MISE AU POINT Quelle place pour le neurologue dans la consultation post-AVC ? What role for the neurologist in stroke follow-up? M. Poli*, I. Sibon* L es accidents vasculaires cérébraux (AVC) représentent la première cause de handicap acquis de l’adulte et la deuxième cause de syndrome démentiel. En dehors de la phase aiguë dédiée à la mise en place de thérapeutiques d’urgence, la prise en charge de la pathologie vasculaire cérébrale a pour objectifs principaux l’identification des mécanismes étiologiques afin d’adapter les stratégies des préventions secondaires et d’apprécier les conséquences des lésions cérébrovasculaires pouvant interférer dans la qualité de vie du patient. L’enquête étiologique et la prise en charge des facteurs de risque vasculaire reposent sur une étroite collaboration entre neurologues et cardiologues alors que la prise en charge de certaines séquelles pouvant requérir l’utilisation de stratégies spécifiques de réadaptation − telles que la spasticité, l’héminégligence ou les troubles vésicosphinctériens −, justifie une prise en charge spécifique dans des structures de médecine physique et de réadaptation. Le neurologue a un rôle de coordination entre les différents acteurs, mais possède aussi une place spécifique dans l’évaluation et la prise en charge thérapeutique de certaines complications, ce qui implique une organisation spécifique de la consultation neurologique après un AVC. Qualité de vie et évaluation du handicap physique Une première étape indispensable est l’évaluation de la qualité de vie qui constitue un reflet de l’influence d’un éventuel déficit séquellaire sur le mode de fonctionnement des patients dans leur vie sociale et professionnelle. Il semble évident que la simple question d’accueil “Comment allez-vous ?” ne permet pas une analyse fiable de leur qualité de vie, et que cette évaluation devrait reposer sur des données objectives représentées par des échelles standardisées. L’inconvénient majeur de ces échelles est souvent représenté par la durée de leur passation. Dans le contexte de la consultation post-AVC, l’utilisation de questionnaires simplifiés ou d’auto­ questionnaires remplis avant la consultation semble être une option qui doit être développée (1, 2). En dehors de cette évaluation globale, la consultation post-AVC a pour premier objectif de mesurer la qualité de la récupération du handicap physique dans les suites de l’événement aigu. Les échelles utilisées comme le score de Rankin modifié ou l’échelle de Barthel représentent des éléments objectifs indispensables à l’évaluation du retentissement du handicap dans la vie quotidienne ; elles permettent un suivi au long cours de l’évolution du patient (3, 4). La réalisation de ces évaluations globales ne peut cependant pas suffire à décrire l’état neurologique du patient, élément qui requiert une évaluation clinique systématique. Dans le cadre spécifique de l’évaluation à distance de l’événement aigu, la place de l’échelle NIHSS (National Institute of Health Stroke Score) pourrait être discutable en termes d’apport clinique. En effet, si le score total permet d’analyser l’évolution du patient depuis la phase aiguë, il ne permet pas d’évaluer l’ensemble des séquelles, et même l’analyse indépendante des différents items n’autorise pas une évaluation fine de certains paramètres tels que la spasticité, l’apraxie mélokinétique, la bradykinésie ou les dysesthésies, qui peuvent pourtant avoir un retentissement majeur sur la qualité de vie des patients au quotidien. * Unité neurovasculaire, CHU de Bordeaux. La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 3 - mars 2014 | 87 Points forts Mots-clés AVC Handicap Cognition Émotions et douleur Highlights »» Neurological post-stroke evaluation should include: ––An assessment of physical damage and functional disability; ––An assessment of cognitive and emotional consequences; ––The research of recurrent focal neurologic events; ––Verification of the stroke mechanism; ––Adaptation of secondary prevention strategies based on objectives and tolerance of each therapeutic. Keywords Stroke Handicap Cognition Emotion and pain »» La consultation neurologique