriques.
"Définir les populations à risque en fonction des données sur
les complications (poumon, cœur, système nerveux central) et
les effets indésirables potentiels des traitements.
"Évaluer le nombre de sujets à risque, déterminer les straté-
gies de prise en charge : bénéfice/risque des antiviraux en cura-
tif et en prophylaxie pour chaque population, modalités de
recours aux filières de soins.
"Évaluer les conséquences sociales et psychologiques des déci-
sions de prise en charge – ou non – des groupes de population.
CONCLUSION
La grippe fait courir une menace permanente, surtout du fait
du risque pandémique. Il faut améliorer la surveillance virolo-
gique dans les zones intertropicales, documenter l’impact inter-
national de la grippe (morbidité, mortalité), diminuer les temps
d’isolement d’une souche vaccinale, augmenter la production
et la disponibilité des vaccins, confirmer l’utilité des antiviraux
en curatif et prophylaxie.
Au plan national, il faut utiliser les données des réseaux et créer
un site télématique officiel d’information et de recommanda-
tions, évaluer les capacités des filières et les tester, discuter l’ex-
tension des indications vaccinales et, si la pandémie survient,
définir les groupes à risque et déterminer les modalités de prise
en charge des populations (traitement, recours aux filières de
soins) en évaluant le retentissement psychologique et social des
recommandations négatives.
L’épidémiologie, la biologie de la grippe pandémique et la limi-
tation des moyens suggèrent qu’elle ne peut être ni prévenue
ni contrôlée, mais une préparation rigoureuse peut en limiter
l’impact. #
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La Lettre de l’Infectiologue - Tome XV - n° 2 - février 2000
53
OINT DE VUE
P
Article de Y. Piémont et coll.
I:
a, b, e ;
II :
b, d, e ;
III :
a, b, c, d, e.
Article de S. Jarraud et coll.
I:
b, e ;
II :
c;
III :
e
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