Sommaire

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Vol. VIII - N° 6
novembre-décembre 2012
ÉDITORIAL 155
ÉDITORIAL
Corps/psyché : unité, duel et dualité
Body/mind: unity, duel and duality
P. Nuss
TRIBUNE 159
La médecine devient-elle industrielle ?
P. Nuss*
Does medicine become industrial?
A. Grimaldi
* Service de psychiatrie,
hôpital Saint-Antoine,
Paris.
ACTUALITÉS SCIENCES 164
Revue critique de la littérature
Corps/psyché :
unité, duel et
dualité
Coordonné par E. Bacon
MISES AU POINT 168
Greffe de visage : les enjeux psychologiques
Facial graft: the psychological issues
S. Cremades
Approche psychopathologique des patients allogreffés
des mains
Psychopathology of double hand transplantated patients
C. Seulin
LE SYMPTÔME 172
Le symptôme en neuropsychologie
S. Terrien, F. Gierski
ÊTRE ET SAVOIR 178
De l’après-cancer... S’autoriser à…
Psychological experience of after cancer… To allow oneself to…
P. Pinault
VOCABULAIRE 181
Guérisons
A. Rey
EN PLUS …
✥ Petites annonces I 167, 180
✥ Agenda I 180
abonnez-vous… page 183
Les articles publiés dans La Lettre du Psychiatre le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs.
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays.
© mars 2005 - EDIMARK SAS - Dépôt légal : à parution.
Imprimé en France - Axiom Graphic SAS - 95830 Cormeilles-en-Vexin
Un supplément “Actualités à l’ISAM” du Courrier des Addictions (8 pages) est routé avec ce numéro.
Body/mind: unity,
duel and duality
“
L
es liens tissés au fil de l’existence entre la construction
psychologique et celle
du corps sont intimes, complexes
et parfois paradoxaux. Qu’il s’agisse
de l’identité psychique, du schéma
corporel, du rapport à l’altérité
ou des enjeux sociétaux du corps,
des influences réciproques
s’établissent entre le corps et l’esprit,
vivifiant et dynamisant un incessant
travail d’intégration afin de conduire
à un sentiment d’unité de soi.
La survenue d’une pathologie, qu’elle
soit physique ou mentale, déstabilise
l’équilibre dynamique préalable
de ces liens dialectiques entre corpsobjet et corps-sujet, corps singulier
et corps social, obligeant à un travail
psychologique parfois difficile,
toujours important.
Observateur de son corps souffrant et prisonnier de ce dernier,
le sujet malade doit aussi entamer
La Lettre du Psychiatre • Vol. VIII - no 6 - novembre-décembre 2012 | 155
ÉDITORIAL
Corps/
psyché :
unité, duel
et dualité
Body/mind:
unity, duel
and duality
P. Nuss*
* Service de psychiatrie,
hôpital Saint-Antoine,
Paris.
un dialogue avec lui-même afin d’ajuster ses représentations préalables aux
nouveaux enjeux imposés par la maladie. S’adressant à lui-même, le sujet active
alors des compétences relationnelles du même ordre que celles qu’il utilise dans le
rapport à l’autre. On conçoit que, en cas de difficultés relationnelles interpersonnelles préexistantes, le sujet malade ait des difficultés à s’adresser à son propre
corps. On assiste ainsi, dans de telles situations, à des retards de prise en charge
ou à un déni partiel ou total des troubles. Les compétences du patient dans le lien
à l’autre sont donc mises en jeu au cours de son travail d’ajustement personnel lié
à l’émergence d’une maladie ; mais elles concernent aussi sa capacité à demander
de l’aide. Cette fonction relationnelle adressée à son corps comme
à un autre soi-même se nourrit aussi des représentations sociales du corps,
représentations idéalisées collectives du corps et de son apparence au sein du
groupe social. Quoi qu’il en soit, et à l’évidence, des difficultés rencontrées par
nos patients dans leur développement, qu’il s’agisse des expériences corporelles
précoces négatives ou de difficultés dans les apprentissages affectifs et relationnels, ont un impact négatif en termes de capacité d’ajustement à la maladie.
Les enjeux sociétaux vis-à-vis du corps dans son rapport à l’identité ont
beaucoup changé au cours de ces dernières décennies. En effet, du statut classique de corps indisponible, quasi “prêté” lors de l’existence terrestre pour abriter
l’âme, le corps contemporain est devenu un territoire de propriété individuelle,
susceptible d’être vendu, prêté et dont on serait “en droit” d’exiger qu’il soit réparé
et modifié afin qu’il s’ajustât aux désirs et à la psychologie de son “propriétaire”.