post-AVC doit comprendre : –– une évaluation des séquelles physiques et du handicap fonctionnel ; –– une évaluation du retentissement cognitif et émotionnel ; –– la recherche de récidive d’événements neurologiques focaux ; –– la vérification du mécanisme étiologique ; –– l’adaptation des stratégies de prévention secondaire en fonction des objectifs et de la tolérance de chaque thérapeutique. En dehors de l’évaluation du handicap, cette consultation devra s’attacher à identifier les différentes complications neurologiques, émotionnelles et cognitives pouvant survenir au décours de l’épisode aigu. L’utilisation d’échelles standardisées, validées et reproductibles devra être privilégiée pour assurer le suivi des patients. Syndromes parkinsoniens et mouvements anormaux Peu d’études épidémiologiques se sont intéressées à évaluer l’incidence des syndromes parkinsoniens dans les suites d’un événement cérébrovas­culaire (5). Des fréquences variables ont été rapportées en fonction des définitions utilisées (6, 7). L’identification clinique des syndromes parkinsoniens est souvent compliquée par la coexistence d’un élément déficitaire moteur homolatéral. C’est donc le plus souvent chez des patients ayant eu une bonne évolution du déficit inaugural qu’il pourra être noté des éléments bradykinétiques souvent qualifiés de sous-utilisation motrice. Un tremblement de repos et une hypertonie extrapyramidale sont rarement observés (8). Le plus souvent, la traduction clinique de ce syndrome parkinsonien est un trouble de la marche avec une très nette prédominance de la bradykinésie aux membres inférieurs et la survenue de troubles des adaptations posturales (5, 8). La survenue d’un syndrome parkinsonien uni­latéral dans les suites d’un AVC isolé est exceptionnelle, il est préférentiellement rencontré dans les lésions affectant les noyaux gris centraux. En revanche, la survenue d’un syndrome parkinsonien bilatéral est plus fréquente, principalement chez les patients présentant une leucoencéphalopathie vasculaire étendue (7). Au niveau du diagnostic, une exploration de type DAT-scan ne peut pas être recommandée de façon systématique car ces manifestations peuvent être la conséquence de lésions pré- ou post-synaptiques ne permettant pas d’établir de conclusion formelle (9). Certains travaux récents suggèrent l’intérêt du 123I-FP-CIT SPECT dans le diagnostic différentiel avec la maladie de Parkinson (10). Au niveau thérapeutique, la grande diversité des lésions cérébrales impliquées dans la survenue de 88 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 3 - mars 2014 ces syndromes parkinsoniens rend probablement compte de la faible réponse habituellement rapportée à la L-dopa et aux agonistes dopaminergiques (10). De plus, le risque de confusion lié à l’utilisation de ces traitements en limite l’utilisation après un AVC. La prise en charge kinésithérapique constitue donc un élément déterminant. Le bénéfice potentiel de la stimulation magnétique trans­crânienne doit, quant à lui, être précisé dans cette indication (11). En dehors des syndromes parkinsoniens, les mouvements anormaux hyperkinétiques de type chorée, athétose, dystonie, astérixis ou myoclonies peuvent être rencontrés après un AVC. Ces complications sont rares (1 à 4 % des cas) [7], parfois révélatrices et survenant le plus souvent dans les premiers jours post-AVC pour s’amender rapidement. La persistance ou la survenue tardive de mouvements hyperkinétiques sont donc rares, dominées par les dystonies. Ces dernières sont favorisées par les lésions du noyau lenticulaire, plus particulièrement du putamen, mais peuvent être observées dans les suites de lésions de localisations diverses (thalamus, noyau caudé, capsule interne, lésions corticales frontales, etc.) [12]. La prise en charge thérapeutique repose le plus souvent sur l’injection de toxine botulique et, plus exceptionnellement, sur l’utilisation d’anti­ cholinergiques, de benzodiazépines, de neuroleptiques ou de tétrabénazine (7, 11). “Docteur, je suis fatigué…” Après un AVC, la fatigue est un symptôme rencontré chez plus de 40 % des patients lors d’une évaluation à 3 mois (13). Les facteurs de risque