La Lettre du Sénologue - n° 34 - octobre-novembre-décembre 2006
Mise au point
Mise au point
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Web, il est estimé qu’un moteur de recherche n’est pas capable
d’indexer plus d’un tiers des pages Web réellement disponi-
bles concernant un sujet particulier. De plus, la plupart des
utilisateurs d’Internet considèrent que les moteurs de recher-
che classent les différents sites et les listent en fonction de la
qualité de l’information. Ceci est faux dans la plupart des cas
car la majorité des moteurs de recherche n’évalue pas les sites
selon leur contenu. Les moteurs de recherche classent les sites
selon d’autres critères, mais pas selon leur qualité médicale
ou leur adéquation par rapport aux mots-clés utilisés pour
la recherche. Ainsi de nombreuses pages sont listées dans les
résultats des recherches mais n’ont en fait aucun lien avec le
sujet initial (11). Deux types de mesure servent à classer les
sites (20) : le clic de popularité, qui est le nombre de fois que
le site a été visité. Certains moteurs de recherche mesurent
cette donnée, mais les résultats ne sont pas rendus publics.
De plus, cette méthode peut être sujet à des manipulations
marketing. Le deuxième type de mesure, le lien de popularité,
est moins susceptible de manipulations, et repose sur les liens
vers d’autres sites plus que sur les statistiques concernant la
fréquentation. Le moteur de recherche “Google” utilise ce type
de classification. On peut obtenir le nombre de liens pour un
site en regardant le lien URL (“Universal Resource Locator”).
Le second problème pour une personne cherchant sur Inter-
net de l’information sur le cancer du sein est de déterminer si
cette information est complète et exacte. Si pour un oncologue
cela se révèle une tâche aisée mais consommatrice de temps,
c’est plus difficile pour une personne naïve. Les quelques sites
ayant une information exacte sont finalement souvent les plus
difficiles à trouver par les patients. Ainsi le site de la Société
américaine de chirurgie esthétique est considéré comme une
source fiable d’information de qualité sur Internet. Cepen-
dant, Gordon et al. ont observé que ce site n’était pas indexé
dans les vingt premiers sites des moteurs de recherche AOL,
Excite et Yahoo (21). De plus, le nombre de sites retrouvés se-
lon les moteurs de recherche varie considérablement selon le
moteur de recherche.
Le troisième problème pour une personne naïve est de déter-
miner si la source d’information est digne de confiance. Il est
de la responsabilité de la communauté médicale de s’assurer de
la qualité des sites médicaux, d’éduquer les patients afin qu’ils
puissent juger par eux-mêmes du contenu de ces sites, et de
diriger les patients vers ces sites de qualité. Personne, aucune
organisation en particulier, n’est actuellement mandatée pour
évaluer et réguler le contenu des sites médicaux disponibles sur
Internet (11). Pourtant il existe sur Internet des labels attestant
de la qualité des sites médicaux de langue anglaise (“Health on
the Net code ou HONcode” et “British Health Internet Associa-
tion”). Ces grilles sont simples car elles utilisent une dizaine
de critères. Cette fondation suisse a établi en 1996 une charte
de qualité en anglais et en français (http://www.hon.ch/HON-
code/French/) et a été primée an mai 2004 par la Commission
européenne pour son activité pionnière dans l’élaboration
de standards de qualité pour les sites de santé sur Internet.
En France, plusieurs initiatives vont dans ce sens. D’abord, il
existe un catalogue indexant les sites médicaux francophones
(CISMeF) dont le lien se retrouve sur le site du CHU de Rouen
(http://www.chu-rouen.fr/cismef/) et sur le site de l’Université
médicale virtuelle francophone (http://www.umvf.prd.fr/).
Toutefois, ce site est destiné à des professionnels de santé. La
deuxième initiative émane aussi du CHU de Rouen qui a mis
au point un outil de validation de la qualité des sites Internet
(“Net Scoring”). Quarante-neuf critères sont répartis en huit
catégories, chaque critère étant pondéré en trois classes (cri-
tèreessentielcotéde0à10,importantde0à5,mineur de 0
à2)(http://cri-cirs-wnts.univ-lyon1.fr/Polycopies/Cancerolo-
gie/index.html). Les huit catégories sont : crédibilité, contenu,
hyper-liens, design, interactivité, aspects quantitatifs, aspects
déontologiques et accessibilité. Il reste à évaluer la robustesse
de ce net scoring en testant la variabilité inter-experts. Une
troisième initiative est développée par l’INIST-CNRS, Institut
de l’information scientifique et technique, héritier des centres
de documentation scientifique du CNRS. L’INIST-CNRS est
le premier producteur de références bibliographiques pour la
base documentaire de la banque de données de santé publique
(BDSP) et le premier producteur de “fiches critiques” de sites
Web. Devant la prolifération des sites et les dérives possibles,
l’information en santé demande une analyse et une attention
soutenue (22). Les sites sont évalués selon une grille, et une
procédure de mise en ligne vérifiant une syntaxe précise a été
bâtie. Cet annuaire critique de sites (http//:www.bdsp.tm.fr/)
est réservé aux seuls professionnels, mais sera ouvert au public
à partir de 2006. La Fédération nationale des Centres de lutte
contre le cancer (FNCLCC) est à l’origine d’une autre initia-
tive : le “SOR SAVOIR Patient”. Ce projet s’inscrit dans une dé-
marche d’information et d’éducation du patient avec pour ob-
jectif de permettre aux patients d’assimiler les connaissances
médicales essentielles concernant leur maladie et leur prise en
charge. Le “SOR SAVOIR Patient” est élaboré à partir des SOR
(Standards Options et Recommandations) d’une pathologie,
ce SOR étant traduit en langage simple puis retravaillé par des
patients selon trois méthodes complémentaires : questionnai-
res, “focus groups” et entretiens individuels. Le “SOR SAVOIR
Patient” sur le cancer du sein a été édité en 2000, avec une
version réactualisée en 2002. Il a été évalué favorablement par
les patients (23). Toutefois, le site de la FNCLCC ne ressort
pas parmi les recherches effectuées, témoignant d’un dysfonc-
tionnement au niveau de la hiérarchisation des sites. Enfin,
la commission européenne a aussi établi un ensemble com-
mun de critères de qualité pour les sites Web dédiés à la santé,
qui peuvent s’appliquer tant aux instructions destinées aux
auteurs des sites qu’à celles qui s’adressent aux utilisateurs de
ceux-ci (24). Ces critères sont au nombre de six : transparence
et honnêteté (identité de l’auteur du site, finalité et objet du
site, définition claire du public visé, transparence de toutes les
sources de financement du site), obligation de référence (sour-
ces d’informations), protection des données et de la vie privée
(collecte et traitement d’informations personnelles, y compris
pour les données non visibles par l’internaute), actualisation
des données (mise à jour précise et régulière du site), respon-
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