Le point sur la radiothérapie d Focus on radiotherapy

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La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 7 - septembre 2007
Le point sur la radiothérapie
Focus on radiotherapy
C. Hennequin*
* Service de radiothérapie, hôpital Saint-Louis, Paris.
FACTEURS PRÉDICTIFS DE RADIOSENSIBILITÉ
Si linformation biologique majeure du Prostate Cancer Sympo-
sium a porté sur l’importance des gènes de fusion dans le cancer
de prostate, plusieurs études ont cependant été consacrées à
déterminer l’émergence de nouveaux facteurs pronostiques ou
prédictifs de l’effi cacité thérapeutique.
L’hypoxie tumorale est bien plus fréquente qu’on ne l’imaginait.
Elle est présente dans 70 à 90 % des cancers de prostate. Elle a
été mesurée par des sondes d’Eppendorf par voie transrectale
chez 236 patients (Milosevic M et al., abstract 299) : le nombre de
zones hypoxiques varie beaucoup d’un patient à lautre, certains
nen ayant aucune tandis que chez d’autres la quasi-totalide la
glande est hypoxique. Les zones adénomateuses sont en parti-
culier tout autant hypoxiques que les zones tumorales ; mais en
moyenne, 35 % de la prostate peuvent être considérés comme
hypoxiques. Il semble que le bicalutamide puisse diminuer cette
fraction hypoxique, ce qui est un argument supplémentaire en
faveur d’une hormonothérapie néo-adjuvante.
Cette hypoxie altère les mécanismes de réparation des lésions
radio-induites (Bristow RG et al., abstract 56) et peut devenir
une cible thérapeutique (Pili R et al., abstract 88).
Les associations chimio-radiothérapie concomitantes sont
encore balbutiantes dans le cancer de prostate. Une étude in
vitro a évalué l’impact dune nouvelle molécule, la nutlin-3, à des
ns radiosensibilisantes (Supiot S et al., abstract 90). La nutlin-3
stabilise la p53 et la p21 en inhibant MDM2 dans les lignées
sauvages, mais pas dans les lignées mutées. Leff et radiosensibili-
sant nest pas gligeable (sensitizing enhancement ratio : 1,3-1,9).
Il existe en conditions normoxiques mais surtout hypoxiques,
essentiellement en majorant lapoptose radio-induite.
RADIOTHÉRAPIE ADJUVANTE
Quasiment une matinée du congrès a été consacrée à ce thème,
qui intéresse à la fois les chirurgiens et les radiothérapeutes.
Trois larges essais comparant une radiothérapie adjuvante à
une simple surveillance ont été publiés ou présentés.
Les critères d’inclusion et les résultats de ces trois essais sont
sus dans le tableau. Tous trois sont positifs en termes
de contrôle biochimique de la maladie, avec un gain de plus
de 20 % de contrôle à long terme. Mais les essais de l’Euro-
pean Organisation for Research and Treatment of Cancer
(EORTC) [1] et du Southwest Oncology Group (SWOG) [2]
montrent également un bénéfi ce signifi catif en termes de réci-
dive clinique, ne prenant pas en compte le PSA. Par ailleurs,
l’essai du SWOG met en évidence une diminution du taux de
métastases à long terme, bien que non signifi cative (fréquence
des métastases : 43,1 % dans le groupe contrôle versus 35,5 %
dans le groupe irradié ; p = 0,06). En outre, la durée de vie
sans traitement hormonal est signifi cativement allongée par
l’irradiation. Dans aucun de ces essais n’a été relevé de bénéfi ce
en termes de survie. Cependant, compte tenu de l’incidence
des s intercurrents dans cette population et des traite-
ments hormonaux de rattrapage, la mise en évidence d’un
tel bénéfi ce paraît peu probable dans l’essai allemand et dans
celui du SWOG au vu des eff ectifs inclus. Lessai de l’EORTC
ne dispose pas encore d’un recul su sant pour ellement
apporter une réponse.
Il est important de noter que la radiothérapie adjuvante béné-
cie à tous les sous-groupes de patients, en particulier à ceux
qui présentent des marges positives ou bien une atteinte des
vésicules séminales. Enfi n, la réalisation de cette irradiation
Tableau.
Radiothérapie adjuvante après prostatectomie radicale : principaux essais randomisés.
Essai Population Recul
(années)
Nombre
de patients
Population avec PSA
postopératoire ≥ 0,2 ng/ml (%) Survie sans récidive biochimique
Pas de radiothérapie Radiothérapie
EORTC pT3a ou pT3b
ou marges positives et N0 5 1 005 10,7 52,6 74
Wiegel PT3 N0 3,5 261 0 60 81
SWOG PT3 ; marges positives 10 347 53 36 65,1
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en mode conformationnel semble diminuer l’incidence des
complications (Casas F et al., abstract 201).
Reste ouverte la question de la comparaison d’une radiothé-
rapie adjuvante à une radiothérapie de rattrapage précoce, avec
un seuil de PSA ne dépassant pas 0,2 ng/ml. Ce sera l’objet
d’un futur essai du Groupe d’étude des tumeurs uro-génitales
(GETUG), GETUG 16, qui devrait s’ouvrir dans le courant de
l’année 2007.