sont dominés par l’existence de maladies chroniques et d’une fatigue antérieure à l’événement cérébrovasculaire. Bien que peu étudiée, la localisation lésionnelle pourrait avoir une influence spécifique. Les infarctus du noyau caudé sont pour certains plus fréquemment responsables d’une fatigue post-AVC ce qui fait évoquer le rôle déterminant des voies sous-cortico-frontales (14). L’évaluation pourra reposer sur des échelles spécifiques grâce à des auto- ou à des hétéroquestionnaires (15). Parmi les différents facteurs associés à une augmentation du risque de fatigue post-AVC, H. Naess et MISE AU POINT al. (16) ont identifié le sexe féminin, un antécédent de dépression et d’infarctus du myocarde, et la présence d’une leucoencéphalopathie vasculaire étendue. La fatigue post-AVC peut relever de nombreux facteurs dominés par la lourdeur du handicap physique, la présence de douleurs, la survenue de troubles du sommeil ou l’existence d’un syndrome dépressif. L’évaluation de ces différents paramètres est un point déterminant dans la prise en charge thérapeutique de cette fatigue. Toutefois, la survenue d’une fatigue isolée peut aussi être rencontrée indépendamment de ces différents facteurs, y compris chez des patients ayant présenté un événement transitoire (17). À ce jour, aucune prise en charge spécifique ne peut être proposée (18). La place des antiépileptiques dans la prise en charge des douleurs post-AVC reste encore incertaine (22). Dans les rares essais randomisés menés, le lévétiracétam (3 g/j) et la prégabaline (150 à 600 mg/j) n’ont pas pu démontrer leur efficacité (23, 24). Une étude a suggéré l’efficacité potentielle du zonisamide (200 mg/j) dans les douleurs thalamiques (25). Par ailleurs, la place respective de la gabapentine, du topiramate ou de la lamotrigine parfois utilisés reste encore indéterminée dans cette indication (26). En dehors des stratégies médicamenteuses, des prises en charge interventionnelles telles que la stimulation du cortex moteur ou du thalamus sont actuellement en cours d’évaluation dans le cadre de douleurs pharmacorésistantes (27). Douleurs Troubles du sommeil De mécanismes multiples, elles sont présentes chez 11 à 55 % des patients selon les études (figure 1) [19]. Les douleurs d’origine musculo-squelettique représentent le mécanisme le plus fréquent ; elles sont dominées par des épaules douloureuses et sont parfois favorisées par le développement d’une spasticité. Les douleurs chroniques d’origine centrale seraient pour leur part présentes chez 1 à 12 % des patients. Ces douleurs − souvent associées à des dysesthésies − se caractérisent cliniquement par leur survenue spontanée ou provoquée, une distribution variable pouvant être focale (péri-orbitaire, segment de membre) ou diffuse. Elles s’accompagnent d’une anomalie de l’examen clinique dans 90 % des cas. L’utilisation systématique d’échelles de type DN4 dans le suivi post-AVC pourrait permettre leur meilleure identification. La survenue de douleurs neuropathiques fait le plus souvent suite à la présence de lésions localisées dans le tronc cérébral (syndrome de Wallenberg), le thalamus, ou, plus rarement, de lésions corticales (20). Dans un travail récent, T. Sprenger et al. ont identifié un risque de survenue plus important lors de lésions du pulvinar (21). La prise en charge thérapeutique de ces manifestations douloureuses reste difficile et bien que des facteurs prédictifs aient pu être identifiés, aucune thérapeutique prophylactique n’a, à ce jour, démontré un bénéfice quelconque (22). Dans le cadre spécifique des douleurs neuropathiques post-AVC, peu d’essais randomisés ont été menés. Par analogie aux douleurs neuropathiques d’une autre origine, les tricycliques ou inhibiteurs spécifiques de la recapture mixte (sérotoninergique et noradrénergique) sont fréquemment utilisés. La présence de troubles du sommeil (figure 2, p. 90), d’origine multifactorielle, contribue à la persistance d’une fatigue post-AVC ainsi qu’à une altération des capacités de récupération. Leur dépistage est donc une étape déterminante de la prise en charge. L’une des principales causes d’une altération du sommeil réside dans la