De ce fait, le rapport du sujet malade au soignant, qui va traiter ou modifier son
corps, s’apparente de plus en plus à celui d’un individu en lien avec un prestataire
de service, prestataire duquel il attend non seulement une prouesse technique
mais aussi qu’il soit celui par lequel l’accomplissement identitaire devienne
possible. Les enjeux relationnels avec les équipes soignantes, bien que d’une autre
nature, restent très forts, et constituent un paramètre qu’il importe de prendre
en compte quand il s’agit de chirurgie réparatrice ou de greffe. Il est important
de comprendre que les compétences et les difficultés relationnelles du sujet avec
son propre corps sont aussi celles qui s’appliquent dans la relation qui s’établit
avec les soignants. C’est ainsi que, pour certains patients candidats à des greffes
ou à de la chirurgie plastique ou réparatrice, les difficultés du lien au corps
et à sa représenation vont se manifester dans un style relationnel difficile, souvent
contentieux, avec les soignants.
Mais le corps est aussi, intrinsèquement, un instrument de communication,
de relation, d’expression de soi, qu’il s’agisse de la parole, des gestes ou de la
mimique. Ainsi, outre les compétences relationnelles du sujet, son potentiel
de communication se trouve dépendant de l’intégrité de ses capacités instrumentales, qu’il s’agisse du visage ou des mains. Comme on le verra dans le présent
numéro, les enjeux des greffes de mains et du visage dépassent le rôle esthétique,
fonctionnel ou la représentation de soi : ils concernent la capacité d’expression,
qui elle-même suppose la robustesse de l’unité psychique, la capacité du lien à
l’autre et à la communication.
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ÉDITORIAL
On le voit, l’irruption d’une pathologie et la mise en œuvre d’une action
thérapeutique supposent une bonne capacité pour le sujet malade à évoluer entre
un avant, supposément à l’équilibre, et un après incertain, interrogeant l’aptitude
du patient à maintenir l’unité de soi en dépit des vicissitudes associées à la
maladie et aux difficultés du traitement. Plusieurs stratégies psychologiques sont
mises en œuvre pour y parvenir. Certains patients imagineront la “restitutio ad
integrum” de leur état, d’autres souhaiteront que l’intervention ou le traitement
leur permette au contraire d’accéder à leur “identité véritable”. D’autres aussi (et,
heureusement, les plus nombreux), considérant que l’unité de vie est celle du
changement continu, s’ajusteront à ce “nouveau corps”, celui d’après la maladie,
l’acte thérapeutique étant vécu comme une expérience au même titre que celles
proposées quotidiennement par la vie. La question du maintien de l’unité de soi
au décours d’une pathologie et de son traitement se pose avec acuité lorsque la
thérapeutique comporte une greffe hétérologue. Comment, en effet, continuer à
être soi-même lorsqu’une part essentielle de soi (visage, main, cœur/poumon,
foie, etc.) provient d’un tiers, tiers souvent décédé et inconnu de la personne ?
Ces questionnements anciens seront actualisés dans ce numéro de La Lettre
du Psychiatre qui, à propos de situations cliniques très diverses rencontrées en
médecine, nous montre la subtilité et la variété des différentes facettes du rapport
dialectique que noue le sujet avec son corps malade à l’occasion de diverses
techniques thérapeutiques. Deux citations latines presque identiques peuvent
servir de fil rouge à nos questionnements et réflexions de thérapeutes. Si Rabelais, citant Juvénal (Satire X), nous apostrophe en nous proposant un “mens sana
in corpore sano”, le fabriquant de chaussure ASICS® nous rappelle lui aussi, à sa
manière, l’importance du corps. Le nom de marque n’est autre en effet que
l’acronyme de la citation latine : “Anima sana in corpore sano”. Si la première fait
référence à la complémentarité de la pensée formelle et de la dimension corporelle pour l’unité du sujet, la seconde évoque la mise en œuvre du projet de soi
grâce à l’action du corps. Le corps et la pensée se trouvent ainsi en dialogue avec
l’Esprit et l’accomplissement de soi. Parvenir à un tel équilibre ou, à tout le moins,
le favoriser, tel serait notre idéal thérapeutique lorsque la maladie et nos soins
mobilisent doublement le sujet dans sa dimension corporelle et psychologique.
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”
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