
cause la notion même du souci du progrès, du
développement. Peut-on dire qu’on est développé
lorsque le mal nous a envahis ? Par mal ici,
j’entends des comportements qui déshumanisent,
qui nous font reculer au lieu d’avancer. Combien
sont-ils, ces filles et fils du Mayo-Kani qui
considèrent leurs semblables comme des ennemis
à abattre à tout prix ? Ils sont nombreux, ceux qui
refusent que les gens émergent dans leurs villages,
que des gens disposent des biens, occupent des
responsabilités importantes à un certain niveau de
la société. On ne peut pas compter ceux qui
disposent des armes mystiques plus dangereuses
que la bombe atomique, des individus prêts à
décréter la mort de telle ou telle personne par
jalousie. Peut-on compter des personnes de
grande valeur qui ont disparu par cette voie
ignoble ? D’autres veulent qu’on ne parle que
d’eux, aussi bien au niveau de leurs familles, de
leurs villages que de leurs régions, faisant alors
tout pour écarter ceux qui aspirent à être comme
eux par quelques moyens que ce soit. Beaucoup
d’élites traditionnelles, d’élites intérieures et
extérieures sont à ranger dans cette catégorie,
faisant comme si elles allaient demeurer éternelles
sur cette terre. Mettons dans ce registre tous ceux
qui refusent que des projets d’intérêt social soient
mis en place dans le Mayo-Kani alors qu’ils en ont
la possibilité, préférant édifier, aux fonds des
villages, des châteaux qui côtoient des habitations
misérables dont les propriétaires, totalement
démunies, vivent dans l’incertitude totale, des
lendemains sans la garantie d’avoir de quoi
manger chaque jour. Ceux qui attendent les
campagnes électorales pour investir des sommes
faramineuses dans le seul but de faire boire et
rendre ivres les villageois, les jeunes gens et
acheter ainsi leurs consciences alors que ces
sommes serviraient à construire des écoles, des
routes, des centres de santé, à établir des certificats
de naissance à beaucoup d’enfants qui n’en ont
pas et ne peuvent convenablement faire l’école,
manquant de fournitures les plus élémentaires,
disposent-ils d’un tout petit esprit de
développement ? N’oublions pas de dénoncer
ceux qui détournent les projets salvateurs destinés
à notre région ou nos villages ou bien sabotent la
bonne marche des comités de développement, soit
en détournant de l’argent, soit en alimentant
expressément des conflits stériles. Nombreuses
sont les élites qui veulent faire croire qu’elles sont
les plus importantes de la région et que sans elles,
rien n’est possible et qu’après eux ce sera un
déluge sans précédent. Sommes-nous développés
quand nous nous bataillons pour des inutilités au
point où nous frisons le ridicule dans une
République qui n’aspire qu’au progrès? Ceux qui
passent leur temps à détruire les infrastructures
de grande importance édifiées dans nos villes à
l’instar du beau lycée de Kaélé, l’Ecole Normale
d’Instituteurs sur la route de Doumrou où il ne
reste plus que des murs, ceux qui détruisent les
forages qui font vivre des milliers de personnes en
enlevant des pièces pour revendre ailleurs, ont-ils
un tout petit sens du mot développement ? Ils
sont incomptables, ceux qui brandissent l’ethnicité
ou l’ethnisme, la famille, le village, la religion à
tout bout de champ, comme si en dehors de leurs
groupes d’appartenance, il n’existe plus que des
animaux, les autres étant relégués au second plan.
Tous ces fils du Mayo-Kani qui ont fait du vin leur
nourriture prioritaire, passant leurs carrières à en
consommer au point d’avoir des problèmes pour
entretenir leurs familles combien de fois investir,
et finir souvent par mourir précocement alors que
disposant des grandes capacités avérées, sont-ils
développés ? Peut-on avancer un chiffre exact de
ceux-là qui en sont soit morts, soit qui ont perdu
leur travail ou humiliant les leurs, parce qu’ivres
tous les jours dans les rues. La liste est longue, car
si on se met à citer toutes ces personnes qui ont ce
genre d’attitudes rétrogrades, tout un livre en
sortirait.
Vu sous l’angle de tout ce qui précède, je
crois que vous conviendrez bien avec moi que la
notion de développement est loin d’être une
réalité dans un tel contexte, un contexte
caractérisé par des comportements qui
témoignent de notre esprit sous-développé. Il faut
qu’on prenne conscience de cet état de choses, de
mauvaises attitudes qui nous aveuglent jusque-là.
On ne peut pas développer tant qu’on n’est pas
développé en soi-même, tant qu’on n’a pas décidé
de se développer. C’est dire qu’il y a un gros défi
qui nous interpelle, filles et fils du Mayo-Kani
sans exception, un défi que chacun doit relever à
son niveau, un défi de conscience. La question à se
poser et qui doit nous guider, c’est celle de se
demander à quelle catégorie appartenons-nous ?
Sous-développés, moins développés ou
développés ? Chacun doit faire cette introspection
profonde et sincère, une remise en cause sans
complaisance pour se situer.
S’il est une chose qu’il ne faudrait pas
La
La La
La lettre du Mayo
lettre du Mayolettre du Mayo
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