présence de syndromes apnéiques. Ainsi, plus de 60 % des patients victimes d’un AVC seraient affectés par un syndrome d’apnées obstructives du sommeil (28). Leur dépistage est fondamental car leur prise en charge permet une optimisation de la prévention secondaire au travers Douleur neuropathique Syndrome régional complexe Douleur segmentaire Douleur d’origine iatrogène (statines, etc.) Spasticité Douleur musculosquelettique Figure 1. Principales orientations diagnostiques devant des douleurs segmentaires postAVC. La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 3 - mars 2014 | 89 MISE AU POINT Quelle place pour le neurologue dans la consultation post-AVC ? Syndrome anxiodépressif Douleur Trouble du sommeil Pathologie du sommeil : SAOS, SJSR, MPS Iatrogène (β-bloquant, antiépileptique, etc.) MPS : mouvements périodiques du sommeil ; SAOS : syndrome d’apnées obstructives du sommeil ; SJSR : syndrome des jambes sans repos. Figure 2. Principales orientations diagnostiques devant des troubles du sommeil post-AVC. notamment d’un meilleur contrôle de la tension artérielle. Dans les suites d’un AVC, il importe de distinguer les apnées centrales des apnées obstructives. Les échelles de Berlin et d’Epworth permettent d’évaluer le niveau de risque des patients ainsi que le retentissement du syndrome apnéique. Néanmoins, la sensibilité très modérée de ces évaluations à la détection du syndrome apnéique et leur absence de discrimination entre apnées centrales et obstructives devra laisser une large place à la réalisation d’une polysomnographie ou d’une simple polygraphie (29). En dehors du syndrome d’apnées obstructives du sommeil, la survenue d’un syndrome des jambes sans repos et de mouvements périodiques pendant le sommeil a été rapportée chez 12 % des patients 1 mois après un AVC (30). Ils seraient favorisés par la présence de lésions des ganglions de la base et de la voie pyramidale et altéreraient le pronostic fonctionnel (31). Aucune donnée de la littérature ne permet, à ce jour, de préciser la stratégie thérapeutique optimale à recommander chez ces patients, et le bénéfice des agonistes dopaminergiques reste à préciser. En outre, toute carence martiale potentiellement liée à un traitement antithrombotique doit être recherchée. Enfin, les troubles du sommeil peuvent être la conséquence directe d’éléments douloureux ou d’un syndrome anxiodépressif qu’il convient d’identifier précocement. Manifestations psychiatriques Elles peuvent revêtir des expressions cliniques variées à type de syndrome dépressif et anxieux, de syndrome de stress post-traumatique ou, plus 90 | La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 3 - mars 2014 rarement, d’état maniaque. La dépression post-AVC affecte plus de 30 % des patients à 3 mois. Les principaux facteurs prédictifs cliniques sont les antécédents de dépression, le sexe féminin, l’isolement social, la sévérité du handicap, l’aphasie et l’intensité du syndrome anxieux à la phase précoce de l’AVC (32). Au niveau neuroradiologique, les lésions hémisphériques gauches et affectant les boucles sous-cortico-frontales seraient plus à même de favoriser la survenue d’une dépression après un AVC (33, 34). De même, l’étendue de la leucoencéphalopathie vasculaire constitue un cofacteur probable augmentant le risque de survenue d’une dépression (35). La dépression a une influence négative sur la récupération fonctionnelle et le pronostic des patients, justifiant son dépistage précoce et sa prise en charge thérapeutique. De nombreuses échelles peuvent être utilisées pour évaluer l’intensité du syndrome dépressif (Beck, MADRS [Montgomery and Asberg Depression Rating Scale], HAD [Hospital Anxiety and Depression Scale], HDRS [Hamilton Depression Rating Scale], etc.), toutes partageant une sensibilité équivalente. Au niveau thérapeutique, la lutte contre l’isolement social et le soutien familial sont 2 éléments déterminants auxquels pourront être associées une psychothérapie de type thérapie par résolution de problème ou cognitivocomportementale et une prise en charge pharmacologique. Bien que n’ayant pas fait l’objet d’essais randomisés spécifiques de grande taille, le bénéfice