QUALITÉ DE VIE
APRÈS CHIRURGIE OU RADIOTHÉRAPIE
Plusieurs abstracts ont rapporles sultats comparatifs de
qualité de vie après traitement des cancers de prostate loca-
lis, en particulier ceux de l’étude CAPSURE (Huang GJ et
al., abstract 111). Quel que soit le traitement réalisé (chirurgie,
radiothérapie externe ou curiethérapie), à 5 ans, les indices
globaux de quali de vie sont identiques. Lincontinence urinaire
est plus fréquente après chirurgie, maximale dans l’année qui
suit le traitement, puis s’améliore progressivement, restant
cependant clairement plus fquente et sévère qu’avec les
autres traitements. Les scores globaux de gêne urinaire ne sont
toutefois, à terme, pas diff érents ; les impériosités suivant en
particulier la curiethérapie paraissent presque aussi gênantes
que l’incontinence.
En termes de sexualité, les paramètres initiaux sont nettement
diff érents selon les groupes, les scores de performance sexuelle
étant manifestement plus élevés chez les patients traités par
chirurgie ou curiethérapie. Cela refl ète la moyenne d’âge plus
élee des patients adressés aux radiotrapeutes. Ce qui
implique que toutes les études comparatives de qualité de vie
ne comportant pas une étude des scores avant traitement sont
ininterprétables. En bref, la chirurgie détériore fortement la
sexualité dans l’année qui suit le geste, puis une nette amélio-
ration dans les deux ou trois années qui suivent est notée. Au
contraire, l’altération des fonctions sexuelles après radiothérapie
est progressive. Les meilleurs sultats sont obtenus avec la
curiethérapie.
Enfi n, les complications digestives sont observées avec toutes
les techniques, sauf la chirurgie, mais sont dans l’ensemble très
modérées.
RADIOTHÉRAPIE EXTERNE
Une étude rétrospective du Radiation erapy Oncology Group
(RTOG) portant sur l’essai qui évaluait une radiothérapie avec
ou sans hormonothérapie (RTOG 85-31) a examiné l’infl uence
du poids sur les résultats de la radiothérapie (Efstathiou JA et
al., abstract 112). On sait que les patients obèses ont un moins
bon pronostic après chirurgie, peut-être du fait de raisons tech-
niques. Dans cette étude, les patients étaient stratifi és selon
leur indice de masse corporelle (IMC) : la mortalité spécifi que
à 5 ans était de 6,5 % pour les patients avec un IMC < 25 kg/m
2
,
de 13,1 % quand l’IMC était compris entre 25 et 30, et de 12,2 %
quand il était supérieur à 30. La diff érence persiste en analyse
multivariée. Les raisons de cette diff érence ne paraissent pas
évidentes ; un environnement hormonal particulier a bien été
incriminé, mais non démontré. Par ailleurs, la mobilité de la
prostate dans le pelvis semble supérieure chez les patients obèses,
ce qui laisserait penser que des champs standard ont pu sous-
doser le volume cible. Enfi n, on ignore si une diminution du
poids après le traitement infl uence les résultats.
Plusieurs abstracts se sont intéressés à l’infl uence respective de
l’hormonothérapie et de lescalade de doses. Une étude rando-
misée anglaise (Dearnaley DP et al., abstract 295) a comparé
deux niveaux de dose (64 Gy et 74 Gy) en association avec une
hormonothérapie courte de 6 mois ; malgré celle-ci, un bénéfi ce
sur le contrôle biochimique a été obtenu avec l’augmentation
de dose (72 versus 60 %). Au contraire, le RTOG a repris les
patients inclus dans leur essai d’escalade de doses et ayant reçu
plus de 73,8 Gy. L’hormonothérapie était laissée libre. Dans
cette étude trospective, les patients ayant bé c d’une
hormonothérapie, qu’elle soit courte ou prolongée, nont pas
un meilleur contrôle biochimique que les autres, ce qui suggère
que lescalade de doses permettrait de se passer de l’hormono-
thérapie. On rappelle que cest précisément la question posée
par l’essai GETUG 14, qui évalue une irradiation à la dose de
80 Gy associée ou non à une hormonothérapie courte.
Enfi n, quelques essais évaluant l’hypofractionnement sont en
cours. Pour certains, il n’augmente pas la toxicité si une dose
de 60 Gy (par fractions de 3 Gy) est réalisée (Choueiri TK et al.,
abstract 203). Pour d’autres, en revanche, une dose de 66 Gy
(toujours par fraction de 3 Gy) entraîne une toxicité rectale
rédhibitoire (Sia M et al., abstract 384).
CONCLUSION
Ce congrès a vraiment inscrit la radiothérapie adjuvante comme
un standard ; la sélection des patients pour cette approche reste
cependant discutée. La qualité de vie était également un point
largement évoqué et l’équivalence des traitements a été montrée,
avec cependant des diff érences portant sur le type de toxicité
observée. Les sultats de l’étude CAPSURE ritent d’être
connus pour mieux expliquer au patient les résultats des diff é-
rentes thérapeutiques.
RéféRences bibliogRaphiques
1. Bolla M, Van Poppel H, Collette L et al. Postoperative radiotherapy after
radical prostatectomy; a randomized controlled trial (EORTC trial 22911).
Lancet 2005;366(9485):572-8.
2. ompson IM, Tangen CM, Paraadelo J et al. Adjuvant radiotherapy for
pathologically advanced prostate cancer: a randomized clinical trial JAMA
2006;296(19):2329-35.
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