des antidépresseurs de type tricyclique, inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine (ISRS) et inhibiteurs spécifiques de la recapture de la noradrénaline (ISRNA) est actuellement admis (36, 37). Par ailleurs, dans les formes pharmacorésistantes, l’électroconvulsivothérapie et la stimulation magnétique transcrânienne peuvent être proposées dans des cas spécifiques (38). Et l’apathie… Présente chez 20 à 40 % des patients 3 mois après un AVC, elle est fréquemment associée à la présence d’un syndrome dépressif. Néanmoins, elle peut être présente de façon isolée et constituer un facteur indépendant de mauvais pronostic (33). Encore méconnus, les facteurs de risque sont incertains, mais les récents travaux de W.K. Tang et al. (39) suggèrent l’influence des lésions du tronc cérébral, possiblement au travers d’une dysfonction des noyaux pédiculopontin et du raphé. Par ailleurs, l’identification d’une hypoperfusion des noyaux MISE AU POINT gris centraux suggère l’influence de l’altération des boucles cortico-sous-corticales frontales dans l’émergence de ce syndrome (40). L’évaluation clinique est effectuée grâce à des échelles spécifiques telles que la LARS (Lille Apathy Rating Scale) ou l’inventaire d’apathie. Au niveau thérapeutique, K. Mikami et al. (41) ont récemment identifié le bénéfice potentiel du citalopram et de la thérapie par résolution de problème sur la prévention du syndrome apathique post-AVC. Ce résultat renforce l’hypothèse d’un lien étroit entre la survenue d’une dépression post-AVC et le syndrome apathique. Le bénéfice potentiel des agonistes dopaminergiques, des anticholinestérasiques et des psychostimulants a été évoqué mais demeure à ce jour indéterminé. Par ailleurs, l’apathie, comme la dépression, pourrait constituer une expression clinique précoce de troubles cognitifs vasculaires. Leur survenue justifie donc une surveillance accrue de l’évolution cognitive après un AVC (42). Troubles cognitifs La fréquence des troubles cognitifs non démentiels (figure 3) est extrêmement importante dans les suites d’un infarctus cérébral. A. Jaillard et al. (43) rapportent ainsi sur une série de 177 patients que 91,5 % des sujets ont une altération dans au moins un domaine cognitif, l’atteinte la plus fréquente concernant la mémoire de travail. Ces désordres cognitifs, souvent apparents uniquement lors de la réalisation de batteries cognitives spécifiques, sont pour autant susceptibles d’altérer la qualité de vie des patients et, pour les plus jeunes, de constituer un facteur limitant à la reprise d’une activité professionnelle. À l’inverse, la présence d’un syndrome démentiel dans l’année qui suit la survenue d’un AVC indépendamment d’un syndrome démentiel antérieur serait d’environ 7 % (44). Ces troubles cognitifs sont rarement la conséquence d’une lésion dans un site stratégique (par exemple, le thalamus) et sont plus souvent observés au cours des états multilacunaires ou lors d’infarctus corticaux multiples. Outre la localisation de la lésion cérébro-vasculaire, les principaux facteurs de risque clinique de détérioration cognitive sont le sexe féminin, l’âge avancé, le faible niveau d’éducation, l’existence d’une détérioration cognitive antérieure à l’AVC (pouvant être évaluée par l’IQ-code) et la présence d’une fibrillation (44). L’influence des facteurs de risque cardiovasculaire est également déterminante, le risque s’accroissant de façon notable avec l’augmentation de leur nombre (Allan, 2011). Par ailleurs, l’existence d’une leucoencéphalopathie étendue et d’une atrophie corticale, notamment médio-temporale, constituent des facteurs de risque de déclin cognitif (44). Le dépistage de ces troubles cognitifs repose au mieux sur la réalisation d’un bilan neuropsychologique et au minimum sur une batterie d’évaluation rapide de type MOCA (Montreal Cognitive Assessment) ou MMSE (Mini-Mental State Examination). La prise en charge thérapeutique pharmacologique reste à ce jour décevante, les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase n’ayant pas démontré un effet significatif. La prévention des facteurs de risque cardiovasculaire et notamment de l’hypertension semble donc être la meilleure option de prévention et de limitation de l’aggravation de ces troubles cognitifs (45). Évaluation des récidives d’événements neurologiques focaux La recherche de survenue d’événements neuro­ logiques représente une étape majeure de la consultation post-AVC (figure 4, p. 92). La description par le patient de symptômes productifs (paresthésies, clonies, hallucinations, etc.) doit faire évoquer la possibilité d’une épilepsie vasculaire. Cette complication affecte 2,5 à 10 % des patients à 5 ans. Les facteurs prédictifs les plus associés sont représentés par un NIHSS élevé, l’existence d’un syndrome démentiel antérieur à l’AVC et la survenue de crises précoces. Les crises comitiales sont plus fréquemment observées dans les infarctus multiples et les hémorragies intracérébrales affectant le cortex frontal (46). À ce jour, il n’existe pas de bénéfice démontré de l’introduction d’un traitement Syndrome démentiel vasculaire ou mixte Syndrome anxiodépressif Trouble cognitif Pathologie du sommeil : SAOS Mécanisme iatrogène (antidépresseur, antiépileptique, anxiolytiques, etc.) Figure 3. Principales orientations diagnostiques devant des troubles cognitifs post-AVC. La Lettre du Neurologue • Vol. XVIII - no 3 - mars 2014 | 91 MISE AU POINT Quelle place pour le neurologue dans la consultation post-AVC ? faire reconsidérer l’efficacité de la prise en charge thérapeutique ainsi que le bilan étiologique. La place de l’IRM systématique n’est pas démontrée en post-AVC, mais elle peut être proposée devant toute nouvelle manifestation neurologique ou en cas d’étiologie indéterminée. Récidive de déficit neurologique focal Permanent Infarctus cérébral : – traitement efficace ? – traitement adapté ? Transitoire Identique à la manifestation inaugurale ? Hémorragie intracérébrale : – effet indésirable des antithrombotiques ? – HTA ? – angiopathie amyloïde ? Non AIT ? AIT : accident ischémique transitoire ; HTA : hypertension artérielle. Conclusion Oui Crise partielle ? AIT ? Figure 4. Principales orientations diagnostiques devant une récidive de déficit neuro­ logique focal post-AVC. Les auteurs n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts. anti­épileptique préventif. De même, peu d’études ont comparé l’efficacité des traitements antiépileptiques, et des molécules telles que la lamotrigine, le lévétiracétam ou la gabapentine sont fréquemment privilégiées en raison de leur efficacité, de leur bon profil de tolérance et du faible taux d’interaction médicamenteuse (47). En cas de manifestation déficitaire focale, une récidive est à évoquer et doit Le neurologue conserve une place centrale dans le suivi des patients victimes d’un AVC. Il se doit d’assurer une évaluation standardisée pour ne pas méconnaître certaines complications pouvant interférer dans la qualité de vie des patients. Cette prise en charge ne saurait être dissociée de l’optimisation des stratégies de prévention secondaire en tenant compte des spécificités des patients “neurologiques” par rapport aux patients présentant une affection cardiovasculaire. Dès la phase aiguë, les informations cliniques associées aux données de neuro-imagerie permettent d’identifier les sujets à risque de complications post-AVC. Le développement de consultations multidisciplinaires adaptées aux problématiques spécifiques de chaque malade pourrait constituer une avancée significative dans la prise en charge au long cours des patients victimes d’un AVC. ■ Références bibliographiques 1. Post MW, Boosman H, van Zandvoort MM et al. Development and validation of a short version of the Stroke Specific Quality of Life Scale. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2011;82(3):283-6. 2. Vroegop S, Dijkgraaf MG, Vermeulen M. Impact of symptoms in patients with functional neurological symptoms on activities of daily living and health related quality of life. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2013;84(6):707-8. 3. Duffy L, Gajree S, Langhorne P et al. Reliability (interrater agreement) of the Barthel Index for assessment of stroke survivors: systematic review and meta-analysis. 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